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Dossier : 2019-2421(CPP)

2019-2422(EI)

ENTRE :

0808498 BC LTD.,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

NATHAN DAHLEN,

intervenant.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appels entendus les 24 et 26 août 2020 et le 25 mai 2022,

à Vancouver (Colombie-Britannique).

Devant : L’honorable juge Don R. Sommerfeldt

Comparutions :

Représentant de l’appelante :

Peter Skov

Avocate de l’intimé :

Représentante de l’intervenant :

Me Katherine Shelley

D. Elizabeth (Liz) Dahlen

 

JUGEMENT

Conformément aux motifs de jugement ci-joints, les appels sont accueillis, et la décision datée du 5 avril 2019 et rendue par l’Agence du revenu du Canada, au nom du ministre du Revenu national, en application du Régime de pensions du Canada et de la Loi sur l’assurance-emploi, est annulée. Aucun dépens n’est accordé.

Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour de mai 2023.

« Don R. Sommerfeldt »

Le juge Sommerfeldt


Référence :2023 CCI 53

Date : Le 4 mai 2023

Dossier : 2019-2421(CPP)

2019-2422(EI)

ENTRE :

0808498 BC LTD.,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

NATHAN DAHLEN

intervenant.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Sommerfeldt

I. INTRODUCTION

[1] Les présents motifs se rapportent aux appels interjetés par la société 0808498 BC Ltd. (La « société ») contre la décision (la « décision ») rendue le 5 avril 2019 par l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »), au nom du ministre du Revenu national (le « ministre »), en application du Régime de pension du Canada (le « RPC ») et de la Loi sur l’assurance-emploi (la « LAE »). La décision était que l’intervenant, Nathan Dahlen, avait été engagé par la société en tant qu’employé, et non en tant qu’entrepreneur indépendant (comme la société l’avait prévu et compris).

II. LES FAITS

A. LES PARTICULARITÉS DU TRAVAIL

[2] La société est détenue par des sociétés de portefeuille appartenant à trois cousins, Peter Skov, Jens Skov et Rolly Skov, qui sont également les trois administrateurs de la société. La société est un promoteur immobilier qui, en 2016, a commencé le développement d’un projet de 23 maisons en rangée à Ladner, en Colombie-Britannique. En tant que petit promoteur, la société a passé un contrat avec UPA Construction Group Canada Limited (« UPA ») pour la construction du complexe de maisons en rangée.

[3] UPA était l’entrepreneur général. Son coordonnateur de projet était Richard Nasadyck. Le chef de chantier d’UPA pour le projet de maisons en rangée était Dan Chilton[1]. Les administrateurs de la société communiquaient généralement avec M. Nasadyck, plutôt qu’avec M. Chilton. La société n’avait pas donné de directives à M. Chilton[2].

[4] Les différents corps de métier (par exemple, plomberie, électricité et cloisons sèches) qui ont travaillé sur le projet ont été sélectionnés par l’entrepreneur général (c’est-à-dire UPA) et approuvés par le promoteur (c’est-à-dire la société). Tous les corps de métier étaient sous-traités par UPA; aucun d’entre eux n’était employé par la société.

[5] Après avoir obtenu son diplôme d’études secondaires, M. Dahlen s’est lancé dans un programme d’apprentissage pour les mécaniciens de machinerie lourde. Faute de travail, M. Dahlen a été licencié en novembre 2016 par l’exploitant du relais routier où il travaillait. Soucieux de trouver un emploi, M. Dahlen a publié sur Facebook un message indiquant qu’il cherchait du travail. M. Dahlen connaissait la fille de Jens Skov et s’est entretenu avec elle de sa recherche d’emploi. Elle a parlé à son père, qui a parlé à Peter et Rolly, et ils ont décidé que la société offrirait une possibilité d’emploi à M. Dahlen.

[6] Jens Skov s’est entretenu avec M. Dahlen et lui a expliqué que la société cherchait à embaucher un agent de la sécurité dans l’industrie de la construction et un secouriste. Jens a dit à M. Dahlen que s’il réussissait un cours de secourisme professionnel de niveau 2 d’une semaine, la société lui rembourserait le coût du cours (640 dollars) et l’engagerait ensuite en tant qu’agent de la sécurité dans l’industrie de la construction sur le chantier de construction des maisons en rangée. M. Dahlen a payé les frais de 640 $ pour le cours le 1er décembre 2016 et a été remboursé pour cette somme par la société le 2 décembre 2016[3]. M. Dahlen a suivi le cours du 5 au 9 décembre 2016.

[7] Lors de leur première conversation, M. Jens avait dit à M. Dahlen que la société ne l’embaucherait pas, mais qu’elle le prendrait plutôt sous contrat, de sorte qu’il serait responsable de ses propres impôts, de ses cotisations à l’assurance-emploi (« AE ») et de ses cotisations au RPC[4].

[8] M. Dahlen a commencé à travailler pour la société le 13 décembre 2016. Le 20 décembre 2016, Peter Skov a fait un chèque, tiré sur le compte de la société dans une coopérative de crédit, d’une somme de 480 $, pour couvrir la rémunération du travail de M. Dahlen du 13 au 16 décembre inclus. Jens Skov a apporté le chèque au domicile de M. Dahlen et s’est entretenu avec ce dernier et sa mère, D. Elizabeth (Liz) Dahlen. Au cours de cette conversation, Jens a rappelé à M. Dahlen qu’il devait mettre de côté de l’argent de chaque chèque pour payer ses impôts lorsqu’il produirait sa déclaration de revenus[5].

[9] Après cette rencontre, Mme Dahlen a aidé M. Dahlen à faire en sorte qu’une grande partie de ses chèques de rémunération soit déposée dans un compte bancaire commun qu’ils possédaient, afin de s’assurer qu’il y aurait suffisamment de fonds pour payer l’impôt dû[6].

[10] L’une des responsabilités de M. Dahlen sur le chantier consistait à s’assurer que les règlements et les règles de la Commission des accidents du travail (la « CAT ») étaient respectés sur le chantier. Par exemple, il devait veiller à ce que personne ne soit autorisé à se rendre sur le chantier sans porter des bottes à embout d’acier, un gilet de sécurité et un casque de protection. M. Dahlen devait également s’assurer qu’il n’y avait jamais plus de 50 travailleurs sur le chantier (car cela entraînerait une classification différente aux fins de la CAT)[7]. À ce titre, M. Dahlen vérifiait régulièrement auprès des sous-traitants (tels que les charpentiers, les couvreurs, les électriciens, les plombiers et autres) le nombre de travailleurs que chacun d’entre eux aurait sur le chantier à un moment donné. En outre, M. Dahlen parcourait régulièrement le chantier ou faisait des patrouilles pour observer le travail effectué et s’assurer que les normes de sécurité appropriées étaient respectées. Par exemple, s’il remarquait qu’un couvreur ne portait pas d’équipement anti‑chute, M. Dahlen le lui signalait.

[11] Au cours de la première semaine de travail de M. Dahlen sur le chantier, M. Chilton, au nom d’UPA, a montré à M. Dahlen ce qu’il devait faire et l’a souvent accompagné dans l’apprentissage et l’exécution de ses tâches. M. Chilton a remis à M. Dahlen une planchette à pince et les formulaires de la CAT à remplir régulièrement[8].

[12] Si un travailleur est blessé sur le chantier, M. Dahlen lui prodiguait les premiers soins. Le nombre de blessés étant relativement faible, M. Dahlen n’a pas passé beaucoup de temps à administrer les premiers soins. L’incident le plus grave auquel il a été confronté s’est produit vers la fin du projet de construction, lorsqu’un conducteur de dépanneuse est venu enlever la remorque qui avait servi de bureau de construction et de poste de secours. Le conducteur de la dépanneuse devait remettre les jantes des pneus en place[9]. Pour ce faire, le conducteur a enroulé une sangle à cliquet autour de la circonférence du pneu en question et a serré la sangle de manière à comprimer le pneu et à presser les flancs du pneu contre la jante pour créer un joint d’étanchéité. Alors que le conducteur travaillait sur le deuxième pneu, un effet de recul des dents de la sangle à cliquet s’est produit et a provoqué une large entaille sur le bras du conducteur. M. Dahlen a soigné cette blessure et a dirigé le conducteur vers l’hôpital pour qu’il se fasse faire des points de suture[10].

[13] En tant qu’agent de la sécurité, M. Dahlen était présent sur le chantier tout au long de la journée de travail. Cependant, ses tâches de sécurité et de premiers secours n’occupaient pas la totalité de la journée de travail. C’est pourquoi il a souvent été sollicité par M. Chilton ou par divers sous-traitants pour participer à des projets qui nécessitaient [traduction] « un coup de main supplémentaire ».

[14] Quatre autres jeunes hommes ont également été embauchés par la société pour travailler sur le chantier. L’un était le fils de Peter, l’autre le fils de Jens et les deux autres étaient des amis du fils de Jens. Ils étaient encore à l’école et ne travaillaient donc pas sur le chantier dans la même mesure que M. Dahlen. Ces quatre jeunes hommes ont également été informés par Jens ou Peter qu’ils travailleraient sur la base d’un contrat, plutôt que sur la base d’un emploi. Le fils de Peter a été embauché en qualité d’agent de la sécurité dans l’industrie de la construction[11]. Les trois autres jeunes hommes ont été embauchés comme ouvriers.

[15] Peter Skov a expliqué qu’en 2017, il y avait une pénurie de travailleurs dans le secteur de la construction, de sorte que les entrepreneurs généraux et les sous-traitants avaient du mal à embaucher des travailleurs. En outre, certains travailleurs embauchés quittaient leur emploi en cours de route pour en occuper un autre. De temps à autre, UPA embauchait des travailleurs par l’intermédiaire de Workforce Staffing Solution Ltd. (« Workforce »), mais ces travailleurs étaient souvent peu fiables, arrivant parfois sur le chantier le matin et repartant avant la fin de la journée de travail. Cette situation était préoccupante, car Workforce facturait à UPA des frais pour l’ensemble de la journée de travail, même si le travailleur en question n’avait été présent qu’une partie de la journée. C’est l’une des raisons pour lesquelles la société a embauché les trois jeunes hommes qui n’étaient pas des agents de la sécurité. Ces jeunes hommes étaient disponibles sur le chantier pour aider l’entrepreneur général et les sous-traitants en cas de besoin[12].

