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Dossier : 2004-2449(IT)APP

ENTRE :

ANDRÉ LORD,

requérant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

 

Demande entendue le 27 août 2004, à Montréal (Québec).

 

Devant : L'honorable juge Paul Bédard

 

Comparutions :

 

Pour le requérant :

Le requérant lui-même

 

Avocat de l'intimée :

Me Simon Petit

____________________________________________________________________

 

ORDONNANCE

 

          Vu la demande faite afin d’obtenir une ordonnance prolongeant le délai dans lequel un appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1990 peut être interjeté;

 

          La demande est rejetée selon les motifs de l'ordonnance ci-joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour d'octobre 2004.

 

 

 

« Paul Bédard »

Juge Bédard


 

 

 

 

Référence : 2004CCI633

Date : 20041012

Dossier : 2004-2449(IT)APP

 

ENTRE :

ANDRÉ LORD,

requérant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

 

Le juge Bédard

 

[1]     Il s'agit d'une demande faite en vertu du paragraphe 167(5) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi ») en vue d'obtenir une ordonnance portant prorogation du délai à l'intérieur duquel le requérant peut interjeter appel de la décision du ministre du Revenu national (le « ministre »). La Cour doit déterminer si la demande du requérant visant la prorogation du délai d'appel pour l'année d'imposition 1990 est bien fondée.

 

[2]     En date du 28 juin 1994, le ministre a expédié au requérant un avis de nouvelle cotisation pour l'année d'imposition 1990. Le ou vers le 23 septembre 1994, le requérant a signifié au ministre une opposition à l'égard de la nouvelle cotisation datée du 28 juin 1994 pour l'année d'imposition 1990. Par lettre recommandée expédiée le 6 novembre 2003, le ministre a avisé le requérant qu'il confirmait la nouvelle cotisation, datée du 28 juin 1994, pour l'année d'imposition 1990. Le requérant n'a pas interjeté appel auprès de la Cour dans le délai prescrit, qui expirait le 4 février 2004 en ce qui concerne la nouvelle cotisation datée du 28 juin 1994, laquelle a été ratifiée le 6 novembre 2003. Le 31 mai 2004, le requérant a déposé auprès de la Cour une demande de prorogation du délai pour interjeter appel de la nouvelle cotisation du 28 juin 1994 pour l'année d'imposition 1990.

 

[3]     En 1994, le requérant avait retenu les services de Me Sylvain Castonguay pour préparer et signifier des avis d'opposition aux cotisations qui avaient été établies pour les années d'imposition 1990, 1991 et 1992, dont celle établie le 28 juin 1994 pour l'année d'imposition 1990. Ces cotisations avaient été établies relativement à des investissements que le requérant avait faits dans la société FTN enr., une société de recherche et de développement. Lorsqu'il a reçu l'avis du ministre daté du 6 novembre 2003 qui confirmait la nouvelle cotisation du 28 juin 1994 pour l'année 1990, le requérant croyait que Me Castonguay s'occupait toujours de son dossier, et ce, bien qu'il n'eût pas eu de nouvelles de ce dernier depuis 1998. Les seules démarches du requérant entre le 6 novembre 2003 et la fin mars 2004 avaient été les suivantes : il avait téléphoné à Me Castonguay à plusieurs reprises et s'était rendu au bureau de ce dernier à trois reprises sans toutefois avoir pu lui parler ou le rencontrer.

 

[4]     Le requérant a témoigné qu'à la fin de mars 2004, il avait rencontré monsieur Douglas Atherton, un des coordonnateurs d'un groupement d'investisseurs qui participaient aux projets de recherche et de développement. Monsieur Atherton a témoigné qu'il avait alors appris au requérant que Me Castonguay n'agissait plus dans les dossiers des investisseurs et donc n'agissait pas dans le dossier du requérant. Monsieur Atherton avait alors recommandé fortement au requérant de venir à une rencontre des investisseurs qui devait se tenir en avril 2004. Monsieur Atherton a expliqué que, lors de cette rencontre au début d'avril 2004, il avait donné au requérant un modèle d'acte de procédure pour lui permettre de présenter une requête en prorogation de délai. Le requérant a témoigné qu'à la suite de cette rencontre, il était entré en communication avec M. Charles Lemire de la division des oppositions de Shawinigan.

