Dossier : A-286-23
Référence : 2024 CAF 177
CORAM :
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LE JUGE BOIVIN
LE JUGE LEBLANC
LE JUGE HECKMAN
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ENTRE : |
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TRANSPORT CAR-FRÉ LTÉE GESTION et TRANSPORT CAR-FRÉ LTÉE |
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appelantes
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SA MAJESTÉ LE ROI et LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, représentant la ministre d’Emploi et Développement social Canada |
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intimés
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Audience tenue à Québec (Québec), le 29 octobre 2024.
Jugement rendu à l’audience à Québec (Québec), le 29 octobre 2024.
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR : |
LE JUGE LEBLANC |
Date : 20241029
Dossier : A-286-23
Référence : 2024 CAF 177
CORAM :
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LE JUGE BOIVIN
LE JUGE LEBLANC
LE JUGE HECKMAN
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ENTRE : |
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TRANSPORT CAR-FRÉ LTÉE GESTION et TRANSPORT CAR-FRÉ LTÉE |
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appelantes |
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et |
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SA MAJESTÉ LE ROI et LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, représentant la ministre d’Emploi et Développement social Canada |
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intimés |
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MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR
(Prononcés à l’audience à Québec (Québec), le 29 octobre 2024.)
LE JUGE LEBLANC
[1] La Cour est saisie de l’appel d’un jugement de la Cour fédérale prononcé le 22 septembre 2023 (2023 CF 1275). Aux termes de son jugement, la Cour fédérale rejetait l’action intentée par les appelantes afin de se faire indemniser des dommages qu’elles estiment avoir subi du fait que les intimés auraient négligemment intenté contre elles une poursuite fondée sur les dispositions pénales du Code canadien du travail, LRC 1985, ch. L-2 (le Code), en marge d’un accident de travail, survenu en Alberta, ayant causé la mort d’un de leurs employés. En juin 2017, un tribunal albertain prononce l’arrêt des procédures contre les appelantes (2017 ABPC 157), estimant que cet accident, survenu en mai 2013, relève de la compétence provinciale en matière de santé et sécurité au travail. La question en jeu, tant pour les enquêteurs que le tribunal, était celle de savoir si l’accident s’était produit dans le cadre de travaux liés aux activités commerciales des appelantes, des sociétés de transport interprovincial assujetties à la compétence fédérale, ou dans le cadre de travaux menés pour les fins personnelles d’un de leurs dirigeants.
[2] L’accident s’étant produit à l’extérieur du Québec, l’action est fondée sur ce qui est connu, en Common Law, comme étant le délit d’enquête négligente. La Cour fédérale a d’abord rejeté l’argument des appelantes voulant qu’elle soit liée, sur le fondement de la doctrine de la préclusion, par le jugement du tribunal albertain, puisque la question qu’elle avait à trancher n’était pas la même que celle tranchée par le tribunal albertain. Elle a conclu par la suite que l’enquête ayant mené au dépôt de la poursuite n’avait pas été négligente, et ce, à la fois à la lumière de la preuve antérieure au dépôt de la poursuite et de celle présentée par les parties au procès. Enfin, la Cour fédérale a jugé qu’il n’y avait à tout événement aucun lien de causalité entre la faute alléguée et le préjudice prétendument subi.
[3] En appel, les appelantes reprennent essentiellement les mêmes arguments. Pour réussir, elles devaient nous convaincre que la Cour fédérale, en concluant comme elle l’a fait, a erré sur une pure question de droit ou, encore, a commis une erreur manifeste et dominante sur une question de fait ou mixte de fait et de droit (Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33 (Housen)). Or, nous sommes tous d’avis que ce fardeau n’a pas été rencontré.
