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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

98-2182(IT)G

ENTRE :

722540 ONTARIO INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appels entendus sur preuve commune avec les appels de Novopharm Limited (98-2422(IT)G), les 19, 20, 21 et 23 juin 2000 à Toronto (Ontario), le 7 juillet 2000 à Vancouver (Colombie-Britannique) et le 19 juillet 2000 à Toronto (Ontario), par

l'honorable juge E. A. Bowie

Comparutions

Avocats de l'appelante :    Me Peter K. Guselle et Me Kay W. Leung

Avocat de l'intimée :         Me Luther P. Chambers, c.r.

JUGEMENT

          Les appels interjetés à l'égard des cotisations établies en application de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1988, 1990 et 1991 sont rejetés.

L'intimée a droit à un seul mémoire de frais.

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de décembre 2001.

« E. A. Bowie »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 2e jour d'avril 2003.

Mario Lagacé, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

98-2422(IT)G

ENTRE :

NOVOPHARM LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appels entendus sur preuve commune avec les appels de 722540 Ontario Inc.(98-2182(IT)G), les 19, 20, 21 et 23 juin 2000 à Toronto (Ontario), le 7 juillet 2000 à Vancouver (Colombie-Britannique) et le 19 juillet 2000 à Toronto (Ontario), par

l'honorable juge E. A. Bowie

Comparutions

Avocats de l'appelante :    Me Peter K. Guselle et Me Kay W. Leung

Avocat de l'intimée :         Me Luther P. Chambers, c.r.

JUGEMENT

          Les appels interjetés à l'égard des cotisations établies en application de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1987 et 1988 sont rejetés.

L'intimée a droit à un seul mémoire de frais.

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de décembre 2001.

« E. A. Bowie »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 2e jour d'avril 2003.

Mario Lagacé, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Date: 20011220

Dossier: 98-2182(IT)G

ENTRE :

722540 ONTARIO INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

98-2422(IT)G

ET ENTRE :

NOVOPHARM LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Bowie

[1]      Novopharm Limited ( « Novopharm » ) interjette appel à l'encontre de cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ) pour ses années d'imposition 1987 et 1988. Par ces cotisations, le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a refusé des déductions d'un montant total de 10 727 914 $ pour 1987 et de 9 579 540 $ pour 1988 que Novopharm avait indiquées dans le calcul de son revenu.

[2]      La 722540 Ontario Inc. ( « 540 » ) interjette appel à l'encontre d'une détermination de sa perte autre qu'en capital pour l'année d'imposition 1988 faite en vertu du paragraphe 152(1.1) de la Loi. En déterminant que la perte autre qu'en capital était nulle, le ministre a refusé la déduction de la part de la 540 sur les pertes déclarées de 270 921 $ de la Millbank Limited Partnership ( « Millbank » ). Une question en litige est de savoir si notre cour est valablement saisie de cet appel. Le ministre dit que non, parce qu'un avis d'opposition n'a pas été déposé en vertu de l'article 165 de la Loi. La 540 fait également appel de cotisations établies à son égard pour 1990 et 1991, soutenant qu'elle est en droit de reporter sur ces deux années-là une perte autre qu'en capital de 1988.

[3]      Les dépenses non admises par le ministre sont des frais d'intérêts sur certains prêts et, pour l'année 1987 de Novopharm, des frais de financement de 500 000 $ et des frais de consultation de 200 000 $ payés, dans les deux cas, relativement à l'un de ces prêts.

Faits

[4]      Les événements donnant lieu aux appels sont une série bien orchestrée d'opérations conçues pour permettre à Novopharm de tirer parti des pertes accumulées - de 11 634 134 $ - et des frais d'exploration et d'aménagement au Canada ( « FEAC » ) inutilisés - d'un montant total de 10 724 370 $ - d'une société appelée Royal Scot Resources Ltd. ( « Royal Scot » ), qui avait en fait été dissoute. Par souci de commodité, les pertes et les FEAC seront collectivement appelés tout simplement les pertes. La base des appels est que la question qui m'est soumise est de savoir si les appelantes ont droit aux déductions concernant les frais d'intérêts et les autres coûts d'emprunt qu'elles ont indiqués. Dans l'affirmative, les montants indiqués sont les montants exacts; dans la négative, les cotisations qui ont été établies doivent être confirmées. On ne conteste pas le fait que les opérations que je décrirai ont eu lieu. La Couronne n'allègue pas l'existence d'un trompe-l'oeil et n'invoque pas la doctrine des opérations incomplètes.

[5]      Novopharm est une société très rentable dont l'entreprise principale consiste à fabriquer et à distribuer des produits pharmaceutiques génériques. Elle a en outre des investissements dans l'immobilier, ainsi que dans divers autres domaines. M. Leslie Dan a créé la société en 1965, et lui et sa famille la contrôlent encore. M. Dan est président-directeur général. En 1986, le profit avant impôt a atteint presque 14 millions de dollars. En 1987 et en 1988, il a été de 9,2 millions et de 10,3 millions respectivement, même après la déduction des montants qui sont en litige dans ces appels. Il est clair que Novopharm était un candidat tout désigné pour l'utilisation d'un plan complexe d'évitement fiscal. En 1987, un tel plan a été proposé à M. Dan par Adrien Boulanger, comptable dans le cabinet Laventhal & Howarth ( « L & H » ), et Leslie Dollinger, avocat dans le cabinet Fogler, Rubinoff.

[6]      Lors de son témoignage, M. Dan faisait un gros effort pour donner l'impression que la proposition que MM. Boulanger et Dollinger lui avaient présentée n'était pour lui qu'un autre marché, à savoir un investissement qu'il faisait pour de bonnes raisons commerciales, c'est-à-dire parce qu'il s'agissait d'un investissement susceptible de donner un rendement satisfaisant pour sa société. Se fondant là-dessus, et comme on l'avait assuré de la légalité de ce plan, il avait accepté que Novopharm y participe. Il a affirmé qu'il ne comprenait pas les détails de ce plan ou qu'il ne comprenait pas que Novopharm en bénéficierait simplement parce qu'elle pourrait déduire de ses profits les pertes d'une autre société - qui ne lui était absolument pas liée - et payer ainsi moins d'impôt sur le revenu. Il manque de franchise à cet égard. M. Dan est un homme d'affaires très perspicace, expérimenté et prospère. Il évalue lui-même des occasions d'investissement en se basant sur sa propre analyse. Son témoignage présentait un certain nombre d'incohérences et, comme par hasard, sa mémoire lui a fait défaut plus d'une fois. Je n'ai aucun doute qu'il comprenait parfaitement bien que ce que préconisaient MM. Boulanger et Dollinger était un stratagème n'ayant d'autre but que de faire en sorte que Novopharm puisse réduire de façon factice son revenu imposable en se plaçant dans une situation lui permettant d'utiliser, à un coût d'environ 3,5 millions de dollars, les pertes accumulées d'une autre société d'un montant total d'environ 20 millions de dollars.

[7]      Je conclus de la preuve présentée par M. Boulanger et par M. Dan que les opérations que je décrirai[1] avaient été entreprises à la condition qu'elles se déroulent toutes de la façon dont elles se sont en fait déroulées; comme l'a dit M. Dan au cours de son témoignage, il s'agissait d'un accord global. Je conclus également que M. Dan a, au nom de Novopharm, autorisé ces opérations simplement parce qu'il croyait que Novopharm obtiendrait ainsi une réduction d'impôt sur le revenu de l'ordre de 20 millions de dollars, à un coût d'environ 3,5 millions de dollars. Ces opérations ne servaient à aucune autre fin ou n'étaient destinées à servir à aucune autre fin.

[8]      Les appelantes ont présenté des éléments de preuve pour montrer que, en 1988 et 1989 et jusqu'en 1997, Millbank était un instrument d'investissement qui produisait pour les appelantes un revenu en dividendes et en intérêts grâce à son portefeuille de titres négociables. Toutefois, ce revenu provenait non pas des opérations que concernent les présents appels, mais d'injections de capital n'ayant absolument aucun rapport avec lesdites opérations.

[9]      Une fois approuvée par M. Dan la mise en oeuvre des opérations que je m'apprête à décrire, M. Boulanger a, par l'intermédiaire d'un associé à lui, Steven Kerr, pris des mesures pour trouver une société appropriée ayant des pertes accumulées d'environ 20 millions de dollars. M. Kerr a fait cela avec l'aide de Kenneth Taves, un avocat de Vancouver faisant partie du cabinet Farris, Vaughan, Wills & Murphy. Royal Scot était une société qui avait des pertes totalisant environ 22,3 millions de dollars et qui n'avait aucune entreprise importante en exploitation. Le président du conseil d'administration de Royal Scot, Donald McLeod, et la Banque Royale, qui exerçait un contrôle de fait en tant que principal actionnaire de Royal Scot, ont été très heureux d'accepter 2 millions de dollars pour les pertes de Royal Scot.

[10]     Une fois recrutée la Royal Scot, a eu lieu la série suivante d'opérations, orchestrée par M. Boulanger et M. Dollinger. L'annexe « A » est une série de tableaux qui a été établie par l'avocat de l'intimée et qui illustre ces opérations.

[11]     Le 12 juin 1987, la 722537 Ontario Inc. ( « 537 » ), la 722538 Ontario Inc. ( « 538 » ), la 722539 Ontario Inc. ( « 539 » ) et la 540 ont été constituées en vertu de la Loi sur les sociétés par actions de l'Ontario. La 537, la 538 et la 539 ont été constituées comme filiales de Royal Scot, tandis que la 540 a été constituée comme filiale de la 539. Le même jour, la 537 et la 538 ont conclu une convention pour créer une société en commandite, Millbank. La 537 était le commandité, avec une participation de 0,01 p. 100, et la 538 était le commanditaire, avec une participation de 99,99 p. 100. La 538 a fait un apport de 20 000 $.

[12]     Le 23 juin 1987, Millbank a emprunté 193 913 043 $ à First Marathon Capital Corporation ( « FMCC » ), à 11,50 p. 100 par année pour une période d'un an, la date d'échéance étant le 23 juin 1988 (le « prêt no 1 » ). Outre les intérêts sur le prêt no 1, Millbank s'était engagée à payer des frais de montage financier de 500 000 $ à FMCC. Une condition du prêt no 1 était que Millbank prête le produit du prêt no 1 à First Marathon Inc. ( « FMI » ), société mère de FMCC, le même jour, à 11,55 p. 100 par année pour une période identique, en échange d'un billet de FMI (le « billet de FMI » ), et que le billet de FMI soit donné par Millbank à FMCC en garantie du prêt no 1. Aucuns frais de montage financier n'étaient payables par FMI à Millbank. En vertu des modalités relatives au billet de FMI, Millbank était en droit d'exiger le paiement anticipé de tous les intérêts payables sur le billet pour la période d'un an, et un tel paiement anticipé devait être utilisé de façon à réduire le prêt no 1. Pour mettre en oeuvre ces opérations, FMCC a fait un chèque à Millbank d'un montant de 193 913 043 $ représentant le produit du prêt no 1, en échange d'un billet du même montant de Millbank, selon les modalités que j'ai décrites. Millbank a immédiatement endossé ce chèque en faveur de FMI en échange du billet de ce montant de FMI, selon les modalités décrites. Millbank a immédiatement exigé le paiement anticipé des intérêts sur le billet de FMI et a reçu de FMI un chèque de 19 991 035 $, à savoir la valeur actualisée des intérêts devant s'accroître sur le billet de FMI pour la période allant du 23 juin 1987 au 23 juin 1988. Millbank a immédiatement endossé ce chèque en faveur de FMCC pour ramener le solde du prêt no 1 de 193 913 043 $ à 173 922 008 $, comme elle était tenue de le faire selon les modalités relatives au billet de FMI.

[13]     Le 24 juin 1987, Royal Scot a acquis la participation de commanditaire de 99,99 p. 100 de 538 dans Millbank, pour un montant de 20 000 $, qu'elle a payé par voie de billet à vue de ce montant.

[14]     Le 25 juin 1987, Millbank a déclaré sa première fin d'exercice, indiquant un revenu net aux fins de l'impôt de 19 381 440 $ représentant les intérêts payés d'avance de 19 993 775 $, moins les frais de montage financier de 500 000 $ payables par Millbank à FMCC, moins des intérêts courus pour deux jours d'un montant de 109 539 $ sur le prêt no 1 et déduction faite de la perte aux fins comptables de 2 796 $. Sur le revenu net de Millbank aux fins de l'impôt, d'un montant de 19 381 440 $, une proportion de 99,99 p. 100 - 19 379 502 $ - a été attribuée à Royal Scot, et une proportion de 0,01 p. 100 - 1 938 $ - a été attribuée à la 537. Le montant attribué à Royal Scot a été annulé par les pertes et n'était donc pas assujetti à de l'impôt sur le revenu.

