Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Dossier : 2016‑1831(GST)I

ENTRE :

PETER THIMIO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 26 mai 2017, à Toronto (Ontario).

Devant : L’honorable juge Réal Favreau

Comparutions :

Avocate de l’appelant :

Me J.M. (Michelle) Farrell

Avocat de l’intimée :

Me Kanga Kalisa

 

JUGEMENT

          L’appel interjeté à l’encontre de la cotisation datée du 29 mai 2015, établie au titre de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise pour la période allant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014, est rejeté, conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 1er jour de septembre 2017.

« Réal Favreau »

Juge Favreau


Référence : 2017 CCI 164

Date : 20170901

Dossier : 2016‑1831(GST)I

ENTRE :

PETER THIMIO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Favreau

[1]              Le présent appel est interjeté à l’encontre d’une cotisation datée du 29 mai 2015, établie par le ministre du Revenu national (le « ministre ») au titre de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. 1985, c. E‑15, dans sa version modifiée (la « LTA »), pour la période allant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014 (la « période visée par l’appel »).

[2]              L’appelant était l’unique propriétaire et exploitant de l’école de natation Big Pete, qui offrait des cours de natation privés.

[3]              Pour la période visée par l’appel, l’appelant a déclaré des ventes de 14 806,77 $ et une taxe sur les produits et services (la « TPS ») nulle, et a demandé des crédits de taxe sur les intrants (les « CTI ») de 3 451,33 $ ainsi qu’un remboursement net de 3 451,33 $.

[4]              Au moyen d’un avis de cotisation daté du 29 mai 2015, le ministre a refusé d’accorder les CTI de 3 451,33 $ que l’appelant avait demandés pour la période visée par l’appel.

[5]              Pour établir la cotisation à l’égard de l’appelant, le ministre s’est fondé, entre autres, sur les hypothèses de fait suivantes énoncées au paragraphe 10 de la réponse à l’avis d’appel modifié :

[traduction]

a)    les faits énoncés et admis ci‑dessus;

b)    l’appelant est un inscrit aux fins de la TPS/TVH;

c)    l’appelant exploitait, à titre de propriétaire unique, une entreprise qui offrait des cours de natation;

d)    selon la LTA, l’appelant est tenu de produire ses déclarations de TPS sur une base annuelle;

e)    le 26 février 2014 [sic], l’appelant a été accusé de contacts sexuels, d’incitation à des contacts sexuels, d’agression sexuelle (deux fois) et d’exploitation sexuelle, en contravention du Code criminel (les « accusations »);

f)     le plaignant, en ce qui concerne chacune des accusations, était une personne employée par l’appelant;

g)    les incidents allégués ayant donné lieu à ces accusations se sont produits entre le 13 juillet 2010 et le 30 avril 2011;

h)    deux des incidents allégués ayant donné lieu aux accusations se sont produits aux adresses où le plaignant était employé par l’appelant, à savoir au 100, avenue Finch Ouest et au Graydon Hall Manor;

i)     trois des incidents allégués ayant donné lieu aux accusations se sont produits dans le véhicule et à la résidence de l’appelant;

j)     l’appelant a plaidé non coupable à tous les chefs d’accusation;

k)    l’appelant était représenté par un avocat pour tous les chefs d’accusation;

l)     les poursuites portées contre l’appelant ont été instruites simultanément;

m)   l’appelant a été acquitté des accusations portées contre lui;

n)    pour la période visée par l’appel, l’appelant a demandé des CTI de 3 451,33 $ relativement aux frais juridiques qu’il a supportés pour assurer sa défense à l’égard des accusions portées contre lui;

o)   l’appelant a supporté des frais juridiques pour la période visée par l’appel ainsi que pour les périodes allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 et du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2015;

p)    le montant total de la TVH à l’égard des frais juridiques supportés par l’appelant s’élevait à 22 151,52 $;

q)    l’appelant a cessé d’exploiter l’entreprise à propriétaire unique en 2013;

r)     le montant de 14 806,77 $, déclaré à titre de revenu dans la déclaration de TPS/TVH pour la période se terminant le 31 décembre 2013, était un remboursement partiel d’un prêt;

s)     l’appelant a consenti un prêt à l’entreprise pour un montant de 94 045,60 $ et a reçu une somme globale de 123 659,14 $, y compris le montant de 14 806,77 $ susmentionné, à titre de remboursement;

t)     les frais juridiques n’ont pas été supportés dans le cadre des activités commerciales de l’appelant.