[16] M. Dahlen rêvait de devenir mécanicien de machinerie lourde Sceau rouge et d’occuper un poste de débardeur. Alors qu’il travaillait pour la société, il a demandé et obtenu un poste de débardeur auprès de la BC Maritime Employers Association. Avant de commencer à travailler à son nouveau poste, et avant de mettre fin à son travail sur le projet de maisons en rangée, M. Dahlen a dû suivre une formation et s’acquitter d’autres fonctions liées à son nouveau poste. Les jours où M. Dahlen assistait à la formation des débardeurs et aux activités connexes plutôt que d’aller travailler sur le chantier de maisons en rangée, il en informait M. Chilton, qui (si nécessaire) prenait dispositions pour qu’un autre agent de la sécurité, dans le cadre d’un contrat avec Workforce, soit présent sur le chantier[13]. Au cours de son contre-interrogatoire, Jens Skov a désigné cette agence de recrutement comme étant « Manpower ». Il a déclaré qu’UPA avait pris les dispositions nécessaires et payé Manpower (c’est-à-dire Workforce) pour fournir des agents temporaires chargés de la santé et de la sécurité au travail, ainsi que des ouvriers. UPA facturait ensuite la société, qui payait à UPA le montant des frais facturés par Workforce[14].

[17] À l’été 2017, la construction des maisons en rangée était presque terminée, ce qui signifie que l’activité de construction sur le chantier était réduite. Les quelques travailleurs restants effectuaient principalement des travaux de finition.

[18] En août 2017 ou aux alentours de cette date, Jens Skov a informé M. Dahlen que la construction des maisons de ville était terminée et que ses services n’étaient plus nécessaires. Le 15 août 2017 fut le dernier jour de travail de M. Dahlen pour la société[15].

B. Déclaration de revenus

[19] Au début de l’année 2017, la société a remis à M. Dahlen un État du revenu de pension, de retraite, de rente ou d’autres sources (formulaire T4A) (le « feuillet T4A de 2016 »), indiquant le montant de la rémunération qui lui avait été versée par la société en 2016[16]. Comme M. Dahlen n’a travaillé pour la société que pendant une partie du mois de décembre 2016, la somme indiquée sur le feuillet T4A de 2016 était relativement modeste, à savoir 1 290 $.

[20] Mme Dahlen a tenté de préparer la déclaration de revenus de 2016 de M. Dahlen, mais elle a éprouvé des difficultés parce qu’elle ne savait pas comment traiter le feuillet T4A de 2016. Jusqu’alors, elle ne connaissait que les feuillets T4. Après avoir été très frustrée par son logiciel de préparation des déclarations de revenus, elle a demandé à M. Dahlen de parler à Jens Skov, qui a parlé à Peter Skov, expert-comptable exerçant en cabinet privé. Peter Skov a indiqué qu’il remplirait la déclaration de revenus de 2016 pour M. Dahlen, ce qu’il a fait[17]. La déclaration de revenus de 2016 préparée par Peter Skov et produite par M. Dahlen auprès de l’ARC indiquait son revenu d’emploi provenant de ses emplois précédents en 2016 à la ligne 101 de cette déclaration, et indiquait sa rémunération, de 1 290 $, provenant de la société, aux lignes 162 et 135, où elle était décrite comme « Revenu tiré d’un travail indépendant – Revenu d’entreprise ». Les montants brut et net de la rémunération sont identiques, à savoir 1 290 $[18]. M. Dahlen a déclaré qu’il n’avait pas examiné sa déclaration de revenus de 2016 avant de la produire[19].

[21] En février 2018, la société a délivré à M. Dahlen un État du revenu de pension, de retraite, de rente ou d’autres sources (formulaire T4A) pour 2017 (le « feuillet T4A de 2017 »), indiquant des « honoraires pour services » de 21 439 $[20].

[22] Mme Dahlen a préparé la déclaration de revenus de 2017 de M. Dahlen sans consulter Peter Skov. Elle ne lui a pas non plus demandé ses services. La copie de la déclaration de revenus de 2017 de M. Dahlen produite comme preuve n’était ni signée ni datée[21]. Je crois comprendre que M. Dahlen a déclaré la rémunération qu’il a reçue de la société en 2017 en tant que revenu d’emploi à la ligne 101 de la déclaration, plutôt qu’en tant que revenu tiré d’un travail indépendant – revenu d’entreprise aux lignes 162 et 135 de la déclaration.

[23] Vers septembre 2018, après avoir conclu que M. Dahlen avait été un employé de la société, plutôt qu’un entrepreneur indépendant, l’ARC a préparé un feuillet T4 indiquant que sa rémunération constituait un revenu d’emploi, plutôt qu’un revenu tiré d’un travail indépendant ou un revenu d’entreprise. L’ARC a fourni une copie de ce feuillet T4 à la société, après quoi cette dernière en a envoyé une copie à M. Dahlen, accompagnée d’une lettre datée du 10 septembre 2018[22]. Le 14 septembre 2018 ou aux alentours de cette date, Mme Dahlen a envoyé une demande de redressement de T1 à l’ARC, accompagnée d’une copie du feuillet T4 que l’ARC avait préparé[23].

C. Procédures relatives à l’assurance-emploi

[24] Début 2018, M. Dahlen s’est inscrit au British Columbia Institute of Technology pour poursuivre son apprentissage des métiers de la mécanique lourde[24]. Il a alors demandé des prestations d’assurance-emploi et a appris que sa période de travail auprès de la société n’était pas considérée comme un emploi assurable[25]. Le 19 mars 2018, il a demandé à la Division de l’admissibilité au RPC/AE de l’ARC de rendre une décision afin de déterminer si son travail auprès de la société constituait un emploi assurable[26].

[25] Dans des lettres datées du 25 juin 2018, la Division de l’admissibilité a rendu une décision (la « décision »), informant M. Dahlen et la société qu’il avait été déterminé que M. Dahlen était un employé de la société et que son emploi était assurable[27]. Le 16 août 2018, la société a interjeté appel de la décision auprès du ministre[28]. Dans des lettres datées du 5 avril 2019, le ministre a transmis la décision à M. Dahlen et à la société, déclarant que l’emploi de M. Dahlen auprès de la société était assurable[29]. La société a interjeté appel de la décision devant la Cour.

III. QUESTION EN LITIGE

[26] La question en litige dans ces appels est de savoir si M. Dahlen a été embauché par la société et a travaillé pour elle en tant qu’employé.

IV. DISCUSSION

A. Fiabilité de la preuve

[27] Outre la question de l’intention des parties concernant le statut de M. Dahlen, les témoignages de Jens Skov, Peter Skov et Mme Dahlen contenaient plusieurs autres incohérences, comme suit :

a) Selon Mme Dahlen, lorsque Jens Skov a apporté le premier chèque de rémunération de M. Dahlen au domicile des Dahlen, Jens a dit à M. Dahlen et à Mme Dahlen que la société ne disposait pas d’un compte de paie, de sorte que la société ne retiendrait pas l’impôt sur le revenu, de sorte que M. Dahlen [traduction] « devait payer son propre impôt sur le revenu »[30]. Toutefois, lorsqu’il a discuté de l’embauche de son fils, du fils de Jens et des deux autres jeunes hommes, Peter Skov a déclaré que le fait de ne pas vouloir assumer la responsabilité de la paie n’était pas la raison pour laquelle ces quatre jeunes hommes avaient été embauchés en tant qu’entrepreneurs indépendants[31].

  • b)Jens a déclaré que, du point de vue de la société, l’accueil et le déchargement des livraisons sur le chantier ne faisaient pas partie des tâches de M. Dahlen[32]. Cependant, en discutant du travail effectué par les quatre jeunes hommes qui ont été embauchés (en plus de M. Dahlen), Peter Skov a déclaré que l’une de leurs fonctions consistait à décharger les appareils et autres articles qui étaient livrés sur le chantier[33]. Néanmoins, il ne s’agit peut-être pas d’une anomalie, étant donné que les responsabilités professionnelles de M. Dahlen et des quatre autres jeunes hommes, bien que similaires, n’étaient pas nécessairement identiques.

[28] Plusieurs circonstances m’ont amené à m’interroger sur la fiabilité de certains éléments de preuve présentés par M. Dahlen :

a) Au cours de l’interrogatoire principal de M. Dahlen, sa représentante, Mme Dahlen, lui a demandé s’il avait eu une conversation avec quelqu’un avant de commencer à travailler sur le chantier. M. Dahlen a répondu qu’il ne savait pas, même après une question complémentaire de Mme Dahlen. Cependant, M. Dahlen a fini par reconnaître qu’il avait eu une conversation sur la formation aux premiers secours[34].

b) Dans son compte rendu de sa rencontre avec Jens Skov, au cours de laquelle la nature des modalités de travail a été discutée, M. Dahlen a déclaré qu’il avait compris qu’il devrait mettre de l’argent de côté pour payer tout [traduction] « impôt supplémentaire » (c’est l’expression qu’il a employée) qui pourrait survenir. Il a ensuite indiqué qu’il ne pensait pas devoir payer d’impôt sur les indemnités qui lui étaient versées par la société, mais qu’il pourrait se produire quelque chose qui entraînerait des impôts supplémentaires. M. Dahlen a reconnu qu’il ne se souvenait pas si, lors de sa première rencontre avec Jens Skov, ce dernier avait utilisé le terme « impôt supplémentaire » ou s’il avait simplement dit que M. Dahlen serait responsable de s’acquitter de son impôt[35].

c) Bien que la déclaration de revenus de 2016 de M. Dahlen ait indiqué que la rémunération versée par la société était un revenu tiré d’un travail indépendant ou un revenu d’entreprise, M. Dahlen a déclaré qu’il n’était pas au courant de la manière dont cette rémunération avait été déclarée, qu’il ne savait pas que Peter Skov avait préparé la déclaration de revenus de 2016 de cette manière et qu’il n’avait pas examiné sa déclaration de revenus avant qu’elle ne soit produite auprès de l’ARC[36]. En fait, il n’était même pas sûr d’avoir signé sa déclaration de revenus de 2016[37].

d) En discutant de la préparation et du contenu de sa déclaration de revenus de 2016, M. Dahlen a déclaré qu’il ne connaissait rien aux impôts et qu’il externalisait toutes ses questions fiscales[38]. Ce n’est que plus tard que M. Dahlen a déclaré qu’en dehors de la déclaration de revenus préparée par Peter Skov, c’était en fait la mère de M. Dahlen qui avait préparé ses déclarations de revenus[39]. Bien qu’il s’agisse probablement d’externalisation, je me suis demandé si M. Dahlen n’essayait pas de me cacher quelque chose, plutôt que de donner son témoignage ouvertement et franchement.

e) Lorsqu’on lui a demandé si Peter Skov avait préparé la déclaration de revenus de 2017 de M. Dahlen, M. Dahlen a d’abord répondu que Peter l’avait fait, après quoi Mme Dahlen est intervenue pour déclarer que c’était elle qui avait préparé et produit les déclarations de revenus de M. Dahlen, à l’exception de la déclaration de 2016, que Peter avait préparée et produite[40]. La déclaration initiale, mais incorrecte, de M. Dahlen selon laquelle sa déclaration de revenus de 2017 avait été préparée par Peter Skov soulève des questions quant à la fiabilité des souvenirs de M. Dahlen concernant les événements survenus en 2016, 2017 et 2018.