[15]     Le 30 juin 1987, les opérations suivantes ont eu lieu :

(i)       La 539 a, pour 1 $, acquis la participation de commandité de 0,01 p. 100 de 537 dans Millbank.

(ii)               La 540 a acquis la participation de commanditaire de 99,99 p. 100 de Royal Scot dans Millbank, pour laquelle elle a donné à Royal Scot deux billets non productifs d'intérêt dont les montants étaient de 20 000 $ et de 2 millions de dollars.

(iii)      Novopharm a acquis de Royal Scot toutes les actions émises de la 539, pour 10 $.

(iv)      Novopharm a, pour 10 $, acquis de la 539 toutes les actions que cette dernière avait dans la 540.

(v)      Novopharm a acheté à Royal Scot le billet de 2 millions de dollars de la 540 en substituant son propre billet de 2 millions de dollars au billet de la 540. Le billet de Novopharm était également payable sans intérêt, mais, contrairement au billet de la 540 qu'il remplaçait, il n'était payable que si n'entraient pas en vigueur certaines modifications de la Loi empêchant Novopharm de déduire les intérêts payables par elle sur le prêt no 2.

(vi)      Novopharm a souscrit 20 000 $ d'actions non émises de la 540, et la 540 a alors utilisé le produit de cette opération pour payer son billet du même montant à Royal Scot. Royal Scot a endossé le chèque de la 540 pour payer son billet d'un montant de 20 000 $ à la 538.

(vii)     Novopharm a acheté 500 000 $ d'actions non émises supplémentaires de la 540, et la 540 a utilisé le produit de cette opération pour faire un apport de capital supplémentaire à Millbank, qui a de son côté utilisé cet argent pour payer à FMCC les frais de montage financier de ce montant qu'elle avait engagés relativement au prêt no 1.

(viii)    Novopharm a emprunté à FMCC 173 922 008 $ à 11,5 p. 100, la date d'échéance étant le 23 juin 1988 (le « prêt no 2 » ). Une condition de ce prêt était que Novopharm en utilise le produit pour acheter des actions non émises supplémentaires de la 540, ce qu'elle a fait. La 540 a alors utilisé le produit de cette opération d'achat d'actions pour faire un apport de capital à Millbank.

(ix)      Outre les intérêts payables sur le prêt no 2, Novopharm a payé à FMCC des frais de montage financier de 500 000 $ pour le prêt no 2.

(x)      Novopharm a en outre émis un billet de 200 000 $ en faveur de Westmorland Financial Service Inc. Ce billet était assujetti à la même condition relative à une modification possible de la Loi que dans le cas du billet de 2 000 000 $ de Novopharm émis en faveur de Royal Scot.

(xi)      Millbank a donné le billet de FMI à FMCC en garantie du prêt no 2.

[16]     Le 10 août 1987, Novopharm a payé à MM. Fogler, Rubinoff 75 549,84 $ pour leurs services concernant ces opérations. Le 13 août 1987, Novopharm a payé à Laventhol & Horwath des honoraires de 200 000 $.

[17]     La modification de la Loi qui préoccupait les parties n'a pas été apportée, de sorte que, en janvier 1988, Novopharm a payé 2 000 000 $ à la Royal Scot et 200 000 $ à la Westmorland Financial Service Inc. pour s'acquitter de ses obligations envers elles.

[18]     Au 23 juin 1988, les sommes suivantes étaient dues sur les prêts no 1 et no 2 et sur le billet de FMI :

(i)       FMI devait à Millbank 193 913 043 $ au titre du principal sur le billet de FMI.

(ii)       Millbank devait à FMCC des intérêts de 383 581 $ sur le prêt no 1.

(iii)      Novopharm devait à FMCC 193 539 458 $ sur le prêt no 2, à savoir 173 922 008 $ au titre du principal et 19 617 450 $ au titre des intérêts.

[19]     Le 23 juin 1988, le prêt no 2 et le billet de FMI sont tous deux arrivés à échéance, par suite de quoi les événements suivants ont eu lieu :

(i)       Millbank a reçu le montant nominal du billet de FMI de 193 913 043 $.

(ii)       Sur ces 193 913 043 $, une somme de 193 529 462 $ a été rendue par Millbank à la 540 par voie de réduction du capital de la 540 dans Millbank. La différence entre ces deux montants - 383 581 $ - a été enregistrée par Millbank comme une réduction d'intérêts courus sur le prêt no 1 pour la période allant du 23 juin 1987 au 30 juin 1987. Le paiement à la 540 a pris la forme d'un chèque de 193 529 462 $ fait par FMI à la 540.

(iii)      La 540 a utilisé ces 193 529 462 $ pour annuler la plupart des actions que Novopharm détenait dans la 540. La 540 a à cette fin endossé le chèque de FMI en faveur de Novopharm.

(iv)      Novopharm a alors endossé ce chèque de FMI en faveur de FMCC pour rembourser le principal sur le prêt no 2, qui s'élevait à 173 922 008 $, et 19 607 454 $ au titre des intérêts y afférents courus - mais jusque-là impayés -, qui s'élevaient à 19 617 450 $. Les intérêts restants - 9 996 $ - ont été payés par Novopharm à FMCC par son propre chèque.

[20]     Lorsque ses actions dans la 540 ont été annulées, Novopharm a réalisé un dividende réputé de 19 170 433 $ conformément au paragraphe 84(3) de la Loi, dividende qu'elle a inclus dans le calcul de son revenu aux fins de l'impôt pour l'année d'imposition 1988 et qu'elle a en outre déduit conformément au paragraphe 112(1) de la Loi.

[21]     Malgré la différence de 0,05 p. 100 entre les taux relatifs aux prêts no 1 et no 2 (11,5 p. 100) et le taux payable sur le billet de FMI (11,55 p. 100), les intérêts payés sur le prêt no 1 (383 581 $) et sur le prêt no 2 (19 617 450 $) (total de 20 001 031 $) dépassaient les intérêts payés sur le billet de FMI (19 991 035 $), ce qui donnait un manque de 9 996 $, que Novopharm a payé à FMCC[2].

[22]     Dans le calcul de son revenu pour ses années d'imposition 1987 et 1988 respectivement[3], Novopharm a déduit 10 027 914 $ et 9 579 540 $ (total de 19 607 454 $) sur les intérêts de 19 617 450 $ payés ou courus relativement au prêt no 2. Millbank a déduit les intérêts de 383 581 $ payés sur le prêt no 1 pour ses exercices 1987 et 1988. Novopharm a en outre déduit, dans le calcul de son revenu pour l'année d'imposition 1987, les frais de montage financier de 500 000 $ payés à l'égard du prêt no 2 et les honoraires de 200 000 $ payés à Laventhol & Horwath.

[23]     En établissant de nouvelles cotisations à l'égard de Novopharm pour les années 1987 et 1988, le ministre a refusé toutes ces déductions, pour le motif que ni les intérêts ni les autres frais en question n'avaient été payés relativement à de l'argent emprunté et utilisé « en vue de ( « for the purpose of » ) tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien » au sens des sous-alinéas 20(1)c)(i) et 20(1)e)(ii). Subsidiairement, le ministre basait la cotisation sur l'article 245 dans la forme dans laquelle il existait avant la version de cet article réédictée en 1988. En faisant une détermination de la perte autre qu'en capital de la 540 pour l'année 1988, le ministre a, pour les mêmes raisons, refusé la déduction, par la 540, de la part qui lui avait été attribuée sur la perte de Millbank relative aux intérêts et aux frais de montage financier afférents au prêt no 1.

Dispositions législatives

[24]     Les dispositions suivantes de la Loi sont pertinentes aux fins de ces appels :

18(1)     Dans le calcul du revenu du contribuable tiré d'une entreprise ou d'un bien, les éléments suivants ne sont pas déductibles :

a)          Idem - un débours ou une dépense, sauf dans la mesure où ce débours ou cette dépense a été fait ou engagé par le contribuable en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien;

20(1)     Nonobstant les dispositions des alinéas 18(1)a), b) et h), lors du calcul du revenu tiré par un contribuable d'une entreprise ou d'un bien pour une année d'imposition, peuvent être déduites celles des sommes suivantes qui se rapportent entièrement à cette source de revenus ou la partie des sommes suivantes qui peut raisonnablement être considérée comme s'y rapportant :

[...]

c)          une somme payée au cours de l'année ou payable pour l'année (suivant la méthode habituellement utilisée par le contribuable dans le calcul de son revenu), en exécution d'une obligation légale de verser des intérêts sur

(i)          de l'argent emprunté et utilisé en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien (autre que l'argent emprunté et utilisé pour acquérir un bien dont le revenu serait exonéré d'impôt ou pour prendre une police d'assurance-vie),

(ii)         [...]

ou une somme raisonnable à cet égard, le moins élevé des deux montants étant à retenir, ou

[...]

e)          la partie de toute dépense, qui n'est pas déductible par ailleurs dans le calcul du revenu du contribuable, engagée au cours de l'année ou d'une année d'imposition antérieure:

[...]

(ii)         dans le cadre d'un emprunt d'argent que le contribuable utilise en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien, sauf s'il s'agit d'argent utilisé par le contribuable en vue d'acquérir un bien dont le revenu serait exonéré,

- y compris les commissions, honoraires et autres montants payés ou payables au titre de services rendus par une personne en tant que vendeur, mandataire ou courtier en valeurs dans le cadre de l'émission, de la vente ou de l'emprunt, mais à l'exclusion des montants payés ou payables au titre du principal de la dette ou au titre des intérêts sur celle-ci ¾ égale au moins élevé : [...]

84(3)     Lorsque, à une date quelconque après le 31 décembre 1997, une corporation résidant au Canada a racheté, acquis ou annulé de quelque façon que ce soit (autrement que par une opération visée au paragraphe (2)) toute action d'une catégorie quelconque de son capital-actions :

a)          la corporation est réputée avoir versé à cette date un dividende sur une catégorie distincte d'actions comprenant les actions ainsi rachetées, acquises ou annulées, égal à la fraction, si fraction il y a, de la somme payée par la corporation lors du rachat, de l'acquisition ou de l'annulation, selon le cas, de ces actions, qui est sus du capital versé relatif à ces actions, existant immédiatement avant cette date; et

b)          chacune des personnes qui détenaient à cette date une ou plusieurs actions de cette catégorie distincte est réputée avoir reçu à cette date un dividende égal à la fraction de l'excédent déterminée en vertu de l'alinéa a) et représentée par le rapport existant entre le nombre de ces actions que détenait cette personne immédiatement avant cette date, et le nombre total des actions de cette catégorie distincte que la corporation a rachetées, acquises ou annulées, à cette date.

111(5) En cas d'acquisition, à un moment donné, du contrôle d'une société par une personne ou un groupe de personnes, aucun montant au titre d'une perte autre qu'une perte en capital ou d'une perte agricole pour une année d'imposition se terminant avant ce moment n'est déductible par la société pour une année d'imposition se terminant après ce moment et aucun montant au titre d'une perte autre qu'une perte en capital ou d'une perte agricole pour une année d'imposition se terminant après ce moment n'est déductible par la société pour une année d'imposition se terminant avant ce moment. Toutefois :

a)          la fraction de la perte autre qu'une perte en capital ou de la perte agricole subie par la société pour une année d'imposition se terminant avant ce moment qu'il est raisonnable de considérer comme résultant de l'exploitation d'une entreprise et, si la société exploitait une entreprise au cours de cette année, la fraction de la perte autre qu'une perte en capital qu'il est raisonnable de considérer comme se rapportant à un montant déductible en application de l'alinéa 110(1)k) dans le calcul de son revenu imposable pour l'année, ne sont déductibles par la société pour une année d'imposition donnée se terminant après ce moment :

(i)          que si, tout au long de l'année donnée, cette entreprise a été exploitée par la société en vue d'en tirer un profit ou dans une attente raisonnable de profit,

(ii)         qu'à concurrence du total du revenu de la société provenant de cette entreprise pour l'année donnée et - dans le cas où des biens sont vendus, loués ou mis en valeur ou des services rendus dans le cadre de l'exploitation de l'entreprise avant ce moment - de toute autre entreprise dont la presque totalité du revenu est dérivée de la vente, de la location ou de la mise en valeur, selon le cas, de biens semblables ou de la prestation de services semblables;

b)          la fraction de la perte autre qu'une perte en capital ou de la perte agricole subie par la société pour une année d'imposition se terminant après ce moment qu'il est raisonnable de considérer comme résultant de l'exploitation d'une entreprise et, si la société exploitait une entreprise au cours de cette année, la fraction de la perte autre qu'une perte en capital qu'il est raisonnable de considérer comme se rapportant à un montant déductible en application de l'alinéa 110(1)k) dans le calcul de son revenu imposable pour l'année, ne sont déductibles par la société pour une année d'imposition donnée se terminant avant ce moment :

(i)          que si, tout au long de l'année d'imposition et de l'année donnée, cette entreprise était exploitée par la société en vue d'en tirer un profit ou dans une attente raisonnable de profit,

(ii)         qu'à concurrence du revenu que la société a tiré pour l'année donnée de cette entreprise et de toute autre entreprise dont la presque totalité des revenus provient de la vente, de la location ou de la mise en valeur de biens semblables aux biens vendus, loués ou mis en valeur ou de la prestation de services semblables aux services rendus dans le cadre de l'exploitation de cette entreprise avant ce moment.

