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Date: 20020125

Dossier: 2000-3233-GST-I

ENTRE :

9001-9159 QUÉBEC INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

La juge Lamarre Proulx, C.C.I.

[1]            Il s'agit d'un appel par voie de la procédure informelle concernant une cotisation pour la période du 1er avril 1994 au 31 mars 1997, en vertu de la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi » ). L'avis de cotisation porte le numéro 03B1372 et est daté du 17 mars 1998.

[2]            La cotisation établit que la taxe nette qui aurait dû être déclarée et payée pour cette période est du montant de 5 947,73 $. Comme des remboursements avaient plutôt été demandés au cours de cette période, les ajustements à apporter à la taxe nette selon la cotisation sont un montant total de taxe nette de 14 294,37 $, des pénalités au montant de 2 373,24 $ et des intérêts au montant de 1 808,70 $.

[3]            La vérificatrice du ministre du Revenu national (le « Ministre » ), madame Colette Lemay a témoigné pour la partie intimée. Elle a témoigné en premier à la demande de la partie appelante.

[4]            La vérificatrice a expliqué que l'appelante est propriétaire d'un dépanneur qui a été acheté en 1994. Selon l'information transmise par l'appelante au Ministre pour les fins de la Loi, la personne contact était un monsieur Noël. La vérificatrice a tenté à deux reprises de le rencontrer au bureau du ministère de novembre 1996 à janvier 1997, mais il ne s'est pas présenté. Elle s'est donc rendue sur les lieux en janvier 1997, après avoir téléphoné pour obtenir les registres comptables. Elle a rencontré monsieur Robert Gervasi, le fils de l'actionnaire principal, qui est monsieur Salvatore Gervasi. On lui a remis une partie des factures d'achat et une partie des rubans de caisse. Elle a demandé de recevoir l'ensemble des documents manquants avant le 15 février 1997. Elle a reçu des factures d'achats pour une année fiscale complète.

[5]            La vérificatrice a alors procédé à une analyse du taux de majoration pour la vente des produits. Elle a demandé à monsieur Robert Gervasi quels étaient les prix de ventes de certains produits dans 14 catégories. Elle avait les prix d'achat, vu qu'elle avait obtenu les factures d'achat. Cette analyse a été produite comme pièce I-4. Elle obtient un taux de majoration de 1,25 p. 100 pour les chips, 1,17 p. 100 pour la bière, 1,28 p. 100 pour le vin, 1,12 p. 100 pour les cigarettes, 1,40 p. 100 pour le chocolat et ainsi de suite pour les autres catégories.

[6]            Elle est arrivée à un taux moyen de 1,31 p. 100. Bien que selon les statistiques du ministère, le taux de majoration moyen d'un dépanneur soit d'au moins 1,25 p. 100, elle a pris dans ce cas, celui de la bière car, dans ce dépanneur, la vente de la bière vaut pour 46 p. 100 de ses ventes. Ce taux de majoration est de 1,17 p. 100.

[7]            La pièce I-3 est la description totale de toutes les factures d'achat qui ont été remises à la vérificatrice pour l'année fiscale 1995-1996, soit du 1er avril 1995 au 31 mars 1996. La pièce I-10 est le même exercice fait pour juillet à octobre 1996.

[8]            La pièce I-8 montre la procédure suivie par la vérificatrice pour l'établissement du montant de taxe pour l'année d'exercice 1994-1995. Elle a calculé les achats des produits taxables à partir des crédits pour intrants réclamés ( « CTIs » ) cette année-là. Ces derniers étaient au montant de 24 040,12 $. Ce montant est l'équivalent de 7 p. 100 payé sur des fournitures taxables. Cela a donné un montant de 343 430,29 $. Elle a déduit les dépenses admissibles ainsi que le stock des marchandises taxables à la fin de l'année selon les états financiers, pour un coût des marchandises vendues taxables de 279 692,54 $. Elle a majoré ce montant de 1,17 p. 100 pour arriver au montant de 327 240,27 $, qui est le montant des ventes taxables. La taxe à percevoir est 7 p. 100 de ce montant, soit 22 906,82 $. Selon sa déclaration, le montant de la taxe perçue est de 19 522,82 $. Ainsi qu'il a été mentionné au début de ce calcul, les intrants réclamés étaient au montant de 24 040,12 $.