[29] Certaines circonstances m’ont amené à m’interroger sur le témoignage de Mme Dahlen :

  • a)Tout au long de l’audience, il est apparu que Mme Dahlen nourrissait de la mauvaise volonté, voire de l’animosité, à l’égard de la société et de ses administrateurs[41]. Bien que cela ne soit pas inadmissible et soit peut-être compréhensible, cela soulève également la question de savoir si de tels sentiments ont pu influencer ses souvenirs des événements, ou si son témoignage et celui de M. Dahlen ont pu être orchestrés.

  • b)Mme Dahlen a déclaré qu’après la rencontre de décembre 2016, lorsque Jens Skov avait apporté le premier chèque de rémunération de M. Dahlen à son domicile et avait rencontré M. Dahlen et Mme Dahlen, elle ne voulait pas que M. Dahlen travaille pour la société, et elle estimait que M. Dahlen devait mettre fin à son travail avec la société[42]. Elle a toutefois reconnu que M. Dahlen aimait travailler sur le projet de maisons en rangée parce que le chantier était proche de la résidence des Dahlen et parce que M. Dahlen avait le sens des responsabilités et était conscient de l’importance de son rôle en tant qu’agent de la sécurité sur le chantier[43].

c) J’ai eu l’impression que Mme Dahlen pensait que la société essayait de tromper son fils ou de profiter de lui. Par exemple, dans son contre-interrogatoire de Peter Skov, elle a insinué que la société avait embauché les quatre jeunes hommes supplémentaires afin de s’assurer que la rémunération de M. Dahlen ne dépasserait pas le seuil de 30 000 $ applicable aux petits fournisseurs en application de la Loi sur la taxe d’accise, de sorte que M. Dahlen n’aurait pas à s’inscrire en application de cette loi, ni à percevoir la taxe sur les produits et services (la « TPS ») auprès de la société à l’égard de la rémunération que cette dernière lui versait[44]. Cette insinuation n’est pas fondée, car la rémunération totale versée en 2017 aux cinq jeunes hommes embauchés par la société s’élevait à 28 894 $[45]. En outre, Mme Dahlen a affirmé à Jens Skov que la société ne payait pas suffisamment son fils[46]. Lors du contre-interrogatoire de Peter Skov, Mme Dahlen a affirmé que les cinq jeunes hommes (c.-à-d. M. Dahlen et les quatre autres) n’étaient pas tous traités de la même manière et a suggéré que certains se voyaient accorder plus d’heures que d’autres, ce que Peter a nié[47]. Au cours de l’audience, j’ai eu l’impression que Mme Dahlen essayait de réparer ce qu’elle considérait comme un tort causé par la société à son fils.

B. Dispositions législatives

[30] D’un point de vue législatif, l’une des questions à résoudre dans le cadre de ces appels est de savoir si, du 13 décembre 2016 au 15 août 2017, M. Dahlen a exercé un emploi assurable. Aux fins des présents appels, la disposition pertinente de la définition légale de l’expression « emploi assurable » se trouve à l’alinéa 5(1)a) de la LAE, qui est rédigée comme suit :

5(1) Sous réserve du paragraphe (2) [qui n’est pas pertinent ici], est un emploi assurable :

a) l’emploi exercé au Canada pour un ou plusieurs employeurs, aux termes d’un contrat de louage de services ou d’apprentissage exprès ou tacite, écrit ou verbal, que l’employé reçoive sa rémunération de l’employeur ou d’une autre personne et que la rémunération soit calculée soit au temps ou aux pièces, soit en partie au temps et en partie aux pièces, soit de toute autre manière; [...]

[31] Une autre question pertinente est de savoir si M. Dahlen était employé par la société dans un emploi ouvrant droit à pension. En 2016 et 2017, les paragraphes 2(1) et 6(1) du RPC (lus ensemble) définissaient l’emploi ouvrant droit à pension comme suit :

2.(1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi. [...]

emploi ouvrant droit à pension Emploi spécifié au paragraphe 6(1). [...]

6(1) Ouvrent droit à pension les emplois suivants :

a) l’emploi au Canada qui n’est pas un emploi excepté;

b) l’emploi au Canada qui relève de Sa Majesté du chef du Canada, et qui n’est pas un emploi excepté;

c) l’emploi assimilé à un emploi ouvrant droit à pension par un règlement pris en vertu de l’article 7.

Le paragraphe 6(2) du RPC définit la notion d’emploi excepté. Aucune des dispositions de cette définition ne s’applique en l’espèce.

[32] Comme il ressort clairement des définitions légales ci-dessus, pour qu’il y ait un emploi assurable ou un emploi ouvrant droit à pension, il faut d’abord qu’il y ait un emploi.

C. Jurisprudence : Employé ou entrepreneur indépendant?

[33] Bien qu’aucun critère universel ne permette de déterminer si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant, la « question centrale est de savoir si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte ».[48] Pour régler la question, les facteurs suivants doivent généralement être pris en compte :

a) L’employeur contrôle-t-il les activités du travailleur?

b) L’employeur fournit-il les outils et l’équipement requis par le travailleur, ou le travailleur doit-il fournir ses propres outils et son propre équipement?

c) Le travailleur engage-t-il lui-même ses assistants?

d) Quel est le degré de risque financier pris par le travailleur? En d’autres termes, le travailleur court-il un risque de perte?

e) Jusqu’à quel point le travailleur est-il responsable des mises de fonds et de la gestion?

f) Jusqu’à quel point le travailleur peut-il tirer profit de l’exécution de ses tâches[49]?

Il n’existe pas de formule fixe concernant l’application des facteurs mentionnés ci-dessus, dont la liste est non restrictive[50].

[34] Récemment, les tribunaux ont noté l’importance de tenir compte de l’intention déclarée des parties (c’est-à-dire l’employeur et le travailleur) pour déterminer si le travailleur est un employé ou un entrepreneur indépendant. Le rôle de l’intention a été expliqué de la manière suivante par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Connor Homes :

30 Parallèlement au critère formulé par les arrêts Wiebe Door et Sagaz, s’est fait jour ces dernières années une autre tendance jurisprudentielle qui accorde un poids substantiel à l’intention déclarée des parties; voir Wolf c. La Reine, 2002 D.T.C. 6053 (C.A.F.) [...] Royal Winnipeg Ballet c. Canada (Ministre du Revenu national), 2006 CAF 87 [...]

33 Par conséquent, la jurisprudence de Royal Winnipeg Ballet enseigne que le premier point à prendre en considération est celui de savoir s’il y a chez les parties une entente ou une intention commune touchant leur relation. Lorsque l’on constate une telle intention commune, qu’elle soit d’établir une relation de client à entrepreneur indépendant ou d’employeur à employé, il convient d’appliquer le critère consacré par la jurisprudence Wiebe Door en examinant les facteurs voulus à la lumière de cette intention afin d’établir si, tout bien pesé, les faits pertinents cadrent avec celleci et la confirment []

38 C’est pourquoi les arrêts Wolf et Royal Winnipeg Ballet exposent une méthode en deux étapes pour l’examen de la question centrale, telle que l’ont définie les arrêts Sagaz et Wiebe Door, qui est d’établir si l’intéressé assure, ou non, les services en tant que personne travaillant à son compte.

39 La première étape consiste à établir l’intention subjective de chacune des parties à la relation. On peut le faire soit d’après le contrat écrit qu’elles ont passé, soit d’après le comportement effectif de chacune d’elles, par exemple en examinant les factures des services rendus, et les points de savoir si la personne physique intéressée s’est enregistrée aux fins de la TPS et produit des déclarations d’impôt en tant que travailleur autonome.

40 La seconde étape consiste à établir si la réalité objective confirme l’intention subjective des parties. Comme le rappelait la juge Sharlow au paragraphe 9 de l’arrêt TBT Personnel Services Inc. c. Canada, 2011 CAF 256 [...], « il est également nécessaire d’examiner les facteurs exposés dans Wiebe Door afin de déterminer si les faits concordent avec l’intention déclarée des parties. » Autrement dit, l’intention subjective des parties ne peut l’emporter sur la réalité de la relation telle qu’établie par les faits objectifs. À cette seconde étape, on peut aussi prendre en considération l’intention des parties, ainsi que les modalités du contrat, puisqu’elles influent sur leurs rapports. Ainsi qu’il est expliqué au paragraphe 64 de l’arrêt Royal Winnipeg Ballet, les facteurs applicables doivent être examinés « à la lumière de » l’intention des parties. Cela dit, cependant, la seconde étape est une analyse des faits pertinents aux fins d’établir si le critère des arrêts Wiebe Door et de Sagaz est, ou non, rempli, c’estàdire [...] si la relation qu’ont nouée les parties est, sur le plan juridique, une relation de client à entrepreneur indépendant ou d’employeur à employé.

41 La question centrale à trancher reste celle de savoir si la personne recrutée pour assurer les services le fait, concrètement, en tant que personne travaillant à son compte. Comme l’expliquent aussi bien les arrêts Wiebe Door que Sagaz, aucun facteur particulier ne joue de rôle dominant, et il n’y a pas de formule fixe qu’on puisse appliquer, dans l’examen qui permet de répondre à cette question. Les facteurs à prendre en considération varient donc selon les faits de l’espèce. Néanmoins, les facteurs que spécifient les arrêts Wiebe Door et Sagaz sont habituellement pertinents, ces facteurs étant le degré de contrôle exercé sur les activités du travailleur, ainsi que les points de savoir si ce dernier fournit luimême son outillage, engage ses assistants, gère et assume des risques financiers, et peut escompter un profit de l’exécution de ses tâches [...]

42 [...] La première étape de l’analyse doit toujours être de déterminer l’intention des parties puis, en deuxième lieu, d’examiner sous le prisme de cette intention la question de savoir si leurs rapports, concrètement, révèlent des rapports d’employeur à employé ou de client à entrepreneur indépendant[51].

[35] Dans Institut de l’assurance de l’Ontario, alors qu’il examinait l’application des deux étapes de l’analyse exposée dans Connor Homes, le juge Graham s’est concentré précisément sur la question de savoir si le résultat de la première étape avait une incidence sur l’application du critère de la deuxième étape. Il a conclu « que l’intention doit être pertinente lorsque les facteurs Wiebe Door et Sagaz établissement [sic] la nature d’une relation d’une certaine façon, mais que les parties avaient l’intention qu’elle soit une autre chose et que leur relation réelle est similaire à leur intention »[52]. Concernant l’application du critère de la deuxième étape, le juge Graham a affirmé ce qui suit :

26. Compte tenu de tout ce qui précède, je conclus que la deuxième étape du critère Connor Homes doit être appliquée comme suit :

  • a)Lorsque le payeur et le travailleur n’ont pas une intention commune, leur relation sera celle indiquée par les facteurs Wiebe Door et Sagaz.