112(1) Lorsqu'une société a reçu, au cours d'une année d'imposition, un dividende imposable :

a)          soit d'une société canadienne imposable;

b)          soit d'une société résidant au Canada (autre qu'une société de placement appartenant à des non-résidents et une société exonérée d'impôt en vertu de la présente partie) et dont elle a le contrôle,

une somme égale au dividende peut être déduite du revenu pour l'année de la société qui le reçoit, dans le calcul de son revenu imposable.

152(1.1)            Lorsque le ministre établit le montant de la perte autre qu'une perte en capital, de la perte en capital nette, de la perte agricole restreinte, de la perte agricole et de la perte comme commanditaire subie par un contribuable pour une année d'imposition et que le contribuable n'a pas déclaré ce montant comme perte dans sa déclaration de revenu pour cette année, le ministre doit, à la demande du contribuable et avec diligence, déterminer le montant de cette perte et envoyer un avis de détermination à la personne qui a produit la déclaration.

152(1.2)            Les alinéas 56(1)l) et 60o), la présente section et la section J, dans la mesure où ces dispositions portent sur une cotisation ou sur une nouvelle cotisation ou sur l'établissement d'une cotisation ou d'une nouvelle cotisation, s'appliquent, avec les adaptations nécessaires, aux montants déterminés ou déterminés de nouveau en application de la présente section, y compris ceux qui sont réputés par les articles 122.61 ou 126.1 être des paiements en trop au titre des sommes dont un contribuable est redevable en vertu de la présente partie. Toutefois, les paragraphes (1) et (2) ne s'appliquent pas aux montants déterminés en application des paragraphes (1.1) et (1.11), étant entendu que le montant d'une perte autre qu'une perte en capital, d'une perte agricole ou d'une perte comme commanditaire subie par un contribuable pour une année d'imposition ne peut être initialement déterminé par le ministre qu'à la demande du contribuable.

152(1.3)            Il est entendu que lorsque le ministre détermine le montant d'une perte autre qu'une perte en capital, d'une perte en capital nette, d'une perte agricole restreinte, d'une perte agricole ou d'une perte comme commanditaire subie par un contribuable pour une année d'imposition ou détermine un montant en application du paragraphe (1.11) en ce qui concerne un contribuable, le montant ainsi déterminé lie à la fois le ministre et le contribuable en vue du calcul, pour toute année d'imposition, du revenu, du revenu imposable ou du revenu imposable gagné au Canada du contribuable ou de l'impôt ou d'un autre montant payable par le contribuable ou d'un montant qui lui est remboursable, sous réserve des droits d'opposition et d'appel du contribuable à l'égard du montant déterminé et sous réserve de tout montant déterminé de nouveau par le ministre.

152(9) Le ministre peut avancer un nouvel argument à l'appui d'une cotisation après l'expiration de la période normale de nouvelle cotisation, sauf si, sur appel interjeté en vertu de la présente loi :

a)          d'une part, il existe des éléments de preuve que le contribuable n'est plus en mesure de produire sans l'autorisation du tribunal;

b)          d'autre part, il ne convient pas que le tribunal ordonne la production des éléments de preuve dans les circonstances.

166.1(1)            Le contribuable qui n'a pas signifié d'avis d'opposition à une cotisation en application de l'article 165 ni présenté de requête en application du paragraphe 245(6) dans le délai imparti peut demander au ministre de proroger le délai pour signifier l'avis ou présenter la requête.

166.2(1)            Le contribuable qui a présenté une demande en application de l'article 166.1 peut demander à la Cour canadienne de l'impôt d'y faire droit après :

a)          le rejet de la demande par le ministre;

b)          l'expiration d'un délai de 90 jours suivant la présentation de la demande, si le ministre n'a pas avisé le contribuable de sa décision.

Toutefois, une telle demande ne peut être présentée après l'expiration d'un délai de 90 jours suivant la date de la mise à la poste de l'avis de la décision au contribuable.

245(1) Dans le calcul du revenu aux fins de la présente loi, aucune déduction ne peut être faite à l'égard d'un débours fait ou d'une dépense faite ou engagée, relativement à une affaire ou opération qui, si elle était permise, réduirait indûment ou de façon factice le revenu.

Question préliminaire

[25]     Avant de traiter du bien-fondé des présents appels, je dois examiner la question de savoir si la Cour est valablement saisie de l'appel de la 540 pour l'année d'imposition 1988. Cela exige un compte rendu des faits relatifs à cette question. Le 18 mai 1993, de nouvelles cotisations ont été établies à l'égard de la 540 pour les années d'imposition 1988, 1990 et 1991. Par la nouvelle cotisation pour 1988, le ministre n'a pas admis la perte autre qu'en capital que la 540 avait indiquée pour cette année-là, à savoir la part qui avait été attribuée à la 540 sur la perte autre qu'en capital de Millbank. Pour les années 1990 et 1991, de nouvelles cotisations ont été établies en conséquence, de manière à refuser le report prospectif de cette perte. Le 16 août 1993, la 540 a déposé auprès du ministre des avis d'opposition à ces cotisations, pour chacune de ces trois années. Dans l'avis d'opposition pour 1988, on reconnaissait que la nouvelle cotisation pour cette année-là était une cotisation portant qu'aucun impôt n'était payable et l'on demandait que le ministre détermine la perte autre qu'en capital du contribuable pour cette année-là conformément au paragraphe 152(1.1) de la Loi. Le ministre a répondu à cela par un avis de détermination de perte pour l'année d'imposition 1988 de la 540, lequel avis est daté du 25 mai 1998 et indique que la perte déterminée est de zéro. Le 9 juin 1998, le ministre a envoyé à la 540 un avis de ratification des nouvelles cotisations pour les années 1990 et 1991[4]. Le 24 août 1998, la 540 a déposé un avis d'appel auprès de notre cour pour les trois années : 1988, 1990 et 1991. Les paragraphes 2 à 6 de la réponse à l'avis d'appel, qui est datée du 23 octobre 1998, indiquent que l'intimée considérait que l'appelante n'avait aucun droit d'appel pour l'une quelconque de ces années-là, et ce, pour la raison suivante. La nouvelle cotisation pour 1988 était une cotisation portant qu'aucun impôt n'était payable, à l'encontre de laquelle aucun appel ne peut être interjeté. L'avis de nouvelle détermination de perte pourrait être porté en appel si seulement un avis d'opposition avait été déposé à cet égard, mais tel n'a pas été le cas. Les appels pour 1990 et 1991 ne peuvent être admis, puisqu'ils dépendent du succès de l'appel pour 1988. Après avoir reçu cet acte de procédure, l'avocat de l'appelante 540 a, le 17 novembre 1998, écrit une lettre au ministre pour demander, conformément au paragraphe 166.1(1) de la Loi, une prolongation du délai pour déposer un avis d'opposition à l'avis de détermination de perte pour 1988. Au haut de cette lettre figurent les termes « SANS PRÉJUDICE » . La lettre du ministre en réponse à cela, datée du 9 décembre 1998, n'est pas longue et, comme elle est cruciale aux fins de cette question, je la reproduis intégralement :

[TRADUCTION]

Me Peter K. Guselle

Fogler, Rubinoff

C.P. 95, tour Royal Trust

Centre T-D, Toronto

M5K 1G8

9 décembre 1998

Monsieur,

Objet :               722540 Ontario Inc. - année d'imposition 1988

J'accuse réception de votre lettre du 17 novembre 1998 portant la mention « SANS PRÉJUDICE » .

Nous sommes disposés à considérer d'un oeil favorable la demande de prolongation du délai pour déposer un avis d'opposition, mais nous portons d'abord à votre attention les questions suivantes.

Votre lettre, qui se veut également un avis d'opposition, n'énonce pas les motifs de l'opposition, si ce n'est qu'elle dit que « le ministre a à tort refusé la déduction des intérêts » . Comme le contribuable est assujetti au paragraphe 165(1.11) de la Loi, il faut que soient clairement énoncés les faits et les motifs, ainsi que le montant du redressement demandé. En outre, nous estimons qu'il n'est pas approprié qu'une opposition soit déposée « SANS PRÉJUDICE » . Enfin, nous devons demander que l'opposition soit signée par un fondé de pouvoir du contribuable.

Une fois réglées ces questions, nous examinerons promptement votre demande.

Veuillez agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.

« W. G. Wilson »

Agent des appels

À cela, l'avocat a, le 22 décembre 1998, répondu :

[TRADUCTION]

J'accuse réception de votre lettre du 9 décembre 1998, à laquelle je répondrai au début de la nouvelle année. J'espère que cela sera satisfaisant.

Il n'y a pas eu d'autre correspondance à ce sujet.

[26]     L'avocat de la 540 invoque deux arguments à l'appui de la validité des appels de la 540. Se fondant sur les propos tenus par le juge Bowman, titre qu'il portait alors, dans l'affaire Aallcann Wood Suppliers Inc. c. La Reine[5], l'avocat dit qu'un appel valable pour l'année 1988 n'est pas nécessaire, car le montant de la perte pour cette année-là peut être déterminé dans les appels pour 1989 et 1990, dont la Cour est valablement saisie. C'est sur le passage suivant des motifs du jugement du juge Bowman que se fonde l'avocat[6] :

Il convient pour commencer de régler un point représentant une question de procédure ou peut-être de compétence. Au départ, l'appelante a demandé à la Cour de déterminer la perte qu'elle avait déclarée pour 1988, car le montant de cette perte influait sur son revenu imposable pour 1985, 1986 et 1987. L'intimée a fait valoir que, dans les appels portant sur les années 1985, 1986 et 1987, l'appelante ne pouvait contester le calcul que le ministre avait fait de la perte relative à 1988 puisqu'elle ne lui avait pas demandé de procéder à une détermination de cette perte.

L'appelante a accepté cet argument et a demandé au ministre une détermination de la perte relative à 1988 en vertu du paragraphe 152(1.1) de la Loi de l'impôt sur le revenu. Le ministre a procédé à une détermination de la perte, un avis d'opposition a été déposé, la détermination a été confirmée, et un appel à l'encontre de cette détermination a été interjeté devant la Cour.

La position que le ministre a adoptée dans la réponse initiale à l'avis d'appel et selon laquelle le calcul qu'il fait d'une perte pour une année d'imposition particulière est immuable à moins qu'une détermination de la perte ne soit faite en vertu du paragraphe 152(1.1) est toutefois erronée. Il est vrai que la Cour ne peut procéder à une détermination de la perte en vertu du paragraphe 152(1.1). Cette fonction incombe au ministre. Si une telle détermination est faite, elle est réputée être valide et exécutoire, mais elle peut être contestée par la voie d'un avis d'opposition ou d'un appel et, si elle est confirmée en appel, sa validité est reconnue. Le paragraphe 152(1.1) a pour objet de permettre à un contribuable de demander au ministre une détermination d'une perte déclarée pour une année donnée, détermination dont il peut appeler à la Cour. Une des raisons sous-jacentes à l'adoption du paragraphe 152(1.1) est qu'on ne peut appeler d'une cotisation portant qu'aucun impôt n'est payable. En l'absence d'une détermination exécutoire faite en vertu du paragraphe 152(1.1), un contribuable peut contester le calcul du ministre concernant une perte relative à une année particulière dans un appel portant sur une autre année lorsque le montant du revenu imposable du contribuable est influencé par le montant de la perte pouvant être reportée prospectivement en vertu de l'article 111. En contestant la cotisation portant sur une année pour laquelle de l'impôt est payable au motif que le ministre a incorrectement calculé le montant d'une perte relative à une année antérieure ou subséquente qui peut être déduite en vertu de l'article 111 dans le calcul du revenu imposable du contribuable pour l'année en question dans l'appel, le contribuable demande à la Cour de faire précisément ce que prévoient les dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu en matière d'appel : déterminer l'exactitude d'une cotisation d'impôt en examinant la justesse d'un ou de plusieurs de ses éléments constituants, soit en l'espèce le montant d'une perte d'une autre année pouvant être déduite. La Cour n'a pas à déterminer la perte en vertu du paragraphe 152(1.1) ni à entendre un appel concernant une cotisation portant qu'aucun impôt n'est payable. Elle doit simplement établir l'exactitude de la cotisation portant sur l'année en question dans l'appel dont elle est saisie.

