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TRÈS SECRET

Date : 20210806


Dossier : A-243-20

Référence : 2021 CAF 165

CORAM :

LE JUGE DE MONTIGNY

LE JUGE LASKIN

LA JUGE MACTAVISH

 

DANS L’AFFAIRE d’une demande de mandats présentée par ||||||||| ||||||||| en vertu des articles 16 et 21 de la Loi sur le service canadien du renseignement de sécurité, LRC (1985), ch. C-23

ET DANS L’AFFAIRE VISANT |[un état étranger, groupe d’états ou personne]

Appel entendu à Ottawa (Ontario) le 10 février 2021.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario) le 6 août 2021.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE LASKIN

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE DE MONTIGNY

 

LA JUGE MACTAVISH

 


TRÈS SECRET

Date : 20210806


Dossier : A-243-20

Référence : 2021 CAF 165

CORAM :

LE JUGE DE MONTIGNY

LE JUGE LASKIN

LA JUGE MACTAVISH

 

 

DANS L’AFFAIRE d’une demande de mandats présentée par ||||||||| ||||||||| en vertu des articles 16 et 21 de la Loi sur le service canadien du renseignement de sécurité, LRC (1985), ch. C-23

ET DANS L’AFFAIRE VISANT |[un état étranger, groupe d’états ou personne]

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE LASKIN

I. Aperçu

[1] Sont en cause en l’espèce le sens et l’application de l’expression « dans les limites du Canada » (en anglais, « within Canada ») qui figure au paragraphe 16(1) de la Loi sur le service canadien du renseignement de sécurité, LRC (1985), ch. C-23 [Loi sur le SCRS]. Le paragraphe 16(1) autorise le Service canadien du renseignement de sécurité [SCRS ou Service], dans les domaines de la défense et de la conduite des affaires internationales du Canada, à prêter son assistance au ministre de la Défense nationale ou au ministre des Affaires étrangères, dans les limites du Canada, à la collecte d’informations relatives à des étrangers ou à des États étrangers. En vertu du paragraphe 21(1) de la Loi sur le SCRS, le Service peut demander à un juge désigné de la Cour fédérale de décerner un mandat lui permettant d’exercer ses fonctions visées au paragraphe 16(1).

[2] L’expression « dans les limites du Canada » empêche-t-elle le Service d’obtenir un mandat en vertu de ces dispositions dans l’objectif de recueillir des informations électroniques |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| à l’extérieur du Canada? En particulier, est-ce le cas lorsque les informations sont demandées par du personnel du Service au Canada |||||[et |||||||||||||[et reçues au Canada]|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||[|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||?

[3] Dans le jugement porté en appel (version publique de 2020 CF 757), le juge Gleeson, juge désigné de la Cour fédérale, a répondu à ces questions par l’affirmative. Il a rejeté les arguments du procureur général du Canada [procureur général], qui soutenait que, selon l’interprétation à en donner, l’expression « dans les limites du Canada » exigeait uniquement que l’assistance soit prêtée et que la collecte d’informations soit effectuée depuis le Canada. Le juge Gleeson a conclu que, selon une interprétation textuelle, contextuelle et téléologique, l’expression « dans les limites du Canada » signifiait « seulement au Canada ». Il a statué qu’en l’espèce, l’activité pour laquelle le mandat avait été demandé, c’est-à-dire la collecte cachée, par du personnel du Service situé au Canada, d’informations qui, a-t-il conclu, se trouvaient |||||||[dans un ou des états étrangers]|||||||, impliquerait |[une collecte]| non autorisée qui ne se déroulerait pas « dans les limites du Canada ». Partant, il a rejeté la demande de mandat autorisant le Service à mener cette activité pour prêter assistance au ministre |||||||||||||||||||||||||||||||| en vertu du paragraphe 16(1).

[4] Le procureur général interjette appel de la décision du juge désigné, laquelle, soutient-il, empêche à tort le Service d’exercer ses fonctions d’assistance visées au paragraphe 16(1). À son avis, la condition « dans les limites du Canada » est respectée lorsque la requête visant les informations et la réception des informations s’effectuent « depuis le Canada ». Il soutient que le juge désigné a omis à mauvais escient de faire ce que d’autres tribunaux au Canada et ailleurs ont fait adéquatement, à savoir reconnaître  [la jurisprudence relative à l’accessibilité de l’information par l’entremise de l’Internet,]|  ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| et donner au texte de loi une interprétation qui tienne compte du progrès technologique. Il ajoute qu’un mandat décerné en vertu de l’article 21 rend inopposable toute inobservation |||[des lois étrangères et/ou internationales et/ou le principe de la non-ingérence reconnu en droit international.] ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[5] Les amici curiae [amici] nommés par la Cour soutiennent quant à eux que le juge désigné a correctement interprété et appliqué le paragraphe 16(1). Ils ajoutent que les pouvoirs invoqués par le procureur général dans ses observations sur le progrès technologique sont tous inapplicables en l’espèce, et que l’activité pour laquelle le mandat avait été demandé constituerait une infraction [aux lois étrangères et/ou internationales et/ou le principe de la non-ingérence reconnu en droit international.]|| Ils soutiennent en outre que la délivrance du mandat exposerait le Service et le Canada aux risques mêmes qui ont poussé le législateur à prévoir la restriction territoriale au paragraphe 16(1).

[6] Pour les motifs exposés ci-après, je rejetterais l’appel. J’ai examiné attentivement les observations du procureur général, mais, à mon avis, l’espèce ne se prête pas à l’invocation |||[de la jurisprudence relative à l’accessibilité de l’information par l’entremise de l’Internet ni du principe]| selon lequel l’interprétation d’un texte de loi devrait tenir compte du progrès technologique. Je suis d’accord avec les juges désignés qui se sont penchés sur la portée de l’article 16 : dans le domaine de la sécurité nationale, dont l’importance et la sensibilité revêtent un caractère unique, il incombe au législateur, et non aux tribunaux, de rajuster en fonction des percées technologiques les techniques d’enquête dont peut faire usage le Service.

