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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

1999-1766(IT)I

ENTRE :

DARLENE A. BALDNER,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 19 juin 2000 à Winnipeg (Manitoba), par

l'honorable juge T. O'Connor

Comparutions

Représentant de l'appelante :                          M. David Baldner

Avocate de l'intimée :                                    Me Tracy Harwood-Jones

JUGEMENT

          Les appels des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1993, 1994 et 1995 sont rejetés conformément aux motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de septembre 2000.

« T. O'Connor »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour de novembre 2003.

Isabelle Chénard, réviseure

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

  

Date: 20000905

Dossier: 1999-1766(IT)I

ENTRE :

DARLENE A. BALDNER,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge O'Connor, C.C.I.

[1]      L'appel en l'instance a été entendu à Winnipeg, au Manitoba, le 19 juin 2000. L'appelante était représentée par David Baldner, son agent et son conjoint (le « conjoint » ), qui a également témoigné pour l'appelante.

FAITS :

[2]      Le 16 février 1987, l'appelante a acheté de son conjoint 63 000 actions ordinaires (les « actions » ) de l'entreprise Greenstreet Holdings Ltd. ( « Greenstreet » ) pour un montant de 125 000 $.

[3]      Greenstreet détenait la totalité des actions de Baldner Holdings Ltd., qui à son tour détenait la totalité des actions de R.W. Packaging Ltd.

[4]      L'appelante a financé l'achat des actions au moyen d'un prêt de 125 000 $ consenti par la Banque Canadienne Impériale de Commerce (la « CIBC » ) (le « prêt pour l'achat d'actions » ). Le prêt pour l'achat d'actions a été garanti par une deuxième hypothèque sur la résidence de l'appelante et de son conjoint.

[5]      La résidence était au départ grevée d'une première hypothèque de 250 000 $ consentie par la CIBC.

[6]      Le conjoint a utilisé les 125 000 $ qu'il avait reçus pour les actions afin de ramener le prêt hypothécaire à environ 125 000 $. En fait, une nouvelle hypothèque (le « prêt hypothécaire no 1 » ) a été consentie en 1990 pour une somme d'environ 125 000 $, et probablement que la première hypothèque a été acquittée.

[7]      En 1992, la CIBC a demandé le remboursement de certains prêts personnels et commerciaux ainsi que du prêt pour l'achat d'actions. Le 1er janvier 1993, le conjoint a fait vendre les actifs de R. W. Packaging Ltd. Le produit de la vente (185 000 $) a été utilisé pour rembourser les prêts comme l'exigeait la CIBC, dont le prêt pour l'achat d'actions qui a été remboursé en partie en 1993 et entièrement en 1994.

[8]      L'appelante et son conjoint n'ont pas remboursé le prêt hypothécaire no 1 étant donné que la CIBC ne demandait pas le paiement de cette hypothèque.

[9]      L'appelante et son conjoint étaient très déçus de la CIBC et, par conséquent, ils ont pris des arrangements pour que la CIBC cède le reliquat du prêt hypothécaire no 1 à la Banque Toronto Dominion (la « Banque TD » ). L'appelante est ainsi devenue redevable à la Banque TD d'une somme d'environ 125 000 $ (le « prêt hypothécaire no 2 » ).

[10]     Pendant les années en cause, l'appelante à chercher à réduire les frais d'intérêts des prêts hypothécaires no 1 et no 2.

[11]     Bien que les actifs de Greenstreet et, dans une moindre mesure, quelques investissements se soient transformés en argent comptant, l'appelante détient toujours les actions acquises.

[12]     Les intérêts débiteurs sur le prêt pour l'achat d'actions s'élevaient à 7534 $ pour l'année 1993, et leur déduction a été accordée.