Il était donc inutile que l'appelante lui demande de déterminer la perte en vertu du paragraphe 152(1.1). La question de la perte relative à 1988 est maintenant soumise à la Cour non seulement dans le cadre d'un appel portant sur la détermination de cette perte, mais également en tant qu'élément influant sur le revenu imposable pour les années 1985, 1986 et 1987 et, dans la mesure où le montant d'une perte peut être reporté prospectivement, pour l'année 1989. Il n'était pas nécessaire pour les fins des appels en instance que je traite à fond de ce point, mais la thèse de la Couronne cadrait si peu avec les règles de droit et les usages en vigueur et pouvait avoir de si vastes répercussions sur un nombre indéfini d'appels devant la Cour que j'ai jugé souhaitable de tuer l'idée dans l'oeuf.

Subsidiairement, l'avocat soutient que la lettre du 17 novembre 1998 par laquelle il a demandé une prolongation de délai conformément au paragraphe 166.1(1) « [...] est une forme suffisante d'avis d'opposition [...] » , car elle faisait référence au précédent avis d'opposition, déposé le 16 août 1993.

[27]     L'avocat de l'intimée dit, tout à fait à juste titre, que le passage du jugement Aallcann Wood Suppliers sur lequel se fonde l'appelante constitue des remarques incidentes, car dans cette cause-là, face à l'argument de la Couronne selon lequel la perte pour 1988 ne pouvait être déterminée dans les appels pour les années sur lesquelles cette perte devait être reportée rétrospectivement, l'appelante avait réglé le problème en obtenant du ministre une détermination de perte, en s'opposant à cette détermination et en interjetant un nouvel appel, valable, à l'encontre de cette détermination.

[28]     Bien que représentant des remarques incidentes, ces propos du juge Bowman ont été suivis par notre cour[7] et par la section de première instance de la Cour fédérale[8], et je n'ai aucun doute que le principe énoncé là est exact. Si l'ordre des événements en l'espèce était le même, je n'aurais aucune hésitation à conclure que l'appelante 540 pourrait attaquer la première cotisation du ministre, relative à la perte pour 1988 et portant qu'aucun impôt n'était payable, de façon indirecte dans les appels pour les années 1990 et 1991 sur lesquelles cette perte devait être reportée prospectivement. Il y a toutefois une différence cruciale concernant les événements. Certes, dans les deux cas, l'appelante a demandé et obtenu une détermination de perte en vertu du paragraphe 152(1.1), et ses droits quant au montant de cette perte sont donc régis par les paragraphes 152(1.2) et (1.3). En vertu du premier de ces paragraphes, le contribuable a le droit de faire opposition à une détermination de perte et d'en appeler comme dans le cas d'une cotisation d'impôt. Pour ce qui est du paragraphe 152(1.3), il dispose que :

[...] le montant ainsi déterminé lie à la fois le ministre et le contribuable en vue du calcul, pour toute année d'imposition, du revenu, du revenu imposable ou du revenu imposable gagné au Canada du contribuable ou de l'impôt ou d'un autre montant payable par le contribuable ou d'un montant qui lui est remboursable, sous réserve des droits d'opposition et d'appel du contribuable à l'égard du montant déterminé et sous réserve de tout montant déterminé de nouveau par le ministre.

Ce passage du paragraphe 152(1.3) indique hors de tout doute que le contribuable qui obtient une détermination de perte ne peut ensuite attaquer indirectement la détermination faite par le ministre. Une telle détermination ne peut être attaquée que par voie d'opposition et d'appel. Dans l'affaire Aallcann Wood Suppliers, l'appelante, ayant obtenu la détermination de perte, avait pris les mesures nécessaires pour en appeler. En l'espèce, l'appelante n'a pas pris les mesures nécessaires, et le libellé du paragraphe 152(1.3) ne permet pas une attaque indirecte. Il s'ensuit que je ne souscris pas entièrement aux propos du juge Bowman selon lesquels la question de la perte pour 1988 pouvait lui être soumise des deux façons; je considère qu'une fois demandée et effectuée une détermination de perte, cette détermination ne peut être soumise à la Cour que si elle a fait l'objet d'un avis d'opposition, suivi d'un avis d'appel.

[29]     Je ne vois aucun fondement à la position subsidiaire de l'appelante sur ce point. La lettre du 9 décembre 1998 est peut-être formulée de façon peu heureuse en ce sens qu'elle n'accorde ni ne refuse au contribuable la prolongation de délai qu'il a demandée. Elle conteste plutôt le contenu de la lettre du 17 novembre qui se voulait à la fois un avis d'opposition et une demande de prolongation de délai. Le dernier paragraphe de cette lettre commence par les termes suivants :

[TRADUCTION]

Donc, nous vous demandons de faire droit à la demande de prolongation de délai du contribuable et d'accepter la présente lettre comme étant l'avis d'opposition du contribuable à l'avis de détermination / nouvelle détermination de perte pour l'année d'imposition 1988 du contribuable, [...]

[30]     L'avocat de l'appelante arguait que je devrais considérer que la réponse du 9 décembre indique que le ministre a fait droit à la demande de prolongation de délai et a accepté la lettre y afférente comme étant aussi un avis d'opposition valablement déposé. Cette réponse ne peut être interprétée comme indiquant l'une ou l'autre de ces deux choses, quoique l'auteur y dise qu'il est favorablement disposé à l'égard de la demande. Le délai de production de l'avis d'opposition avait expiré en août 1998 et n'a jamais été prolongé; la prolongation demandée n'a pas été refusée non plus. Nul doute que le contribuable avait droit à une décision sur la demande, mais il n'en a jamais eu une. Après le 15 février 1999, il aurait pu demander la prolongation de délai à notre cour en vertu de l'article 166.2, mais il ne l'a pas fait. La question s'est simplement éteinte avec la lettre de l'avocat en date du 22 décembre 1998 que j'ai déjà mentionnée. Quoi qu'il en soit, une prolongation de délai de production d'avis d'opposition accordée par le ministre ou la Cour - même si la demande y afférente était acceptée comme étant aussi l'avis d'opposition - ne pourrait valider un appel déjà interjeté. Elle ne pourrait que permettre au contribuable d'interjeter alors un nouvel appel, valable, ce qui n'a évidemment pas été fait en l'espèce.

[31]     Comme la Cour n'est pas valablement saisie de l'appel contre la détermination de perte pour 1988 et que le seul redressement demandé par la 540 dans ses appels pour 1990 et 1991 dépend du succès de la contestation de cette détermination, les trois appels doivent être rejetés.

Positions des parties sur la question de fond

[32]     Les avocats des parties ont produit entre eux plus d'une centaine de pages d'observations écrites[9] et ont présenté des observations verbales pendant une journée complète. Ils ont cité environ 50 causes et plusieurs articles de revue. Je résumerai leurs positions le plus brièvement possible. Je commencerai par les points peu nombreux, mais importants, sur lesquels s'entendent les avocats des parties. Premièrement, il ne s'agit pas ici d'un cas d'opérations incomplètes ou trompe-l'oeil. Les diverses opérations ont été réellement et intégralement exécutées. Elles visaient à créer et ont bel et bien créé des relations juridiques exécutoires entre les divers acteurs. Deuxièmement, la doctrine de l'opération en série n'entre pas en ligne de compte. L'avocat des appelantes dit que cette doctrine ne fait pas partie de notre droit; l'avocat de l'intimée dit qu'il s'agit d'un faux argument, car il n'invoque pas cette doctrine.

Les appelantes

[33]     La position fondamentale des appelantes est que Novopharm avait conclu l'opération de prêt de manière à emprunter de l'argent pour procéder à un achat d'actions de la 540 en tant qu'investissement duquel elle tirerait un revenu. Le mot « revenu » , dans le contexte du sous-alinéa 20(1)c)(i), désigne un revenu brut et non un profit, de sorte que l'on ne peut considérer comme pertinent le fait que le coût d'emprunt, composé des intérêts et des honoraires versés à L & H et à FMCC, dépasserait inévitablement le revenu que Novopharm recevrait de la 540 sous la forme du dividende réputé. Pourvu que l'utilisation de l'argent emprunté donne lieu à un certain revenu brut, il est satisfait au critère de l'objet.

[34]     L'appelante argue qu'il ne m'est pas loisible d'examiner la réalité économique et commerciale sous-jacente à l'opération de prêt pour déterminer l'objet de celle-ci. Si la remarque incidente du juge Dickson dans l'affaire Bronfman Trust[10] peut être considérée comme sanctionnant cela, elle a, depuis, été infirmée par les décisions que la Cour suprême a rendue dans les affaires Antosko[11], Friesen[12], Continental Bank[13] et Shell Canada[14]. Dans une variante du même argument, l'appelante soutient que seule l'utilisation directe de l'argent emprunté doit régir la disponibilité de la déduction. Elle dit que l'utilisation directe en l'espèce tient à l'achat des actions de la 540 et qu'il n'est pas permis d'aller au-delà, ce qui équivaudrait d'après elle à importer au Canada la doctrine de l'opération en série. L'appelante va toutefois plus loin en faisant valoir que, dans la présente espèce, « les opérations en cause ne sont pas réglées d'avance » [15]. Enfin, à cet égard, l'avocat de l'appelante arguait que la Cour ne peut chercher à déterminer l'objet ultime ou véritable de l'emprunt comme l'ont fait le juge Bowman dans Mark Resources[16] et le juge McArthur dans Canwest Broadcasting[17], car cette approche a été désapprouvée par la Cour suprême du Canada dans Shell Canada et, plus récemment, dans Singleton et Ludco. Quoi qu'il en soit, du point de vue des faits, les affaires Mark Resources et Canwest Broadcasting peuvent être distinguées de la présente espèce, de l'avis de l'appelante.

[35]     Au sujet des honoraires payés à FMCC et à L & H (500 000 $ et 200 000 $ respectivement), l'appelante a argué que, dans le premier cas, les frais sont déductibles en vertu du sous-alinéa 20(1)e)(ii) et que, dans le deuxième cas, les frais sont déductibles en vertu de l'alinéa 18(1)a), et ce, pour la même raison dans les deux cas, à savoir que les intérêts sont déductibles en vertu du sous-alinéa 20(1)c)(i). En d'autres termes, le sort des demandes de déduction de ces deux montants dépend du résultat de la demande de déduction des intérêts.

[36]     L'avocat de l'appelante soutenait que l'article 245 de la Loi ne s'appliquait pas à la présente espèce. Il ne reconnaissait pas que le critère tripartite établi par la Cour d'appel fédérale dans Fording Coal[18] était nécessairement le bon critère, mais il ne proposait aucun critère de remplacement. Il arguait plutôt que, en l'espèce, aucun des trois éléments du critère de l'arrêt Fording Coal servant à établir une réduction indue ou factice des revenus des appelantes n'était présent, pour les raisons suivantes. Si les appelantes réussissent à établir leur droit aux déductions en vertu de l'article 20, ces déductions ne peuvent être incompatibles avec l'objet et l'esprit de la Loi. Le ministre n'ayant pas formulé dans un acte de procédure l'hypothèse que les emprunts n'étaient pas conformes à l'usage normal en affaires, l'intimée a la charge de prouver cela, ce qu'elle n'a pas fait. Enfin, l'avocat de l'appelante arguait que le troisième élément du critère de l'arrêt Fording Coal, à savoir l'absence d'un véritable but commercial, est incompatible avec les décisions rendues par la Cour suprême du Canada dans Stubart Investments[19], Continental Bank[20], Hickman Motors[21] et Neuman[22]. Il poursuivait en faisant valoir que, de toute façon, l'achat, par Novopharm, d'actions de la 540 était une opération qui comportait un but commercial, à savoir gagner un revenu en dividendes.