 

[5]     Il convient de souligner que la Cour avait fait parvenir au requérant une copie de la lettre datée du 30 octobre 2002 (pièce I-1) qu'elle avait adressée à Me James Bonhomme et dans laquelle la Cour accusait réception de l'avis de cessation de représentation de Me Bonhomme dans le litige concernant l'année d'imposition 1992. Lorsqu'on l'a interrogé sur les gestes qu'il avait posés à la suite de la réception de cette lettre, le requérant a répondu ainsi[1] :

 

Moi, je ne me rappelle pas d'avoir eu cette lettre-là. De toute façon, maître Bonhomme m'aurait . . . Ça ne me disait rien pour moi. Moi, c'était maître Castonguay que je voulais communiquer avec. »

 

[6]     Le requérant s'est-il conformé au paragraphe 167(5) de la Loi et a-t-il droit à une prorogation du délai pour déposer son avis d'appel? Le paragraphe 167(5) de la Loi se lit comme suit :

 

167(5)

 

            (5) Acceptation de la demande. Il n'est fait droit à la demande que si les conditions suivantes sont réunies :

 

a)         la demande a été présentée dans l'année suivant l'expiration du délai imparti en vertu de l'article 169 pour interjeter appel;

 

b)         le contribuable démontre ce qui suit :

 

(i)         dans le délai par ailleurs imparti pour interjeter appel, il n'a pu ni agir ni charger quelqu'un d'agir en son nom, ou il avait véritablement l'intention d'interjeter appel,

 

(ii)        compte tenu des raisons indiquées dans la demande et des circonstances de l'espèce, il est juste et équitable de faire droit à la demande,

 

(iii)       la demande a été présentée dès que les circonstances le permettaient,

 

(iv)       l'appel est raisonnablement fondé.

 

[7]     Le délai pour interjeter appel en vertu de l'article 169 de la Loi expirait le 4 février 2004. Le requérant avait présenté sa demande en prorogation de délai le 31 mai 2004. La demande a donc été présentée dans l'année suivant l'expiration du délai imparti en vertu de l'article 169 de la Loi pour interjeter appel. Par conséquent, le requérant s'est conformé à l'alinéa 167(5)a) de la Loi.

 

[8]     Avant de faire droit à la demande de prorogation du délai d'appel, la Cour doit être convaincue que, dans le délai imparti pour interjeter appel (en l'espèce ce délai expirait le 4 février 2004), le requérant n'a pu ni agir ni charger quelqu'un d'agir en son nom, ou qu'il avait véritablement l'intention d'interjeter appel. Ces deux conditions apparaissant au sous-alinéa 167(5)b)(i) de la Loi sont disjonctives.

 

[9]     Le requérant avait le fardeau en l'espèce de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu'il avait l'intention d'interjeter appel avant le 4 février 2004.

 

[10]    Le requérant, qui devait démontrer qu'il avait eu l'intention d'interjeter appel dans le délai imparti, a présenté une preuve consistant uniquement en son propre témoignage : d'après ce témoignage, le requérant croyait que Me Castonguay s'occupait toujours de son dossier; le requérant lui avait téléphoné à plusieurs reprises et s'était rendu au bureau de Me Castonguay à trois reprises sans jamais pouvoir lui parler. Comment le requérant pouvait-il penser que cet avocat s'occupait du dossier alors qu'il n'était même pas capable de parler à l'avocat ou de le rencontrer? Je suis d'avis qu'un contribuable le moindrement diligent et prudent doit dans de telles circonstances faire d'autres démarches avant l'expiration du délai imparti. En effet, si un contribuable n'est pas capable d'entrer en communication avec son avocat et qu'il a véritablement l'intention d'interjeter appel, il doit soit vérifier le statut de son avocat auprès du Barreau du Québec, soit envoyer une lettre à son avocat de façon à avoir une preuve documentaire dans son dossier, soit communiquer avec la Cour ou avec les autorités fiscales pour obtenir des renseignements sur son dossier ou sur la façon d'interjeter appel, soit communiquer avec un autre avocat ou avec toute autre personne qui pourrait l'aider. Le requérant n'a posé aucun de ces gestes avant l'expiration du délai imparti. Le comportement du requérant à l'égard de la lettre du 30 octobre 2002 (pièce I-1) démontre clairement son incurie et son manque de diligence. Comment peut-on expliquer autrement le comportement d'un contribuable qui ne fait absolument rien lors qu'on l'avise qu'il n'est plus représenté?

 

[11]    Est-ce que la demande de prorogation a été présentée dès que les circonstances le permettaient? La preuve a révélé que le requérant avait appris à la fin de mars 2004 que son avocat ne le représentait plus, et pourtant, il n'a signifié sa demande de prorogation qu'à la fin du mois de mai 2004, soit deux mois après qu'il eut appris la mauvaise nouvelle. La preuve n'a révélé aucune circonstance particulière qui aurait pu expliquer un tel retard.

 

[12]    Pour ces motifs, je conclus au rejet de la demande de prorogation.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour d'octobre 2004.

 

 

 

« Paul Bédard »

Juge Bédard


 

 

RÉFÉRENCE :

2004CCI633

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2004-2449(IT)APP

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :

André Lord et Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L'AUDIENCE :

Montréal (Québec)

 

DATE DE L'AUDIENCE :

Le 27 août 2004

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR :

L'honorable juge Paul Bédard

 

DATE DE L'ORDONNANCE :

Le 12 octobre 2004

 

COMPARUTIONS :

 

Pour le requérant :

Le requérant lui-même

 

Pour l'intimée :

Me Simon Petit

 

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER:

 

Pour le requérant :

 

Nom :

 

 

Étude :

 

 

Pour l'intimée :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 



[1] Page 20 des notes sténographiques.

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