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Date : 19990520

Dossier : 96-2821-IT-G

ENTRE :

342583 B.C. LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Bell, C.C.I.

QUESTION EN LITIGE :

[1] Il s’agit d’un appel interjeté à l’encontre d’une cotisation imposant à l’appelante une obligation, en vertu du paragraphe 160(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la “ Loi ”), pour un montant de 163 409,91 $ relativement à un transfert de biens — à savoir une maison et le terrain environnant — de Kurt Freiburghaus (“ F ”) à l’appelante, effectué le 4 juin 1992. Le ministre du Revenu national (le “ ministre ”) a établi la cotisation en prenant pour hypothèse notamment qu’au moment du transfert, l’appelante n’avait donné aucune contrepartie pour les biens.

FAITS :

[2] Les parties ont déposé un exposé conjoint des faits. Cet exposé indique que F avait un lien de dépendance avec l’appelante, au sens de la Loi. À la date de leur transfert à l’appelante, soit le 4 juin 1992, la juste valeur marchande des biens était de 280 000 $ et ceux-ci étaient grevés d’une hypothèque de 85 000 $.

[3] L’appelante a payé F en émettant à son intention 195 000 actions privilégiées de second rang (“ Actions ”) d’une valeur nominale de 1,00 $ chacune. Ces actions comportaient les droits et restrictions qui suivent :

(a) sans droit de vote;

(b) donnant droit, suite à une déclaration adoptée par l’ensemble des administrateurs, à des dividendes cumulatifs de 10% par année pendant la période de cinq ans suivant l’émission et, par la suite, à des dividendes non cumulatifs au même taux, dans chaque cas sur la valeur de remboursement (i.e. 1.00 $) par action à laquelle s’ajoutent les dividendes cumulatifs non versés de même que les dividendes non cumulatifs déclarés mais non versés;

(c) rachetables au gré de l’appelante à un montant équivalent à leur valeur de remboursement;

(d) après cinq ans, remboursables au gré du porteur à un montant équivalent à leur valeur de remboursement; et

(e) donnant droit, en cas de liquidation, au paiement prioritaire de la valeur de remboursement, de préférence à toutes les autres catégories d’actions (à l’exception des actions privilégiées de premier rang, dont aucune n’était en circulation à l’époque pertinente).

[4] En application de l’article 21 de la Property Law Act, l’appelante s’est vu imputer la responsabilité de l’hypothèque grevant les biens. L’appelante a effectué les versements hypothécaires pour ses exercices se terminant le 1er août, de 1992 à 1997. L’appelante a accepté de louer les biens à F pour une somme qui incluait les versements hypothécaires, les frais d’entretien, l’impôt foncier et les assurances.

[5] Le 4 juin 1992, F était assujetti à l’impôt pour une somme d’au moins163 409,91 $.

[6] L’unique témoin cité par l’appelante était M. W. A. McMann (“ M. McMann ”), évaluateur d’entreprise et vice-président chez PricewaterhouseCoopers. La qualité d’expert de ce témoin a été reconnue et celui-ci a donné son opinion sur la valeur des Actions. La lettre jointe à son rapport d’évaluation mentionne notamment ce qui suit :

[TRADUCTION]

Vous m’avez demandé mon opinion sur la juste valeur marchande, en date du 4 juin 1992, de 195 000 actions privilégiées de second rang émises à cette date par 342583 B.C. Ltd. à M. Kurt Freiburghaus, à titre de contrepartie pour le transfert par celui-ci à 342583 B.C. Ltd. d’un immeuble situé au 1036 West 17th Street, North Vancouver, Colombie-Britannique.

[7] Il a indiqué, dans son rapport écrit, qu’en date du 4 juin 1992, la juste valeur marchande des 195 000 Actions était de 174 000 $.

[8] Le rapport précise que :

[TRADUCTION]

[...] l’on définit la juste valeur marchande comme étant “ le prix — exprimé en argent ou en valeur en argent — le plus élevé pouvant être obtenu entre un vendeur et un acheteur compétents et prudents, n'ayant aucun lien de dépendance, agissant de son plein gré et en pleine connaissance de cause, dans un marché où la concurrence peut s'exercer librement. ”

[9] M. McMann a souligné que, parmi les points principaux de cette définition qui doivent être pris en considération par un évaluateur d’entreprise, l’on retrouve l’hypothèse d’une vente théorique au prix le plus élevé pouvant être obtenu entre deux parties présumées agir en toute connaissance de cause. Il a également expliqué que l’on ne pouvait tenir compte, à cette fin, d’informations obtenues après coup et qu’il lui fallait se replacer au 4 juin 1992, en mettant de côté tous les renseignements obtenus après cette date.