L'intimée

[37]     L'intimée reconnaît que le principe de l'arrêt Duke of Westminster[23] demeure la règle de droit au Canada, mais elle dit que l'interprétation du paragraphe 20(1) doit être abordée d'une manière conforme à l'économie de la Loi et notamment de la sous-section b de la section B de la partie I, où le paragraphe 20(1) figure. Cette sous-section traite du calcul du revenu ou de la perte provenant d'une entreprise ou d'un bien et ne permet de déduire du revenu que les dépenses engagées en vue d'obtenir un profit économique. Elle n'est pas là pour favoriser des stratagèmes d'évitement fiscal. Permettre la déduction d'intérêts et d'autres coûts d'emprunt vise à favoriser l'accumulation de capital. La mention du « revenu » au paragraphe 20(1) doit donc désigner le revenu net et non pas, comme le prétend l'appelante, le revenu brut. Sur la foi des faits de l'espèce, il était non seulement improbable, mais impossible, que les prêts no 1 ou no 2 donnent lieu à un revenu. Toutes les opérations qui ont eu lieu avaient été réglées d'avance et, sans les économies d'impôt, le résultat serait inévitablement des pertes importantes.

[38]     L'intimée arguait en outre que, en cherchant à déterminer la fin pour laquelle l'argent emprunté est utilisé, la Cour ne doit pas se contenter d'examiner isolément la première opération suivant l'emprunt. Dans un cas comme celui­-ci - dans lequel il y a de nombreuses opérations représentant toutes un « accord global » , comme disait M. Dan au cours de son témoignage, et dans lequel l'argent passe d'un participant à un autre -, la Cour doit examiner l'objet réel ou véritable de l'emprunt et non pas simplement la première chose qui a été faite avec l'argent emprunté. Ce n'est pas là appliquer la doctrine de l'opération en série, car cela n'implique pas de faire fi, aux fins de l'impôt, de l'une quelconque des opérations, soutient l'avocat.

[39]     L'intimée argue subsidiairement que la déduction des intérêts et des autres coûts d'emprunt réduirait indûment ou de façon factice les revenus des appelantes, ce qui est interdit par l'article 245 de la Loi dans la forme dans laquelle il existait à l'époque pertinente. L'avocat m'exhortait à appliquer le critère établi par la Cour d'appel fédérale dans Fording Coal et à conclure que la présente espèce entre dans le cadre des trois éléments de ce critère. Les opérations considérées en l'espèce, disait-il, sont contraires à l'objet et à l'esprit de la Loi et notamment de l'article 20, qui a été édicté pour permettre à des entreprises d'augmenter leur capital et non pour les aider à exécuter des stratagèmes d'évitement fiscal. Les opérations considérées en l'espèce ne sont pas des opérations commerciales normales; Novopharm a emprunté des centaines de millions de dollars pour les investir indirectement dans une société de personnes qui ne pouvait tirer profit de cet investissement. Il était clair dès le début que Novopharm subirait une perte commerciale de plusieurs millions de dollars. Enfin, les opérations n'avaient aucun objet commercial véritable; leur seul objet était de permettre à Novopharm d'accéder aux pertes de Royal Scot à des fins d'évitement fiscal.

Sous-alinéa 20(1)c)(i)

[40]     La Cour suprême du Canada a déterminé les quatre conditions du sous-alinéa 20(1)c)(i) auquel un contribuable doit pouvoir satisfaire pour que des intérêts puissent être déduits dans le calcul du revenu en vertu de la Loi[24] :

Le sous-al. 20(1)c)(i) permet au contribuable de déduire de son revenu l'intérêt payé relativement à de l'argent emprunté et utilisé en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien. Il s'agit d'une exception à l'art. 9 et à l'al. 18(1)b), qui interdisent par ailleurs la déduction des sommes dépensées au titre du capital, c'est-à-dire l'intérêt payé à l'égard de fonds empruntés et utilisés pour produire un revenu : Canada Safeway Ltd. c. Minister of National Revenue, [1957] R.C.S. 717, aux pp. 722 et 723, le juge en chef Kerwin et à la page 727, le juge Rand; Bronfman Trust c. La Reine, [1987] 1 R.C.S. 32, à la p. 45, le juge en chef Dickson. La disposition comporte quatre conditions : (1) la somme doit être payée au cours de l'année ou être payable pour l'année au cours de laquelle le contribuable cherche à la déduire; (2) elle doit l'être en exécution d'une obligation légale de verser des intérêts sur l'argent emprunté; (3) celui-ci doit être utilisé en vue de tirer un revenu non exonéré d'une entreprise ou d'un bien; et (4) la somme doit être raisonnable compte tenu des trois premiers critères.

C'est seulement la troisième de ces conditions qui est en cause dans la présente espèce.

[41]     Dans cette affaire, la Cour nous rappelle que « les tribunaux doivent tenir compte de la réalité économique qui sous-tend l'opération » tout en évitant aussi bien une nouvelle qualification d'opérations basée sur des réalités économiques qu'un écart par rapport aux dispositions claires de la loi fondé sur des considérations de principe[25].

[42]     Tout comme dans de nombreuses causes précédentes, la question est simplement de savoir si l'argent que, en l'espèce, Novopharm a emprunté (prêt no 2) a été utilisé « en vue de [ « for the purpose of » ] tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien [...] » . En termes simples, la position de l'appelante est que l'achat des actions ordinaires de la 540 représente une telle utilisation; on peut s'attendre que des actions ordinaires rapportent des dividendes, et des dividendes sont des revenus. Si l'appelante a raison à cet égard, alors, sous réserve de l'application de l'article 245, elle doit avoir gain de cause.

[43]     Dans l'affaire Shell, l'emprunt avait été fait en dollars néo-zélandais ( « $ NZ » ). Shell avait besoin, pour utilisation dans son entreprise, de 100 millions de dollars américains ( « $ US » ). Elle avait converti les $ NZ en $ US, tout en concluant certaines opérations à terme grâce auxquelles elle obtenait un avantage fiscal relatif à la déductibilité de paiements d'intérêts. La Cour suprême a statué que, malgré le fait que la première utilisation de l'argent emprunté avait consisté à acheter des $ US, c'était l'argent emprunté qui avait été utilisé dans l'entreprise de l'appelante. La déductibilité des paiements d'intérêts n'était pas modifiée par la conversion en $ US ou par le fait que Shell avait nécessairement payé un taux d'intérêt beaucoup plus élevé pour emprunter en $ NZ que ce qu'elle aurait eu à payer si elle avait emprunté des $ US.

[44]     Plus récemment, dans l'affaire Ludco, la Cour suprême a statué que, pour satisfaire à l'exigence du sous-alinéa 20(1)c)(i) quant à l'objet des opérations, il suffit que l'une des fins de l'emprunt soit de tirer d'une entreprise ou d'un bien un revenu non exonéré d'impôt, même s'il s'agit d'une fin secondaire. Les intérêts payés sur de l'argent emprunté pour acheter des actions sont déductibles à la seule condition que l'investissement, considéré objectivement, indique que l'emprunteur pouvait raisonnablement s'attendre à gagner un revenu brut. Ce principe n'était pas modifié par le fait que gagner un revenu, par opposition à réaliser un gain en capital, n'était qu'une fin accessoire de l'utilisation de l'argent.

[45]     La Cour suprême du Canada a tranché l'affaire Singleton c. Canada le même jour qu'elle a tranché l'affaire Ludco. Le contribuable faisait partie d'une société de personnes et avait dans son compte de capital un solde de plus de 300 000 $. Ayant décidé d'acheter une maison, il avait emprunté à la banque 400 000 $, dont 300 000 $ avaient été déposés dans le compte bancaire de la société de personnes, au crédit du compte de capital du contribuable. Le même jour, le contribuable avait retiré 300 000 $ du compte général de la société de personnes, avait débité son compte de capital et avait utilisé cette somme pour payer partiellement la maison. La Cour a majoritairement statué que les intérêts sur le prêt étaient déductibles en vertu du sous-alinéa 20(1)c)(i). L'objet du prêt était de refinancer la participation du contribuable dans la société de personnes. En rendant les motifs de la majorité, le juge Major a dit[26] :

En toute déférence, il est erroné de considérer ces démarches comme une seule et même opération. Pour donner effet aux rapports juridiques, il faut considérer les opérations comme des opérations distinctes. Sous cet angle, que l'on retienne l'une ou l'autre version des faits (c.-à-d. indépendamment de l'ordre des événements), l'intimé a en l'espèce utilisé l'argent emprunté pour renflouer son compte de capital dans la société de personnes. Il s'agit là de l'opération juridique à laquelle notre Cour doit donner effet. À cet égard, je fais miens les motifs suivants du juge Rothstein (au par. 54) :

En l'espèce, l'argent emprunté a directement été utilisé en vue de renflouer le compte de capital de l'appelant. En considérant l'argent emprunté comme s'il était utilisé pour financer l'achat de la maison, on ne tient pas compte de ce que l'appelant a réellement fait, à savoir qu'il a utilisé l'argent emprunté pour remplacer les fonds qui devaient être dans son compte de capital. Comme l'a dit le juge en chef Dickson dans l'arrêt Bronfman Trust, la Cour ne peut pas omettre de tenir compte de l'usage direct que l'appelant a fait des fonds empruntés.

Le fait que l'emprunt ait été effectué afin que l'intimé puisse utiliser ses fonds propres pour acheter la maison est sans importance. Dans l'arrêt Shell, il a été jugé que la raison de l'emprunt n'était pas pertinente. Le fait que l'argent ait été transféré du cabinet à l'intimé pour l'achat d'une résidence n'a aucune incidence sur l'application du sous-al. 20(1)c)(i) aux intérêts payés sur l'argent emprunté qui a directement servi à renflouer le compte de capital et, de ce fait, à tirer un revenu du cabinet d'avocats.

Il est donc maintenant bien établi que ce qui doit régir la question de la déductibilité, c'est l'utilisation effective de l'argent emprunté et non quelque utilisation future ou quelque réalité économique perçue.

[46]     L'avocat de l'intimée reconnaissait dans ses observations écrites déposées après les décisions Ludco et Singleton que ces décisions rendaient insoutenable une grande partie de l'argumentation qu'il avait présentée à la conclusion de l'audience. En fait, après ces deux décisions, son argument sur cet aspect de l'affaire est devenu simplement que l'investissement dans les actions de la 540 n'avait jamais été destiné à produire un revenu et n'était pas susceptible d'en produire un. Tout ce qu'il était destiné à produire et qu'il a bel et bien produit, c'était un rendement de capital, qui, en vertu du paragraphe 84(3) de la Loi, était réputé être un dividende.

[47]     Dans une réponse écrite aux observations supplémentaires de l'intimée, l'avocat de l'appelante soutient qu'il s'agit là d'un nouvel argument, qui n'avait pas été invoqué dans un acte de procédure ou à l'audition de l'appel et que l'intimée ne peut donc invoquer maintenant. Je ne suis pas d'accord. L'avocat de l'intimée ne cherche pas par cet argument à soulever une nouvelle question de fait. Cet argument concerne simplement la qualification appropriée de l'effet juridique de faits qui n'ont jamais été en litige, et l'avocat de l'appelante s'est vu offrir la possibilité de répondre à cet argument et s'est prévalu de cette possibilité. S'il y avait un doute quant au droit de la Couronne d'invoquer cet argument maintenant, cette question serait réglée en vertu du paragraphe 152(9). L'avocat de l'appelante n'a pas dit qu'il y a des preuves supplémentaires qui se rapportent à ce nouvel argument et qu'il devrait être autorisé à présenter.

[48]     L'avocat de l'intimée soutient que la source du dividende réputé de 19 170 433 $, que Novopharm a reçu et qu'elle a déclaré comme revenu, est le paiement anticipé d'intérêts sur le prêt no 1 fait par FMI à Millbank le 23 juin 1987. La 538 était alors le commanditaire dans Millbank, avec une participation de 99,99 p. 100. Le jour suivant, la 538 a vendu sa participation dans Millbank à Royal Scot, pour 20 000 $. Une semaine plus tard, Royal Scot, s'étant vu attribuer 99,99 p. 100 du revenu net de la société de personnes aux fins de l'impôt (19 379 502 $), a vendu cette même participation à la 540, pour 2 020 000 $. Malgré le fait qu'il y avait eu une répartition de fin d'exercice aux fins de la Loi, il n'y avait eu aucune distribution des actifs de Millbank. La part de la 538 sur le capital de Millbank est donc passée à la 540 et était la source du dividende réputé, qui, argue l'avocat, était en réalité simplement un rendement d'une partie du capital de la 540 pour son seul actionnaire, Novopharm.