[6]              M. Peter Thimio a témoigné à l’audience. Il a expliqué qu’il avait été arrêté le 4 avril 2013 et accusé d’avoir, en violation de la loi, commis les infractions décrites à l’alinéa 10e) de la réponse modifiée sur une employée de 15 ans. Le 5 avril 2013, il a été mis en liberté moyennant un cautionnement de 50 000 $. Il devait respecter les conditions suivantes : a) ne pas se trouver dans un parc public, une zone où l’on peut se baigner, une garderie, un terrain d’école, un terrain de jeu ou un centre communautaire ni dans tout autre endroit où des enfants de moins de 18 (dix‑huit) ans ont l’habitude de se rassembler, sauf en présence constante d’un adulte et sauf pour aller chercher ou déposer son épouse au travail au 150 Graydon Hall Manor, dans la ville de Toronto; et b) ne pas se rendre au 185 Graydon Hall Manor, ni dans les locaux de Good Life situés au 185 The West Mall, au 25 Peel Centre Drive, à Brampton, et au 1000, avenue Finch Ouest.

[7]              Le 10 avril 2013, en raison de la nature des accusations criminelles, la Société de sauvetage a suspendu toutes les accréditations qu’elle avait délivrées à l’appelant pour une période indéterminée et, le 15 avril 2013, la Croix‑Rouge canadienne a résilié l’entente avec un partenaire de formation datée du 12 décembre 2011 et conclue entre la Société canadienne de la Croix‑Rouge et l’école de natation Big Pete. Par suite de la résiliation de cette entente, l’école de natation Big Pete ne pouvait plus se présenter comme un partenaire de formation de la Société canadienne de la Croix‑Rouge, pas plus qu’elle ne pouvait utiliser les logos de cette dernière en tant que partenaire de formation ou fournir au public des cours de la Société canadienne de la Croix‑Rouge.

[8]              La direction de Goodlife a dit à CBC News qu’elle rompait les liens avec le moniteur de natation et qu’elle ne lui permettrait plus de louer ses installations.

[9]              Étant donné que les accusations ont attiré l’attention de nombreux médias, les revenus de l’école de natation Big Pete (avant TVH) sont passés de 245 255,38 $ en 2012 à 132 902,79 $ en 2013 (jusqu’après la session d’été). Les cours de natation pour la session d’automne 2013 ont été suspendus avant même qu’ils ne reprennent, puisque l’école n’avait pas assez d’élèves inscrits aux programmes, mais l’école n’a pas définitivement fermé ses portes. M. Thimio a conservé son numéro de taxe de vente harmonisée pour son entreprise, mais il a fermé son compte de paie et mis à pied ses 11 moniteurs de natation.

[10]         À compter de l’automne 2013, M. Thimio a, en priorité, assuré sa défense à l’égard des accusations portées contre lui. Après 11 jours de procès, il a été déclaré non coupable de tous les chefs d’accusation. Il a reçu le verdict le 13 avril 2015. Il a déclaré qu’il avait payé des frais juridiques de 176 000 $ (avant TVH) pour son procès et, lorsqu’il a été acquitté, les médias ont très peu fait mention du verdict.

[11]         Depuis le prononcé du verdict, M. Thimio cherche à récupérer ses titres de compétence afin de reprendre ses activités commerciales. Le 15 février 2017, il a obtenu un certificat de police, après vérification des références, lui permettant de travailler avec des enfants.

Question en litige

[12]         En l’espèce, la Cour est appelée à se prononcer sur la seule question de savoir si l’appelant a le droit de demander des CTI relativement à la taxe de vente harmonisée qui a été ajoutée aux frais juridiques qu’il a engagés pour se défendre à l’égard des accusations d’inconduite sexuelle portées contre lui sous le régime du Code criminel.

Thèse de l’appelant

[13]         L’appelant était tenu d’engager des employés afin d’exploiter son entreprise.

[14]         Par suite de fausses allégations formulées par une ancienne employée, la viabilité commerciale de l’entreprise de l’appelant a été menacée.

[15]         Si une personne est accusée à tort d’inconduite sexuelle dans l’exercice de ses activités professionnelles, la seule question en jeu est l’exécution des activités professionnelles de la personne.

[16]         Le ministre a commis une erreur lorsqu’il a conclu que trois des cinq accusations n’étaient pas liées à un contexte propre au travail. Toutes les allégations criminelles portaient manifestement sur des actes d’inconduite sexuelle commis dans des endroits directement liés aux activités de l’école de natation Big Pete.

[17]         Les frais juridiques engagés par l’appelant pour se défendre contre ces accusations d’inconduite sexuelle étaient intrinsèquement liés à ses activités professionnelles et aux activités lucratives de l’école de natation Big Pete.