[9]            La pièce I-5 est le calcul de la taxe pour l'année 1995-1996. Les achats taxables selon le relevé des factures pour l'année est de 459 660,12 $, majoré de 1,17 p. 100 pour des ventes taxables de 537 802,34 $. Après quelques petits ajustements la taxe qui aurait dû être déclarée est de 37 717,15 $ et les CTIs auxquels l'appelante avait droit étaient de 32 510,34 $. La taxe déclarée a été de 17 958,97 $ et les CTIs réclamés, au montant de 21 788,31 $.

[10]          La pièce I-9 est le calcul de la taxe pour l'année 1996-1997. Le coût des marchandises vendues a été pris aux états financiers, soit 386 630,39 $. Ce montant a été majoré de 1,17 p. 100 pour un montant de ventes taxables de 451 733,01 $. La taxe à percevoir devait être de 31 674,85 $. Les CTIs devraient être au montant de 27 064,13 $. La taxe déclarée fut de 22 704,75 $ et les CTIs réclamés de 48 564,18 $.

[11]          La vérificatrice explique qu'en ce qui concerne la bière, il arrive que des compagnies en approvisionnent les dépanneurs à faible coût dans le but de promouvoir leurs ventes. Cela pourrait faire contrepoids aux bières fournies par le dépanneur pour les activités sportives du voisinage sans majoration de prix.

[12]          Monsieur Salvatore Gervasi a témoigné. Il s'est décrit comme retraité. Il est l'actionnaire principal de l'appelante. Il a relaté que le dépanneur, du nom de Dépanneur Oma's, était situé à Verdun près de l'Hôpital Douglas, un hôpital psychiatrique. Les patients de cet hôpital sont les clients du dépanneur. Monsieur Gervasi a rapporté qu'il y aurait presque à tous les jours des vols. Il a aussi relaté qu'il commanditait des équipes de sport pour près de 15 000 $ chaque année en leur laissant la bière au prix coûtant.

[13]          Monsieur Guy Guertin, comptable agréé, a témoigné pour la partie appelante. Il a été le comptable de l'appelante lors de l'acquisition par cette dernière du dépanneur en 1994. À la suite des premières visites de la vérificatrice, vers juin 1997, l'appelante lui a demandé d'établir ses états financiers.

[14]          Monsieur Guertin explique qu'il ne conteste pas les résultats auxquels en est arrivée la vérificatrice du Ministre en ce qui concerne le coût des marchandises taxables. Cependant en ce qui concerne le montant des ventes taxables, il conteste le taux de majoration. Il commente la pièce I-4, qui est l'étude de la marge de profits sur 14 catégories de produits. Il commente les catégories « bière » , « jus et breuvages » et « produits laitiers » . Il dit qu'une caisse de bière, dont le coût d'achat mentionné est de 19,95 $, devrait plutôt être 20,71 $, pour en arriver à une marge bénéficiaire de 1,12 p. 100. Il dit qu'il a vu quelques factures à ce prix. Il suggère que la marge bénéficiaire pour les jus et breuvages devrait être de 1,21 p. 100 plutôt que 1,44 p. 100. Pour les produits laitiers, la marge devrait être 1,20 p. 100 et non 1,27 p. 100. Sa proposition est que le taux de majoration moyen est de 1,12 p. 100. Lors de son témoignage, il a mentionné que son client lui aurait dit que le taux de majoration était de 1,14 p. 100.

[15]          L'Avis d'appel mentionnait ce qui suit :

...

5.              La vérification ci-dessus mentionnée a amené une augmentation des droits payables de 5 947,73 $, une pénalité de 2 373,24 $ de même que des intérêts de 1 808,70 $ relatés dans un avis de cotisation daté du 30 mars 1998 et portant le numéro EB1372.

6.              Pour procéder à la vérification, la vérificatrice du ministère du Revenu a procédé à un échantillonnage en présumant un taux de profits bruts. Ainsi, en utilisant les taux de profits bruts par les différents produits, elle a multiplié ce taux par les achats pour arriver à des ventes potentielles, selon lesquelles elle a calculé les droits payables.

C. ARGUMENTATION

7.              L'Appelante soumet respectueusement que les taux utilisés par la vérificatrice ne sont pas réels et qu'elle a surestimé lesdits taux.