[49]     Néanmoins, eu égard à ce que le juge Iacobucci disait aux paragraphes 57 à 65 de ses motifs du jugement dans l'affaire Ludco quant au sens du mot « revenu » , je ne trouve pas cet argument convaincant. Plus particulièrement, cet argument ne peut être concilié avec l'affirmation suivante figurant au paragraphe 61 de l'arrêt Ludco : « Il est donc clair que « revenu » s'entend du revenu en général, savoir de toute somme qui entre dans le revenu imposable et non seulement du revenu net. » (L'italique est de moi.)

[50]     À mon avis, aucun examen de réalités économiques n'est nécessaire pour conclure que, en l'espèce, l'appelante Novopharm n'a pas investi l'argent emprunté (prêt no 2) en vue de ( « for the purpose of » ) gagner un revenu. Il ne s'agit pas d'un cas dans lequel il y a, quant à l'emprunt, des fins principales et des fins secondaires ou des fins véritables et des fins moins véritables. Ce n'est pas non plus un cas dans lequel il y a, quant à l'argent emprunté, des utilisations directes et des utilisations indirectes. Les définitions suivantes du mot anglais « purpose » figurent dans le Canadian Oxford Dictionary :

[TRADUCTION]

1.          a          quelque chose à atteindre; chose visée.

b          raison pour laquelle quelque chose est fait ou existe.

[51]     Leslie Dan a toujours été le cerveau de Novopharm. C'était lui qui prenait les décisions, en se fondant sur sa propre appréciation du bien-fondé de propositions qui lui étaient présentées, dont la proposition de MM. Boulanger et Dollinger de conclure ces opérations. Ainsi, la recherche de l'objectif visé en l'espèce commence et s'arrête avec ce que M. Dan cherchait à atteindre pour Novopharm. Mon appréciation de la preuve, et notamment des dépositions de M. Boulanger et de M. Dan, est que M. Dan a autorisé ces opérations dans le seul but d'assurer à Novopharm l'utilisation des pertes accumulées de Royal Scot, de manière que ces pertes soient déduites des profits de Novopharm, afin de réduire le montant de l'impôt que Novopharm aurait à payer. Il n'y avait aucune fin secondaire. J'ai déjà mentionné que le juge McLachlin a dit dans Shell Canada que les tribunaux doivent tenir compte de la réalité économique qui sous-tend des opérations[27]. Je fais également remarquer que dans l'affaire Ludco, bien qu'il aie rejeté les critères de l'objet véritable et de l'objet dominant pour l'application du sous-alinéa 20(1)c)(i), le juge Iacobucci a dit[28] :

On peut présumer que les tribunaux retiendraient une telle approche lorsque des inquiétudes sont exprimées en matière d'évitement fiscal.

[52]     J'ai conclu que les opérations considérées en l'espèce n'avaient d'autre but que de permettre à Novopharm d'éviter une obligation fiscale. Contrairement à ce que soutenait Me Guselle, les opérations avaient assurément été réglées d'avance, dans ce seul but. Le juge Estey a dit dans Stubart c. La Reine[29] :

[TRADUCTION] Aujourd'hui il n'y a qu'un seul principe ou solution: il faut lire les termes d'une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s'harmonise avec l'esprit de la loi, l'objet de la loi et l'intention du législateur.

Commentant cet énoncé de droit, le juge Iacobucci disait dans Canada c. Antosko[30] :

C'est ce principe qui doit prévaloir à moins que l'opération ne soit un trompe-l'oeil ou qu'elle ne soit si manifestement synthétique qu'elle est en réalité artificielle.                     (L'italique est de moi.)

La question du trompe-l'oeil n'est pas en cause dans la présente espèce, mais, à mon avis, la deuxième moitié de la phrase précitée décrit bien le plan d'évitement fiscal que MM. Boulanger et Dollinger avaient conçu pour M. Dan. Selon moi, il suffit de suivre le sens ordinaire et grammatical des termes du sous-alinéa 20(1)c)(i) pour conclure que cet emprunt ne répond pas aux exigences de ce sous-alinéa. Si j'ai tort à cet égard, j'interpréterais assurément les termes « utilisé en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien » comme n'étant pas destinés à inclure une utilisation d'argent emprunté visant à exécuter des plans n'ayant d'autre but que de permettre d'éviter de l'impôt.

[53]     Deux stratagèmes semblables à celui-ci ont déjà été examinés par notre cour. Dans Mark Resources[31], la contribuable - une société résidente du Canada - avait conclu une série complexe d'opérations en vue de pouvoir tirer parti des pertes accumulées d'une filiale résidente des États-Unis. Tout comme en l'espèce, on avait à cette fin organisé les emprunts, ainsi que les opérations connexes, de façon que la société rentable soit tenue de payer des intérêts, qu'elle avait ensuite cherché à déduire en vertu du sous-alinéa 20(1)c)(i), tandis que le revenu produit avait été acheminé vers la société des États-Unis, où les pertes pourraient en être déduites. Les fonds sont ensuite allés à la contribuable canadienne sous la forme d'un dividende intersociétés libre d'impôt. Le juge Bowman, titre qu'il portait alors, a conclu que la « véritable fin » relative à l'utilisation de l'argent emprunté était l'importation des pertes de la filiale américaine, de sorte que ces pertes puissent être déduites dans le calcul du revenu de la contribuable canadienne. Dans ses motifs du jugement, le juge Bowman a dit[32] :

Les manières respectives dont l'appelante et l'intimée caractérisent la fin à laquelle l'argent a été utilisé sont, à certains égards, justes en apparence. Cependant, je crois qu'elles sont toutes les deux fondées sur une erreur de logique dans la mesure où elles attribuent à un événement dans une série une fin qui est fondée sur l'événement subséquent. La véritable fin est plus large et elle incorpore tous les maillons subordonnés et accessoires de la chaîne. Avant toute chose, l'argent emprunté a été utilisé pour permettre aux pertes américaines de PDI d'être, en réalité, importées au Canada et déduites dans le calcul du revenu de PDL. Tel était l'objectif financier ultime de l'opération. [L'italique est de moi.]

Il a poursuivi en disant[33] :

Quelle a été, donc, l'utilisation « directe » de l'argent emprunté en l'espèce? L'utilisation directe et immédiate a consisté à injecter des capitaux dans une filiale, avec comme conséquence nécessaire et prévue que la filiale devait tirer un revenu en intérêts de dépôts à terme, revenu sur lequel elle pourrait verser des dividendes. Cependant, à mon avis, l'on ne peut pas dire que le gain de revenus en dividendes était la fin réelle pour laquelle les fonds empruntés ont été utilisés. Théoriquement, l'on pourrait dire que, dans une série d'événements liés qui conduisent à une conclusion prédéterminée, tous visent, l'un après l'autre, à atteindre le résultat qui s'ensuit immédiatement, mais pour déterminer à quelle « fin » les fonds ont été empruntés, en application de l'alinéa 20(1)c), la Cour est confrontée à des considérations pratiques qui n'intéressent pas le théoricien pur. Cette fin, pratique et réelle, et en aucune façon lointaine, fantaisiste ou indirecte, consiste dans l'importation de pertes des États-Unis. Cette affaire n'est pas l'inverse de l'affaire Bronfman. La fin vague, c'est-à-dire de protéger un actif n'ayant pratiquement pas produit de revenu, était évidemment secondaire par rapport à la fin directe et peu rentable que constituait le versement du capital à un bénéficiaire de la fiducie. En l'espèce, l'étape immédiate qui consistait à investir dans une filiale, laquelle, d'après le plan, devait nécessairement verser des dividendes, n'était pas la fin réelle de l'utilisation de l'argent. Le fait pour PDI d'avoir gagné un revenu en intérêts et le fait d'avoir versé des dividendes à PDL étaient des étapes essentielles, tout en étant d'ordre secondaire et incident, compte tenu de l'objectif réel qui était sous-jacent à la mise en oeuvre du plan. Le montant de dividendes, bien qu'il fût déductible dans le calcul du revenu imposable et fondé sur l'intérêt tiré des dépôts à terme, était inférieur à l'intérêt versé à la Banque Royale. Il est vrai que le résultat économique global, si tous les éléments du plan fonctionnent, représente un gain net pour l'appelante, mais ce type de gain ne résulte pas de la production d'un revenu mais d'une diminution des impôts autrement payables au Canada. Je sais que les dividendes, bien qu'ils soient déductibles dans le calcul du revenu imposable, constituent néanmoins un revenu. C'est cette caractéristique de notre système fiscal canadien selon lequel ces dividendes peuvent être déduits dans le calcul du revenu imposable, qui confère néanmoins au plan son apparente viabilité économique.

Bien qu'il traite de la « véritable fin » , de l' « objectif financier » et du « résultat économique global » , le juge Bowman a clairement conclu dans cette affaire, comme je le fais en l'espèce, qu'il y avait une seule fin à laquelle l'argent emprunté avait été affecté.

[54]     Dans Canwest[34], le juge McArthur était parvenu à la même conclusion, et ce, essentiellement pour les mêmes raisons. Dans cette affaire, on avait conclu environ 32 opérations dans le seul but de faire en sorte que l'appelante puisse revendiquer le droit de déduire environ 5 millions de dollars en vertu du sous-alinéa 20(1)c)(i), tout en recouvrant la quasi-totalité de cette somme sous la forme d'un dividende intersociétés libre d'impôt. Tout comme dans l'affaire Mark Resources, il n'y avait manifestement pas d'autre but que la production d'un revenu pour la société déficitaire et la production de pertes pour la société rentable.

[55]     L'avocat de l'appelante cherchait à distinguer ces deux affaires de la présente espèce du point de vue des faits. Il arguait en outre que ces décisions avaient en fait été infirmées par les décisions rendues dans Shell, Ludco et Singleton. Il est vrai que les séries d'opérations mises en oeuvre dans les affaires Mark Resources et Canwest et dans la présente espèce ne sont pas identiques. Toutefois, ce que ces causes ont en commun et qui les distingue toutes de Shell, Ludco et Singleton, c'est que, dans chacune de ces causes, on avait mis en oeuvre une série complexe d'opérations uniquement pour permettre à la société rentable de déduire des intérêts, tout en faisant en sorte que le rendement de l'argent emprunté devienne un revenu pour la société déficitaire, revenu qui passait ensuite entre les mains de la société rentable sous la forme d'un dividende intersociétés, libre d'impôt. Par contraste, la société Shell Canada avait besoin d'emprunter de l'argent pour l'exploitation de son entreprise. Dans l'affaire Ludco, la contribuable avait emprunté les fonds pour les investir, donc pour gagner de l'argent, sous la forme de revenus et de gains en capital. Tout comme dans le cas de la société Shell, le but de M. Singleton était d'utiliser l'argent dans son entreprise. Dans chacun de ces cas, le contribuable avait un but qui consistait à produire un revenu; tous avaient organisé leurs affaires pour réaliser cet objectif le plus efficacement pour eux, ce que les contribuables canadiens sont en droit de faire comme l'a dit à maintes reprises la Cour suprême du Canada. L'appelante soutient que notre droit ne fait pas mention d'un critère de l'objet commercial; en tant que proposition générale, cette assertion est exacte. Cependant, pour avoir une déduction en vertu du sous-alinéa 20(1)c)(i), il faut qu'il y ait un objectif ( « purpose » ) de « tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien » , même si cela peut n'être qu'une fin secondaire par rapport à l'objectif global du contribuable et même si le revenu devant être gagné peut être minuscule par rapport aux frais d'intérêts. Il en est ainsi non pas parce que cela fait partie du droit en général, mais parce que ces termes figurent dans le sous-alinéa établi par le législateur. Et il n'est pas satisfait aux exigences relatives à ce libellé par la simple intention de faire en sorte que les pertes d'une société s'appliquent de manière à réduire l'impôt pour une autre société. Je conclus que Novopharm n'a pas droit à la déduction qu'elle avait demandée en vertu du sous-alinéa 20(1)c)(i). Pour les mêmes raisons, elle n'est pas en droit de déduire non plus les frais de montage financier qu'elle a payés ou les honoraires qu'elle a versés à L & H.