[18]         N’eût été l’entreprise, l’appelant n’aurait pas eu besoin de se défendre contre les accusations d’inconduite sexuelle portées contre lui. Il savait qu’il était innocent et qu’il avait été accusé à tort. Notre système juridique applique le principe de la présomption d’innocence à l’égard de tout accusé. Il n’était pas déraisonnable d’engager les dépenses pour contester les accusations.

[19]         Par conséquent, l’appelant demande que l’appel soit accueilli et qu’un rajustement de 22 151,52 $ lui soit accordé afin qu’il puisse demander des CTI pour la période se terminant le 31 décembre 2014.

[20]         À l’appui de la thèse de l’appelant, l’avocate de ce dernier a renvoyé la Cour aux jugements suivants :

-         Bilodeau c. La Reine, 2004 CCI 685, rendu par la juge Lamarre Proulx (CanLII);

-         La Reine c. Eric Doiron, 2012 CAF 71;

-         Gordon Ironside v. The Queen, [2015] 5 C.T.C. 2001.

Thèse de l’intimée

[21]         L’intimée soutient que l’appelant n’a pas droit à des CTI pour le montant de 3 141,55 $ ni pour aucun montant, étant donné que les frais juridiques engagés par l’appelant n’ont pas été engagés dans le cadre de ses activités commerciales, en application des articles 169 et 170 de la LTA.

[22]         L’intimé fait valoir en outre que l’appelant n’a pas droit à des CTI pour le montant de 3 141,55 $ ni pour aucun montant, étant donné qu’il n’a pas engagé les frais juridiques dans le but d’effectuer des fournitures taxables dans le cadre d’une de ses initiatives, comme l’énonce l’article 141.01 de la LTA.

[23]         À l’appui de la thèse de l’intimée, l’avocat de cette dernière a renvoyé la Cour aux jugements suivants :

-         La Reine c. Eric Doiron, 2012 CAF 71;

-         David D. Haggart c. La Reine, 2003 CCI 185, confirmé par la Cour d’appel fédérale, 2003 CAF 446.

Dispositions légales

[24]         Les dispositions pertinentes de la LTA qui s’appliquent en l’espèce sont les suivantes : les paragraphes 123(1) (pour la définition du terme « entreprise » et de l’expression « activité commerciale »), 141.01(1), (1.1), (2), (3) et (5), 169(1), 169(4) et 170(2). Ces dispositions sont ainsi libellées :

123(1) Définitions

entreprise Sont compris parmi les entreprises les commerces, les industries, les professions et toutes affaires quelconques avec ou sans but lucratif, ainsi que les activités exercées de façon régulière ou continue qui comportent la fourniture de biens par bail, licence ou accord semblable. En sont exclus les charges et les emplois.

activité commerciale Constituent des activités commerciales exercées par une personne :

a) l’exploitation d’une entreprise (à l’exception d’une entreprise exploitée sans attente raisonnable de profit par un particulier, une fiducie personnelle ou une société de personnes dont l’ensemble des associés sont des particuliers), sauf dans la mesure où l’entreprise comporte la réalisation par la personne de fournitures exonérées;

b) les projets à risque et les affaires de caractère commercial (à l’exception de quelque projet ou affaire qu’entreprend, sans attente raisonnable de profit, un particulier, une fiducie personnelle ou une société de personnes dont l’ensemble des associés sont des particuliers), sauf dans la mesure où le projet ou l’affaire comporte la réalisation par la personne de fournitures exonérées;

c) la réalisation de fournitures, sauf des fournitures exonérées, d’immeubles appartenant à la personne, y compris les actes qu’elle accomplit dans le cadre ou à l’occasion des fournitures.

141.01(1) Définition de initiativeAu présent article, constituent les initiatives d’une personne :

a) ses entreprises;

b) ses projets à risque et ses affaires de caractère commercial;

c) la réalisation de fournitures d’immeubles lui appartenant, y compris les actes qu’elle accomplit dans le cadre ou à l’occasion des fournitures.

(1.1)         Sens de contrepartie Pour l’application des paragraphes (1.2), (2) et (3), une contrepartie symbolique n’est pas une contrepartie.

[. . .]