8.              De plus, en calculant les achats, la vérificatrice a ignoré le fait que l'Appelante subventionnait différents organismes de charité et que certains produits étaient vendus au coût, ce qui a comme conséquence d'augmenter indûment les droits payables.

9.              La vérificatrice a également ignoré le pourcentage de vols qui est un facteur connu dans le genre de commerce opéré par l'Appelante.

10.            L'Appelante soumet que la Cotisation est mal fondée en faits et en droit pour, inter alia, les motifs suivants :

a)              Elle ne reflète en rien les revenus de l'Appelante et les taux utilisés ne reflètent pas la réalité et des écarts importants pour l'ensemble des produits;

b)             On a ignoré l'impact des organisations sans but lucratif;

c)              On a ignoré les vols dans un tel commerce.

...

[16]          Lors de sa plaidoirie, l'avocat de l'appelante a repris les arguments de l'Avis d'appel. Il a fait valoir que le taux de majoration ne devrait être que 1,12 p. 100, tel que suggéré par le comptable.

[17]          L'avocat de l'intimée fait valoir que le prix de la bière tel que suggéré par le comptable n'est corroboré par aucun document. Il en va de même pour les vols allégués. Il n'y a pas de preuve concernant ces vols, comme des rapports de police ou autres documents. Rien n'a été remis à la vérificatrice avant l'audition.

Conclusion

[18]          Lors de son témoignage, monsieur Salvatore Gervasi n'a pas discuté du taux de majoration moyen de son entreprise. Aucune question ne lui a été posée à ce sujet ni concernant la comptabilité de son entreprise. Il est à noter que monsieur Robert Gervasi qui est le gérant de l'entreprise n'est pas venu témoigner.

[19]          Monsieur Guertin dit avoir vu plusieurs factures de caisses d'une certaine bière à 21,70 $ et non à 19,95 $. Pour les jus et breuvages, le taux de majoration auquel il serait arrivé est de 1,21 p. 100 et non de 1,44 p. 100 et pour les produits laitiers, de 1,20 p. 100 au lieu de 1,27 p. 100.

[20]          Le problème avec ces affirmations est qu'elles ne sont appuyées par aucune preuve documentaire. Ni les factures ni un document d'analyse n'ont été produits à l'audience. En fait, ces documents devraient plutôt être montrés à l'autre partie avant l'audience. La Réponse à l'avis d'appel exprimait clairement comment la vérificatrice avait établi le taux de majoration à 1,17 p. 100. Il appartenait à l'appelante d'apporter une preuve satisfaisante à l'encontre de cette position. D'autant plus que cette position paraît fort raisonnable dans les circonstances. Le taux de majoration de 1,17 p. 100 est inférieur au taux le plus bas des statistiques du ministère, qui est de 1,25 p. 100 et concerne le produit qui constitue 46 p. 100 des ventes du dépanneur.

[21]          Comme le montant des crédits pour intrants n'était pas contesté et que seul le montant de la taxe était contesté, il me faut donc, selon la prépondérance de la preuve, rejeter l'appel.

Signé à Ottawa, Canada, ce 25e jour de janvier 2002.

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.

No DU DOSSIER DE LA COUR :        2000-3233(GST)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :                 9001-9159 Québec Inc. et Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                      Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                    le 10 décembre 2001

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :         l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

DATE DU JUGEMENT :                      le 25 janvier 2002

COMPARUTIONS :

Pour l'appelante :                  Me Jacques Matte

Pour l'intimée :                       Me Benoit Denis

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

Pour l'appelante :

                                Nom :       Me Jacques Matte

                                Étude :     Matte Bouchard, avocats

                                                Montréal (Québec)

Pour l'intimé(e) :                    Morris Rosenberg

                                                Sous-procureur général du Canada

                                                Ottawa, Canada

2000-3233(GST)I

ENTRE :

9001-9159 QUÉBEC INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 10 décembre 2001 à Montréal (Québec) par

l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions

Avocat de l'appelante :                                  Me Jacques Matte

Avocat de l'intimée :                                     Me Benoît Denis

JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d'accise dont l'avis de cotisation porte le numéro 03B1372 et est daté du 17 mars 1998 est rejeté, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 25e jour de janvier 2002.

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.


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