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Dossier : 2017-5069(IT)G

ENTRE :

EXXONMOBIL CANADA RESOURCES COMPANY,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé.

[Traduction française officielle]

 


Requête entendue par conférence téléphonique le 10 août 2023, à Ottawa (Ontario)

Devant : l’honorable juge Bruce Russell

Comparutions :

Avocat de l’appelante :

Jehad Haymour

Avocat de l’intimé :

Wendy Bridges

 

ORDONNANCE

La requête de l’intimé – relative à certains aspects de l’argument invoqué par l’appelante quant au secret professionnel de l’avocat qui s’attache à la lettre du cabinet d’avocats portant le titre « NEB - Recovery of Sponsor Costs Opinion » (ONE – Avis juridique sur le recouvrement des frais de promoteur) » – est accueillie, avec dépens.

En outre, conformément aux motifs de la présente ordonnance, la Cour ordonne que l’appelante produise, à l’intention de l’intimé, une copie de la première page de la lettre du cabinet d’avocats dont les éléments suivants ne sont pas caviardés :

(a) l’entête du cabinet d’avocats;

(b) la date de la lettre;

(c) le(s) nom(s) et adresse(s) du/des destinataire(s) de la lettre;

(d) la ligne « objet » de la lettre (ou une ligne d’en-tête comparable).

Signé à Halifax (Nouvelle-Écosse), ce 26e jour de septembre 2023.

« B. Russell »

Le juge Russell

 


Référence : 2023 CCI 143

Date : 26092023

Dossier : 2017-5069(IT)G

ENTRE :

EXXONMOBIL CANADA RESOURCES COMPANY,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé.

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

Le juge Russell

[1] Dans sa requête, l’intimé sollicite une ordonnance pour exiger de l’appelante qu’elle :

(1) explique pourquoi elle revendique le privilège du secret professionnel de l’avocat à l’égard d’une lettre d’un cabinet d’avocats [la lettre]. Cette lettre était jointe à un courriel et elle était identifiée par la mention « NEB – Recovery of Sponsor Costs Opinion » (ONE – Avis juridique sur le recouvrement des frais de promoteur). L’intimé demande que l’explication soit suffisamment détaillée pour permettre de déterminer si la revendication du privilège est fondée;

(2) produise les parties de la lettre qui permettront d’identifier le client.

[2] La lettre figurait comme pièce jointe à un courriel du 30 mars 2001. Celui-ci avait été envoyé par un dénommé M.G. Wheatley, de Phillips Alaska Inc., à un certain Peter Lowry, d’Exxon Mobil Corporation (la société mère de l’appelante).

[3] L’appelante a décrit la lettre comme un avis juridique du 5 mars 2001 rédigé par les avocats du cabinet Fraser Milner Casgrain S.E.N.C.R.L., s.r.l. qui reflète les conseils donnés aux parties au Alaskan Gas Pipeline Project Agreement (Accord relatif au projet de gazoduc de l’Alaska) du 5 décembre 2000.[1]

[4] La Cour se penche d’abord sur la partie de la requête dans laquelle l’intimé sollicite la production d’une version partiellement caviardée de la lettre, et ce, afin de lui permettre d’identifier le « client ». À cet égard, l’intimé demande que la première page de la lettre soit produite et que les éléments suivants qui y figurent ne soient pas caviardés : le nom du ou des destinataires, l’entête du cabinet d’avocat et la date de la lettre.

[5] L’appelante s’y oppose. Elle soutient que l’intimé devrait croire sur parole son avocat lorsqu’il affirme que le destinataire de la lettre était le North American Natural Gas Pipeline Group (groupe nord-américain de gazoducs).

[6] L’appelante a fait savoir que le nom du groupe a été adopté le ou vers le 1er mars 2001 par les parties à l’Accord relatif au projet de gazoduc de l’Alaska du 5 décembre 2000. Ces parties sont Exxon Mobil Corporation, BP Exploration (Alaska) Inc. et Phillips Alaska Inc.

[7] Je ne suis pas d’accord avec l’appelante. Il s’agit pour l’avocat d’une pratique professionnelle fondamentale de communiquer un document, même s’il est caviardé, à la partie adverse. On ne peut s’attendre que cette dernière croie sur parole l’avocat quant à la teneur d’un document qui ne lui a pas été communiqué. Rappelons qu’un avocat ne saurait témoigner dans une instance à laquelle il comparaît. Le fait que la partie adverse souhaite la production d’un document (même caviardé, en tout ou en partie) ne remet pas en question le professionnalisme de l’avocat.

[8] J’accueille la requête de l’intimé. Il y sollicite une ordonnance de la Cour pour obtenir de l’appelante qu’elle produise une copie de la première page de la lettre en question dans laquelle les éléments suivants ne seront pas caviardés : l’entête du cabinet d’avocats, la date de la lettre et tout détail figurant sur cette page en lien avec le ou les destinataires, y compris leur(s) nom(s) et adresse(s). Aucun de ces détails n’est en soi protégé par le secret professionnel de l’avocat, et l’appelante n’a pas prétendu le contraire. Ce sont ces mêmes détails que l’avocat souhaite personnellement communiquer, plutôt que de produire une version partiellement caviardée de la première page de la lettre.

[9] Dans la deuxième partie de sa requête, l’intimé sollicite une ordonnance de la Cour pour obtenir de l’appelante qu’elle justifie son recours au privilège du secret professionnel de l’avocat. L’intimé n’a pas précisé ce qu’il cherchait réellement à obtenir à cet égard.

[10] À mon avis, l’appelante doit fournir des précisions sur la nature des renseignements qui sont contenus dans la lettre et à l’égard desquels elle invoque le secret professionnel de l’avocat. Une description élémentaire de la teneur de la lettre est nécessaire. La description de la lettre comme une pièce jointe à un courriel constitue du ouï-dire, contrairement aux renseignements qui figurent à ce qui est communément appelé l’« objet » de la lettre (ou une ligne d’entête comparable). Dans cet « objet », l’auteur est susceptible d’avoir fourni une description succincte du contenu de la lettre, sans révéler d’informations assujetties au secret.

[11] Par conséquent, j’ordonne que, outre les informations qui sont mentionnées plus haut, la ligne « objet » (ou une ligne d’entête similaire) ne soit pas caviardée dans la première page de la lettre qui sera communiquée à l’intimé.

[12] Comme je le soulignais dans l’ordonnance modifiée du 31 janvier 2023, cette conclusion ne constitue pas une décision sur le bien-fondé du privilège. Il appartient à l’intimé de déterminer ou d’examiner cette question isolément, à la lumière de tous les renseignements et documents dont il dispose, y compris ceux qui lui seront communiqués conformément à la présente ordonnance.

[13] La Cour accueille la requête, avec dépens.

Signé à Halifax (Nouvelle-Écosse), ce 26e jour de septembre 2023.

« B. Russell »

 


RÉFÉRENCE :

2023 CCI 143

N° DU DOSSIER DE LA COUR :

2017-5069(IT)G

INTITULÉ :

EXXONMOBIL CANADA RESOURCES COMPANY c. SA MAJESTÉ LE ROI

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 10 août 2023

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

L’honorable juge Bruce Russell

DATE DE L’ORDONNANCE :

Le 26 septembre 2023

COMPARUTIONS :

Avocat de l’appelant :

Jehad Haymour

Avocat de l’intimé :

Wendy Bridges

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelant :

Nom :

Jehad Haymour

 

Cabinet :

Bennett Jones LLP

Pour l’intimé :

Shalene Curtis-Micallef

Sous-procureure générale du Canada Ottawa, Canada

 



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