(2)        Acquisition afin d’effectuer une fourniture [restriction relative aux CTI] La personne qui acquiert ou importe un bien ou un service, ou le transfère dans une province participante, pour consommation ou utilisation dans le cadre de son initiative est réputée, pour l’application de la présente partie, l’acquérir, l’importer ou le transférer dans la province, selon le cas, pour consommation ou utilisation :

a) dans le cadre de ses activités commerciales, dans la mesure où elle l’acquiert, l’importe ou le transfère dans la province afin d’effectuer, pour une contrepartie, une fourniture taxable dans le cadre de l’initiative;

b) hors du cadre de ses activités commerciales, dans la mesure où elle l’acquiert, l’importe ou le transfère dans la province :

(i) afin d’effectuer, dans le cadre de l’initiative, une fourniture autre qu’une fourniture taxable effectuée pour une contrepartie,

(ii) à une fin autre que celle d’effectuer une fourniture dans le cadre de l’initiative.

(3)        Utilisation afin d’effectuer une fourniture La consommation ou l’utilisation d’un bien ou d’un service par une personne dans le cadre de son initiative est réputée, pour l’application de la présente partie, se faire :

a) dans le cadre des activités commerciales de la personne, dans la mesure où elle a pour objet la réalisation, pour une contrepartie, d’une fourniture taxable dans le cadre de l’initiative;

b) hors du cadre des activités commerciales de la personne, dans la mesure où elle a pour objet :

(i) la réalisation, dans le cadre de l’initiative, d’une fourniture autre qu’une fourniture taxable effectuée pour une contrepartie,

(ii) une autre fin que la réalisation d’une fourniture dans le cadre de l’initiative.

[. . .]

(5)        Méthodes de mesure de l’utilisationSous réserve de l’article 141.02, seules des méthodes justes et raisonnables et suivies tout au long d’un exercice peuvent être employées par une personne au cours de l’exercice pour déterminer la mesure dans laquelle :

a) la personne acquiert, importe ou transfère dans une province participante des biens ou des services afin d’effectuer une fourniture taxable pour une contrepartie ou à d’autres fins;

b) des biens ou des services sont consommés ou utilisés en vue de la réalisation d’une fourniture taxable pour une contrepartie ou à d’autres fins.

169(1) Règle générale [crédit de taxe sur les intrants] – Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, un crédit de taxe sur les intrants d’une personne, pour sa période de déclaration au cours de laquelle elle est un inscrit, relativement à un bien ou à un service qu’elle acquiert, importe ou transfère dans une province participante, correspond au résultat du calcul suivant si, au cours de cette période, la taxe relative à la fourniture, à l’importation ou au transfert devient payable par la personne ou est payée par elle sans qu’elle soit devenue payable :

A × B

où :

A  représente la taxe relative à la fourniture, à l’importation ou au transfert, selon le cas, qui, au cours de la période de déclaration, devient payable par la personne ou est payée par elle sans qu’elle soit devenue payable;

B :

a) dans le cas où la taxe est réputée, par le paragraphe 202(4), avoir été payée relativement au bien le dernier jour d’une année d’imposition de la personne, le pourcentage que représente l’utilisation que la personne faisait du bien dans le cadre de ses activités commerciales au cours de cette année par rapport à l’utilisation totale qu’elle en faisait alors dans le cadre de ses activités commerciales et de ses entreprises;

b) dans le cas où le bien ou le service est acquis, importé ou transféré dans la province, selon le cas, par la personne pour utilisation dans le cadre d’améliorations apportées à une de ses immobilisations, le pourcentage qui représente la mesure dans laquelle la personne utilisait l’immobilisation dans le cadre de ses activités commerciales immédiatement après sa dernière acquisition ou importation de tout ou partie de l’immobilisation;

c) dans les autres cas, le pourcentage qui représente la mesure dans laquelle la personne a acquis ou importé le bien ou le service, ou l’a transféré dans la province, selon le cas, pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de ses activités commerciales.

[. . .]

(4) Documents L’inscrit peut demander un crédit de taxe sur les intrants pour une période de déclaration si, avant de produire la déclaration à cette fin :

a) il obtient les renseignements suffisants pour établir le montant du crédit, y compris les renseignements visés par règlement;

b) dans le cas où le crédit se rapporte à un bien ou un service qui lui est fourni dans des circonstances où il est tenu d’indiquer la taxe payable relativement à la fourniture dans une déclaration présentée au ministre aux termes de la présente partie, il indique la taxe dans une déclaration produite aux termes de la présente partie.

170(2) Autre restriction [doit être raisonnable] − Le calcul du crédit de taxe sur les intrants d’un inscrit n’inclut pas de montant au titre de la taxe payable par celui‑ci relativement à un bien ou un service qu’il a acquis, importé ou transféré dans une province participante, sauf dans la mesure où :

a) d’une part, la consommation ou l’utilisation du bien ou du service, compte tenu de leur qualité, nature ou coût, est raisonnable dans les circonstances, eu égard à la nature des activités commerciales de l’inscrit;

b) d’autre part, le montant est calculé sur la contrepartie du bien ou du service ou sur la valeur du bien qui est raisonnable dans les circonstances.