[7] Pour expliquer ma démarche, je vais d’abord passer en revue les dispositions pertinentes de la Loi sur le SCRS. Je décrirai ensuite la preuve présentée au juge désigné ainsi que ses constatations quant aux implications de |||||||||||||||||||||||[la méthode de collection proposée quant à l’information à l’extérieur du Canada.]||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| Enfin, je donnerai les motifs pour lesquels, à mon avis, le juge désigné n’a pas fait fausse route – comme le soutient le procureur général – lorsqu’il a statué, compte tenu de la preuve et de ses constatations, qu’il y avait lieu de refuser la délivrance d’un mandat autorisant [la collecte de cette information] |||||||||||||||||||||| en cause.

II. Cadre législatif

[8] Le paragraphe 16(1) de la Loi sur le SCRS confère au Service les fonctions de prestation d’assistance, dans les domaines de la défense et de la conduite des affaires internationales du Canada, au ministre de la Défense nationale ou au ministre des Affaires étrangères, à la collecte des informations ou de renseignements sur les moyens, les intentions ou les activités d’un État étranger ou d’un groupe d’États étrangers. Selon le paragraphe 16(3), l’assistance du Service est subordonnée à une demande personnelle écrite du ministre concerné et au consentement personnel écrit du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile. Le paragraphe 16(1) précise que le Service peut prêter son assistance au ministre « dans les limites du Canada » (en anglais, « within Canada »).

[9] Voici le passage le plus pertinent du paragraphe 16(1).

Assistance

Collection of information concerning foreign states and persons

 

16 (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article, le Service peut, dans les domaines de la défense et de la conduite des affaires internationales du Canada, prêter son assistance au ministre de la Défense nationale ou au ministre des Affaires étrangères, dans les limites du Canada, à la collecte des informations ou de renseignements sur les moyens, les intentions ou les activités :

16 (1) Subject to this section, the Service may, in relation to the defence of Canada or the conduct of the international affairs of Canada, assist the Minister of National Defence or the Minister of Foreign Affairs, within Canada, in the collection of information or intelligence relating to the capabilities, intentions or activities of

a) d’un État étranger ou d’un groupe d’États étrangers […].

(a) any foreign state or group of foreign states […].

[Non souligné dans l’original.]

[10] Le libellé intégral des articles 16 et 21, ainsi que des articles 12 et 21.1, se trouve en annexe.

[11] Parce qu’il comporte la restriction « dans les limites du Canada », l’article 16 se distingue des dispositions de la Loi sur le SCRS qui établissent les autres fonctions du Service. Aucune autre ne comporte expressément une telle restriction. Au contraire, d’autres dispositions autorisent expressément le Service à exercer ses fonctions même à l’extérieur du Canada. Ces dernières découlent des modifications apportées en 2015 (LC 2015, ch. 9 et 20). L’article 16 n’a subi aucune modification de cette nature.

[12] Le paragraphe 12(1) établit les fonctions du Service en matière de collecte, d’analyse et de conservation d’informations et de renseignements ayant trait aux menaces envers la sécurité du Canada. Le paragraphe 12(2) précise qu’« [i]l est entendu » que le Service peut exercer les fonctions susmentionnées « même à l’extérieur du Canada ». Le paragraphe 12.1(1) autorise le Service, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une activité donnée constitue une menace envers la sécurité du Canada, à prendre des mesures pour réduire la menace « même à l’extérieur du Canada ». L’article 13 autorise le Service à fournir des évaluations de sécurité, et l’article 14, à fournir des conseils à un ministre sur les questions de sécurité du Canada ou à transmettre des informations à un ministre sur des questions de sécurité ou des activités criminelles, dans la mesure où ces conseils et informations sont en rapport avec l’exercice, par ce ministre, des pouvoirs et fonctions qui lui sont conférés en vertu de la Loi sur la citoyenneté, LRC (1985), ch. C-29, ou de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch. 27. Selon le paragraphe 15(2), « [i]l est entendu » que le Service peut mener des enquêtes pour ces fins « même à l’extérieur du Canada ». La version anglaise de ce passage est ainsi libellée : « within or outside Canada ».

[13] En outre, les dispositions de la Loi sur le SCRS ayant trait aux mandats établissent une distinction, sur le plan de la portée territoriale, entre les fonctions du Service quant à la menace et ses fonctions d’assistance aux ministres visées à l’article 16. Le paragraphe 21(1) autorise le directeur ou un employé du Service désigné, après avoir obtenu l’approbation du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, à demander à un juge désigné de décerner un mandat s’il a des motifs raisonnables de croire que le mandat est nécessaire pour permettre au Service « de faire enquête, au Canada ou à l’extérieur du Canada [en anglais, « within or outside Canada »], sur des menaces envers la sécurité du Canada ou d’exercer les fonctions qui lui sont conférées en vertu de l’article 16 ».

[14] Aucune disposition du type « même à l’extérieur du Canada » ne s’applique aux demandes de mandat permettant au Service d’exercer ses fonctions visées à l’article 16, auxquelles s’applique plutôt la restriction « dans les limites du Canada » prévue au paragraphe 16(1).

[15] Le paragraphe 21(3.1) prévoit qu’en vertu d’un mandat, le Service peut être autorisé à mener des activités « à l’extérieur du Canada » (« outside Canada ») pour faire enquête sur des menaces envers la sécurité du Canada, et ce, « [s]ans égard à toute autre règle de droit, notamment le droit de tout État étranger ». Encore une fois, cette disposition ne s’applique pas à un mandat décerné au Service pour lui permettre d’exercer ses fonctions visées à l’article 16. De même, les paragraphes 21.1(1) et (3) prévoient la délivrance, « [p]ar dérogation à toute autre règle de droit mais sous réserve de la Loi sur la statistique », d’un mandat autorisant le Service à prendre, « au Canada ou à l’extérieur du Canada » (« within or outside Canada »), des mesures pour réduire une menace envers la sécurité du Canada. Aux termes du paragraphe 21.1(4), un mandat décerné en vertu du paragraphe 21.1(3) peut autoriser la prise de mesures à l’extérieur du Canada « [s]ans égard à toute autre règle de droit, notamment le droit de tout État étranger ». Le Service ne peut se voir décerner un mandat en vertu de l’article 21.1 que dans le cadre de ses fonctions de réduction des menaces envers la sécurité du Canada, pas pour ses fonctions visées à l’article 16.

