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Date : 20240522


Dossier : A-147-23

Référence : 2024 CAF 98

CORAM :

LE JUGE LEBLANC

LA JUGE ROUSSEL

LA JUGE GOYETTE

 

 

ENTRE :

 

 

JULES CHARTIER

 

 

appelant

 

 

et

 

 

SA MAJESTÉ LE ROI

 

 

intimé

 

Audience tenue à Winnipeg (Manitoba), le 22 mai 2024.

Jugement rendu à l’audience à Winnipeg (Manitoba), le 22 mai 2024.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE GOYETTE

 


Date : 20240522


Dossier : A-147-23

Référence : 2024 CAF 98

CORAM :

LE JUGE LEBLANC

LA JUGE ROUSSEL

LA JUGE GOYETTE

 

 

ENTRE :

 

 

JULES CHARTIER

 

 

appelant

 

 

et

 

 

SA MAJESTÉ LE ROI

 

 

intimé

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Winnipeg (Manitoba), le 22 mai 2024.)

LA JUGE GOYETTE

[1] L’appelant interjette appel d’une décision de la Cour canadienne de l’impôt rendue oralement le 2 mai 2023. Cette décision porte sur la pénalité prévue au paragraphe 162(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, c. 1 (5e suppl.) (la Loi) laquelle s’applique lorsqu’un contribuable produit tardivement une déclaration de revenus. Cette pénalité est calculée en fonction de l’impôt impayé à la date fixée dans la Loi pour la production de la déclaration.

[2] L’appelant ne conteste pas avoir produit tardivement sa déclaration de revenus pour l’année d’imposition 2014. Plutôt, il s’est adressé à la Cour canadienne de l’impôt parce qu’il considère que la ministre du Revenu national a incorrectement calculé la pénalité découlant de ce retard. Selon l’appelant, si la ministre avait tenu compte des crédits disponibles à son compte et des trois chèques qu’il avait transmis à l’Agence du revenu du Canada, la ministre aurait conclu que l’appelant n’avait aucun impôt impayé à la date de production de sa déclaration pour 2014 et, qu’en conséquence, le montant de la pénalité est nul.

[3] La Cour canadienne de l’impôt a rejeté l’appel. Faisant référence à la preuve devant elle, la Cour a conclu que l’appelant n’a donné aucune indication à l’Agence précisant comment allouer le montant des chèques au solde d’impôt dont l’appelant était redevable pour 2014. Au surplus, la Cour a considéré qu’elle n’avait pas juridiction de refaire ex post facto les allocations de paiements et de crédits au compte de l’appelant.

[4] Devant notre Cour, l’appelant fait valoir deux arguments principaux. Premièrement, il soutient que la Cour canadienne de l’impôt a erré en entérinant le montant de la pénalité calculé par la ministre. À l’appui de cet argument, l’appelant fait référence aux chèques et paiements sur lesquels s’est penchée la Cour canadienne de l’impôt. Deuxièmement, l’appelant soutient que la Cour canadienne de l’impôt a manqué à l’équité procédurale en ne respectant pas son choix d’avoir un procès complétement en français et en ne lui permettant pas de contre-interroger la déposante d’une déclaration sous serment produite par l’intimé.

[5] Nous ne pouvons accepter ces arguments.

[6] En ce qui a trait au calcul de la pénalité, un débiteur effectuant un paiement à son créancier peut allouer ce paiement à la dette de son choix, et le créditeur doit respecter ce choix. Toutefois, lorsque le débiteur effectue ce paiement sans préciser une allocation particulière, le créancier a la discrétion d’allouer le paiement à sa guise : Andrew Paving & Engineering Ltd v. Minister of National Revenue, 84 DTC 1157 à 1159, citant Agricultural Insurance Co. v. Sargeant, (1896), 26 SCR 29 à 36; La Ronge Lumber & Electric Ltd. v. Minister of National Revenue, 85 DTC 573, aux paras. 10–11.

[7] En l’espèce, la Cour canadienne de l’impôt a conclu à l’absence d’instructions de la part de l’appelant concernant l’allocation de ses chèques. La Cour a de plus noté qu’il arrivait à l’appelant d’envoyer des informations confuses à l’Agence, tels le numéro d’assurance sociale de sa conjointe ou son numéro de taxe de vente, ce qui pouvait induire l’Agence à allouer un paiement à un compte autre que le compte d’impôt de l’appelant. Ne décelant aucune erreur manifeste et déterminante de la part de la Cour canadienne de l’impôt sur cette évaluation de la preuve, une norme d’intervention exigeante, notre Cour ne peut intervenir.

[8] Au surplus, à la lumière de la preuve devant elle, nous sommes d’avis que la Cour canadienne de l’impôt était fondée de conclure qu’elle ne pouvait se substituer à l’Agence et allouer les paiements et crédits au compte d’impôt de l’appelant. Dans la même veine, nous ne pouvons acquiescer à l’argument de l’appelant selon lequel la nouvelle cotisation pour l’année d’imposition 2013 aurait dû être établie avant la nouvelle cotisation pour 2014. Non seulement cet argument n’a-t-il pas été soumis à la Cour canadienne de l’impôt, mais nous ne disposons d’aucune information qui nous permettrait de nous prononcer sur ce point. Lors de l’audience, l’appelant a soulevé un certain nombre d’arguments qui ne se retrouvent pas dans son mémoire et à l’égard desquels il n’a pu nous référer au dossier d’appel. Encore une fois, et tel que nous le lui avons expliqué à l’audience, nous ne pouvons considérer ces arguments.

[9] Au sujet de l’équité procédurale, la transcription de l’audition révèle que le procès a eu lieu en français et que les références à des décisions disponibles seulement en anglais ont été traduites par l’avocate de l’intimé. Pour ce qui est du contre-interrogatoire de la déposante d’une déclaration sous serment produite par l’intimé, la preuve révèle que cette déclaration a été déposée des mois avant l’audience. Ce n’est qu’à la veille de l’audience que l’appelant a communiqué son intention de contre-interroger la déposante. Or, si l’appelant désirait contre-interroger la déposante, il aurait dû lui signifier un subpoena exigeant sa présence à l’audience (article 19 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure informelle), DORS/90-688b) ou, à tout le moins, en avertir l’avocate de l’intimé en temps opportun. Dans ce contexte, nous ne pouvons conclure à un manquement à l’équité procédurale.

[10] Pour toutes ces raisons, l’appel sera rejeté avec dépens.

« Nathalie Goyette »

j.c.a.

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

DOSSIER :

A-147-23

 

 

INTITULÉ :

JULES CHARTIER c. SA MAJESTÉ LE ROI

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Winnipeg (Manitoba)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 22 mai 2024

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE LEBLANC

LA JUGE ROUSSEL

LA JUGE GOYETTE

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE :

LA JUGE GOYETTE

 

COMPARUTIONS :

Jules Chartier

 

Pour l'appelant

SE REPRÉSENTANT LUI-MÊME

 

Caroline Pellerin

 

Pour l'intimé

SA MAJESTÉ LE ROI

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Shalene Curtis-Micallef

Sous-procureure générale du Canada

Pour l'intimé

SA MAJESTÉ LE ROI

 

 

 

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