[13]     Les intérêts débiteurs sur le prêt hypothécaire no1 s'élevaient à 5 760 $ en 1993. Les intérêts débiteurs sur le prêt hypothécaire no 1 s'élevaient à 8 106 $ en 1994. En 1995, le total des intérêts débiteurs sur les prêts hypothécaires no 1 et no 2 s'élevaient à 8 398 $. Il n'y a pas eu de nouvelles cotisations pour l'appelante en 1994 et aucun avis d'opposition n'a été présenté par l'appelante en ce qui concerne l'année 1994. Les intérêts débiteurs de 8 106 $ avaient été déduits à tort pour l'année 1994, sur la déclaration du conjoint, et ils ont été refusés.

[14]     Au moyen d'une nouvelle cotisation datée du 19 novembre 1996, le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a rejeté la demande de l'appelante visant la déduction des intérêts suivants, soit 7 534 $ pour l'année 1993 et 8 398 $ pour l'année 1995.

[15]     L'appelante a déposé des avis d'opposition à l'égard de ces nouvelles cotisations.

[16]     Ensuite, le 9 février 1999, le ministre a établi une nouvelle cotisation pour l'année d'imposition 1993 afin d'accorder la déduction de 7 534 $. De plus, le ministre a ratifié la nouvelle cotisation pour l'année 1995 au moyen d'un avis de ratification daté du 9 février 1999.

OBSERVATIONS :

[17]     Les observations de l'intimée et de l'appelante se lisent en partie comme suit :

                        [TRADUCTION]

          Me HARWOOD-JONES (Avocate de l'intimée) :

Malgré certains témoignages longs et parfois confus, je crois que les faits relatifs à la présente affaire ne sont pas si complexes qu'ils semblent.

Nous nous trouvons devant une situation où Mme Baldner avait à son nom les deux prêts dont nous parlons; un de ces prêts était lié aux actions qu'elle a achetées de l'entreprise Greenstreet, et ... elle avait légitimement droit à une déduction d'intérêts, et le ministre lui a accordé cette déduction.

L'autre prêt était un prêt hypothécaire ou un prêt personnel obtenu pour l'achat de sa résidence personnelle. Ces faits ne sont pas en litige. Je crois que personne ne les conteste.

Finalement, la CIBC a rappelé le prêt lié aux actions. En d'autres termes, la CIBC exigeait qu'elle rembourse ce prêt. Et M. Baldner ... a vendu les actifs de son entreprise et reçu, je crois que c'était 185 000 $, ou quelque chose du genre, du produit de la vente, dont il a utilisé une partie pour rembourser le prêt pour l'achat d'actions de Mme Baldner dont la CIBC exigeait le remboursement.

Le prêt hypothécaire, le prêt qui avait été accordé pour l'achat de la maison, existait toujours. Ce prêt n'a pas été remboursé...

Le prêt pour l'achat d'actions était également garanti par la résidence, mais ce prêt a été entièrement remboursé. Le prêt hypothécaire existait toujours, la nature et le caractère de celui-ci n'avaient pas changé.

Toutefois, étant donné que le prêt à l'entreprise a été rappelé et que Mme Baldner avait obtenu la déduction d'intérêts relativement à ce prêt, mais étant donné que ce prêt n'existait plus, ayant été remboursé par M. Baldner, Mme Baldner veut aujourd'hui demander une déduction d'intérêt pour le prêt hypothécaire.

La position du ministre est, bien sûr, que ce prêt hypothécaire n'a jamais été utilisé afin de tirer un revenu. Il a été utilisé pour acheter la résidence personnelle. Et c'est évidemment la question en litige dans la présente affaire.

Sauf à l'alinéa 20(1)c) de la Loi, ... aucune déduction n'est accordée en ce qui concerne des intérêts, mais le paragraphe 20(1) accorde au contribuable une déduction d'intérêts ou, veuillez m'excusez, une déduction en ce qui concerne une somme qui se rapporte entièrement à, et ensuite nous faisons un saut à l'alinéa c),

[...] la moins élevée d'une somme payée au cours de l'année ou payable pour l'année [...] en exécution d'une obligation légale de verser des intérêts sur de l'argent emprunté et utilisé en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien.

Cette disposition a fait l'objet d'un commentaire de la Cour suprême du Canada...