  • b)Lorsque le payeur et le travailleur ont une intention commune :

  1. si les facteurs Wiebe Door et Sagaz correspondent à cette intention commune, alors leur relation sera celle qu’ils ont voulue;

  2. si les facteurs Wiebe Door et Sagaz sont totalement incompatibles avec cette intention commune, alors leur relation sera celle indiquée par ces facteurs;

  3. si les facteurs Wiebe Door et Sagaz sont incompatibles avec cette intention commune, mais que les parties agissent et poursuivent néanmoins leur relation d’une manière similaire à ce que l’on attendrait de leurs intentions, alors leur relation sera celle qu’elles ont voulue[53].

D. Analyse en deux étapes

[36] En suivant les directives énoncées dans l’arrêt Connor Homes, je vais d’abord examiner s’il y avait une compréhension mutuelle ou une intention commune entre la société et M. Dahlen concernant leur relation. J’examinerai ensuite les facteurs énoncés dans l’arrêt Sagaz et la décision Wiebe Door à la lumière de cette intention mutuelle (le cas échéant) afin de :

a) décider si, tout bien pesé, les faits pertinents soutiennent cette intention et sont compatibles avec celle-ci; ou

b) s’il n’y a pas d’intention mutuelle, déterminer si ces facteurs relèvent d’un emploi ou d’un contrat indépendant.

E. Intention

[37] Il est clair que Peter Skov et Jens Skov, en tant qu’administrateurs de la société, ont eu l’intention et voulu que la société engage M. Dahlen en tant qu’entrepreneur indépendant et non en tant qu’employé. Par exemple, ils ont indiqué que la société n’avait pas d’employés, et Jens a pu dire à M. et Mme Dahlen que la société n’était pas organisée pour gérer un système de paie pour les employés.

[38] Peter Skov et Jens Skov pensaient que les cinq jeunes hommes avaient été engagés sur une base similaire. Il semble que les quatre autres jeunes hommes n’aient pas remis en question leur statut d’entrepreneur indépendant[54].

[39] Il est plus difficile de déterminer l’intention ou la compréhension de M. Dahlen quant à la relation qu’il entretenait avec la société. Lors de son témoignage, il a affirmé avec force qu’il avait été un employé, qu’il n’avait pas été indépendant et qu’il n’avait pas d’entreprise. Lorsqu’il a été confronté aux données inscrites aux lignes 162 et 135 de sa déclaration de revenus de 2016, il les a désavouées et a déclaré qu’elles avaient été inscrites à son insu et sans instructions de sa part.

[40] M. Dahlen et Mme Dahlen pensaient que Jens Skov leur avait dit que la société n’était pas conçue pour gérer un système de paie et que M. Dahlen serait responsable de ses impôts. Sur les conseils de Jens, M. Dahlen a mis de l’argent de côté pour payer l’impôt sur le revenu[55].

[41] Selon Jens Skov, M. Dahlen avait été engagé pour apporter les premiers secours et effectuer d’autres tâches à sa convenance. M. Dahlen avait toute latitude pour organiser son travail, et il était libre de travailler pour d’autres sous-traitants qui se trouvaient sur le chantier, sans communiquer avec la société[56]. Il ne relevait pas directement de la société[57]. En fait, selon Jens Skov, M. Dahlen [traduction] « ne communiquait pas [régulièrement] avec... 0808498[58] », et [traduction] « il ne rendait compte à personne d’autre que lui-même[59] », pas même à M. Chilton[60].

[42] Jens Skov a déclaré qu’au cours de l’été 2017, alors que M. Dahlen suivait une formation pour un poste de débardeur, il lui arrivait de s’absenter du chantier pendant plusieurs jours, sans avoir à faire le point avec la société et sans avoir à demander la permission de quitter le chantier[61].

[43] En tout état de cause, il était évident qu’au moment de l’audience, il y avait une divergence d’opinion entre M. Dahlen et la société quant à la nature de sa relation passée avec la société. Au cours de son témoignage, M. Dahlen a déclaré qu’il pensait s’être rendu compte pour la première fois en avril 2017 (au moment de préparer sa déclaration de revenus de 2016) que lui et la société avaient des points de vue différents sur la nature de leur relation. Cependant, il n’a pas eu de conversation avec Peter Skov ou Jens Skov pour discuter de ce malentendu[62].

[44] Il est possible que l’intention et la compréhension de M. Dahlen concernant sa relation avec la société en avril 2017 n’aient pas été les mêmes que sa compréhension et son intention en décembre 2016, lorsqu’il a commencé à travailler pour la société. Il est également possible que, bien qu’il n’ait pas eu l’intention d’être un entrepreneur indépendant, son intention réelle ait pu correspondre à une relation se situant quelque part sur le continuum entre le statut d’employé et celui d’entrepreneur indépendant (ce qui sera examiné ci-dessous).

[45] S’il est tout à fait clair qu’au moment de l’audience, M. Dahlen était fermement convaincu que son intention et sa compréhension étaient qu’il avait été un employé de la société, je ne peux pas déterminer si c’était également son intention et sa compréhension en décembre 2016, lorsqu’il a commencé à travailler pour la société, ou si son intention et sa compréhension en décembre 2016 auraient en fait pu être différentes. Étant donné mon incapacité à déterminer l’intention et la compréhension de M. Dahlen en décembre 2016, je mènerai le reste de mon analyse en me fondant sur le fait que la société et M. Dahlen n’avaient pas une intention commune, ce qui fait que nous sommes visés par l’alinéa 26a), plutôt que par l’alinéa 26b), de l’analyse du juge Graham dans Institut de l’assurance[63].

F. Autres facteurs

[46] Comme il est indiqué dans les arrêts Wiebe Door, Sagaz et les autres décisions examinées précédemment, plusieurs facteurs supplémentaires doivent être pris en considération pour déterminer si un travailleur est un employé ou un entrepreneur indépendant, comme cela est indiqué au paragraphe 33 ci-dessus.

1. Le degré de contrôle

[47] Les éléments de preuve ont établi que la société ne contrôlait pas l’exécution par M. Dahlen de ses tâches liées au travail. Dans la mesure où M. Dahlen était soumis à un contrôle quelconque, ce contrôle venait de M. Chilton (qui était le chef de chantier d’UPA)[64], et non de la société. Ceci est cohérent avec le fait qu’en tant qu’entrepreneur général, UPA était responsable du chantier et de toutes les personnes qui s’y trouvaient[65].

[48] M. Dahlen a déclaré que Jens Skov lui avait dit, apparemment lorsque M. Dahlen a commencé à travailler sur le chantier, que la personne à qui il devait faire rapport était M. Chilton[66]. Toutefois, Peter Skov a indiqué que M. Dahlen n’avait pas été orienté vers UPA aux fins de supervision et de direction sur le chantier. Au contraire, il pouvait aider n’importe quel travailleur sur le chantier[67].

[49] M. Dahlen a indiqué que, s’il ne savait pas quoi faire ou comment le faire, il demandait à M. Chilton. Si M. Chilton ne savait pas, M. Dahlen demandait conseil à l’un des charpentiers de finition ou à un autre travailleur[68]. Parfois, lorsque M. Chilton savait qu’il ne serait pas sur le chantier le lendemain, il donnait à M. Dahlen une liste de travaux à effectuer. Une fois ces travaux terminés, il [traduction] « pouvait parcourir le chantier, [pour] s’assurer que tout le monde faisait son travail en toute sécurité[69] ». Les autres jours où M. Chilton ne venait sur le chantier et où il ne laissait pas de liste de travaux à M. Dahlen, ce dernier faisait le tour du chantier pour s’assurer que tout le monde travaillait en toute sécurité et pour administrer les premiers soins, le cas échéant[70].

[50] M. Dahlen avait le contrôle des jours où il travaillait sur le projet de maisons en rangée, en particulier lorsqu’il participait à la formation pour le poste de débardeur qu’il prévoyait d’occuper. M. Dahlen a simplement informé M. Chilton et peut-être Jens Skov qu’il (M. Dahlen) ne serait pas sur le chantier, après quoi, en cas de besoin (c.-à-d. si le fils de Peter Skov, qui était également agent de la sécurité, n’était pas disponible), M. Chilton prenait des dispositions pour qu’un agent de la sécurité soit fourni par Workforce[71].

[51] Jens Skov a déclaré que, lorsque M. Dahlen a commencé à travailler sur le chantier, il a travaillé à temps plein pendant un certain temps, puis il a fini par [traduction] « commencer à réduire un peu ses heures[72] », au point qu’il était parfois absent [traduction] « plusieurs jours d’affilée[73] ». Peter Skov a déclaré que M. Dahlen jouissait d’une grande liberté sur le chantier et qu’il pouvait quitter le chantier pour se rendre à des entretiens d’embauche[74]. Je crois donc savoir que, dans une certaine mesure, M. Dahlen a pu déterminer les jours et les heures pendant lesquels il a travaillé sur le chantier.

[52] Comme M. Dahlen possédait une camionnette qu’il utilisait pour se rendre sur le chantier, M. Chilton ou l’un des sous-traitants lui demandait parfois d’aller chercher des matériaux pour eux. M. Dahlen le faisait généralement sans communiquer au préalable avec un représentant de la société pour obtenir la permission de le faire ou pour informer la société qu’il quittait le chantier pour aller chercher des matériaux[75].

[53] Lorsqu’on lui a demandé s’il comprenait que les cinq jeunes hommes géraient chacun une entreprise distincte lorsqu’ils travaillaient pour la société, Peter Skov a répondu par l’affirmative, car ils pouvaient aller et venir, et ils ne travaillaient pas tous les jours. Certains jours, ils étaient présents sur le chantier, d’autres jours, ils n’y étaient pas[76].

[54] Au cours de son interrogatoire principal, M. Dahlen a déclaré qu’il était tenu de remplir régulièrement les listes de contrôle de sécurité que lui fournissait M. Chilton[77]. Au cours de son contre-interrogatoire, il a déclaré que les listes de contrôle de sécurité lui avaient été fournies par UPA et qu’il devait les remplir et les remettre à M. Chilton[78].

[55] C’est au cours de son contre-interrogatoire par Peter Skov que M. Dahlen a raconté l’expérience du conducteur de la dépanneuse qui s’est blessé à l’avant-bras en replaçant les jantes sur les pneus. Après que M. Dahlen a raconté son expérience, les propos suivants ont été échangés : [traduction]

Q. Lorsqu’un accident de ce type se produit[,] il y a un rapport d’incident de la CAT?

R. Oui, et je le remplissais.

Q. Je n’en ai jamais reçu.

R. Eh bien, c’est Dan [Chilton] et UPA qui m’ont fourni ces formulaires.

Q. Vous travailliez donc pour UPA à ce moment-là?

R. À ce moment-là, oui[79].

[56] L’échange ci-dessus indique que les documents de déclaration d’incident utilisés par M. Dahlen provenaient d’UPA et non de la société, que M. Dahlen a signalé l’accident à UPA et non à la société et que M. Dahlen considérait, au moins à cette occasion, qu’il travaillait pour UPA.