[56]     Me Guselle cherchait également à distinguer de la présente espèce les affaires Mark Resources et Canwest en disant que, dans ces deux causes, la société utilisée comme source du dividende intersociétés versé à l'appelante avait été dissoute une fois le plan exécuté, tandis que, en l'espèce, la 539 et la 540 ont continué d'exister et ont exploité la société de personnes Millbank, achetant et vendant des titres négociables et produisant des profits pour Novopharm jusqu'à ce que, en 1995, elles soient vendues. Toutefois, ni les quelques placements que Millbank a faits dans des titres négociables en 1988 et en 1989 ni le fait qu'elle a continué d'exister après 1989 n'ont d'incidence sur les opérations que concernent les présents appels. Ces placements ont été financés avec de l'argent autre que le produit du prêt no 2, que Millbank a utilisé intégralement pour rembourser le prêt no 1. La question qui m'est soumise se rapporte uniquement à la fin à laquelle a été utilisé le produit du prêt no 2. Cela n'est pas modifié par d'autres activités de Millbank, qu'elles aient été exercées en même temps ou après.

Réduction indue ou factice du revenu

[57]     Avant sa réédiction en 1988, le paragraphe 245(1) se lisait comme suit :

245(1) Dans le calcul du revenu aux fins de la présente loi, aucune déduction ne peut être faite à l'égard d'un débours fait ou d'une dépense faite ou engagée, relativement à une affaire ou opération qui, si elle était permise, réduirait indûment ou de façon factice le revenu.

Dans l'affaire Mark Resources, le juge Bowman a examiné la question de savoir si cette disposition s'appliquait aux faits dont il était saisi et il a conclu que non. Il n'avait toutefois pas l'avantage de pouvoir se fonder sur les décisions rendues par la Cour d'appel fédérale dans Fording Coal[35] et La Reine c. Central Supply Company (1972) Limited.[36]. Dans ces décisions, la Cour d'appel a énoncé les trois facteurs suivants à prendre en compte dans l'application du paragraphe 245(1). Si elle était permise, la déduction serait-elle contraire à l'objet et à l'esprit de la Loi? Les opérations donnant lieu aux déductions sont-elles conformes à l'usage normal en affaires? Les opérations ont-elles été conclues pour des fins commerciales véritables? La Cour suprême du Canada a eu l'occasion d'examiner cette formulation du critère dans Shell Canada, mais a choisi de ne pas la désapprouver ni de l'approuver[37].

La déduction serait-elle contraire à l'objet et à l'esprit de la Loi?

[58]     Les opérations considérées en l'espèce visaient, ai-je conclu, un seul objectif. Novopharm a acheté les pertes accumulées de Royal Scot pour une somme représentant 10 p. 100 du montant de ces pertes. La Cour d'appel fédérale a récemment statué, dans OSFC Holdings Ltd. c. La Reine[38], que de telles opérations, si elles permettaient de réduire l'impôt, représenteraient un abus des dispositions de la Loi. Le juge d'appel Rothstein a traité assez longuement de la politique sous-jacente à la Loi concernant le transfert de pertes d'un contribuable à un autre. Après avoir examiné la doctrine, ainsi que les dispositions du paragraphe 111(5), qui permet le transfert de pertes entre sociétés dans certaines circonstances très limitées, il a conclu, au paragraphe 98 de ses motifs :

Je n'ai aucune difficulté à conclure que la politique générale qui sous-tend la Loi de l'impôt sur le revenu interdit l'échange des pertes autres que des pertes en capital par les sociétés, sous réserve de certaines limites précises.

Les circonstances limitées dont a traité le juge d'appel Rothstein concernent un changement du contrôle d'une entreprise suivi du maintien de l'exploitation de celle-ci et ne s'appliquent évidemment pas à la présente espèce. Il serait en outre contraire à l'esprit du sous-alinéa 20(1)c)(i) de la Loi de permettre la déduction des intérêts dans ce cas-ci. Comme la Cour suprême l'a statué depuis longtemps[39], cette disposition a pour objet de favoriser l'accumulation de capital, pour que cela donne ensuite lieu à un revenu imposable. Appliquer cette disposition pour mettre en oeuvre un transfert de pertes entre sociétés non liées dans le cadre d'un plan d'évitement fiscal n'est assurément pas conforme à l'objet de cette disposition. L'argument de l'appelante selon lequel une déduction du revenu permise par les dispositions expresses de la Loi ne peut être contraire à l'objet et à l'esprit de celle-ci est dépourvu de fondement. Un tel argument a été examiné et rejeté par le juge d'appel Strayer dans Fording Coal[40] et plus récemment par le juge d'appel Rothstein dans OSFC[41]. La réponse à la première question est « oui » .

Les opérations sont-elles conformes à l'usage normal en affaires?

[59]     L'avocat de l'appelante arguait que l'achat d'actions ordinaires est une opération commerciale normale et que, le ministre n'ayant pas formulé une hypothèse contraire dans un acte de procédure, l'intimée ne peut l'emporter sur ce point qu'en présentant une preuve que cela n'est pas conforme à l'usage normal en affaires. Aucune preuve semblable n'a été présentée. À mon avis, il peut bien y avoir des cas dans lesquels des éléments de preuve sont nécessaires pour régler la question de savoir si une opération ou un groupe d'opérations est conforme à l'usage normal en affaires, mais il ne s'agit pas ici d'un tel cas. Les faits de l'espèce montrent bien clairement que les opérations en cause ne sont pas des opérations qui seraient conclues dans le cours normal des activités d'une entreprise. Dans l'affaire Canwest, le juge McArthur a décrit un plan d'évitement fiscal semblable, mais différent, comme représentant une « manipulation fiscale » et non la « réalité commerciale » . Cela décrit bien le plan que MM. Dollinger et Boulanger ont vendu à M. Dan en l'espèce. En faisant abstraction pour l'instant de leur résultat du point de vue de l'évitement fiscal, ces opérations réglées d'avance ( « accord global » ) ne pouvaient donner lieu qu'à la perte d'environ 3,5 millions de dollars de Novopharm.

Les opérations ont-elles été conclues pour des fins commerciales véritables?

[60]     Je n'ai pas compris que l'avocat des appelantes prétende qu'une fin commerciale autre que l'évitement de l'impôt motivait les appelantes en l'espèce. Cette prétention exigerait assurément pas mal d'explications, et aucune explication n'a été donnée.

Conclusion

[61]     Les appels de Novopharm échouent, pour le motif que cette dernière ne peut satisfaire aux exigences du sous-alinéa 20(1)c)(i) concernant les intérêts, aux exigences du sous-alinéa 20(1)e)(ii) concernant les frais de montage financier ou aux exigences de l'alinéa 18(1)a) concernant les honoraires versés à L & H. Ils échouent également en vertu de l'article 245 dans la forme dans laquelle il existait à l'époque pertinente.

[62]     Les appels de la 540 échouent pour les raisons données au paragraphe 31 ci-devant. Même si j'avais été valablement saisi de l'appel de la 540 pour 1988, cet appel échouerait pour les mêmes raisons que dans le cas des appels de Novopharm, et les appels de la 540 pour 1990 et 1991, étant des appels corrélatifs, échoueraient également.

[63]     Tous les appels sont rejetés. L'intimée a droit à un seul mémoire de frais.

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de décembre 2001.

« E. A. Bowie »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 2e jour d'avril 2003.

Mario Lagacé, réviseur


ANNEXE « A »

TABLEAU 1

12 JUIN 1987

Constitution de sociétés à numéro




ROYAL SCOT RESOURCES LTD.

( « Royal Scot » )

(environ 20 000 000 $ de pertes autres qu'en capital et de frais d'exploration au Canada)

                                                        




                  100 %                                       100 %                                    100 %




722537

722538

722539

                                                                                                      

      100 %

                                                                                               

·         La 722537 Ontario Inc. ( « 722537 » ), la 722538 Ontario Inc. ( « 722538 » ) et la 722539 Ontario Inc. ( « 722539 » ) sont constituées comme filiales de Royal Scot Resources Ltd. ( « Royal Scot » ).

·         La 722540 Ontario Inc. est constituée comme filiale de la 722539.


TABLEAU 2

12 JUIN 1987

Fondation de la société en commandite Millbank




ROYAL SCOT

                                                         

                            

                         100 %                                                         100 %

722537

722538

                            

COMMANDITÉ                                                                         COMMANDITAIRE

(participation                                                                   (participation de

de 0,01 %)                                                                      99,99 %)

MILLBANK

·         La 722537 et la 722538 concluent une convention pour créer une société en commandite sous le nom « Millbank Limited Partnership » ( « Millbank » ).

·         La 722537 est le commandité dans Millbank, avec une participation de 0,01 %.

·         La 722538 est le commanditaire dans Millbank, avec une participation de 99,99 %.

·         La 722537 n'a fait aucun apport de capital à Millbank, et la 722538 a fait un apport de 20 000 $.


TABLEAU 3

23 JUIN 1987

Prêt no 1




FMCC

                                                              

Chèque de 193 913 043 $                           Billet de FMI de 193 913 043 $

                                                     

MILLBANK

                                                                 

Chèque de 193 913 043 $                           Billet de FMI de 193 913 043 $

endossé en faveur de FMI                                   

                                                   

FMI

·         La First Marathon Capital Corporation ( « FMCC » ) fait un chèque de 193 913 043 $ à Millbank, à savoir le produit du prêt no 1, à 11,5 % par année. Des frais de montage financier de 500 000 $ sont payables à FMCC.

·         Comme condition du prêt no 1, Millbank endosse le chèque de FMCC de 193 913 043 $ en faveur de First Marathon Inc. ( « FMI » ) par voie de prêt.

·      En échange, FMI donne à Millbank un billet d'un montant de 193 913 043 $ (le « billet de FMI » ), à 11,55 % par année, mais aucuns frais de montage financier ne sont payables.

·         Millbank donne le billet de FMI à FMCC en garantie du prêt no 1.


TABLEAU 4

23 JUIN 1987

Paiement anticipé d'intérêts sur le billet de FMI




FMCC

                                                                   

Millbank endosse un chèque de FMI

de 19 991 035 $

MILLBANK

                                                                  

Chèque de 19 991 035 $

FMI

·      Millbank reçoit un chèque de 19 991 035 $ de FMI en guise de paiement anticipé d'intérêts exigé par Millbank sur le billet de FMI.

·      Millbank endosse le chèque de FMI de 19 991 035 $ en faveur de FMCC en réduction du principal sur le prêt no 1 - qui passe de 193 913 043 $ à 173 922 008 $ -, ce qui était une condition du prêt no 1.


TABLEAU 5

24 JUIN 1987

                             Royal Scot Resources Ltd. devient

                             le nouveau commanditaire dans Millbank

                                                                       




ROYAL SCOT

2)          Billet d'un montant de 20 000 $

                                                                                                 

                                                                                                 1) Participation de

                                                                                                        commanditaire

                                                                                                    dans Millbank

                                                                                                       

                                                                                

                 100 %                                                            100 %    




722537

722538

                                                                                     

                                

Commandité                                                                   Commanditaire

(0,01 %)                                                                          (99,99 %)

MILLBANK

1)       Royal Scot acquiert la participation de commanditaire de la 722538 dans Millbank.

2)       Royal Scot donne à la 722538 un billet d'un montant de 20 000 $.


TABLEAU 6

25 JUIN 1987

Première fin d'exercice de Millbank

722537

Royal Scot

                                                                             

1 938 $ (0,01 % du revenu net)                                      19 379 502 $ (99,99 % du

                                                                                     revenu net)

                                                                       19 381 440 $ (100 % du revenu net)

MILLBANK

·         La première fin d'exercice du 25 juin 1987 de Millbank est déclarée.

·         Le revenu net de Millbank aux fins de l'impôt, d'un montant de 19 381 440 $, a été calculé comme suit :

                  Intérêts payés d'avance                                       19 991 035 $

                  Moins : deux jours d'intérêt

sur le prêt no 1;                                  109 595 $

                                                                                                                   

                  frais de montage financier

relatifs au prêt no 1                            500 000 $        609 595 $

                                                                                               19 381 440 $

                                                                                                                

·         Sur le revenu net de Millbank aux fins de l'impôt, 1 938 $ ont été attribués à la 722537 et 19 379 502 $ ont été attribués à Royal Scot.

·         Royal Scot a compensé par ses pertes autres qu'en capital et par ses frais d'exploration au Canada la part de 19 379 502 $ qui lui avait été attribuée sur le revenu net de Millbank.


TABLEAU 7

30 JUIN 1987

La 722537 et Royal Scot cessent d'être des associés dans Millbank

                  




722539

722540

1) Participation                2) 1,00 $     3) Participation             4) Billets d'un

de commandité                                     de                               montant de

                                                   commanditaire            20 000 $ et d'un

montant de 2 000 000 $

                                                                                       




722537

Royal Scot

Commandité                                                                   Commanditaire

(0,01 %)                                                                          (99,99 %)

                                                     

MILLBANK

1)       La 722537 vend sa participation de commandité de 0,01 % dans Millbank à la 722539, pour 1,00 $.