[10] Il a précisé qu’en additionnant la valeur de remboursement de 195 000 $ et le dividende cumulatif de 10 % sur ce montant annuellement pour une période de cinq ans, on obtient la somme de 292 500 $. Il ne s’attendait pas à l’encaissement, à chaque année, d’une somme de 19 500 $, mais plutôt à un report des dividendes cumulatifs jusqu’au remboursement après cinq ans. Il n’existait pas, à sa connaissance, de bail en bonne et due forme ni d’accord portant sur la location. C’est donc en raison d’une plus-value en capital que l’acheteur pouvait espérer un rendement de 292 500 $. Il a expliqué que tout remboursement de capital sur l’hypothèque effectué au cours de ces cinq années augmenterait la part nette de la société à l’égard des biens et que la valeur locative de ceux-ci permettait le paiement du loyer, de l'hypothèque et de l’impôt foncier.

[11] Il a rappelé la valeur de certains des taux d’intérêt directeurs et des taux de rendement — incluant le taux préférentiel de 7,5%, le taux de 9,9% pour une hypothèque de cinq ans et les taux de 7¼ à 8% des certificats de placement garantis d’une durée de cinq ans — qui prévalaient au mois de juin 1992. Il a également dressé une liste comportant un sommaire des évaluations municipales faites en Colombie-Britannique pour une maison valant 282 000 $ en 1992 et des statistiques de la chambre immobilière de la Colombie-Britannique, et ce, pour une période d’au moins 14 ans. La première série de statistiques indiquait un taux annuel de croissance composé de 10,1% pour la période allant de 1987 à 1992, de 8,6% pour la période allant de 1982 à 1987 et de 9,4% pour la période allant de 1982 à 1992. La seconde série de statistiques indiquait un taux annuel de croissance composé de 14,2% pour la période allant de 1987 à 1992, de 4,4% pour la période allant de 1982 à 1987 et de 9,2% pour la période allant de 1982 à 1992.

[12] Il a noté que le taux annuel de rendement composé nécessaire pour que la somme de 195 000 $ passe à 292 500 $ en cinq ans était de 8.45%. Il a expliqué qu’en utilisant les valeurs imposables établies pour la Colombie-Britannique et les valeurs marchandes compilées par la chambre immobilière et en se référant à deux périodes distinctes de cinq ans, l’on obtenait un rendement supérieur à celui-ci dans trois tests sur quatre. Il a fait remarquer que le rendement obtenu sur une période de dix ans était également supérieur lors des deux tests effectués. Il a en outre fait état de l’information suivante tirée de la B.C. Economical and Statistical Review :

[TRADUCTION]

40 621 unités ont été mises en chantier en 1992; il s’agit d’une augmentation de 27 % par rapport à 1991. Cette importante augmentation était causée par un taux d’immigration élevé, des taux hypothécaires à la baisse et un regain de confiance des consommateurs.

Il a ajouté que la question relative à l'évaluation peut être formulée ainsi :

[TRADUCTION]

Quel est le prix le plus élevé pouvant être obtenu pour encaisser, en cinq ans, un montant maximal de 292 500 $ à titre de produit du rachat d’actions privilégiées rachetables, lorsque l’actif servant à financer ce produit de rachat correspond à la valeur d’une parcelle de biens immeubles.

[13] Se fondant sur tous les facteurs mentionnés précédemment, il a indiqué qu’à son avis, la juste valeur marchande des Actions en date du 4 juin 1992 était de 174 000 $. Il a expliqué en être arrivé à cette conclusion en actualisant le montant de 292 500 $ (qui correspond à la totalité de l’encaissement éventuel) durant cinq ans au taux de 11 %. Il a retenu ce taux d’actualisation pour refléter la prime de risque ajoutée au taux de rendement de 7,25 % à 8,275 % qui prévalaient à l’époque, tel que mentionné dans son rapport. Bref, il a affirmé qu’un montant de 174 000 $ suffisait pour obtenir, à la fin de la période de cinq ans, la somme de 292 500 $. Il a ajouté qu’il lui était égal que l’on obtienne ce chiffre à l’égard du vendeur ou de l’acheteur. Considérant les rendements de 7,25 % à 8,5% établis précédemment, il a privilégié un taux de 11 % en raison du facteur de risque additionnel. Choisissant, parmi ces chiffres, le taux de 8 %, il y a ajouté trois points de pourcentage, ce qui représentait dans les faits, une augmentation de 37,5%. Enfin, il a affirmé être à l’aise avec ce qu’il a décrit comme une méthode objective fondée sur son expérience et qu’une maison située à North Vancouver était à l’origine de ces faits.