[16] Le paragraphe 21(2) précise le contenu d’une demande de mandat visée au paragraphe 21(1) (demande qui s’applique aux fonctions visées à l’article 16). Il exige qu’une telle demande s’accompagne d’un affidavit du demandeur portant sur certains points. Il s’agit notamment des faits sur lesquels il s’appuie pour avoir des motifs raisonnables de croire que le mandat est nécessaire pour permettre au Service de faire enquête sur des menaces envers la sécurité du Canada ou d’exercer les fonctions qui lui sont conférées en vertu de l’article 16 (alinéa a); du fait que, sans mandat, il est probable que des informations importantes concernant les menaces ou les fonctions visées à l’article 16 ne pourraient être acquises (alinéa b); « [d]es catégories de communications dont l’interception, [ainsi que] [d]es catégories d’informations, de documents ou d’objets dont l’acquisition […], sont à autoriser » (alinéa c); « si possible, [d’]une description générale du lieu où le mandat demandé est à exécuter » (alinéa f).

[17] En vertu du paragraphe 21(3), le juge saisi de la demande peut décerner le mandat s’il est convaincu de l’existence des faits qui sont mentionnés aux alinéas 21(2)a) et b), « [p]ar dérogation à toute autre règle de droit mais sous réserve de la Loi sur la statistique ». Un mandat décerné en vertu de l’article 21 autorise ses destinataires « à prendre les mesures qui y sont indiquées » (c’est‑à-dire intercepter toute communication ou acquérir tout document ou objet). À cette fin, le mandat peut autoriser de leur part « l’accès à un lieu ou un objet ou l’ouverture d’un objet; […] la recherche, l’enlèvement ou la remise en place de tout document ou objet, leur examen, le prélèvement des informations qui s’y trouvent, ainsi que leur enregistrement et l’établissement de copies ou d’extraits par tout procédé, […] l’installation, l’entretien et l’enlèvement d’objets ».

III. Instance antérieure

[18] Le sens de l’expression « dans les limites du Canada » qui se trouve au paragraphe 16(1) est une question qui a d’abord été soulevée auprès d’un juge désigné (le juge Noël) dans le cadre d’une demande de mandats présentée par le Service contre ||||[un état étranger, groupe d’états ou personne.]|||| Le Service demandait notamment un mandat autorisant  |  ||||||||[la collecte d’information électronique.]|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[19] Le juge Noël a rejeté la demande, car l’un des mandats demandés permettait de  [collecter l’information électronique dans un ou des états étrangers]  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| (2018 CF 738). Il a entrepris de décortiquer le libellé, le contexte et l’objet de l’article 16, puis (aux paragraphes 72 à 100), il a fait l’historique législatif de cette disposition et des différentes propositions ayant visé à la modifier par l’élimination de la restriction « dans les limites du Canada ».

[20] Le juge désigné a ainsi cherché à cerner les risques présumés qui ont sous-tendu l’inclusion de la restriction à l’article 16. Au paragraphe 74, il a souligné que, dans son rapport rendu en 1981, qui a mené à la création du Service, la Commission McDonald (Commission d’enquête sur certaines activités de la Gendarmerie royale du Canada) avait formulé une mise en garde : « le gouvernement qui se livre à des activités d’espionnage contre d’autres États court un risque politique manifeste ». En outre, elle avait laissé entendre qu’une « réputation d’honnêteté et de droiture dans la conduite des affaires internationales peut […] procurer au Canada des avantages ». La Commission avait également soulevé ce qu’elle considérait être le « grave problème moral » que pose à un gouvernement « [l’] » utilisation d’un service secret dont la manière d’opérer viole fatalement les lois d’autres pays ».

[21] Aux paragraphes 78 et 79, le juge désigné a également cité le témoignage livré par l’honorable juge Robert Kaplan, alors solliciteur général, devant le comité sénatorial qui étudiait le projet de loi qui allait devenir la Loi sur le SCRS. Il a souligné que M. Kaplan avait affirmé, entre autres, que le Service serait « un organisme de cueillette de renseignements, [et que] son mandat [serait] différent de celui d’un organisme de protection du gouvernement, comme la CIA en est un par rapport au gouvernement américain. Une autre différence importante est que l’organisme exerce[rait] son activité au Canada ». Selon le juge, ce témoignage exprimait clairement que le gouvernement avait décidé que le Service « ne deviendrait pas un organisme s’apparentant à la CIA qui peut se rendre à l’étranger en cachette afin d’influer sur des événements et des activités sur place ».

[22] Le juge désigné a soutenu que l’expression « dans les limites du Canada » signifie « seulement au Canada », et qu’adopter un sens plus large reviendrait à réécrire cette disposition, ce qui incombe exclusivement au législateur. Il a conclu que, même si ||||[la collecte]||| est effectuée « à partir du Canada », ||||||||||||||||||||||||||||||une partie considérable de ||[la collecte se produirait à l’extérieur du Canada]|. Partant, il a statué ne pas avoir la compétence de délivrer un mandat autorisant  [la collecte d’information proposée dans un ou des états étrangers.]  ||||||||||||||||||||||||||||||

[23] Le procureur général a porté en appel la décision du juge Noël, appel que la Cour a rejeté (version publique de 2018 CAF 207) purement au motif que la preuve au dossier quant à la manière dont ||||||||||||||||||||||||||||[allait s’effectuer]|||||||||| la collecte |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||[d’information à l’extérieur du Canada]|||||||||||||||||||||||||||| n’était pas suffisamment éclairante pour lui permettre de traiter des motifs allégués en appel. La Cour a dressé une liste de treize questions qu’elle considérait comme importantes à cette fin, auxquelles le dossier ne répondait pas. Cependant, elle a expressément évité d’écarter la possibilité qu’une future demande de mandat s’accompagne d’une preuve suffisante pour démontrer qu’accorder les pouvoirs refusés par le juge désigné respecterait l’exigence « dans les limites du Canada » prévue au paragraphe 16(1).