[Bronfman Trust c. La Reine, [1987] 1 R.S.C. 32] est une affaire dans laquelle la fiducie avait emprunté des fonds afin de faire des prélèvements sur le capital pour les verser à la bénéficiaire de la fiducie. L'emprunt des fonds - le versement de capital ne visait la production d'un revenu. L'objectif était de remettre une certaine somme au bénéficiaire.

La fiducie a demandé une déduction d'intérêts étant donné que l'emprunt de ces fonds permettait à la fiducie de conserver un actif qui produisait un revenu dans le portefeuille de la fiducie...

La Cour suprême n'a pas accordé la déduction parce que les fonds empruntés n'ont pas été utilisés pour produire un revenu, mais plutôt pour faire le paiement à la bénéficiaire.

Le juge en chef Dixon, tel était alors son titre, a également fait de nombreux commentaires qui sont pertinents à la présente affaire. Je les ai soulignés et annotés.

Au paragraphe 20, qui se trouve à la page 8 de la décision, - j'ai fourni une version abrégée à M. le juge ainsi qu'à M. Baldner - on trouve un nombre de commentaires qui sont, selon les observations du ministre, importants dans la présente affaire.

[TRADUCTION]

Il est important de se rappeler que l'objectif de la déduction d'intérêts est de favoriser l'accumulation de capitaux productifs de revenus imposables.

           

            La Cour suprême nous rappelle également que :

Ce ne sont pas tous les intérêts qui sont déductibles,

et l'intérêt sur un emprunt utilisé à des fins non productives de revenu, telles que la consommation personnelle, ne constitue pas un intérêt déductible.

            La Cour indique que :

La déduction prévue par la loi exige donc qu'on détermine si l'argent emprunté a été utilisé en vue de tirer un revenu imposable d'une entreprise ou d'un bien, ce qui constitue une utilisation admissible, ou s'il a été affecté à quelqu'une des possibles utilisations inadmissibles.

Et comme l'affirme la Cour :

Il incombe au contribuable d'établir que les fonds empruntés ont été utilisés à une fin identifiable ouvrant droit à la déduction.

En d'autres termes, le contribuable doit démontrer que les fonds, et cela peut se faire en recensant les différentes opérations, sont utilisés à une fin admissible, en d'autres mots, à des fins productives de revenus.

...

            Au paragraphe 28 de la décision, qui est à la page 9 de la copie que j'ai fournie, on trouve également l'observation du ministre, qui est très importante dans la présente affaire. Comme vous pouvez le voir dans la partie soulignée, la Cour déclare :

[...] ni la Loi de l'impôt sur le revenu ni la jurisprudence n'autorisent les tribunaux à ne pas tenir compte de l'usage direct qu'un contribuable fait d'argent emprunté.

Cette déclaration est très importante dans la présente affaire parce que l'argent, le prêt hypothécaire, a été utilisé directement pour l'achat de la résidence personnelle de la contribuable ...

            Toutefois, afin de poursuivre l'examen de cette affaire, au paragraphe 31, qui se trouve à la page 10, la Cour indique ce qui suit :

[...] on a conclu à maintes reprises qu'un particulier ne peut pas déduire l'intérêt payé sur l'hypothèque grevant une habitation personnelle, même s'il allègue que l'emprunt lui a évité d'avoir à vendre des placements productifs de revenu.

ce qui ressemble beaucoup à la situation que nous avons ici.

            Dans cette affaire, la question en litige est, bien sûr, que le produit de la vente des actifs a été utilisé pour rembourser le prêt pour l'achat d'actions, contrairement au prêt hypothécaire.

            Finalement, au paragraphe 40, qui se trouve à la page 12 de cet arrêt, la Cour fait l'affirmation suivante :

[...] le contribuable doit convaincre la Cour que la fin réelle qu'il visait en utilisant les fonds était de gagner un revenu.