[14] En contre-interrogatoire, M. McMann a convenu que l’appelante pourrait remplacer les biens et que l’acheteur des Actions ne pourrait exercer aucun contrôle sur les actifs de la société, à l’exception de la possibilité de faire valoir son privilège de rachat après cinq ans. Il a convenu que l’appelante pourrait vendre la maison et acheter autre chose, mais il a fait référence à l’obligation fiduciaire des administrateurs en précisant que ceux-ci devraient agir avec prudence. Il a souligné que si l’appelante avait emprunté de l’argent sur un bien, il lui aurait fallu le placer et a laissé entendre qu’un comportement abusif à cet égard pourrait entraîner une poursuite. Il a indiqué avoir tenu compte de ce qui s’était passé avant 1992 afin de faire ses prévisions. Il a également convenu qu’il était possible que la valeur marchande subisse une baisse après 1992, mais il a précisé que les valeurs passées qu’il avait utilisées ont subi une baisse, qu’il a considéré la période de dix ans dans son ensemble et qu’il a retenu le facteur de 11 % en raison d’une baisse éventuelle. Soulignant qu’il n’y aurait plus de nouveaux terrains dans Northet West Vancouver, il a indiqué que [TRADUCTION] “ même aujourd’hui ” il croit que la valeur des biens immobiliers augmentera. Il a précisé que la valeur marchande était également influencée par l’immigration et les taux d’intérêts. Lorsqu’on lui a demandé s’il avait tenu compte du fait que l’argent serait immobilisé pour une période de cinq ans, il a répliqué qu’un taux de risque s’ajoutait au rendement. Il a retenu le taux de 11 % parce que la demande de remboursement ne pouvait être présentée avant cinq ans. En établissant ce taux, il a également tenu compte du fait que l’appelante était une société fermée. Il a affirmé que de supposer que la société verserait un dividende annuel défiait la logique, étant donné que celle-ci n’y était pas obligée.

[15] L’avocate de l’intimée a ensuite assigné un certain Frank Pollock (“ M. Pollock ”) et a tenté d’établir sa qualité de témoin expert. La Cour a refusé de le reconnaître comme tel. Titulaire d’un baccalauréat en administration des affaires obtenu en 1973 à la University of British Columbia, il a travaillé pendant une année dans un cabinet de comptables agréés. Depuis 1977, il travaille pour Revenu Canada. Il dit avoir pris des cours d’évaluation internes de même que six cours portant sur l’évaluation d’entreprises organisés par la University of Toronto. Il a en outre indiqué qu’il avait subi l’examen à deux reprises et avait échoué à chaque fois. Il avait effectué toutes ses évaluations pour le compte de Revenu Canada. Il s’agissait de sa première comparution en cour.

[16] L’intimée n’a posé aucune question à M. Pollock et n’a soumis aucune autre preuve.

ARGUMENTATION DE L’APPELANTE :

[17] L’avocat de l’appelante a soutenu que, sur le plan juridique, la valeur de la contrepartie donnée par l’appelante à F était de 195 000 $. Il a affirmé que, conformément à l’article 42 de la British Columbia Company Act, aucune action ayant une valeur nominale ne peut être distribuée ou émise à moins que cela ne soit à un prix ou pour une contrepartie équivalant au moins au résultat obtenu en multipliant le nombre d’actions par 1 $. Il a indiqué qu’en souscrivant les Actions, F s’est vu imposer l’obligation de payer à l’appelante la somme de 195 000 $ en espèces ou en biens. Pour appuyer sa prétention, il a cité les articles 42, 43 et 55 du British Columbia Company Act. Le paragraphe 42(1) prévoit qu’aucune action ayant une valeur nominale ne peut être distribuée ou émise à moins que cela ne soit à un prix ou pour une contrepartie équivalant au moins au résultat obtenu en multipliant le nombre d’actions distribuées ou émises par leur valeur nominale. L’article 43 édicte notamment qu’aucune action ne peut être émise à moins d’être entièrement libérée et qu’une action n’est entièrement libérée qu’à partir du moment où la société émettrice a reçu la contrepartie totale pour celle-ci en espèces ou sous forme de biens ou de services. En vertu de l’article 55, la responsabilité d’un membre à l’égard d’une action ayant une valeur nominale se limite au montant non versé sur cette action et que la responsabilité personnelle de ce membre se limite au prix convenu de l’action.