[4] Quant à la question de la préclusion, la Cour fédérale a bien identifié le test applicable et sa conclusion à l’effet que la question qu’elle avait à trancher n’était pas la même que celle du tribunal albertain, est, selon, nous, inattaquable. Même s’il a conclu que l’accident de travail en cause relevait de la compétence provinciale, le tribunal albertain n’avait pas à se prononcer sur le caractère négligent ou non de l’enquête ayant mené au dépôt de la poursuite. Comme la Cour fédérale l’a, à juste titre, souligné, l’analyse du tribunal albertaine a été faite, de surcroît, à partir d’une preuve qui n’était pas la même que celle dont disposait les enquêteurs fédéraux – et provinciaux – en mai 2013 et ne sera pas la même que celle administrée au procès tenu en l’espèce. Au surplus, que le poursuivant fédéral n’en ait pas appelé du jugement du tribunal albertain ne peut, selon nous, être raisonnablement interprété, sans plus, comme un aveu d’enquête négligente de sa part, cette décision ayant très bien pu être influencée par le fardeau que le poursuivant devait rencontrer en appel.
[5] La Cour fédérale a également bien identifié le test applicable au délit d’enquête négligente. Après avoir analysé en détail la preuve faite devant elle, elle a conclu qu’il était raisonnable de la part des enquêteurs fédéraux de déterminer que l’accident en cause relevait de la compétence fédérale et justifiait, par conséquent, le dépôt de poursuites en vertu du Code (Jugement de la Cour fédérale, au para. 88). Ce faisant, elle a apprécié la crédibilité des témoignages qu’elle a entendus sur la question centrale du caractère personnel ou commercial des installations que les appelantes étaient alors à construire et où l’accident fatal s’est produit.
[6] Pour l’essentiel, les appelantes reprochent à la Cour fédérale d’avoir mal apprécié la preuve contradictoire qui lui a été soumise sur cette question. Or, s’agissant là d’une question de fait, la norme d’intervention, que ce soit au niveau des constatations de faits ou des inférences qui en ont été tirées par la Cour fédérale, est, comme notre Cour l’a rappelé dans l’affaire Canada c. South Yukon Forest Corporation, 2012 CAF 165, au paragraphe 46, hautement déférente. Comme tribunal des faits, la Cour fédérale était dans une position privilégiée pour apprécier la crédibilité des témoins et il ne nous appartient pas, comme Cour d’appel, de remettre en question, en l’absence d’une erreur manifeste et dominante, le poids qu’elle a attribué aux différents éléments de la preuve, y compris aux différents témoignages qu’elle a entendus (Housen aux paras. 24-25). En somme, les appelantes auraient souhaité un résultat différent. Toutefois, cela ne peut justifier une intervention de notre part.
[7] Ayant conclu que la Cour fédérale n’a pas erré en concluant que les appelantes n’avaient pas fait la preuve que l’enquête ayant menée au dépôt des accusations pénales contre elles, avait été faite négligemment, il n’est pas nécessaire d’aborder la question du lien de causalité entre la faute alléguée et le préjudice prétendument subi.
[8] Malgré les habiles représentations de la procureure des appelantes, l’appel sera rejeté, avec dépens en faveur des intimés.
« René LeBlanc »
j.c.a.
COUR D’APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
Dossier : |
A-286-23 |
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INTITULÉ :
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TRANSPORT CAR-FRÉ LTÉE GESTION et TRANSPORT CAR-FRÉ LTÉE c. SA MAJESTÉ LE ROI et LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, représentant la ministre d’emploi et développement social canada |
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LIEU DE L’AUDIENCE : |
Québec (Québec) |
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DATE DE L’AUDIENCE :
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LE 29 octobre 2024 |
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MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :
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LE JUGE BOIVIN LE JUGE LEBLANC LE JUGE HECKMAN |
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PRONONCÉS À L’AUDIENCE :
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LE JUGE LEBLANC |
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COMPARUTIONS :
Me Elodie Drolet-French Me Anne-Sophie Ayoub |
Pour les appelantes |
Me Martin Lamoureux |
Pour les intimés |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Jean-François Bertrand avocats inc. Québec (Québec) |
Pour les appelantes |
Shalene Curtis-Micallef Sous-procureure générale du Canada |
Pour les intimés |