[24] Par la suite, le Service a demandé d’autres mandats en vue d’obtenir des informations et des renseignements sur |[état étranger, groupe d’états ou personne]|||. Ce faisant, il a demandé au juge désigné saisi de la demande, le juge Gleeson, d’apporter des précisions sur la question de l’expression « dans les limites du Canada », compte tenu des autres éléments de preuve qu’il avait présentés par suite de la décision en appel. Le Service a demandé au juge de [traduction] « préciser si l’article 16 permet au Service, pour prêter son assistance au ministre demandeur, de recueillir  [de l’information électronique sans tenir compte si l’information est à l’intérieur ou l’extérieur du Canada]|  ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ». Le jugement portant sur cette question fait l’objet du présent appel. Il est établi que l’issue de l’espèce s’appliquera également aux mandats demandés ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||.

IV. Mandats antérieurs visant ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[25] Pendant l’essentiel de la période allant de |||| à 2018, année où a été présentée la demande ayant mené à l’espèce, le Service s’est vu décerner des mandats lui permettant de recueillir des informations sur les moyens, les intentions ou les activités |||[d’un état étranger, groupe d’états ou personne]|||||||||||||||||||||||||| afin d’exercer ses fonctions visées à l’article 16. Ces mandats l’ont notamment autorisé à  xxxxxxxx[collecter l’information de personnes étrangères]  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| au Canada. Ces mandats ont été demandés et décernés malgré  xxxxxxx[les lois qui pourraient interdire la collecte.]|  ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| Toutefois, comme il a été souligné plus haut, il est possible de décerner un mandat en vertu de l’article 21 « sans égard à toute autre règle de droit ».

[26]  |  ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||[fait partie d’informations électroniques visées]||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||| par les mandats. Ceux-ci pouvaient être exécutés par tous moyens, notamment  |  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[27] Les rapports fondés sur les informations obtenues grâce aux mandats ont été considérés très éclairants sur les moyens, les intentions et les activités |||[d’un état étranger, groupe d’états ou personne]||| et très utiles pour ce qui était de la gestion |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| Dans la demande d’assistance présentée au Service qui a mené à la dernière demande de mandats, |||||||||[le/la] ministre|||||||||||||||||| a notamment souligné qu’ [il serait difficile d’obtenir l’information désirée de sources ouvertes.]|  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| Dans son explication sur l’importance des informations demandées pour |||[le fondement | législatif de la collecte,] [le/la] ministre|||||||||||||||||||||||||| a évoqué, entre autres,  [les questions qui ont suscité l’intérêt du Canada dans la collecte.]|  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||[Il/Elle]|||||||||||||||| a demandé au Service d’utiliser toute la gamme des techniques d’enquête qui lui sont disponibles, notamment les mandats décernés en vertu de l’article 21.

[28] Toutefois, le Service a constaté  [qu’il n’est plus pratique d’utiliser des méthodes antérieures pour certaine collecte, comme c’était aussi le cas dans Les limites du Canada, CF.]|  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

V. ||||||||||||||[Méthode de collecte]||||||| proposée

[29]  [Car il n’est plus pratique d’utiliser des méthodes antérieures pour certaine collecte, le Service a proposé d’accéder l’information recherchée |||||||||||||||||||||||||en utilisant la méthode proposée. L’information collectée serait ce qui répond]||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| à la demande d’assistance ||[du/de la] ministre||| visée au paragraphe 16(1)|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||.

[30]  [La méthode de collecte proposée serait amorcée, et l’information reçue par le Service, à l’intérieur du Canada.]|  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[31] Dans l’affidavit en appui à la demande de mandats, le Service a donné d’autres détails sur  [la méthode de collecte proposée ainsi que les impacts de la méthode de collecte à l’intérieur et l’extérieur du Canada.]|  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

VI. |||||[Preuves relatives au lieu de la collecte]|||||

[32] Dans leur contre-interrogatoire, les amici ont soulevé, auprès de la déposante du Service pour les questions techniques|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||  [de l’information indiquant que l’information serait collectée à l’intérieur d’états spécifiques et connus.]|  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[33] La déposante du Service a fini par reconnaître [[– même si le Service n’était pas en mesure de s’assurer des particularités de l’information  |– il était très probable de la preuve que la collecte s’effectue d’un ou de plusieurs états spécifiques.]||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

VII. Décision du juge désigné

A. Constatations de fait

[34] Au paragraphe 75 de ses motifs, le juge désigné a dressé la liste ci-après de ce qu’il a dit être ses « principales constatations de fait, selon la prépondérance des probabilités ».

A. ||[Des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques| |lliés à l’information recherchée et/ou la méthode proposée pour les obtenir.]||||||||||||||

B. ||[Des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques|||||||||||||| ||liés à l’information recherchée et/ou la méthode proposée pour les obtenir.]|||||||||||||||

C. ||[Des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques |||||||||| ||liés à l’information recherchée et/ou la méthode proposée pour les obtenir.]||||||||||||||

D. ||[Des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques|| |||||||||||| ||liés à l’information recherchée et/ou la méthode proposée pour les obtenir.]||||||||||||||

E. ||[Des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques||| ||| ||liés à l’information recherchée et/ou la méthode proposée pour les obtenir.]|||||||||||||||

F. |||[Des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques |||||||||| |||liés à l’information recherchée et/ou la méthode proposée pour les obtenir.]|||||||||||||

G. |||[Des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques ||||||| |||liés à l’information recherchée et/ou la méthode proposée pour les obtenir.]||||||||||||

H. Le Service recourt à ||||[des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques liés à l’information |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||recherchée et/ou la méthode proposée pour les obtenir]|| depuis le Canada.

I. ||[Des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques|||||||||||||| |lliés à l’information recherchée et/ou la méthode proposée pour les obtenir.]||||||||||||||||||||||||

J. Une fois  [des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques liés à l’information recherchée |  |||||||||||||||||||et/ou la méthode proposée pour les obtenir]||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| depuis le Canada, aucune intervention humaine n’est nécessaire jusqu’à ce que  |  ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||.

K. ||[Des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques|| ||||||||||lliés à l’information recherchée et/ou la méthode proposée pour les obtenir.]||

L. |||[La méthode de collecte proposée] |||| entraîne un accès |||||||||||||||| aux informations |||||||||||||||||||||| et il est raisonnable de présumer que cet accès constitue aussi une infraction aux  [lois étrangères et/ou internationales et/ou le principe de la non-ingérence reconnu en droit international.] |  ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

M. |[Des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques|| |liés à l’information recherchée et/ou la méthode proposée pour les obtenir.]|

N. |[Des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques|||||| |liés à l’information recherchée et/ou la méthode proposée pour les obtenir.]