[57] M. Dahlen a indiqué que l’une de ses responsabilités consistait à fournir « une paire de mains supplémentaire lorsqu’il effectuait des travaux [...][80] ». Pendant le contre-interrogatoire, les propos suivants ont été échangés : [traduction]

Q. Vous avez indiqué qu’une grande partie de vos tâches consistait à aider, par exemple, les charpentiers, les charpentiers de finition peut-être, les plombiers, les électriciens, les poseurs de cloisons sèches?

R. Oui, Dan [Chilton] m’a demandé d’aider ces personnes en premier lieu et d’assurer mes fonctions de secouriste et d’agent de la sécurité en second lieu[81].

Il semble donc que M. Chilton ait ordonné à M. Dahlen de subordonner ses fonctions d’agent de la sécurité dans l’industrie de la construction aux besoins des sous-traitants qui travaillaient sur le chantier.

[58] À la question de savoir s’il avait le statut de secouriste désigné lorsqu’il travaillait sur le chantier, M. Dahlen a répondu ce qui suit : [traduction]

R. J’étais censé être désigné comme secouriste et agent de la sécurité dans l’industrie de la construction, mais Dan [Chilton] avait sa propre façon de faire, et il a donc fait en sorte que je sois principalement un ouvrier général et que les fonctions d’agent de la sécurité dans l’industrie de la construction et de secouriste soient secondaires[82].

[59] M. Dahlen a déclaré qu’il passait environ 70 % de son temps sur le chantier à effectuer des travaux généraux et 30 % à s’occuper de la sécurité et des premiers secours[83].

[60] Comme il est mentionné ci-dessus, de temps en temps, alors que M. Dahlen travaillait sur le chantier, M. Chilton, ou peut-être certains des sous-traitants, lui demandait de conduire sa propre camionnette à Dunbar Lumber pour récupérer des matériaux nécessaires sur le chantier. Cela s’est fait à l’insu des administrateurs de la société. M. Dahlen a expliqué qu’il essayait de rembourser une faveur qui lui avait été faite par la société. En d’autres termes, il a déclaré que la société lui avait fait une faveur en lui fournissant du travail lorsqu’il en avait besoin, et qu’il pouvait lui rendre la pareille en utilisant sa camionnette pour aller chercher des fournitures à la scierie[84]. M. Dahlen a expliqué qu’un employé de Dunbar Lumber lui avait dit qu’il facturait un forfait de 100 $ pour chaque livraison effectuée sur un chantier. Par conséquent, chaque fois que M. Dahlen utilisait sa camionnette pour aller chercher des fournitures à la scierie, il faisait économiser 100 $ à la société[85], bien qu’il n’y ait aucune preuve indiquant si les frais de livraison auraient été facturés à la société ou à UPA et, dans ce dernier cas, s’ils auraient été facturés à la société ou s’ils auraient été absorbés dans le prix global du contrat.

[61] Au cours du contre-interrogatoire, M. Dahlen a expliqué l’arrangement de la manière suivante : [traduction]

Q. Vous avez déclaré que vous étiez le seul à posséder une camionnette?

R. Il était le seul à posséder une camionnette capable, à l’époque, d’aller chercher des fournitures. Il est évident que c’est un euphémisme de supposer que j’étais le seul sur le chantier à posséder une camionnette. N’est-ce pas? Bien sûr, les charpentiers, les plombiers et tous les autres, étant eux-mêmes des artisans, auraient une camionnette, n’est-ce pas? Mais Dan [Chilton] a jugé plus facile de m’envoyer chercher les fournitures, ce qui leur permet de ne pas interrompre leur travail tout au long de la journée et d’achever le projet à temps.

Q. Mais ces instructions étaient données par Dan?

R. C’est exact[86].

Le commentaire ci-dessus est un autre exemple du contrôle exercé par UPA, et non par la société, sur M. Dahlen.

[62] Apparemment, M. Chilton a donné à M. Dahlen un jeu de clés pour ouvrir et fermer le chantier. Si cela s’est fait, c’est à l’insu ou sans le consentement de la société et, d’après la nature et le ton de la réponse de Peter Skov lors de son contre-interrogatoire par Mme Dahlen, sans l’approbation ou l’autorisation de la société[87]. Ainsi, dans la mesure où la société a pu déléguer le contrôle de M. Dahlen à M. Chilton, cette délégation n’était pas illimitée. En d’autres termes, l’incidence du facteur de contrôle peut être réduite.

[63] Comme le montre l’analyse ci-dessus, la société n’a pas exercé de contrôle direct sur M. Dahlen. C’est plutôt M. Chilton, le chef de chantier d’UPA, qui semblait contrôler les activités de M. Dahlen. Compte tenu de ma compréhension de la relation contractuelle entre la société (c.-à-d. le promoteur) et UPA (c.-à-d. l’entrepreneur général)[88], et étant donné que Jens Skov avait demandé à M. Dahlen de faire rapport à M. Chilton[89], je considère qu’il s’agit d’une délégation de contrôle, de sorte que le contrôle exercé sur M. Dahlen par le chef de chantier d’UPA, M. Chilton, constituait également un contrôle par la société[90].

[64] Bien que la société ait délégué à M. Chilton un contrôle limité sur M. Dahlen, ce qui indique qu’il s’agit d’un emploi, quatre autres circonstances font pencher la balance dans l’autre sens. Premièrement, sans consulter la société, M. Chilton a modifié la priorité et l’orientation des activités de M. Dahlen, qui n’était plus un agent de la sécurité dans l’industrie de la construction et, si le temps le permettait, une « deuxième paire de mains », mais principalement un ouvrier général, et seulement accessoirement un agent de la sécurité. Deuxièmement, M. Dahlen jouissait d’une grande liberté sur le chantier, puisqu’il pouvait déterminer les jours et les heures de travail et quitter le chantier pour se rendre à des entretiens d’embauche et suivre une formation de débardeur. Troisièmement, la société n’a pas autorisé M. Chilton à donner des clés du chantier à M. Dahlen. Quatrièmement, compte tenu de la responsabilité du fait d’autrui qui peut incomber à un employeur si un employé a un accident de voiture pendant qu’il travaille, l’utilisation par M. Dahlen de sa camionnette pour aller chercher des matériaux à la scierie n’entrait pas dans le cadre d’une délégation de contrôle de la part de la société à M. Chilton[91]. Par conséquent, à mon avis, le facteur de contrôle penche dans les deux sens.

2. Propriété des instruments de travail

[65] Lorsque le projet de maisons en rangée a commencé, la société a loué une remorque de construction et l’a fait remorquer jusqu’au chantier. La majeure partie de l’espace de la remorque était occupée par le bureau du contremaître et du chef de chantier[92]. Cependant, la remorque disposait également d’un petit poste de secours[93]. Selon Peter Skov, le poste de secours ne contenait qu’une trousse de premiers secours. M. Dahlen a déclaré qu’il y avait également un lit de camp et une bouteille d’oxygène[94]. Aucune preuve n’indiquait si la société était propriétaire de la trousse de premiers secours, du lit de camp et de la bouteille d’oxygène ou si elle les louait à un tiers. Jens Skov a déclaré que la société avait fourni la trousse de premiers secours pour l’ensemble du chantier, et non spécifiquement pour M. Dahlen[95].

[66] La fourniture par la société d’une trousse de premiers soins, d’un lit de camp et d’une bouteille d’oxygène peut être comparée à la mise à disposition d’un radiologue d’un appareil à rayons X par un hôpital. Dans certains cas, le radiologue peut être un employé de l’hôpital, mais dans d’autres cas, il peut être un entrepreneur indépendant travaillant à l’hôpital. Ainsi, la fourniture par la société de la trousse de premiers secours, du lit de camp et de la bouteille d’oxygène n’est pas nécessairement révélatrice d’une relation d’emploi.

[67] Le directeur du chantier d’UPA, M. Chilton, a fourni à M. Dahlen la planchette à pinces et les formulaires de la CAT qu’il utilisait quotidiennement pour surveiller les travailleurs sur le chantier et pour patrouiller sur le chantier afin de s’assurer du respect des règles et des règlements de la CAT. Aucune preuve n’indiquait si la planchette à pincettes appartenait à M. Chilton personnellement ou à UPA.

[68] Les tâches effectuées sur le chantier par M. Dahlen lorsqu’il n’était pas occupé à ses activités d’agent de la sécurité comprenaient le balayage et le pelletage. La société n’a pas fourni les balais et les pelles utilisés par M. Dahlen. Aucun élément de preuve précis n’a été produit quant à l’identité de la personne qui a fourni les balais et les pelles, bien qu’il ait été suggéré qu’il s’agissait d’UPA ou de l’un des sous-traitants[96].

[69] M. Dahlen était propriétaire du casque de protection, du gilet de sécurité et des bottes à embout d’acier qu’il portait lorsqu’il travaillait sur le chantier. Comme indiqué ailleurs dans les présents motifs, M. Dahlen était propriétaire de la camionnette qu’il utilisait de temps à autre pour aller chercher des matériaux chez Dunbar Lumber. À mon avis, la camionnette était un atout important, ce qui tend à équilibrer la balance.

[70] Ce facteur semble se répartir de manière assez égale entre l’emploi et le contrat indépendant.

3. Embauche d’aides

[71] Lorsque Jens Skov a été contre-interrogé par Mme Dahlen, il a déclaré qu’à sa connaissance, M. Dahlen avait la possibilité de demander à quelqu’un d’autre de travailler pour lui s’il ne venait pas au travail. Cependant, M. Skov a déclaré qu’il n’avait pas parlé à M. Dahlen de la possibilité de sous-traiter à un autre entrepreneur[97].

[72] Que M. Dahlen ait eu ou non le pouvoir d’embaucher un travailleur de remplacement, il n’a pas tenté de le faire. Au contraire, lorsqu’il ne se rendait pas sur le chantier, en particulier lorsqu’il participait à la formation pour son poste de débardeur, et lorsqu’un autre agent de la sécurité dans l’industrie de la construction, comme le fils de Peter Skov, ne travaillait pas sur le chantier[98], M. Dahlen en informait M. Chilton, qui engageait alors un agent de la sécurité dans l’industrie de la construction de remplacement auprès de Workforce. Cela indique non seulement qu’il était relativement simple pour M. Dahlen de demander à M. Chilton de trouver un agent de la sécurité dans l’industrie de la construction de remplacement, mais aussi que le poste d’agent de la sécurité dans l’industrie de la construction pouvait facilement être pourvu par une personne qui n’était pas un employé d’UPA ou de la société.

[73] Je ne pense pas que ce facteur fasse clairement pencher la balance dans un sens ou dans l’autre.

4. Risque de pertes

[74] Aux fins de l’impôt sur le revenu, M. Dahlen n’a déduit aucune dépense de la rémunération qui lui a été versée par la société.

