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Date : 20230309


Dossier : A-245-21

Référence : 2023 CAF 55

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE LASKIN

LA JUGE MACTAVISH

LA JUGE MONAGHAN

 

ENTRE :

GÁBOR LUKÁCS

appelant

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

intimé

Audience tenue par vidéoconférence organisée par le greffe, le 9 mars 2023.

Jugement rendu à l’audience à Ottawa (Ontario), le 9 mars 2023.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE MACTAVISH

 


Date : 20230309


Dossier : A-245-21

Référence : 2023 CAF 55

CORAM :

LE JUGE LASKIN

LA JUGE MACTAVISH

LA JUGE MONAGHAN

 

ENTRE :

GÁBOR LUKÁCS

appelant

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

intimé

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Ottawa (Ontario), le 9 mars 2023.)

LA JUGE MACTAVISH

[1] Gábor Lukács fait appel d’une ordonnance discrétionnaire de la juge responsable de la gestion de l’instance (2021 CF 951). La juge a refusé de lui accorder l’autorisation, conformément à la règle 312 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, de déposer un affidavit supplémentaire à son dossier afin qu’il puisse être utilisé à la fois dans la demande principale de contrôle judiciaire et dans plusieurs requêtes préliminaires.

[2] Pour placer l’appel en contexte, rappelons que M. Lukács a déposé une plainte auprès du Commissaire à l’information du Canada relativement au refus de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) de lui accorder l’accès aux documents qu’il avait demandés en application de la Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. (1985), ch. A-1. Après que le Commissaire à l’information a conclu que sa plainte n’était pas fondée, M. Lukács a demandé à la Cour fédérale, en application de l’article 41 de la Loi, une révision de novo de la question de savoir si l’ASFC avait eu raison de lui refuser l’accès.

[3] Les parties ont finalement pu convenir que certains des documents demandés par M. Lukács devraient lui être fournis. M. Lukács a également renoncé à demander l’accès à certains documents. Ainsi, il ne reste plus que six brefs extraits caviardés encore en litige dans la demande principale.

[4] La juge responsable de la gestion de l’instance a autorisé M. Lukács à déposer un affidavit supplémentaire, y compris deux des documents présentés afin qu’ils puissent être utilisés dans la demande. La juge a refusé de lui permettre d’utiliser l’affidavit supplémentaire et les pièces jointes dans les requêtes préliminaires en instance.

[5] M. Lukács affirme que la juge responsable de la gestion de l’instance a commis de nombreuses erreurs en lui refusant l’autorisation de présenter d’autres éléments de preuve et en omettant d’incorporer l’entente des parties concernant certains documents dans l’ordonnance rendue relativement à sa requête. Aucune de ces observations n’est fondée et, bien que nous ayons soigneusement examiné toutes les observations de M. Lukács, nous n’avons à nous prononcer que sur certaines d’entre elles.

[6] Comme notre Cour l’a souligné au paragraphe 11 de l’arrêt L’Hirondelle c. Canada, 2001 CAF 338, et confirmé dans l’arrêt Constant c. Canada, 2012 CAF 87, au paragraphe 12, les juges responsables de la gestion des instances doivent avoir une certaine « latitude » dans la gestion des instances. Par conséquent, la Cour ne devrait infirmer les ordonnances rendues dans le cadre de la gestion des instances que dans les cas où un pouvoir discrétionnaire judiciaire a manifestement été mal exercé.