O. |[Des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques|||||||||||||| lliés à l’information recherchée et/ou la méthode proposée pour les obtenir.]Il n’y a aucun accès aux autres informations |||||||||||||||||||||||||||||||||||| et il n’y a pas de répercussions pour celles-ci.

P. |[Des constatations factuelles concernant des problèmes techniques et/ou géopolitiques|||| |liés à l’information recherchée et/ou la méthode proposée pour les obtenir.]

[35] Le procureur général ne conteste pas ces constatations. À mon avis, elles sont toutes étayées par le dossier. La constatation « L » reflète l’entente entre le procureur général et les amici (au paragraphe 42 des motifs du juge désigné) selon laquelle « [l]a Cour peut raisonnablement inférer que la collecte d’informations, effectuée de la manière décrite dans la question dont est saisie la Cour, constituera une infraction aux |||[lois étrangères et/ou internationales||||||||| ||||| et/ou le principe de la non-ingérence reconnu en droit international]|||||||||||||| dont relève l’endroit où  |[les aspects de la collecte se produiront]   |||||||||||||||||| ».

[36] Après avoir établi les constatations susmentionnées, le juge désigné a entrepris d’adopter en grande partie l’analyse du juge Noël (voir les paragraphes 18 à 22 des présents motifs). Le juge désigné a estimé que le procureur n’avait pas mis cette analyse en cause, et qu’en l’adoptant, il se conformait au principe de la courtoisie judiciaire entre juges d’un même tribunal. Le juge désigné a estimé que, compte tenu de la décision de la Cour dans l’appel ayant visé celle du juge Noël, il lui fallait se prononcer sur la question suivante : le dossier plus étoffé qu’il avait en main l’amenait-il à une conclusion différente que celle formulée par le juge Noël? Il a convenu avec les amici que, pour en arriver à une conclusion différente, il devait constater d’une part que la collecte ||||||||||||||||||||||||||||||||[d’information électronique en utilisant la méthode proposée]|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||, peu importe ||||||||||||||||[qu’elle soit]|||||||||||||||||| au Canada ou à l’étranger, respectait la restriction « dans les limites du Canada » prévue à l’article 16 de la Loi sur le SCRS et que, d’autre part, l’article 21 de la Loi sur le SCRS donnait à la Cour fédérale compétence pour autoriser le Service à mener des activités qui enfreignaient des lois étrangères ou internationales.

B. « Dans les limites du Canada »

[37] Le juge désigné a abordé la première des deux questions à compter du paragraphe 82 de ses motifs. D’entrée de jeu, il a évoqué les observations du procureur général, dans lesquelles ce dernier soutient qu’il faut interpréter l’article 16 de manière à donner effet à la relation qui existe entre les articles 16 et 21 de la Loi sur le SCRS. Cet argument reposait entre autres sur – selon le procureur général – les termes généraux de l’article 21. Il a soutenu par exemple qu’à l’alinéa 21(2)c) et au paragraphe 21(3), il est prévu qu’un juge peut autoriser le Service à |||[collecter]||||| des informations, ce qui ne limite pas l’autorisation ||||||[d’un type de collecte particulière]||||| et qu’à l’alinéa 21(2)f), il est question de donner « si possible » une description générale du lieu où le mandat est à exécuter, ce qui atténue l’importance du lieu |||||||||||[où l’information sera collectée.]|||||||||||| Aux paragraphes 88 à 91 de ses motifs, le juge désigné a estimé que cet argument ne correspondait pas à la preuve dont il était saisi, selon laquelle |||||||[la méthode de collecte proposée]|||||||, en l’absence d’autorisation judiciaire, constituait  |  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||[la collecte d’informations non autorisée.]|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[38] Aux paragraphes 93 et 94 de ses motifs, le juge désigné a ajouté que, pour une autre raison, les articles 21, 12 et 12.1 de la Loi sur le SCRS s’avéraient utiles pour interpréter l’article 16 et montraient que le législateur avait adopté une « approche très différente » pour définir la portée géographique des différentes fonctions du Service ainsi que du pouvoir de la Cour fédérale d’autoriser les activités extraterritoriales.

[39] Le juge désigné s’est ensuite penché (au paragraphe 95) sur l’interprétation de l’article 16 lui-même, et sur l’observation du procureur général selon laquelle l’expression « dans les limites du Canada » devrait être interprétée au sens de « depuis le Canada ». Le juge désigné n’a constaté aucun argument convaincant à l’appui de cette interprétation qui, à son avis, ne correspondait pas au sens littéral de l’expression, qu’il considérait comme clair et sans équivoque : l’assistance autorisée à l’article 16 devait être prêtée à l’intérieur des frontières du Canada.

[40] En outre, a souligné le juge désigné au paragraphe 99, l’interprétation du procureur général ne correspondait pas à ce qu’il considérait comme la nature limitée et contrôlée des fonctions conférées par le législateur en vertu de l’article 16. Ces « principes législatifs de “limites et de contrôles” » ne se reflétaient pas uniquement dans l’expression « dans les limites du Canada », mais aussi dans le prérequis voulant que l’assistance soit subordonnée à une demande personnelle écrite du ministre de la Défense nationale ou des Affaires étrangères, et dans le fait qu’elle se limite à la collecte d’informations ou de renseignements sur les moyens, les intentions ou les activités d’étrangers ou d’États étrangers.

[41] Le juge désigné a également trouvé dans le contexte législatif un appui à l’interprétation littérale de l’expression « dans les limites du Canada ». Il a de nouveau souligné le contraste entre, d’une part, l’autorisation d’agir à l’extérieur du territoire expressément prévue aux articles 12, 12.1, 15, 21 et 21.1 et, d’autre part, le libellé du paragraphe 16(1). À l’instar du juge Noël, il n’a pu « que conclure que le législateur [avait] eu l’intention de bien marquer la différence entre la portée des différentes fonctions du Service, d’une part “même à l’extérieur du Canada” […] et, d’autre part, “dans les limites du Canada” à l’article 16 » (au paragraphe 104).