            L'affaire Bronfman a été, pour ainsi dire, réaffirmée par la Cour suprême dans l'arrêt Tennant c. La Reine, (ministre du Revenu national - M.R.N.) [1996] 1 R.C.S. 305, que j'ai également fourni.

            Les faits essentiels de cette affaire sont qu'un contribuable a utilisé un prêt d'un million de dollars afin d'acquérir des actions et a ensuite effectué un refinancement en vertu de l'article 85 et obtenu des actions d'une entreprise différente qui ne valaient que

1 000 $. Le ministre a permis la déduction seulement jusqu'à concurrence de la valeur des actions de remplacement.

            Cet appel a été accueilli parce que les actions de remplacement étaient suffisamment liées au prêt initial...

            La Cour suprême nous dit que pour obtenir une déduction d'intérêts, nous devons établir un lien dont l'utilisation actuelle est admissible, le produit de la disposition du bien dont l'utilisation initiale était admissible, si c'est l'option qui est choisie, et l'argent qui a été emprunté pour acheter le bien dont l'utilisation initiale était admissible.

            Dans cette affaire, le contribuable pouvait établir le lien avec ces fonds initiaux qui avaient été utilisés pour produire un revenu. Il y avait une option que nous pouvions suivre.

            Au fond, le problème dans la présente affaire ... est que ces fonds sur le prêt hypothécaire n'ont pas été empruntés, comme M. Baldner l'a admis dans son témoignage, afin de produire un revenu. Ils ont été empruntés pour acheter une résidence principale, ce qui n'est pas une activité qui produit un revenu.

            Il ne s'agit pas d'une situation où les fonds ont été ensuite utilisés pour rembourser un prêt à l'entreprise ou quelque chose comme ça. En fait, cette hypothèque, la nature de cette hypothèque n'a jamais changé, et je crois que c'est là le problème auquel fait face Mme Baldner aujourd'hui.

            Lorsque le prêt à l'entreprise a été rappelé, M. Baldner l'a remboursé, mais les fonds hypothécaires étaient quand même utilisés pour la résidence. Ils n'ont pas été utilisés à d'autres fins.

            En fait, nous avons ici une situation où la contribuable affirme qu'étant donné qu'elle ne peut obtenir la déduction d'intérêts pour le prêt à l'entreprise, parce qu'il a été remboursé, elle voudrait que la déduction d'intérêts soit appliquée à un différent prêt, mais le problème c'est que ce prêt n'a jamais été utilisé pour produire un revenu et que cette utilisation est une condition essentielle ...

            Ainsi, Mme Baldner veut obtenir la déduction d'intérêts parce que si la banque n'avait pas, à ce moment-là, rappelé le prêt à l'entreprise, supposant que M. Baldner a vendu les actifs de l'entreprise, et nous avons entendu un témoignage selon lequel il a vendu les actifs de l'entreprise parce qu'on avait rappelé les prêts, mais ce que je crois que l'on suggère, c'est que si l'on n'avait pas exigé le remboursement des prêts à l'entreprise et que la vente avait eu lieu, alors ces fonds auraient été utilisés afin de rembourser le prêt hypothécaire, mais qu'il n'en a simplement pas eu l'occasion.

            Mais encore,... nous devons examiner les faits. En réalité, le prêt à l'entreprise a été remboursé. L'hypothèque est demeurée intacte et n'a jamais été utilisée à des fins commerciales.

            Il n'existe aucun lien entre le produit de l'hypothèque ou le prêt hypothécaire et une activité productrice de revenu. Ce n'est pas un type d'intérêt déductible. Il s'agit d'un prêt personnel qui a été utilisé, et qui continue de l'être en tout temps, dans le seul but d'acquérir la résidence.

            M. Baldner a indiqué dans son témoignage qu'il avait remboursé le prêt pour l'achat d'actions afin de protéger l'intérêt sur la résidence, parce que le prêt pour l'achat d'actions était également garanti par une hypothèque sur la résidence, une deuxième hypothèque, mais le seul fait que le prêt pour l'achat d'actions était un prêt hypothécaire de deuxième rang ne signifie pas que la première hypothèque avait été prise à des fins commerciales. Il s'agit d'un type de prêt distinct servant des fins distinctes.