[18] Il a ensuite allégué que F avait l’obligation de payer la somme de 195 000$ à l’appelante le 4 juin 1992 et qu’il s’était acquitté de cette obligation par le transfert de biens ayant une juste valeur marchande de 195 000 $. Il a ajouté que les 195 000 actions ayant chacune une valeur nominale de 1 $ représentaient la contrepartie reçue par F et que ce dernier était ainsi libéré de son obligation de payer ses actions en espèces.

[19] Il a cité l’arrêtOsborne v. Steel Barrel Co. Ltd., [1942] 1 All E.R. 634 (C.A.). Dans cette affaire, une société nouvellement créée a acquis des stocks[1] pour une somme d’argent de 10 000 £ et des actions entièrement libérées ayant une valeur nominale de 30 000 £ émises à l’intention du propriétaire des stocks. La Couronne soutenait que ces actions n’avaient rien coûté à la société et que la valeur des stocks inscrite aux registres devrait être de 10 000 £ . La Cour, rejetant cette prétention, dit, aux p. 637 et 638 :

[TRADUCTION]

Il a été soutenu avec vigueur, au nom de la Couronne, que si une société acquiert des stocks à titre de contrepartie de l’émission d’actions entièrement libérées au vendeur, il faut, pour établir les bénéficies réalisés par la société, considérer ces stocks comme ayant été acquis pour rien. Ainsi, lors de la vente de ces stocks, le fisc est justifié de considérer le prix total d’achat comme un gain. Ces affirmations ont de quoi surprendre et il faudrait que la jurisprudence à cet égard soit concluante pour que nous puissions les admettre. [...] Cette argumentation repose en fait sur une perception erronée de ce qui se produit lorsqu’une société émet des actions inscrites au crédit comme entièrement libérées, en échange d’une contrepartie qui n’est pas en argent comptant. L’obligation première de l’attributaire d’actions est de payer celles-ci en espèces, mais lorsque les actions attribuées sont inscrites au crédit comme entièrement libérées, l’attributaire s’acquitte de cette obligation première en fournissant une contrepartie qui n’est pas en espèces. Ainsi, une société qui, dans l’exécution d’une telle opération, accepte de créditer les actions comme étant entièrement libérées, renonce à ce qu’elle aurait autrement eu, à savoir, le droit de réclamer de l’attributaire le paiement de la valeur nominale en espèces. [...] Par conséquent, lorsque des actions entièrement libérées sont émises comme il se doit en échange d’une contrepartie qui n’est pas de l’argent comptant, la contrepartie donnée par la société doit être au moins égale à la valeur nominale des actions et doit être fondée sur une juste estimation, par les administrateurs, de la valeur des biens acquis.

[20] L’avocat de l’appelante a ensuite évoqué l’arrêtTuxedo Holdings Co. Ltd. v. Minister of National Revenue, 59 DTC 1102, rendu par la Cour de l’Échiquier du Canada. À la p. 1108, le juge Cameron a appliqué dans cette affaire le principe de l’arrêt Steel Barrel :

[TRADUCTION]

À mon avis, la contrepartie payée par l’appelante pour les 905 lots correspondait à la valeur nominale des actions émises et rien de plus. C’est au droit de réclamer des attributaires des actions le paiement de la valeur nominale de chacune des actions qu’elle a renoncé. Par conséquent, le montant de 200 000 $ représente bien [...] ces lots pour l’appelante.

[21] Les deux jugements mentionnés ci-dessus ont par ailleurs été cités dans l’arrêt Marina Québec Inc. v. M.N.R., 92 DTC 1392. Le juge Tremblay, après avoir fait siennes les observations faites par le juge Greene dans l’arrêt Steel Barrel Co. Ltd., a ajouté ce qui suit, à la p. 1440 :

[TRADUCTION]

Puisque les faits de l’espèce sont similaires à ceux des trois arrêts cités ci-dessus, la valeur des actions privilégiées émises au cours de l’exercice financier 1979 de M. Robitaille (1978) sera égale à la valeur réelle des biens acquis figurant dans l’inventaire.

