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Date : 20080502

Dossier : IMM‑2013‑08

Référence : 2008 CF 575

Vancouver (Colombie‑Britannique), le 2 mai 2008

En présence de monsieur le juge Pinard

 

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

demandeur

 

et

 

JOSE FRANCISCO CARDOZA QUINTEROS

défendeur

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Le demandeur voudrait que soit rendue, conformément à l’article 18.2 de la Loi sur les Cours fédérales, une ordonnance suspendant l’ordonnance du commissaire Shaw Dyck, de la Section de l’immigration (SI), en date du 29 avril 2008, qui a mis le défendeur en liberté. Le demandeur voudrait que l’ordonnance contestée soit suspendue jusqu’à la première des dates suivantes :

a)                  la date à laquelle il sera statué au fond sur la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire déposée contre ladite ordonnance; ou

b)                  la date du prochain contrôle de la détention du défendeur exigé par la loi.

 

[2]               Le défendeur est un Salvadorien qui est arrivé au Canada le 2 septembre 2007 et qui a revendiqué l’asile. Il devait retourner au point d’entrée le 4 septembre 2007 pour la poursuite de son interrogatoire.

 

[3]               À cette date, le défendeur fut interrogé par deux représentants de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC). Durant l’entrevue, le défendeur a fait plusieurs déclarations sur son rôle au sein d’une organisation criminelle au Salvador, le MS‑13 ou la Mara Salvatrucha, entre 1999 et 2004. Entre autres choses, le défendeur a admis avoir tué de deux à quatre personnes et avoir été le témoin de 100 à 150 assassinats.

 

[4]               Après l’entrevue, le défendeur fut déclaré par l’ASFC interdit de territoire en application de l’alinéa 37(1)a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), pour criminalité organisée.

 

[5]               Le défendeur a été détenu en raison de doutes sur son identité, mais, au deuxième contrôle de sa détention, qui a eu lieu le 13 septembre 2007, le demandeur a voulu maintenir le défendeur en détention en raison du danger que, selon lui, il constituait pour le public. Lors de ce contrôle, l’avocat du défendeur a dit que son client niait avoir été membre du MS‑13 et que, s’il avait prétendu avoir été membre de cette organisation, c’était parce qu’il voulait être admis au Canada. Le commissaire Nupponen, de la SI, a conclu que le défendeur pouvait être mis en liberté sous condition.

 

[6]               Le demandeur a déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de cette décision, mais n’a pas sollicité la suspension de la mise en liberté du défendeur avant qu’une décision soit rendue sur cette demande.

 

[7]               Une enquête a eu lieu et, le 22 février 2008, le commissaire Tessler, de la SI, a conclu que le défendeur [traduction] « était un membre de la Mara Salvatrucha, au Salvador » et qu’il était interdit de territoire, en application de l’alinéa 37(1)a) de la LIPR, pour criminalité organisée. Une mesure d’expulsion a été prononcée contre le défendeur. Ni la décision de la SI ni la mesure d’expulsion n’ont été contestées par le défendeur.

 

[8]               Le 31 mars 2008, le défendeur a déposé une demande d’examen des risques avant renvoi (demande d’ERAR) et a produit ses observations finales en la matière le 22 avril 2008. Selon le demandeur, cette demande sera traitée d’après le processus accéléré.

 

[9]               Le 17 avril 2008, la demande de contrôle judiciaire déposée par le ministre à l’encontre de la décision du commissaire Nupponen de mettre le défendeur en liberté a été accueillie. Plus précisément, la juge Hansen a estimé que le commissaire Nupponen avait commis une erreur de droit en disant que, même si le défendeur avait été déclaré coupable de vol qualifié, cette déclaration de culpabilité n’entrait pas dans les paramètres du sous‑alinéa 246f)(ii) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227.

 

[10]           Le 21 avril 2008, le défendeur s’est volontairement présenté à l’ASFC pour être à nouveau mis en détention.

 

[11]           Comme le requiert le paragraphe 57(1) de la LIPR, un contrôle de la détention a eu lieu le 23 avril 2008. Par décision communiquée le 29 avril 2008, le commissaire Shaw Dyck, de la SI, est arrivé à la conclusion que le défendeur devait être mis en liberté sous condition.

 

[12]           Le ministre a déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de cette décision, tout en sollicitant la suspension de la mise en liberté du défendeur.

 

[13]           Pour obtenir une suspension, un demandeur doit prouver : (1) qu’il y a une question sérieuse à trancher; (2) qu’il subira un préjudice irréparable si la suspension n’est pas accordée; et (3) que la prépondérance des inconvénients milite en faveur de l’octroi de la suspension (arrêt Toth c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1988), 86 N.R. 302 (C.A.F.)).

 

[14]           Après avoir entendu les avocats des parties et avoir lu les pièces produites, je suis d’avis qu’il y a une question sérieuse à trancher en ce qui a trait à la manière dont le commissaire Shaw Dyck a considéré les faits suivants :

a)                  la conclusion non contestée tirée le 22 février 2008 par le commissaire Tessler, de la SI, selon laquelle le défendeur [traduction] « était un membre de la Mara Salvatrucha, au Salvador », et selon laquelle il est interdit de territoire, en application de l’alinéa 37(1)a) de la LIPR, pour criminalité organisée;

b)                  la mesure non contestée d’expulsion prononcée ultérieurement contre le défendeur;

c)                  l’effet que l’attention des médias pour cette affaire ainsi que l’imminence du renvoi du défendeur pourraient avoir sur le défendeur, compte tenu que le commissaire de la SI a conclu que le défendeur avait une propension à commettre des actes criminels violents dans des situations de conflit.

Vu la nature de la question sérieuse susmentionnée, je ne crois pas que le danger pour le public, si une suspension n’est pas accordée, soit pure conjecture. Le danger est réel et, aux fins de la présente requête, il constitue un préjudice irréparable.

 

[15]           Finalement, la sécurité du public, dans ces conditions, fait pencher la prépondérance des inconvénients en faveur du ministre.

 

[16]           Par conséquent, l’ordonnance du commissaire Shaw Dyck, de la SI, mettant le défendeur en liberté sera suspendue, mais pas selon toutes les conditions proposées par le ministre, et cela jusqu’à la première des dates suivantes :

 

a)                  la date à laquelle il sera statué au fond sur la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire déposée contre ladite ordonnance; ou

b)                  la date à laquelle il sera statué sur la demande d’examen des risques avant renvoi (demande d’ERAR).


ORDONNANCE

 

L’ordonnance rendue le 29 avril 2008 par le commissaire Shaw Dyck, de la Section de l’immigration, qui mettait en liberté le défendeur, est suspendue jusqu’à la première des dates suivantes :

a)      la date à laquelle il sera statué au fond sur la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire déposée contre ladite ordonnance; ou

b)      la date à laquelle il sera statué sur la demande d’examen des risques avant renvoi (demande d’ERAR).

 

« Yvon Pinard »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM‑2013‑08

 

INTITULÉ :                                       MCI c. JOSE FRANCISCO CARDOZA QUINTEROS

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 VANCOUVER (COLOMBIE‑BRITANNIQUE)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 2 MAI 2008

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE 

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE PINARD

 

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 2 MAI 2008

 

 

COMPARUTIONS :

 

Caroline Christaens

 

POUR LE DEMANDEUR

Shepherd Moss

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

Vancouver (C.‑B.)

 

POUR LE DEMANDEUR

Shepherd Moss

Avocat

Vancouver (C.‑B.)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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