            Je ne fais que spéculer en ce moment, mais il se peut que si la structure avait été différente, c'est-à-dire que si le produit de la vente de l'entreprise avait été utilisé afin de rembourser le prêt hypothécaire et qu'ensuite un autre prêt avait été obtenu afin de rembourser le prêt pour l'achat d'actions ou quelque chose du genre, nous serions peut-être devant une situation où il serait possible d'établir un lien, mais il n'en existe simplement pas. Nous avons ici deux situations de prêt tout à fait différentes.

            Ce sont là mes observations en ce qui concerne l'importante question de savoir si la déduction d'intérêts est accordée, mais j'ai quelques commentaires à faire relativement à la validité de l'appel lié à l'année 1994.

            Ainsi, ce que je comprends des documents que j'ai présentés et du témoignage de M. Baldner, c'est que l'année d'imposition 1994 a tout d'abord fait l'objet d'une cotisation et la cotisation accordée comme on l'a indiqué le 26 mai 1995, et cela est prouvé par l'avis de cotisation déposé sous la cote R-4.

            L'avis d'opposition officiel, relativement à l'année 1994, a été déposé le 20 mars 1997; il se trouve dans le paquet d'avis d'opposition déposés sous la cote R-3.

            M. Baldner a témoigné que le 30 janvier 1997, il a écrit une lettre à Revenu Canada afin de discuter de ce concept voulant qu'il puisse transférer la déduction qui lui était accordée à sa conjointe; de plus, la lettre de Scarrow et Donald, déposée sous la cote A-9, indique ce qui suit :

          [TRADUCTION]

En janvier 1997, notre client avait écrit à Revenu Canada et avait compris que vous accepteriez cette lettre à titre d'avis d'opposition.

Il s'agit d'une lettre datée du 28 février 1997.

            Ainsi ce que nous avons est un avis de cotisation de 1995, de mai 1995, pas une nouvelle cotisation, mais une demande au début de 1997 et ensuite un avis d'opposition après cette demande.

            C'est après cela que le ministre a indiqué qu'il n'allait pas permettre que cela se fasse, ...

...

            L'article 165 de la Loi de l'impôt sur le revenu exige qu'un avis d'opposition soit déposé dans les 90 jours suivant la date de mise à la poste de l'avis de cotisation. Évidemment, un contribuable peut obtenir une prorogation de délai...

            La demande d'une prorogation de délai peut être présentée en vertu du paragraphe 166.1(7), c'est-à-dire 1(7), mais cet article ne permet pas, excusez-moi, il s'agit de l'article qui exclut l'approbation d'une demande à moins que celle-ci ne soit présentée dans l'année suivant l'expiration du délai par ailleurs imparti pour signifier un avis d'opposition, et c'est de là, bien sûr, que nous avons pris nos renseignements en ce qui concerne une année et 90 jours.

            Dans la présente affaire, la date limite était le 26 août 1996 ou aux alentours de cette date. C'est donc avant que M. Baldner n'ait indiqué à Revenu Canada qu'il souhaitait que la déduction qui lui était accordée soit transférée à Mme Baldner, une demande qui, finalement, n'a pas été accordée, et qui serait refusée de toute façon, pour les mêmes raisons que celles pour lesquelles les demandes pour les années 1993 et 1995 ont été rejetées, parce que la position du ministre consiste à dire qu'il s'agit d'un prêt hypothécaire sans but commercial et qu'ainsi, les exigences de l'alinéa 20(1)c) ne sont pas respectées.

            Le ministre, bien sûr, ne pourrait approuver une prorogation de délai conformément au paragraphe 166.1(7) et, selon ce que je comprends et compte tenu des éléments de preuve présentés, aucune demande de prorogation de délai n'a été présentée au ministre.

            De toute façon, le ministre ne pourrait approuver une telle demande et il va de soi que la présente cour est liée par les mêmes contraintes bien que ce soit en vertu d'un article différent de la Loi.