[75] Comme il est indiqué plus haut, M. Dahlen utilisait parfois sa camionnette pour aller chercher des matériaux chez Dunbar Lumber. En raison de cet arrangement unique, que M. Dahlen a entrepris de son propre chef (bien qu’il ait pu être persuadé par M. Chilton, qui représentait UPA et non la société), M. Dahlen aurait supporté quelques dépenses modestes (par exemple, pour l’essence), ainsi qu’une usure supplémentaire de sa camionnette. Il y avait également le risque d’être victime d’un accident en se rendant à la scierie ou en en revenant, ou de voir sa camionnette endommagée lors du chargement ou du déchargement des matériaux.

[76] Lorsqu’un travailleur fournit son propre véhicule pour son travail, il est reconnu qu’il existe un risque de perte :

Le contrat de [l’appelant] lui faisait aussi courir le risque de subir des pertes importantes. Les amendes liées à des infractions aux règlements de la circulation, les dommages causés au véhicule et la possibilité d’être tenu responsable des dommages causés à des tiers dans le cadre du travail constituaient tous des risques pouvant entraîner des pertes. Certains de ces risques étaient très importants, et [l’appelant] pouvait se protéger contre certains d’entre eux au moyen de contrats d’assurance. Il était même tenu de contracter une assurance contre le recours des tiers. Cependant, les pertes imprévues constituent toujours un risque dans les cas où les travailleurs fournissent leurs propres véhicules[99].

[77] Bien qu’il n’y ait pas eu de risque substantiel de perte, ce facteur suggère un contrat indépendant plutôt qu’un emploi.

5. Responsabilité liée aux mises de fonds et à la gestion

[78] Aucune preuve se rapportant spécifiquement à ce facteur particulier n’a été produite. Cependant, M. Dahlen avait investi dans la camionnette qu’il conduisait pour se rendre sur le chantier et qu’il utilisait parfois pour récupérer des matériaux. Dans l’arrêt City Water, la Cour d’appel fédérale a reconnu que la mise à disposition d’un véhicule constitue un investissement important, ce qui peut favoriser la conclusion qu’un travailleur est un entrepreneur indépendant[100].

[79] Ce facteur indique qu’il s’agit d’un contrat indépendant.

6. Possibilité de profit

[80] Jens Skov a déclaré que M. Dahlen était libre de fixer ses propres heures chaque jour de travail. En réponse à une question posée lors du contre-interrogatoire, à savoir si M. Dahlen aurait pu venir sur le chantier à 15 h, Jens a déclaré que M. Dahlen aurait pu le faire s’il avait voulu être payé pour seulement deux heures de travail ce jour-là. En d’autres termes, si M. Dahlen arrivait sur le chantier plus tard dans la journée, il était simplement payé pour un travail moins important[101].

[81] On pourrait faire valoir que, comme M. Dahlen était libre de fixer ses propres heures de travail chaque jour, il aurait pu gagner davantage et faire des bénéfices en travaillant plus longtemps. Cependant, cet argument n’est pas étayé par la jurisprudence. La jurisprudence soutient plutôt la proposition selon laquelle, en général, « la possibilité, pour un travailleur payé à l’heure, de travailler plus longtemps pour gagner davantage n’équivaut pas à la possibilité de réaliser des profits »[102].

[82] Ce facteur indique que M. Dahlen avait le statut d’employé, plutôt que celui d’entrepreneur indépendant.

7. Appréciation et pondération

[83] Il s’agit d’une situation où l’analyse des facteurs Wiebe Door et Sagaz ne donne pas de résultat clair. Dans certaines situations, cela pourrait suggérer de mettre davantage l’accent sur l’intention des parties, comme cela a été fait dans l’arrêt City Water[103]. Cependant, dans ces appels, les parties ne reconnaissent pas qu’elles avaient une intention commune.

[84] Aux fins de l’évaluation et de la pondération des facteurs examinés précédemment, il s’agit d’une situation délicate[104]. Bien que, dans l’ensemble, de nombreux critères pointent dans les deux directions, ou dans aucune, et que certains facteurs compensent d’autres facteurs, je pense que la liberté de M. Dahlen de fixer ses propres jours et heures de travail et de s’absenter du chantier, dans sa recherche d’un autre travail[105], et le fait qu’il ait pris l’initiative d’utiliser sa camionnette pour ramasser et livrer des matériaux, sans en informer la société[106], font pencher la balance en faveur d’une relation d’entrepreneur indépendant, plutôt que d’une relation d’emploi.

[85] La nature très rapprochée de cette situation peut également suggérer que la relation entre M. Dahlen et la société se situait quelque part sur le continuum entre une relation d’emploi et une relation d’entrepreneur indépendant, que je vais maintenant examiner.

G. Continuum entre un emploi et un contrat indépendant

[86] Ces dernières années, plusieurs tribunaux ont noté qu’il n’y avait pas de dichotomie nette entre un contrat de travail (traditionnellement appelé contrat de service) et un contrat indépendant (traditionnellement appelé contrat de louage de services). Il existe plutôt un continuum entre les deux, avec la relation employeur-employé à une extrémité, la relation entrepreneur indépendant à l’autre extrémité, et une relation hybride, intermédiaire ou entrepreneur dépendant « quelque part au milieu »[107]. Nombre de ces affaires portaient sur la question de savoir si un loueur était tenu de donner un préavis raisonnable à un travailleur avant de mettre fin au contrat qui les liait. Ce concept a été décrit en ces termes dans Marbry Distributors :

On peut peut-être considérer que toutes les relations sur le lieu de travail se situent sur un continuum. À une extrémité du continuum se trouve la relation employeur/employé, pour laquelle un préavis raisonnable est nécessaire pour mettre fin à la relation. À l’autre extrémité, on trouve les contrats indépendants ou les relations d’agence strictes, qui ne requièrent pas de préavis. La difficulté consiste évidemment à déterminer où l’on se situe sur ce continuum. La relation s’apparente-t-elle davantage à une relation employeur/employé ou à un statut d’entrepreneur indépendant[108]?

[87] Du point de vue du droit du travail, le statut d’un entrepreneur dépendant a été décrit comme suit :

[traduction]

En règle générale, une personne figurant sur la liste de paie d’un employeur et pour laquelle celui-ci effectue les retenues légales traditionnelles sur son salaire sera considérée comme un employé [...] Un entrepreneur indépendant [...] n’est pas un employé. Entre ces deux états se trouve un produit de la common law : l’entrepreneur dépendant. L’entrepreneur dépendant n’est pas inscrit sur la feuille de paye, mais il se conduit et est considéré comme un employé à presque tous les autres égards[109].

[88] Bien qu’un entrepreneur dépendant fonctionne généralement et soit traité comme un employé, la jurisprudence a reconnu qu’une relation hybride, intermédiaire ou d’entrepreneur dépendant s’apparente, mais n’est pas identique, à une relation employeur-employé[110].

[89] Le processus d’évolution de la common law, qui a conduit à la reconnaissance de relations qui ne sont ni des relations employeur-employé ni des relations d’entrepreneur indépendant, a été décrit comme suit :


 

[90]  

[traduction]

La jurisprudence en matière de droit du travail a évolué, dans un passé relativement récent, les tribunaux reconnaissant les réalités du lieu de travail moderne et le fait que la relation entre les travailleurs et ceux à qui ils fournissent leurs services n’est pas simplement binaire – soit une relation employé-employeur, soit une situation d’entrepreneur indépendant. Dans plusieurs décisions, les tribunaux ont fini par reconnaître qu’il existe une variété d’arrangements que les parties peuvent conclure. L’approche à adopter consiste à examiner la situation d’un point de vue fonctionnel.

Il en résulte la reconnaissance de relations qui s’inscrivent entre les deux modèles traditionnels. Traitant d’une question similaire dans Kahn v. All-Can Express Ltd., 2014 BCSC 1429, j’ai fait les commentaires suivants, qui me semblent pertinents pour l’affaire qui nous occupe :

[traduction]

[...] Sur la base de plusieurs précédents auxquels j’ai été renvoyé, je suis convaincu que la common law concernant cette question a évolué vers un état plus nuancé, qui reflète la réalité d’une économie dans laquelle de nombreux travailleurs fournissent des services à d’autres dans le cadre d’arrangements qui sont spécifiquement structurés de telle sorte qu’il ne s’agit pas de relations employeur-employé ni de relations d’entrepreneur indépendant.

[...] En effet, les tribunaux ont reconnu que ces types de relations, en fonction de leurs caractéristiques particulières, peuvent se situer à différents points d’un continuum, allant de situations purement employeur-employé à des arrangements classiques d’entrepreneur indépendant [...][111]

[91] La Cour d’appel de l’Ontario a donné des indications sur la manière de déterminer l’existence d’une relation d’entrepreneur dépendant, ainsi que sur certaines des raisons de principe et des conséquences de cette détermination, comme suit :

[traduction]

[30] Je conclus qu’il existe une catégorie intermédiaire, qui regroupe, à tout le moins, ces relations de travail qui ne reposent pas sur un contrat d’emploi et qui présentent une certaine dépendance économique minimale, qui peut être établie par une exclusivité absolue ou quasi absolue. Les travailleurs relevant de cette catégorie sont considérés comme des « entrepreneurs dépendants » et ils doivent recevoir un préavis de cessation d’emploi raisonnable [...]

[32] Ayant conclu qu’il existe une catégorie intermédiaire entre le travailleur indépendant et l’employé, à savoir l’« entrepreneur dépendant », je conclus également que les principes juridiques applicables à la distinction entre les employés et les entrepreneurs indépendants s’appliquent également à la distinction entre les employés et les entrepreneurs dépendants. De cette manière, la catégorie des entrepreneurs dépendants constitue une « exception » à la catégorie des non-employés et n’affecte pas l’éventail de la catégorie des employés [...]

[34] Ainsi, la première étape consiste à déterminer si un travailleur est un entrepreneur ou un employé, ce qui relève de l’analyse énoncée dans les arrêts Sagaz et Belton, laquelle est décrite dans la section suivante. Dans le cadre de cette analyse, l’exclusivité du travailleur est citée comme un facteur pesant en faveur de la catégorie des employés (premier principe de Belton). L’étape suivante de l’analyse s’applique uniquement si, à l’issue de la première étape, une personne est considérée comme un entrepreneur, auquel cas il s’agira de déterminer si elle appartient à la catégorie des entrepreneurs indépendants ou dépendants – c’est-à-dire si l’exclusivité est un attribut déterminant qui le place en situation de dépendance économique. Par conséquent, l’exclusivité pourrait être une « caractéristique » de la catégorie des entrepreneurs dépendants par rapport à la catégorie plus large des entrepreneurs. Cependant, elle continue également à être un facteur permettant de déterminer si le travailleur n’est pas du tout un entrepreneur, mais plutôt un employé, dans l’analyse de la première étape.