[22] L’avocat de l’appelante a conclu son argumentation en soutenant qu’étant donné que ce principe de la valeur fondée sur la valeur nominale des actions est reconnu par les tribunaux canadiens depuis 1959, au moins, le législateur devait être au courant de celui-ci lorsqu’il a édicté l’article 160 de la Loi de l’impôt sur le revenu. Il a souligné au surplus que ce principe était d’une importance fondamentale puisqu’il permettait que les opérations commerciales impliquant l’émission d’actions en échange de biens se déroulent dans un climat de confiance. Sa conclusion, par conséquent, est que la juste valeur marchande des 195 000 actions privilégiées de second rang correspondait à leur valeur nominale, à savoir 195 000 $.

[23] Si cette conclusion n’était pas retenue, l’avocat soumet que la valeur, en date du 4 juin 1992, était de 174 000 $. L’unique preuve soumise à la Cour en ce qui a trait à cette valeur est celle découlant du témoignage de M. McMann. Après avoir examiné son rapport d’évaluation et avoir passé en revue les réponses franches qu’il a données lors de son contre-interrogatoire et considérant son analyse et sa présentation dans leur ensemble, sa crédibilité et son travail m’impressionnent. Conséquemment, je conclus que la valeur estimée de 174 000 $ est acceptable.

[24] Je rejette la prétention de l’appelante selon laquelle la valeur de la contrepartie donnée par l’appelante à F était de 195 000 $. Le but de l’arrêt Osborne était de déterminer le coût de l’inventaire payé par la société. Celle-ci avait émis des actions d’une certaine valeur nominale parce qu’elle avait reçu des biens de même valeur. La question de la valeur des actions reçues en raison du transfert des biens n’était pas à l’étude. Le même résultat a été atteint dans l’affaire Tuxedo. Il convient de rappeler la conclusion du juge Cameron :

Par conséquent, le montant de 200 000 $ représente bien le coût de ces lots pour l’appelante.

(Je souligne.)

[25] Je viens de faire état de la première conséquence d’une souscription d’actions, c'est-à-dire le coût pour la société des biens pour lesquels elle a émis des actions. La deuxième conséquence d’une telle opération concerne la juste valeur marchande des actions reçues par l’auteur du transfert des biens. Pour déterminer celle-ci, il faut notamment examiner les conditions que comportent ces actions. En l’espèce, F n’avait aucun droit contractuel d’encaisser la somme de 195 000 $ avant l'expiration d'un délai de cinq ans après l’émission des actions. M. McMann a établi que les dividendes cumulatifs, le temps écoulé et les actifs de la société ne justifiaient pas une évaluation de 195 000 $. Ainsi que je l’ai déjà mentionné, son témoignage m’a convaincu. Il est extrêmement improbable qu’une partie n’ayant pas de lien de dépendance avec l’appelante aurait transféré des biens à celle-ci aux conditions fixées en l’espèce.

[26] Le paragraphe 160(1) prévoit notamment que :

(1) Lorsqu’une personne a [...] transféré des biens [...] à [...] une personne avec laquelle elle avait un lien de dépendance [...] le bénéficiaire et l’auteur du transfert sont solidairement responsables du paiement en vertu de la présente loi d’un montant égal au moins élevé des montants suivants :

(i) l’excédent [...] de la juste valeur marchande des biens au moment du transfert sur la juste valeur marchande à ce moment de la contrepartie donnée pour le bien,

(ii) le total des montants dont chacun représente un montant que l’auteur du transfert doit payer en vertu de la présente loi au cours de l’année d’imposition dans laquelle les biens ont été transférés ou d’une année d’imposition antérieure ou pour une de ces années;

Le moins élevé de ces deux montants est 21 000 $ (195 000 $ - 174 000 $). L’appel est admis en partie, la responsabilité de l’appelante, conformément à la disposition citée ci-dessus, étant limitée à ce montant.

Signé à Ottawa, Canada ce 20e jour de mai 1999.

“ R. D. Bell ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 24e jour de février 2000.

Benoît Charron, réviseur



[1]               i.e. un inventaire

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