            Mais de toute façon, l'année et les 90 jours sont passés pour l'année 1994, et il ne peut donc tout simplement pas y avoir d'appel parce que, évidemment, afin de pouvoir interjeter appel, un avis d'opposition valide doit avoir été déposé.

...

            MONSIEUR LE JUGE : Bon, une question seulement. Que pensez-vous des conseils qu'a apparemment donnés Revenu Canada en ce qui concerne la primauté du fond sur la forme?

            Me HARWOOD-JONES : Bien, évidemment, il s'agit d'une question juridique, à savoir si un prêt répondra aux exigences de l'alinéa 20(1)c), et Revenu Canada, bien sûr, ne peut être tenu responsable de l'avis juridique qu'il a fourni.

            La preuve en l'instance à cet égard est assez vague. Nous avons les notes qui indiquent en fait que Revenu Canada, ou plutôt le comptable semble reconnaître que, dans l'ensemble, ce prêt hypothécaire ne répondrait pas aux exigences de l'alinéa 20(1)c).

            Si Revenu Canada a réellement dit d'aller de l'avant et de faire la demande, alors c'est regrettable, mais il ne peut y avoir préclusion. Bien sûr, il ne peut y avoir préclusion contre la Couronne...

            MONSIEUR BALDNER : J'aimerais seulement faire quelques commentaires en ce qui concerne la conclusion.

            Si je peux commencer en disant que, vous savez, vous dites que vous pourriez entendre quelque chose de différent de la part de M. Baldner, et lorsque vous dites, vous savez, « il semble qu'ils veulent obtenir une déduction de toute façon alors que l'hypothèque n'avait aucune fin commerciale » , je crois que le - premièrement nous ne contestons pas le fait que la première hypothèque n'avait rien à voir avec le prêt pour l'achat d'actions. C'était le cas.

            Nous avons pris une hypothèque que - nous avions une hypothèque sur notre maison afin d'en financer l'achat et une deuxième hypothèque afin de financer l'achat des actions de Green Street Holdings, et nous ne contestons pas cela parce que ce sont les faits.

            Toutefois, si j'avais pu changer les événements d'une façon ou d'une autre, je l'aurais fait. Si j'avais pu payer l'hypothèque et ne pas rembourser le prêt pour l'achat d'actions, je l'aurais fait. Ces choix ne s'offraient pas à moi...

            L'hypothèque, on a suggéré que l'hypothèque n'avait jamais été utilisée aux fins de tirer un revenu de placement. Pas au départ, mais cela a été le cas par la suite, parce qu'après, après que la CIBC eut demandé le remboursement du prêt, le prêt pour l'achat d'actions, nous soutenons qu'à partir de ce moment, étant donné que nous avions les fonds pour rembourser l'hypothèque, mais que nous n'étions pas autorisés à le faire, nous demandons à la Cour de nous permettre de déduire l'intérêt hypothécaire sur les première et deuxième hypothèques, qui étaient les hypothèques de la CIBC et de la Banque TD sur la résidence.

            Nous faisons cette demande parce que, même si au départ le prêt hypothécaire n'a pas été contracté à cette fin, nous avions encore les actions. Nous avions toujours le titre de placement. Nous n'avions pas le prêt de la banque parce que celle-ci exigeait que nous le remboursions, mais nous avions encore l'hypothèque.

            Ainsi, bien que nous ne contestions pas le fait que le prêt n'a pas été contracté dès le début, il est certain que lorsque la CIBC a demandé le remboursement du prêt pour l'achat d'actions, nous avons vérifié auprès de Revenu Canada qui nous a informés que nous devrions, ou du moins qu'il était raisonnable d'adopter une position fondée sur le principe de la primauté du fond sur la forme...