[35] Ce processus d’analyse sert les objectifs de politique qui sous-tendent la jurisprudence. En résumant la jurisprudence, Geoffrey England, Roderick Wood et Innis Christie, Employment Law in Canada, 4th ed. (Markham, Ont. : LexisNexis Canada) vol. 1, à l’article 2.33, décrit [sic] les motifs de politique fréquemment invoqués pour reconnaître une catégorie intermédiaire :

Ces décisions ont souvent reconnu qu’il était justifié sur le plan des principes de recourir à la doctrine du statut « intermédiaire » pour étendre les mesures de protection inhérentes à un contrat d’emploi aux travailleurs indépendants qui sont soumis à un degré assez élevé de subordination et de dépendance économique, mais qui, au sens strict, n’ont pas qualité d’« employé ».

[36] Face à ce souci de protéger les travailleurs qui sont officiellement des « entrepreneurs », mais qui se trouvent dans une position de vulnérabilité économique, il me semble logique de dissocier la catégorie d’entrepreneurs dépendants de celle existante, plus large, d’entrepreneurs et de ne pas modifier la portée de la catégorie d’employés. Par conséquent, l’analyse qu’il convient d’effectuer pour distinguer les employés des « entrepreneurs » en général est celle qui existe pour distinguer les employés des entrepreneurs indépendants[112].

[92] Ainsi, la notion de contrat dépendant ou de relation intermédiaire ne réduit pas l’espace occupé par l’emploi. Elle reconnaît simplement qu’entre l’espace de l’emploi et l’espace du contrat indépendant, il existe un espace intermédiaire qui n’est ni l’emploi ni le contrat indépendant, bien qu’il présente certaines similitudes avec ces deux espaces.

[93] Compte tenu de la reconnaissance judiciaire d’une catégorie intermédiaire ou hybride de travailleurs, parfois appelée « entrepreneur dépendant », « le critère permettant de déterminer si un travailleur est un employé ou un entrepreneur indépendant est aujourd’hui plus nuancé que par le passé »[113].

[94] Comme il est indiqué dans l’arrêt McKee[114], une analyse fondée sur les facteurs énoncés dans les arrêts Wiebe Door/Sagaz/Belton est généralement utilisée pour faire la distinction entre un employé et un entrepreneur dépendant, de manière similaire à l’approche adoptée pour faire la distinction entre un employé et un entrepreneur indépendant. Sur la base de l’analyse entreprise ci-dessus[115], je conclus que, si M. Dahlen n’était pas un entrepreneur indépendant, il était dans une relation d’entrepreneur hybride, intermédiaire ou dépendant avec la société.

H. Conditions d’emploi

[95] Aux termes du paragraphe 5(1) de la LAE, à l’exception du service dans les Forces canadiennes ou dans une force policière, le terme emploi assurable nécessite qu’il y ait un emploi dans l’une des quatre catégories précisées[116]. De même, il ressort clairement de la définition du terme emploi ouvrant droit à pension aux paragraphes 2(1) et 6(1) du RPC (lus ensemble) que l’emploi ouvrant droit à pension nécessite qu’il y ait emploi.

[96] Bien qu’une relation employeur-employé dans la catégorie intermédiaire puisse, à certains égards, s’apparenter à un emploi, comme il est indiqué ci-dessus, la jurisprudence a précisé qu’une telle relation intermédiaire n’est pas un emploi à proprement parler[117].

[97] Dans l’arrêt Marbry, le juge en chef McEachern, dans une opinion dissidente, a fait la déclaration suivante, bien que dans un contexte légèrement différent :

[traduction]

En ce qui concerne l’analyse entreprise dans un grand nombre d’affaires similaires concernant les relations de quasi-emploi, je souhaite seulement dire que, sauf dans le jeu de fers à cheval, la « proximité » n’est généralement pas suffisante pour l’établissement de relations juridiques. Le fait qu’une relation commerciale soit proche d’une relation d’emploi ne permet pas aux juges d’insérer dans un accord une clause que les parties elles-mêmes ont choisi de ne pas convenir[118].

Je suis d’avis qu’un principe similaire s’applique ici. En d’autres termes, la proximité d’une relation d’entrepreneur avec une relation d’emploi ne permet pas à un juge de qualifier la relation d’emploi aux fins de la LAE et du RPC. La LAE et le RPC imposent des obligations importantes aux employeurs et aux travailleurs (paiement des primes et des cotisations) et au gouvernement fédéral (paiement des prestations et des pensions). Ces obligations ne devraient être imposées que lorsqu’il existe clairement (et non presque) une relation d’emploi. À mon avis, une relation intermédiaire, hybride ou d’entrepreneur dépendant ne peut pas être considérée comme un emploi assurable ou un emploi ouvrant droit à pension.

I. Résumé et résolution

[98] Par les motifs susmentionnés, j’ai conclu que, aux fins du RPC et de la LAE, M. Dahlen n’était pas un employé de la société.

V. CONCLUSION

[99] Les appels sont accueillis et la décision est annulée.

[100] Étant donné que ni les règles de procédure de la Cour canadienne de l’impôt à l’égard du Régime de pensions du Canada ni les règles de procédure de la Cour canadienne de l’impôt à l’égard de la Loi sur l’assurance-emploi ne prévoient de dépens, je ne me prononce pas sur les dépens de ces appels.

Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour de mai 2023.

« Don R. Sommerfeldt »

Le juge Sommerfeldt

 



RÉFÉRENCE :

2023 CCI 53

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :

2019-2421(CPP) et 2019-2422(EI)

INTITULÉ :

0808498 BC LTD. c. LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL et

NATHAN DAHLEN

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie-Britannique)

DATES DE L’AUDITION :

Les 24 et 26 août 2020 et le 25 mai 2022

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Don R. Sommerfeldt

DATE DU JUGEMENT :

Le 4 mai 2023

COMPARUTIONS :

Représentant de l’appelante :

Peter Skov

Avocate de l’intimé :

Représentante de l’intervenant :

Me Katherine Shelley

D. Elizabeth (Liz) Dahlen

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelante :

s. o.

Pour l’intimé :

Shalene Curtis-Micallef

Sous-procureure générale du Canada

Ottawa, Canada

Pour l’intervenant :

s. o.

 



[1] Il s’agit des titres de poste utilisés par Jens Skov; transcription, vol. 1, de la p. 26, ligne 25, à la p. 27, ligne 4. Au cours de son témoignage, Peter Skov a désigné Richard Nasadyck comme chef de chantier et Dan Chilton comme contremaître; Transcription, vol. 1, p. 70, lignes 13 à 15; et p. 74, ligne 18.

[2] Transcription, vol. 1, de la p. 40, ligne 28, à la p. 41, ligne 4.

[3] Pièce I-2. Il semble que, malgré ce que M. Jens avait dit à M. Dahlen, le remboursement de 640 $ n’était pas réellement conditionné à la réussite du cours par M. Dahlen.

[4] Transcription, vol. 1, p. 45, lignes 6 à 8; et vol. 2, de la p. 184, ligne 26 à la p. 185, ligne 2; p. 186, lignes 12 à 23; de la p. 208, ligne 25 à la p. 209, ligne 3; de la p. 211, ligne 28 à la p. 212, ligne 10; et p. 218, lignes 2 à 5 et 9 à 11.

[5] Transcription, vol. 2, p. 228, lignes 15 à 25.

[6] Transcription, vol. 2, de la p. 229, ligne 18 à la p. 230, ligne 3.

[7] Pièce A-6.

[8] Transcription, vol. 2, p. 131, lignes 14 et 15; p. 175, lignes 13 à 19; et p. 178, lignes 10 à 14.

[9] Bien que M. Dahlen ne l’ait pas mentionné dans son récit, il s’agit vraisemblablement des pneus de la remorque.

[10] Transcription, vol. 2, de la p. 174, ligne 11 à la p. 175, ligne 10.

[11] Transcription, vol. 1, p. 34, lignes 5 à 11.

[12] Transcription, vol. 1, de la p. 88, ligne 22 à la p. 90, ligne 23.

[13] Transcription, vol. 2, de la p. 206, ligne 23 à la p. 207, ligne 5. Voir le paragraphe 50 ci-dessous.

[14] Transcription, vol. 1, de la p. 36, ligne 6; à la p. 37, ligne 1; et de la p. 47, ligne 17 à la p. 48, ligne 8.

[15] Pièce I-1, par. 8.

[16] Bien qu’une copie du feuillet T4A de 2017 ait été produite en preuve, je n’ai pas reçu de copie du feuillet T4A de 2016.

[17] Peter Skov n’a pas facturé d’honoraires à M. Dahlen pour la préparation de la déclaration de revenus de 2016. Voir la transcription, vol. 2, p. 231, lignes 9 à 12.

[18] Pièce I-11, cinquième page.

[19] Transcription, vol. 2, p. 203, lignes 20 à 22.

[20] Pièce A-5, deuxième page; et pièce I-12, douzième page.

[21] Pièce I-12.

[22] Pièce I-14.

[23] Pièce I-15.

[24] Pièce I-8.

[25] Transcription, vol. 2, de la p. 213, ligne 8 à la p. 214, ligne 28.

[26] Réponse à l’avis d’appel, déposée par le ministre le 3 septembre 2019, par. 13.

[27] Ibid., par. 14.

[28] Ibid., par. 15.

[29] Ibid., par. 18.

[30] Transcription, vol. 2, p. 199, lignes 18 à 20; et p. 228, lignes 15 à 25.

[31] Transcription, vol. 1, p. 83, lignes 23 à 27.

[32] Transcription, vol. 1, p. 40, lignes 21 à 23.

[33] Transcription, vol. 1, p. 72, lignes 2 à 23.

[34] Transcription, vol. 2, p. 129, lignes 2 à 27.

[35] Transcription, vol. 2, de la p. 199, ligne 13 à la p. 201, ligne 3.

[36] Transcription, vol. 2, p. 203, lignes 20 à 22.

[37] Transcription, vol. 2, p. 202, lignes 22 à 24.

[38] Transcription, vol. 2, p. 203, lignes 23 et 24.

[39] Transcription, vol. 2, p. 205, lignes 10 à 13.

[40] Transcription, vol. 2, de la p. 204, ligne 2 à la p. 205, ligne 9.

[41] Notamment, voir la transcription, vol. 2, p. 229, lignes 4 à 8; p. 231, lignes 2 et 3; et p. 232, lignes 1 à 18.

[42] Transcription, vol. 2, p. 218, lignes 6 à 18; p. 219, lignes 11 et 12; et p. 229, lignes 4 à 8.

[43] Transcription, vol. 2, p. 219, lignes 4 et 5 et 12 à 19.

[44] Transcription, vol. 1, de la p. 83, ligne 28 à la p. 84, ligne 2.

[45] Pièce A-5, Sommaire du revenu de pension, de retraite, de rente ou d’autres sources (formulaire T4A Sommaire), première page.