2)       La 722537 reçoit 1,00 $.

3)       Royal Scot vend sa participation de commanditaire dans Millbank à la 722540.

4)       Royal Scot reçoit des billets d'un montant de 20 000 $ et d'un montant de 2 000 000 $.


TABLEAU 8

30 JUIN 1987

Acquisition, par Novopharm, de la 722539 et de la 722540




NOVOPHARM

                            

                            

                            

                                                                             

                            100 %                                                  100 %

722539

722540

·         Novopharm acquiert de Royal Scot les actions de la 722539 et acquiert de la 722539 les actions de la 722540, pour 10,00 $ dans chaque cas.


TABLEAU 9

30 JUIN 1987

Achat, par Novopharm, d'un billet d'un montant de 2 000 000 $

ROYAL SCOT

                                                                 

2) Billet de Novopharm                               1) Billet de la 722540

     de 2 000 000 $                                                       de 2 000 000 $

                                                                              

NOVOPHARM

3) Dette de 2 000 000 $            3)                       4) Conversion en actions,

     de la 722540 envers Novopharm                           le 18 juillet 1988, de la

dette de la 722540 envers

Novopharm

722540

1)       Novopharm achète le billet de Royal Scot de 2 000 000 $ émis par la 722540.

2)       En contrepartie, Novopharm donne à Royal Scot son propre billet d'un montant de 2 000 000 $. Le paiement de ce billet est conditionnel, comme l'indique la pièce R-1, (107), annexe « A » .

3)       La 722540 doit à Novopharm 2 000 000 $ en raison de 1) et 2) ci-dessus.

4)       Le 18 juillet 1988, Novopharm convertit en actions de la 722540 les 2 000 000 $ de dette de la 722540 envers elle.


TABLEAU 10

30 JUIN 1987

Paiement du billet d'un montant de 20 000 $




ROYAL SCOT

  




                                                                                  3) Royal Scot endosse

                                                                                    un chèque de Novopharm

1) Chèque de

     20 000 $ pour

     souscription d'actions                                   100 %                  100 %     

722540

722537

722538

2) La 722540 endosse le

     chèque de 20 000 $

     de Novopharm

1)       Novopharm fait un chèque de 20 000 $ à la 722540 pour l'achat d'actions non émises.

2)       La 722540 endosse le chèque de 20 000 $ en faveur de Royal Scot en paiement de son billet d'un montant de 20 000 $ dû à Royal Scot (voir le tableau 7).

3)       Royal Scot endosse le chèque de 20 000 $ en faveur de la 722538 pour payer son billet d'un montant de 20 000 $ (voir le tableau 5).


TABLEAU 11

30 JUIN 1987

Prêt no 2




FMCC

1) Chèque de 173 922 008 $                                            4) Endossement du chèque de FMCC

              pour le remboursement du

              prêt no 1. Millbank donne le

              billet de FMI de 193 913 043 $

              en garantie du prêt no 2.

Novopharm

2) Endossement du chèque de

    173 922 008 $ de FMCC




722540

3) Endossement du chèque de

    173 922 008 $ de FMCC

Millbank

1)       FMCC fait un chèque de 173 922 008 $ à Novopharm comme produit du prêt no 2, à 11,5 % par an. Des frais de montage financier de 500 000 $ sont payés par Novopharm à FMCC.

2)       Novopharm endosse le chèque de 173 922 008 $ de FMCC en faveur de la 722540 pour une souscription d'actions.

3)       La 722540 endosse le chèque de 173 922 008 $ de FMCC en faveur de Millbank comme apport de capital.

4)       Millbank endosse le chèque de FMCC de 173 922 008 $ en faveur de FMCC pour rembourser le solde de 173 922 008 $ du prêt no 1. Millbank donne le billet de FMI de 193 913 043 $ en garantie du prêt no 2.


TABLEAU 12

30 JUIN 1987

Paiement de frais de montage financier relatifs au prêt no 1




FMCC

                                                                                           3) Chèque de 500 000 $ pour

                                                                                               le paiement de frais de

                                                                                              montage financier relatifs

        au prêt no 1

                                                                            

Novopharm

                                                                  

1) Chèque de 500 000 $ pour

    des actions non émises




722540

2) Chèque de 500 000 $ pour

     un apport de capital

Millbank

1)       Novopharm fait un chèque de 500 000 $ à la 722540 pour des actions non émises.

2)       Millbank reçoit un chèque de 500 000 $ de la 722540 pour un apport de capital.

3)       FMCC reçoit un chèque de 500 000 $ de Millbank pour le paiement de frais de montage financier relatifs au prêt no 1.


TABLEAU 13

23 JUIN 1988

Sommes dues sur les prêts no 1 et no 2 et sur le billet de FMI

   

FMI

FMCC

                                                                                     

1)       193 913 043 $




2) 383 581 $

                             

            

   

Novopharm

3) 193 539 458 $

1)       FMI doit à Millbank 193 913 043 $ au titre du principal sur le billet de FMI.

2)       Millbank doit à FMCC 383 581 $ d'intérêt sur le prêt no 1.

3)       Novopharm doit à FMCC sur le prêt no 2 :

         •         principal                173 922 008 $

          •         intérêt                    19 617 450 $

                                                193 539 458 $

                                                                                       


TABLEAU 14

23 JUIN 1988

Le prêt no 2 et le billet de FMI arrivent à échéance

   

FMI

FMCC

1) Chèque de                                                                                            

    193 913 043 $

  

Millbank

   

722540

2) Endossement d'un                      3) Endossement du

    chèque de 193 529 462 $               chèque de 193 529 462 $

   

Novopharm

4) Chèque de 9 996 $

1)      FMI émet un chèque de 193 529 462 $ en faveur de la 722540 (produit du billet de FMI de 193 913 043 $ moins 383 581 $ d'intérêts dus par Millbank à FMCC).

2)      La 722540 endosse le chèque de FMI de 193 529 462 $ en faveur de Novopharm.

3)      Novopharm endosse le chèque de FMI de 193 529 462 $ en faveur de FMCC.

4)      Novopharm fait un chèque de 9 996 $ à FMCC, à savoir la différence entre le montant total de 193 539 458 $ dû à FMCC (tableau 13) et le montant net de 193 529 462 $ du chèque de FMI endossé en faveur de FMCC.


TABLEAU 15

23 JUIN 1988

Flux financiers

Sur son billet, FMI doit à Millbank                                                 193 913 043 $

Moins : Millbank doit de l'intérêt à

   FMCC sur le prêt no 1                                                                    (383 581) $

Chèque net de FMI à Millbank, endossé en

faveur de la 722540, ensuite en faveur de Novopharm,

puis en faveur de FMCC pour payer le principal et l'intérêt

sur le prêt no 2                                                                             193 529 462 $

Novopharm doit à FMCC

•                             Principal sur le prêt no 2          173 922 008 $

•                             Intérêt sur le prêt no 2              19 617 450 $ 193 539 458 $

Solde dû par Novopharm

à FMCC                                                                                                 (9 996) $

Payé par Novopharm à FMCC                                                               9 996 $

                                                                                                                          0


TABLEAU 16

30 juin 1987 - 4 mars 1988

Décaissements de Novopharm

                                                          2)




722539

1)

NOVOPHARM

7)

6)

9)

                                   3)          4)         8)                                                     




722540

                               6)

Laventhol & Horwath

4)                                 5)

       




Millbank

Westmorland

4)

       




FMCC

Fogler, Rubinoff

                                                             

                                                             




1)                 Le 30 juin 1987, Novopharm paie à la 722539 les actions

de la 722540                                                                                       10 $

2)       Le 30 juin 1987, Novopharm paie à Royal Scot des actions

de la 722539                                                                                       10 $

Report                                                                                                           20 $


Reporté                                                                                                         20 $

3)                 Le 30 juin 1987, Novopharm souscrit des actions

non émises de la 722540                                                             20 000 $

4)                 Le 30 juin 1987, Novopharm finance le paiement,

par Millbank à FMCC, des frais de montage

financier relatifs au prêt no 1                                                      500 000 $

5)       Le 30 juin 1987, Novopharm paie à FMCC les frais

           de montage financiers relatifs au prêt no 2                               500 000 $

6)       Le 10 août 1987, Novopharm paie des honoraires

           juridiques à Fogler, Rubinoff                                                       75 550 $

7)       Le 26 janvier 1988, Novopharm paie Royal Scot                    2 000 000 $

8)       Le 13 août 1987, Novopharm paie des honoraires

           de consultation à Laventhol & Horwath                                    200 000 $

9)       Le 4 mars 1988, Novopharm paie des honoraires

           d'intermédiation à Westmorland                                                200 000 $

10)     Le 23 juin 1988, Novopharm paie à FMCC d'autres

           intérêts relatifs au remboursement du prêt no 2                            9 996 $

           Total des décaissements                                                       3 505 566 $

                                                                                                                           



[1]           Paragraphes 11 à 19 ci-après.

[2]           Sous-alinéa 19(iv) ci-devant.

[3]           Elle n'a pas déduit le paiement supplémentaire d'intérêts de 9 996 $ fait à FMCC, pour des raisons qui n'ont pas été expliquées au cours de la présentation de la preuve.

[4]           Avis d'appel, par. 4.

[5]           C.C.I., no 92-2505(IT)G, 3 mai 1994 (94 DTC 1475).

[6]           Aux pages 1 et 2 (DTC : aux pages 1475 et 1476).

[7]           Samson et Frères Ltée c. La Reine, C.C.I., no 92-607(IT)G, 1er novembre 1995 (97 DTC 642).

[8]           Liampat Holdings Ltd. c. La Reine, (no 2), C.F. 1re inst., no T-897-89, 4 janvier 1996 (96 DTC 6044).

[9]           Une fois que je les ai invités à le faire, ils ont ajouté 30 pages après que la Cour suprême du Canada eut rendu ses jugements dans les affaires Singleton c. Canada, 2001 C.S.C. 61, et Ludco Enterprises Ltd. c. Canada, 2001 C.S.C. 62.

[10]          Bronfman Trust c. La Reine, [1987] 1 R.C.S. 32 (87 DTC 5059).

[11]          Canada c. Antosko, [1994] 2 R.C.S. 312 (94 DTC 6314).

[12]          Friesen c. Canada, [1995] 3 R.C.S. 103 (95 DTC 5551).

[13]          Continental Bank Leasing Corp. c. Canada, [1998] 2 R.C.S. 298 (98 DTC 6505).

[14]          Shell Canada Ltée c. Canada, [1999] 3 R.C.S. 622 (99 DTC 5669).

[15]          Observations écrites de l'appelante, p. 33.

[16]          Mark Resources Inc. c. La Reine, C.C.I., no 91-1124(IT)G, 11 juin 1993 (93 DTC 1004).

[17]          Canwest Broadcasting Ltd. c. La Reine, C.C.I., no 93-585(IT)G, 4 août 1995 (96 DTC 1375).

[18]          Canada c. Fording Coal Ltd. (C.A.), [1996] 1 C.F. 518 (95 DTC 5672).

[19]          Stubart Investments Limited c. La Reine, [1984] 1 R.C.S. 536 (84 DTC 6305).

[20]          Continental Bank, précité.

[21]          Hickman Motors Limited c. Canada, [1997] 2 R.C.S. 336 (97 DTC 5363).

[22]          Neuman c. M.R.N., [1998] 1 R.C.S. 770.

[23]          I.R.C. v. Duke of Westminster, [1936] A.C. 1.

[24]          Shell Canada Ltée c. Canada, précité, par. 28.

[25]          Par. 39-48.

[26]          Singleton, précité, par. 34-35.

[27]          Précité, au par. 39.

[28]          Précité, au par. 53.

[29]          Précité.

[30]          Précité.

[31]          Précité.

[32]          À la page 16 (DTC : à la page 1011).

[33]          Aux pages 19 et 20 (DTC : à la page 1012).

[34]          Précité.

[35]          Précité.

[36]          C.A.F., no A-411-95, 2 juin 1997 (97 DTC 5295).

[37]          Shell Canada Ltée c. Canada, précité, au par. 56.

[38]          C.A.F., no A-424-99, 11 septembre 2001 (2001 DTC 5471).

[39]          Dans Shell Canada Ltée c. Canada, précité, au par. 57, et dans la jurisprudence qui y est citée.

[40]          Précité, aux pp. 7 et 8 (DTC : aux pp. 5675 et 5676).

[41]          Précité, au par. 63.

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