            Pour ce qui est de remonter jusqu'à l'origine des fonds et d'établir leur admissibilité et quant au fait qu'il devrait y avoir un lien direct, je voudrais souligner qu'il y a un lien direct et que ce lien direct consiste en ce qu'au départ, nous avions un prêt pour l'achat d'actions dont la CIBC a demandé le remboursement. Nous avons donc transféré la déduction à un prêt dont la garantie était la même, les deux prêts étaient garantis par notre résidence, et les montants étaient à peu près les mêmes.

            Encore une fois, il s'agit du principe de la primauté du fond sur la forme parce que ce n'est pas comme si ma conjointe avait vendu ses actions. Elle n'a pas vendu ses actions. Elle avait toujours l'investissement initial, les actifs ou actions d'origine qui avaient été acquis avec le produit du prêt original pour l'achat d'actions.

            Le fait qu'il devrait y avoir un objectif de bonne foi visant la production d'un revenu, bien, sûrement lorsque le prêt pour l'achat d'actions a dû été remboursé, pour nous, il s'agissait d'un objectif de bonne foi relativement à l'hypothèque, encore une fois en raison du fait que nous n'avions pas le choix. Nous avons dû rembourser le prêt pour l'achat d'actions. Nous aurions remboursé le prêt hypothécaire parce qu'il n'était pas déductible...

            Selon moi, ces frais financiers devraient être accordés pour les raisons suivantes :

            La contribuable n'avait aucun contrôle sur le fait que la CIBC rappelait son prêt pour l'achat d'actions. La CIBC a exigé le remboursement de son prêt conjointement avec une marge de crédit pour le compte de R.W. Packaging Ltd.

            Le prêt pour l'achat d'actions ne pouvait pas être refinancé parce R.W. constituait le principal actif détenu par Baldner Holdings, qui était la propriété exclusive de Green Street Holdings Inc.

            Le prêt pour l'achat d'actions représentait 7 p. 100 des actions en circulation de Green Street Inc., et Darlene détient encore ces actions à ce jour.

            Parce qu'il était préoccupé par le fait qu'il était obligé de rembourser un prêt pour l'achat d'actions déductible, David Baldner a demandé à Doug Smith, du Groupe Scarrow et Donald, de vérifier auprès de Revenu Canada si le contribuable pourrait remplacer l'intérêt sur le prêt pour l'achat d'actions par celui sur la première hypothèque.

            Comme l'a indiqué Doug Smith aujourd'hui, les montants du prêt pour l'achat d'actions et du prêt hypothécaire étaient à peu près les mêmes, et il a expliqué cela à Revenu Canada, de même que le fait que les deux prêts étaient garantis par une hypothèque sur la résidence de la contribuable et de son conjoint.

            Revenu Canada a indiqué à Doug Smith que cela était raisonnable en utilisant un argument fondé sur le principe de primauté du fond sur la forme juridique. Selon cette discussion, selon, excusez-moi, selon cette discussion, les déductions ont été acceptées jusqu'à ce que Revenu Canada refuse d'accorder les frais financiers.

            Et nous somme d'avis que l'utilisation du premier prêt hypothécaire, et plus tard du deuxième prêt hypothécaire, de la Banque Toronto Dominion, est raisonnable, et je suis admissible dans les circonstances parce que je comprends la position de Revenu Canada, mais je crois qu'étant donné les circonstances, ma conjointe et moi-même croyons qu'il est raisonnable de remplacer le prêt pour l'achat d'actions par le prêt hypothécaire étant donné les circonstances auxquelles était confrontée la contribuable.

            Je crois donc que cela constitue l'essentiel du principe de la primauté du fond sur la forme juridique...

De toute façon, je crois, pour conclure, je crois que, de notre point de vue, il s'agit vraiment d'une question de primauté du fond sur la forme juridique. Nous ne contestons pas le fait que l'hypothèque - en fait, nous sommes d'accord qu'au départ, le prêt hypothécaire avait comme objectif l'acquisition d'actions, mais selon les événements qui se sont produits, nous croyons qu'il est raisonnable que nous puissions déduire le prêt hypothécaire étant donné que la CIBC exigeait le remboursement du prêt pour l'achat d'actions, mais n'exigeait pas le remboursement du prêt hypothécaire, que les montants de ces prêts étaient les mêmes et étaient garantis par les mêmes biens et que ma conjointe détient encore aujourd'hui les actions.