Analyse

[25]         Selon les éléments de preuve, il ne fait aucun de doute que les accusations criminelles ont été portées contre l’appelant personnellement. Ni l’école de natation, ni les propriétaires des immeubles où l’école était exploitée, ni aucun autre employé de l’école n’ont fait l’objet d’accusations. De plus, il est manifeste que trois des incidents allégués à l’origine des accusations se sont produits dans le véhicule de l’appelant et à sa résidence, à l’extérieur des locaux où l’école exerçait ses activités.

[26]         J’admets le fait que les accusations criminelles portées contre l’appelant ont eu des répercussions énormes sur le revenu et la réputation de son entreprise. Il a effectivement perdu ses accréditations et ne pouvait plus travailler à son école de natation.

[27]         Je reconnais également que l’appelant n’a pas fermé son école de natation, mais qu’il a simplement suspendu ses activités jusqu’à ce qu’il puisse récupérer ses accréditations.

[28]         Toutefois, en l’espèce, je ne vois pas le lien entre les frais juridiques engagés par l’appelant pour défendre sa réputation et la capacité de son école de natation de générer des revenus et les activités commerciales comme telles exercées en 2014 par cette école.

[29]         Il est bien établi dans la jurisprudence portant sur la LTA que les CTI ne peuvent être demandés que dans la mesure où les intrants ont été acquis pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre des activités commerciales de la personne qui les demande (voir les décisions Two Carlton Financing Ltd. v. R, [1998] G.S.T.C. 59 (C.C.I.), Nineteen Ninety Clothing v. R, [1994] G.S.T.C. 89 (C.C.I.), Blanchard c. La Reine, [2001] A.C.I. no 484 (C.C.I) et Haggart v. R, [2003] G.S.T.C. 71 (C.C.I.), confirmée par la Cour d’appel fédérale, 2003 C.A.F 446).

[30]         Bien que l’appelant n’ait pas fermé son entreprise et qu’il ait toujours eu l’intention de la relancer comme une entreprise à propriétaire unique, il n’a pas établi de lien direct ou indirect entre les services juridiques qu’il a demandés et une fourniture permanente de services taxables.

[31]         Pour l’application du paragraphe 169(1) de la LTA, les services juridiques n’ont pas été acquis « dans le cadre des activités commerciales » de l’appelant et, pour l’application du paragraphe 141.01(2) de la LTA, les services juridiques n’ont pas été acquis « afin d’effectuer une fourniture taxable dans le cadre de l’initiative » (voir le paragraphe 2 de l’arrêt Haggart, précité, rendu par la Cour d’appel fédérale).

[32]         Les décisions Bilodeau et Ironside citées par l’appelant sont instructives, puisque la question du « lien » entre le besoin auquel répondaient les frais juridiques et l’entreprise elle‑même est soulevée, mais leur pertinence pour les besoins du présent appel est limitée, parce qu’elles portent sur la déduction de frais juridiques pour l’application de la Loi de l’impôt sur le revenu.

[33]         L’arrêt Doiron, cité par les deux parties, est plus pertinent, car il portait précisément sur la question soulevée en l’espèce. La Cour d’appel fédérale a clairement établi qu’il incombe à la personne qui demande les intrants de prouver que ceux‑ci, sous la forme de services juridiques acquis dans le but d’assurer sa défense au criminel, ont été engagés dans le cadre de ses activités commerciales. L’appelant n’a pas réussi à s’acquitter du fardeau qui lui incombait de démontrer qu’il existait un lien direct et clair entre les accusations qui ont été portées contre lui et les activités qu’il a exercées en vue de gagner un revenu.

[34]         Pour les motifs qui précèdent, l’appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 1er jour de septembre 2017.

« Réal Favreau »

Juge Favreau


RÉFÉRENCE :

2017 CCI 164

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2016‑1831(GST)I

INTITULÉ :

Peter Thimio et Sa Majesté La Reine

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 26 mai 2017

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Réal Favreau

DATE DU JUGEMENT :

Le 1er septembre 2017

COMPARUTIONS :

Avocate de l’appelant :

Me J.M. (Michelle) Farrell

Avocat de l’intimée :

Me Kanga Kalisa

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelant :

Nom :

J.M. (Michelle) Farrell

 

Cabinet :

Farrel Law & Mediation

Pour l’intimée :

Nathalie G. Drouin

Sous‑procureure générale du Canada

Ottawa, Canada

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.