[7] En l’espèce, la juge responsable de la gestion de l’instance a déterminé correctement le critère relatif à l’admission d’éléments de preuve en application de la règle 312 des Règles des Cours fédérales, à savoir que l’élément de preuve doit être admissible dans le cadre de la demande de contrôle judiciaire et doit avoir un lien avec une question que la cour de révision est appelée à trancher. En outre, la juge a indiqué que, comme l’a souligné notre Cour au paragraphe 2 de l’arrêt Holy Alpha and Omega Church of Toronto c. Canada (Procureur général), 2009 CAF 101, pour établir si l’octroi d’une ordonnance en application de la règle 312 est dans l’intérêt de la justice, la Cour doit également prendre en compte les éléments suivants :

a) si la preuve que l’on demande à présenter était disponible lorsque la partie a déposé ses affidavits ou la diligence raisonnable aurait pu rendre cette preuve accessible;

b) si la preuve aidera la Cour en raison de son lien avec une question devant faire l’objet d’une décision et sa valeur assez probante pour se répercuter sur le résultat; et

c) si la preuve causera un préjudice sensible ou grave à la partie adverse.

[8] Rien dans les motifs de la juge responsable de la gestion de l’instance n’indique qu’elle a mal compris la notion de pertinence. Elle n’a pas non plus commis d’erreur en tenant compte des longs délais dans cette instance ou du volume de documents déposés dans le cadre de la demande en l’espèce. En effet, l’article 45 de la Loi dispose que les demandes présentées en vertu de l’article 41 doivent être entendues et jugées en procédure sommaire. Cependant, malgré les meilleurs efforts de la juge responsable de la gestion de l’instance pour faire progresser l’instance, cela ne s’est pas produit en l’espèce en raison de la prolifération des requêtes déposées par les parties et de leur demande que les requêtes soient tranchées dans un ordre particulier.

[9] Bien que le principe de proportionnalité ne fût pas mentionné explicitement à la règle 3 des Règles des Cours fédérales au moment où la juge responsable de la gestion de l’instance a rendu l’ordonnance portée en appel, ce principe faisait partie intrinsèque de la règle : ViiV Healthcare Co. c. Gilead Sciences Canada, Inc., 2021 CAF 122, au para. 18. Conformément à ce principe, les juges sont encouragés à appliquer les règles de manière à prévenir, éliminer ou minimiser les conduites qui entraînent des retards et des coûts : ViiV Healthcare, précité au para. 18; Hryniak c. Mauldin, 2014 CSC 7, au para. 31. Par conséquent, la juge responsable de la gestion de l’instance était en droit de tenir compte du volume de documents qui avaient déjà été déposés en lien avec la demande, des retards qui s’étaient produits jusque-là et de ceux qui résulteraient d’ajouts au dossier.

[10] Enfin, la juge responsable de la gestion de l’instance n’a pas commis d’erreur en refusant de modifier son ordonnance pour refléter l’entente des parties relativement aux trois des pièces jointes à l’affidavit supplémentaire de M. Lukács. Comme l’a noté la juge responsable de la gestion de l’instance, l’intimé avait clairement et à maintes reprises informé M. Lukács que le ministre ne s’opposait pas à l’inclusion de ces documents au dossier afin qu’ils puissent être utilisés en relation avec les requêtes préliminaires et la question de fond de la demande principale. Par conséquent, il n’était pas nécessaire d’incorporer cette entente à l’ordonnance de la Cour.

[11] En fin de compte, M. Lukács ne nous a pas convaincus que la juge responsable de la gestion de l’instance a commis, dans sa décision, une erreur de droit ou une erreur manifeste et dominante de fait ou mixte de fait et de droit. Par conséquent, le présent appel est rejeté, essentiellement pour les motifs énoncés par la juge responsable de la gestion de l’instance.

« Anne L. Mactavish »

j.c.a.


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


Dossier :

A-245-21

INTITULÉ :

M. GÁBOR LUKÁCS c. LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE ORGANISÉE PAR LE GREFFE

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 9 mars 2023

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE LASKIN

LA JUGE MACTAVISH

LA JUGE MONAGHAN

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :

LA JUGE MACTAVISH

COMPARUTIONS :

Gábor Lukács

l’appelant (pour son propre compte)

Jan Jensen

Pour l’intimée

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Shalene Curtis-Micallef

Sous-procureure générale du Canada

Pour l’intimée

 

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