            J'aimerais également souligner à la Cour que le prêt hypothécaire a été remboursé après cela. Ainsi, si cela ne s'était pas produit, si la CIBC n'avait pas exigé le remboursement de nos prêts, ce prêt serait encore actif aujourd'hui. Nous aurions déduit les intérêts et nous aurions probablement eu droit à cette déduction pendant nombre d'années à venir.

            Mais nous ne pourrons pas - vous savez, Revenu Canada alors aurait - il y aurait eu des frais pour Revenu Canada ou alors il n'aurait pas... vous savez ce que je veux dire : C'est que nous contestons les années 1993, 1994 et 1995, mais le fait est que cela aurait duré longtemps.

            Nous n'avons plus d'hypothèque. Nous avons tout remboursé. Nous ne faisons pas de demande pour le prêt hypothécaire.

            Alors, Revenu Canada est présentement gagnant parce que la CIBC a soudainement rappelé ce prêt, parce que tout est payé maintenant.

            Par conséquent, nous demandons seulement qu'en raison des circonstances, il soit reconnu qu'étant donné que nous n'avions aucun contrôle sur la CIBC et que celle-ci exigeait le remboursement de ce prêt, nommément le prêt pour l'achat d'actions, que vous reconnaissiez la validité du prêt hypothécaire, qui, à l'origine, n'avait pas été contracté à cette fin, mais qui aurait été remboursé, ou payé, et, vous savez... accordez-nous cela pour la période en cause.

ANALYSE ET DÉCISION :

[18]     Selon moi, la position du ministre est correcte. L'intérêt sur les prêts hypothécaires n'est pas déductible, étant donné que les fonds n'ont pas été empruntés dans le but de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien comme le précise l'alinéa 20(1)c) de la Loi de l'impôt sur le revenu. Le fait que l'appelante et son conjoint préféreraient avoir remboursé les prêts hypothécaires sans intérêts déductibles plutôt que d'avoir remboursé le prêt pour l'achat d'actions, résulte de ce que la CIBC a rappelé le prêt pour l'achat d'actions et les prêts commerciaux et personnels. Toutefois, cela n'est pas suffisant pour permettre de remonter à la source de l'intérêt sur les prêts hypothécaires et pour que cet intérêt soit, en fait, considéré comme un intérêt sur le prêt pour l'achat d'actions. Le fait que les montants du prêt hypothécaire et du prêt pour l'achat d'actions étaient d'environ 125 000 $ chacun et que le prêt pour l'achat d'actions était garanti par la résidence tout comme le prêt hypothécaire, je le répète, n'est pas suffisant pour autoriser la déduction d'intérêts sur les prêts hypothécaires. En ce qui concerne les observations de l'appelante et l'argument relatif à la primauté du fond sur la forme, il ne peut y avoir aucune préclusion contre la Couronne relativement à l'avis juridique donné par certaines personnes à Revenu Canada. Ce principe est bien établi.

[19]     Étant donné que l'intérêt sur les prêts hypothécaires n'a pas été accordé, je n'ai pas à essayer de déterminer qui avait le droit de déduire cet intérêt pour l'année 1994 et je n'ai pas à examiner le fait qu'aucun avis d'opposition n'a été déposé par l'appelante pour l'année 1994 ou à déterminer si toute pièce de correspondance pourrait être considérée comme un avis d'opposition, mais, de toute façon, je le répète, je crois que les observations de l'avocate de l'intimée sont correctes. Étant donné qu'aucun avis d'opposition n'a été présenté pour l'année 1994, aucun appel ne peut être présenté devant la Cour pour l'année en question.


[20]     Par conséquent, les appels sont rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de septembre 2000.

« T. O'Connor »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour de novembre 2003.

Isabelle Chénard, réviseure

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