[42] Enfin, aux paragraphes 105 à 108, le juge désigné s’est attardé à un dernier élément d’interprétation de l’expression « dans les limites du Canada », c’est-à-dire l’analyse téléologique effectuée par le juge Noël, que ne contestait pas le procureur général. Selon la conclusion de l’analyse, l’article 16 et sa restriction géographique reflètent le souci du législateur d’en arriver à un équilibre entre, d’une part, les besoins du Canada en matière de renseignements étrangers de grande qualité au pays et à l’étranger et, d’autre part, l’importance de protéger les relations diplomatiques et la réputation internationale du pays, éléments essentiels pour que des gouvernements étrangers continuent de collaborer avec le Canada et de lui communiquer des informations de sécurité sensibles. Cette mise en balance a mené le législateur à conférer au Service des fonctions limitées de collecte de renseignements étrangers qui excluent que soient menées « à l’étranger des activités cachées et offensives », afin d’« atténuer les risques politiques, diplomatiques et moraux liés à la tenue d’activités de collecte de renseignements étrangers, qui pourraient contrevenir à des lois internationales et à des lois étrangères et compromettre la réputation internationale du Canada […] ». Partant, selon le juge désigné, une analyse téléologique n’allait pas non plus dans le sens d’un élargissement de l’expression « dans les limites du Canada » au-delà de ce que laissait entendre son sens littéral.

[43] Aux paragraphes 110 et 111, le juge désigné a exposé en ces termes sa conclusion quant à l’interprétation de l’article 16 :

L’examen de l’article 16 en fonction du contexte global, du sens grammatical et ordinaire du libellé, et compte tenu de l’esprit et de l’objet de la loi et de l’intention du législateur, ne me permet pas de conclure que le segment « […] son assistance […], dans les limites du Canada, à la collecte d’informations ou de renseignements […] » peut être interprété de manière à signifier qu’il suffit que l’assistance soit prêtée et que |||||||||||||| soit effectuée « depuis » le Canada. En contexte, ce segment exige que ces deux actions se déroulent dans les limites du Canada.

Le juge Noël a conclu que l’interprétation correcte de l’expression « dans les limites du Canada » est « seulement au Canada ». J’abonde dans son sens.

[44] Toutefois, au paragraphe 112, le juge désigné a apporté une précision : la restriction « dans les limites du Canada », a-t-il déclaré, « n’exige pas que toute étape, toute action ou tout élément de l’activité de collecte proposée se déroule au Canada ». Se reportant à sa conclusion selon laquelle la restriction géographique imposée par le législateur au paragraphe 16(1) visait à éviter que soient menées « à l’étranger des activités cachées et offensives », il a affirmé qu’il « [était] possible de donner à l’article 16 une interprétation adéquate : il interdit les activités de collecte qui implique des mesures extraterritoriales qui vont à l’encontre de l’intention du législateur ou qui comportent les risques que le législateur souhaitait atténuer. Cela doit être déterminé au cas par cas ».

[45] Au paragraphe 113, il a ajouté que, dans l’affaire dont il était saisi, la preuve |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| montrait que la |||||||[méthode de collecte proposée]||||| serait utilisée pour accéder |||||||||||||||||||||| à des informations ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||[qui sont à l’extérieur du Canada.]|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| Sa conclusion selon laquelle l’utilisation de |||||||||[la méthode de collecte proposée]||||||||||||||||||||||| enfreindrait l’article 16 s’appliquait uniquement aux faits constatés. Il a affirmé que ces faits [traduction] « ne se rapportaient pas à une situation où  [les informations seraient connues pour être en dehors de n’importe quel état]|  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||| ». Sans rien ajouter sur ces situations possibles, il a [traduction] « [reconnu] que, dans d’autres circonstances, il pourrait être possible de conclure que le recours à ||||||[la méthode de collecte proposée]|||| respecte l’exigence “dans les limites du Canada” prévue à l’article 16, mais [n’a formulé] aucune opinion à cet égard ».

C. Jurisprudence relative |[à l’accessibilité de l’information par l’entremise de l’Internet]|

[46] Bien qu’ayant formulé sa conclusion quant au sens de l’expression « dans les limites du Canada » prévue à l’article 16 et à son application aux faits qui lui avaient été présentés, le juge désigné s’est néanmoins penché (à compter du paragraphe 115) sur l’argument du procureur général voulant que l’utilisation proposée de ||||||||[la méthode de collecte]|||||||||||||||| puisse être autorisée sur la foi de la jurisprudence relative ||[à l’accessibilité de l’information par l’entremise de l’Internet.]| Il s’agit d’un ensemble de décisions qui reconnaissent  |  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[47] Dans son examen de l’argument du procureur général, le juge désigné a traité de  |  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||[la jurisprudence canadienne.]||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| Il n’a rien dit des cas analogues relevés dans la jurisprudence de tribunaux américains, sur lesquels le procureur général s’était aussi appuyé.

[48] ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||[Les paragraphes 48 et 49 sont une discussion de la jurisprudence relative à l’accessibilité de l’information par l’entremise de l’Internet.]|||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||

[49]  |  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[50] En l’espèce, le juge désigné a exprimé l’opinion (aux paragraphes 126 à 130) que la jurisprudence |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| n’était d’aucun secours au procureur général. Entre autres, il était raisonnable de présumer que le recours à  [la méthode de collecte proposée comportait des éléments en violations des lois étrangères  |et/ou internationales et/ou le principe de la non-ingérence reconnu en droit international.] || ||||||||||||||||||||||||||||[La méthode de collecte proposée ne correspond]|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||| pas au type de pratiques internationales et |||[ne cadre pas]||| avec le principe de la courtoisie internationale invoqués |||||||||[dans la jurisprudence relative à l’accessibilité de l’information par l’entremise de l’Internet]|||||||||||||. En outre, ni dans ||[la jurisprudence]|| les dispositions législatives applicables ne comprenaient une restriction expresse sur les activités extraterritoriales de même nature que celle qui est prévue à l’article 16.

[51] Le juge désigné a affirmé au paragraphe 129 qu’au vu des faits dont il disposait, il n’était pas en mesure de conclure à l’établissement du lien réel et important qui est nécessaire pour que la jurisprudence |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| entre en ligne de compte. Au paragraphe 130, il a soutenu que, bien qu’il soit nécessaire que les tribunaux reconnaissent le progrès technologique et interprètent les lois en fonction de la réalité technologique d’aujourd’hui, un tribunal ne saurait s’appuyer sur des percées technologiques pour adopter une interprétation qui va à l’encontre du sens ordinaire ou de l’objet de la loi.