[46] Lors du contre-interrogatoire de Jens Skov, Mme Dahlen a déclaré qu’elle avait fait des recherches et qu’elle avait appris que Workforce facturait 40 $ de l’heure plus la TPS pour un agent de la sécurité ayant le niveau 2 de secourisme, et elle a obtenu de Jens que la société paie M. Dahlen environ 14 ou 15 $ de l’heure; voir Transcription, vol. 1, p. 40, lignes 5 à 12. Peter Skov semble indiquer que la société a payé 17,95 $ l’heure, TPS incluse, pour les travailleurs qu’UFA a obtenus par l’intermédiaire de Workforce; voir Transcription, vol. 1, p. 55, lignes 11 à 17.

[47] Transcription, vol. 1, p. 85, lignes 16 à 26.

[48] Arrêt 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., [2001] 2 R.C.S. 983, 2001 CSC 59, par. 47. Voir également la décision Wiebe Door Services Ltd. c. MNR, [1986] 3 CF 553, [1986] 2 C.T.C. 200, 87 D.T.C. 5025 (CAF), par. 17, citant l’arrêt Market Investigations, Ltd. v. Minister of Social Security, [1968] 3 All E.R. 732 (QBD), p. 737.

[49] Voir Sagaz, ibid., par. 47.

[50] Sagaz, précité, note 48, par. 48.

[51] 1392644 Ontario Inc. (Connor Homes) c. Canada (Revenu National), 2013 CAF 85, par. 30, 33 et 38 à 42. Voir également AE Hospitality Ltd. c. M.R.N., 2019 CCI 116, par. 72.

[52] Institut de l’assurance de l’Ontario c. M.R.N., 2020 CCI 69, par. 23.

[53] Ibid., par. 26.

[54] Les actions ou l’inaction des quatre autres jeunes hommes ne s’appliquent pas à M. Dahlen et ne sont pas une indication ou une preuve de la relation entre M. Dahlen et la société.

[55] Transcription, vol. 2, de la p. 197, ligne 27 à la p. 198, ligne 2; de la p. 199, ligne 13 à la p. 200, ligne 9; p. 218, lignes 6 à 12; et p. 228, lignes 15 à 25.

[56] Transcription, vol. 1, p. 22, lignes 15 à 27.

[57] Transcription, vol. 1, p. 20, lignes 1 à 4.

[58] Transcription, vol. 1, p. 22, lignes 19 à 22.

[59] Transcription, vol. 1, p. 31, lignes 18 et 19.

[60] Transcription, vol. 1, p. 32, lignes 25 à 27.

[61] Transcription, vol. 1, p. 20, lignes 13 à 18.

[62] Transcription, vol. 2, p. 210, lignes 2 à 17.

[63] Voir le paragraphe 35 et les notes de bas de page 52 et 53 de la présente décision.

[64] Transcription, vol. 2, de la p. 131, ligne 20 à la p. 132, ligne 16; et de la p. 193, ligne 5 à la p. 194, ligne 1.

[65] Transcription, vol. 1, p. 71, lignes 6 à 12.

[66] Transcription, vol. 2, p. 138, lignes 4 à 7.

[67] Transcription, vol. 1, p. 79, lignes 14 à 25.

[68] Transcription, vol. 2, de la p. 137, ligne 23 à la p. 138, ligne 3.

[69] Transcription, vol. 2, p. 138, lignes 8 à 17.

[70] Transcription, vol. 2, p. 138, lignes 18 à 22.

[71] M. Dahlen a indiqué qu’il avait informé à la fois M. Chilton et Jens Skov; voir la transcription, vol. 2, de la p. 130, ligne 26, à la p. 131, ligne 3. Jens Skov n’était pas de cet avis; voir la transcription, vol. 1, p. 20, lignes 13 à 18; de la p. 33, lignes 23 à la p. 34, ligne 27.

[72] Transcription, vol. 1, p. 45, lignes 9 à 12.

[73] Transcription, vol. 1, p. 20, lignes 13 à 18.

[74] Transcription, vol. 1, p. 80, lignes 21 à 26.

[75] Transcription, vol. 1, de la p. 80, ligne 27 à la p. 81, ligne 7.

[76] Transcription, vol. 1, p. 91, lignes 15 à 20. En discutant des habitudes de travail des cinq jeunes hommes travaillant sur le chantier, et en faisant remarquer le fait qu’ils n’étaient pas sur le chantier tous les jours, Peter Skov a déclaré : [traduction] « certains étaient là, d’autres non, Dieu sait où ils étaient »; voir la transcription, vol. 1, p. 91, lignes 20 à 22. Selon moi, cela signifie qu’il n’était pas toujours informé des allées et venues de ces cinq jeunes hommes ni de leurs absences du chantier.

[77] Transcription, vol. 2, p. 131, lignes 6 à 15.

[78] Transcription, vol. 2, p. 178, lignes 10 à 14.

[79] Transcription, vol. 2, p. 175, lignes 13 à 22.

[80] Transcription, vol. 2, de la p. 131, ligne 16 à la p. 132, ligne 3.

[81] Transcription, vol. 2, p. 178, lignes 18 à 24.

[82] Transcription, vol. 2, p. 208, lignes 13 à 16.

[83] Transcription, vol. 2, p. 194, lignes 2 à 7.

[84] Transcription, vol. 2, p. 190, lignes 5 à 17.

[85] Transcription, vol. 2, p. 139, lignes 2 et 8; et de la p. 178, ligne 25 à la p. 179, ligne 15.

[86] Transcription, vol. 2, p. 184, lignes 4 à 16.

[87] Transcription, vol. 1, p. 81, lignes 20 à 27.

[88] L’arrangement entre la société et UPA n’a pas été produit à titre d’élément de preuve.

[89] Transcription, vol. 2, p. 138, lignes 4 à 7.

[90] Dean (Ana’s Care & Home Support) c. M.R.N., 2012 CCI 370, par. 23; Loving Home Care Services Ltd. c. M.R.N., 2014 CCI 71, par. 46; et Wholistic Child and Family Services Inc. c. M.R.N., 2016 CCI 34, par. 24.

[91] Transcription, vol. 1, de la p. 80, ligne 27 à la p. 81, ligne 7.

[92] Transcription, vol. 2, p. 105, lignes 11 à 17. En décrivant la remorque, Peter Skov a indiqué que le bureau était utilisé par le chef de chantier, vraisemblablement Dan Chilton. Ailleurs, M. Chilton était parfois désigné comme le directeur du chantier.

[93] Transcription, vol. 1, p. 42, lignes 20 et 21; et vol. 2, p. 105, lignes 17à 19.

[94] Transcription, vol. 2, p. 137, lignes 16 à 20.

[95] Transcription, vol. 1, p. 42, lignes 18 à 26; et de la p. 43, ligne 26 à la p. 44, ligne 1.

[96] Transcription, vol. 1, p. 43, lignes 2 à 25.

[97] Transcription, vol. 1, p. 42, lignes 2 à 6.

[98] Transcription, vol. 1, p. 42, lignes 8 à 10.

[99] Décision Dynamex Canada Corp. c. M.R.N., 2008 CCI 71, par. 18. Dans l’arrêt City Water International Inc. v. Canada, 2006 CAF 350, par. 26, la Cour d’appel fédérale a adopté un point de vue plus étroit, car elle semblait ne considérer que les frais de fonctionnement d’une automobile.

[100] City Water, ibid., par. 22.

[101] Transcription, vol. 1, de la p. 34, ligne 21 à la p. 35, ligne 6; et p. 37, lignes 8 à 10.

[102] Quinte Children’s Homes Inc. c. M.R.N., 2015 CCI 250, par. 26 et 28. Voir également City Water, précité, note 99, par. 14 et 24; et Hennick v. Canada, (1995) 179 NR 315, 53 ACWS (3d) 1134 (CAF), par. 10 et 14. Pour un point de vue différent, voir Co-Operative Hail Insurance Company Limited v. M.N.R., 2023 CCI 40, par. 38.

[103] City Water, précité, note 99, par. 31.

[104] Voir DHL Express (Canada) Ltd. c. M.R.N., 2005 CCI 178, par. 33.

[105] Transcription, vol. 1, p. 20, lignes 13 à 18; vol. 1, p. 45, lignes 9 à 12; et vol. 1, p. 80, lignes 21 à 26.

[106] Transcription, vol. 1, de la p. 80, ligne 27 à la p. 81, ligne 7; vol. 2, de la p. 178, ligne 25 à la p. 179, ligne 15; et vol. 2, p. 190, lignes 5 à 17.

[107] DHL Express, précité, note 104, par. 32. Voir également Dynamex, précité, note 99, par. 19; et Med Express Inc. c. M.R.N., 2021 CCI 8, par. 13 et 14.

[108] Marbry Distributors Ltd. c. Avrecan International Inc., 1999 BCCA 172, par. 9.

[109] Glimhagen c. GWR Resources Inc., 2017 BCSC 761, par. 44.

[110] Marbry Distributors,précité, note 108, par. 19 et 46; Jacks c. Victoria Amateur Swimming Club, 2005 BCSC 778, par. 12; TCF Ventures Corp. c. The Cambie Malone’s Corporation, 2016 BCSC 1521, par. 53; conf. En partie par 2017 BCCA 129, par. 1, 2 et 10; Pasche c. MDE Enterprises Ltd. et al., 2018 BCSC 701, par. 104, 106, 107 et 110; et Anderson c. M.R.N., 2021 CCI 28, par. 53, 54 et 56.

[111] TCF Ventures (BCSC), ibid., par. 48 et 49.

[112] McKee c. Reid’s Heritage Homes Ltd., 2009 ONCA 916, par. 30, 32 et 34 à 36. La référence à l’arrêt Belton au paragraphe 34 de la citation qui précède renvoie à l’arrêt Belton c. Liberty Insurance Co. of Canada, (2004) 72 OR (3d) 81 (Ont. CA), dans lequel la Cour a recensé cinq principes, inspirés en partie des facteurs de Sagaz, que l’arrêt McKee, au paragraphe 39, résume ainsi :

1. Le mandataire était-il limité exclusivement au service du mandant?

2. Le mandataire était-il assujetti au contrôle du mandant non seulement quant au produit vendu, mais également quant au moment et à l’endroit où il était vendu et à la manière dont il était vendu?

3. Le mandataire détenait-il un investissement ou une participation dans ce que l’on appelle les « outils » se rapportant à son service?

4. Le mandataire assumait-il un risque dans le sens commercial du terme ou, subsidiairement, avait-il relativement à la prestation de son service une attente de profit autre que le versement d’une commission fixe?

5. L’activité du mandataire faisait-elle partie de l’entreprise du mandant pour qui il travaillait? En d’autres termes, à qui appartenait l’entreprise?

 

[113] Pasche, précité, note 110, par. 73 à 74 et 88.

[114] McKee, précité, note 112, par. 34 et 36.

[115] Plus précisément, voir les paragraphes 47 à 84 ci-dessus.

[116] Alinéas 5(1)a), b), d) et e) de la LAE.

[117] Voir le paragraphe 88 et la note de bas de page 110 ci-dessus.

[118] Marbry, précité, note 110, par. 59.

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