D. Conclusion du juge désigné

[52] Partant, le juge désigné a conclu (aux paragraphes 131 et 132) que l’article 16 limitait l’assistance à celle qui était prêtée dans les limites géographiques du Canada, et que l’assistance se conformait à cette restriction « lorsque toute activité importante ayant trait à l’assistance ou à la collecte [était] menée uniquement dans les limites du Canada ». Si la définition d’« activité d’assistance ou de collecte importante » dépend des circonstances de chaque cas, elle inclura selon lui, « au minimum, 1) toute activité pertinente qui porte à conséquences sur le plan juridique et 2) toute activité qui présente les risques mêmes que le législateur a cherché à atténuer par l’adoption de la restriction géographique prévue à l’article 16 [de la Loi sur le SCRS] ». En règle générale, cela comprend toute activité qui contrevient au droit international et au principe de non‑intervention, sauf avis contraire du législateur. En l’espèce, le juge désigné a statué que |||||||[la méthode de collecte proposée]|||||| impliquerait de nombreuses activités à l’extérieur du Canada, activités qui sont pertinentes sur le plan juridique et qui présentent les risques mêmes que le législateur a cherché à atténuer.

[53] Partant, de l’avis du juge désigné, au vu des faits dont il disposait, le recours proposé ||||[à la méthode de collecte]||| ne respecterait pas la restriction « dans les limites du Canada », emportant le refus obligatoire de l’autorisation demandée. Le juge désigné a abondé dans le sens du juge Noël : en arriver à une autre conclusion reviendrait à usurper le rôle du législateur. Il a également soutenu que l’article 21, pour ce qui était d’une demande de mandat visant la prestation d’assistance en vertu de l’article 16, ne permettait pas d’autoriser le Service à mener dans un État étranger des activités qui contreviennent aux  [lois étrangères et/ou internationales et/ou le principe de la non-ingérence reconnu en droit international à l’égard de certains pays étrangers]|  ||||||||||||||||||||.

VIII. Questions et norme de contrôle

[54] Le présent appel vise essentiellement à déterminer si le juge désigné a statué erronément que la restriction « dans les limites du Canada » prévue au paragraphe 16(1) de la Loi sur le SCRS empêche un juge, dans le cadre d’une demande de mandat présentée en vertu de l’article 21 pour permettre au Service d’exercer les fonctions qui lui sont conférées par l’article 16, de décerner un mandat autorisant des personnes qui se trouvent au Canada  |  ||||||||||||||||||||||||[d’utiliser la méthode de collecte proposée pour obtenir de l’information]|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| à l’extérieur du Canada.

[55] En fonction – en partie – de la réponse donnée à cette première question, une seconde pourrait devoir être étudiée : dans les mêmes circonstances que la première question, le juge désigné a-t-il statué à tort qu’en vertu de l’article 21, un juge ne pouvait pas décerner de mandat autorisant que soient menées, ||[à l’extérieur du Canada]||||, des activités relatives à l’article 16 qui contrevenaient |[à des lois étrangères et/ou internationales et/ou le principe de la non-ingérence reconnu en droit international]||?

[56] Les conclusions formulées par le juge désigné soulèvent des questions de droit susceptibles de contrôle selon la norme de la décision correcte. Premièrement, comme le soutient le procureur général, dans le contexte analogue en droit criminel, constitue une question de droit la question de savoir si, au vu des faits, ||[une collecte]|| respecte les conditions légales permettant de l’autoriser (R. c. MacKenzie, 2013 CSC 50, au paragraphe 54). Deuxièmement, les conclusions du juge désigné soulèvent des questions d’interprétation de la loi et, partant, des questions de droit (Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33, au paragraphe 8; TELUS Communications Inc. c. Wellman, 2019 CSC 19, au paragraphe 30). Troisièmement, dans la mesure où il est possible d’affirmer que les conclusions en cause soulèvent des questions mixtes de faits et de droit, le procureur général ne conteste aucune des constatations de fait du juge désigné, mais avance que celui-ci a fait erreur dans sa démarche d’interprétation de l’article 16. Une telle contestation soulève une question de droit isolable.

IX. Analyse

A. Première question : la restriction « dans les limites du Canada »

[57] Le procureur général avance que le juge désigné à commis des erreurs de droit dans sa décision sur la première question, dont les principales sont les suivantes : le juge désigné a négligé de 1) reconnaître  |  |[la difficulté d’attribuer un lieu à l’information dans ce contexte;]||| 2) conclure qu’une démarche entreprise « depuis le Canada » respecte l’exigence « dans les limites du Canada » prévue à l’article 16; 3) tenir compte de la jurisprudence relative |[à l’accessibilité de l’information par l’entremise de l’Internet;]| 4) prendre en considération le progrès technologique dans l’attribution d’un sens à l’expression « dans les limites du Canada ».

[58] Je vais aborder tour à tour chacun de ces éléments.

1) ||||[Le lieu de la collecte]||||

[59] Selon le procureur général, le juge désigné a déterminé à tort  |  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||[d’attribuer le lieu à un certain aspect de la collecte.]||||| Il avance que, selon une compréhension adéquate de ce qui allait se produire, |||||[le lieu de la collecte n’est pas pertinent]||||||, parce que le Service allait axer sa démarche sur l’accès ||||||||||||||||||||||||||||||||||||[à l’information.]|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[60] Je ne constate aucune erreur du juge désigné à cet égard. La caractérisation |||[de certains aspects de la collecte]||| dans le mandat ne saurait être déterminante. Dans le dossier dont il disposait, le juge a constaté notamment que,  [employée avec succès, la méthode de collecte permet d’accéder aux informations liées à un ou des lieux connu(s) et spécifique(s)]|  ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| (voir la constatation « K », au paragraphe 34 des présents motifs). ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||[La preuve]|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| montre que|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||[le lieu de la collecte]||||||||||||||||||||||||||||| est tout à fait pertinent, peu importe ce sur quoi le Service se concentre.

2) « Depuis le Canada »

[61] Le procureur général soutient que le juge désigné a commis une erreur en ne concluant pas qu’il y avait lieu de donner à l’expression « dans les limites du Canada » le sens de « depuis le Canada ». Selon cette interprétation, les faits constatés par le juge désigné suffiraient à respecter l’exigence « dans les limites du Canada » (se reporter aux constatations « H » et « J », au paragraphe 34 des présents motifs).

[62] Je ne tiendrais pas compte de cet argument. Comme le souligne la professeure Sullivan, il existe une différence importante entre, d’une part, donner une interprétation atténuée à une disposition législative dont la portée est jugée trop large et, d’autre part, comme le propose le procureur général, y voir du contenu additionnel pour en ajuster la portée jugée trop restreinte. En règle générale, [traduction] « l’atténuation – pourvu qu’elle soit justifiée – d’une disposition législative dont la portée est jugée trop large est considérée comme de l’interprétation, tandis que l’inclusion par interprétation est considérée comme une modification qui, partant, relève du législateur » (Sullivan on the Construction of Statutes, 6e édition, LexisNexis Canada Inc., 2014, au point 12.16; voir aussi R. c. Shubley, [1990] 1 RCS 3, à la page 26, et Canada (Procureur général) c. Vorobyov, 2014 CAF 102, au paragraphe 33). En ce sens, ajoute la professeure Sullivan, le libellé d’une loi [traduction] « en circonscrit le sens; normalement, il y a peu de marge de manœuvre entre le sens courant d’une disposition et la limite qu’impose son libellé ».

[63] Je reconnais qu’il peut être possible d’estimer que l’interprétation « depuis le Canada » trouve un certain appui dans la décision du juge désigné, le juge Mosley, dans la version publique de X (Re), 2009 CF 1058, au paragraphe 60, où il se dit d’accord avec l’énoncé suivant : « les exigences relatives à la compétence de décerner un mandat en vertu de l’article 21 sont remplies lorsque l’autorisation demandée vise à pouvoir obtenir des renseignements depuis le Canada ». Toutefois, les activités visées par la demande de mandat en cause s’inscrivaient dans le cadre des fonctions du Service prévues à l’article 12, pas de celles prévues à l’article 16. Ainsi, aucune interprétation de l’expression « dans les limites du Canada » ni aucun examen de sa portée n’avaient été demandés ni effectués.

[64] Partant, je rejetterais la deuxième observation du procureur général.

3) Omission de tenir compte de la jurisprudence relative  [à l’accessibilité de l’information par l’entremise de l’Internet] |  ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[65] Je suis d’accord avec le procureur général : la jurisprudence |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| établit une règle d’application générale.  |  ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||[Discussion de la jurisprudence canadienne.]|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[66] Toutefois, je conviens avec le juge désigné qu’en définitive, la jurisprudence |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| n’est d’aucun secours au procureur général. |||||||| ||||||||||||||||||[Discussion de raisons pourquoi la jurisprudence canadienne n’est pas applicable dans ce contexte.]||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||

[67] Par ailleurs, le procureur général critique le juge désigné pour ne pas avoir tenu compte de la jurisprudence américaine qui adopte une approche similaire à la jurisprudence ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||. Cependant, comme le reconnaît le procureur général, la jurisprudence américaine a, au mieux, une force persuasive. Quoi qu’il en soit, le fait qu’elle n’ait pas été évoquée expressément ne signifie pas qu’elle n’a pas été prise en considération (Mahjoub c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CAF 157, aux paragraphes 67 à 69).

[68] Avant de passer à autre chose, je me dois de souligner que la thèse du procureur général, selon laquelle ||||[la jurisprudence relative à l’accessibilité de l’information par l’entremise de l’Internet]||| pourrait permettre d’établir |||||||||||||||||||||||||||||| un « lien réel et important » qui suffirait à respecter l’exigence « dans les limites du Canada » prévue à l’article 16 est, de toute façon, discutable. Comme le soutiennent les amici, « lien réel et important » et « dans les limites du Canada » sont deux concepts qui diffèrent grandement. Le premier est un critère ancré dans la courtoisie internationale qui établit qu’une affaire doit avoir un lien minimal avec le Canada pour que celui-ci puisse justifier l’exercice de sa compétence. Le second est une restriction territoriale enchâssée dans la loi qui restreint les fonctions d’assistance du Service en matière de renseignement étranger prévues à l’article 16, peu importe l’importance du lien avec |||||||||||||||||||| visé par la collecte de renseignements. En outre, comme l’a fait observer le juge désigné (au paragraphe 128 de ses motifs, |||||||||||||||||||||||||||||||||| au paragraphe 60) : « Le critère du lien réel et important vise à éviter que l’on aille trop loin dans l’exercice de compétences sur les opérations extraterritoriales […], non à encourager l’élargissement des limites territoriales. »

[69] Cependant, compte tenu de mes conclusions susmentionnées, il n’y a rien à ajouter à ce sujet pour statuer sur l’observation du procureur général fondée sur  [la jurisprudence relative à l’accessibilité de l’information par l’entremise de l’Internet].|  ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

4) Omission de prendre en considération le progrès technologique

[70] Il n’est pas contesté qu’il y a lieu d’interpréter l’expression « dans les limites du Canada » figurant à l’article 16 selon « l’approche moderne » en matière d’interprétation des lois. Selon celle-ci, « [i]l faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur » (Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 RCS 27, 1998 CanLII 837).

[71] L’interprétation du libellé d’une loi fédérale doit aussi tenir compte, sauf indication contraire, des règles établies dans la Loi d’interprétation, LRC (1985), ch. I-21 (au paragraphe 3(1)), ainsi que de toute règle applicable de common law en matière d’interprétation des lois (Société canadienne des postes c. Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2019 CSC 67, au paragraphe 42; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Vavilov, 2019 CSC 65, aux paragraphes 117 et 118).


[72] L’une des règles à prendre en considération en l’espèce est énoncée à l’article 10 de la Loi d’interprétation : « [l]a règle de droit a vocation permanente ».

10 La règle de droit a vocation permanente; exprimé sans un texte au présent intemporel, elle s’applique à la situation du moment de façon que le texte produise ses effets selon son esprit, son sens et son objet.

10 The law shall be considered as always speaking, and where a matter or thing is expressed in the present tense, it shall be applied to the circumstances as they arise, so that effect may be given to the enactment according to its true spirit, intent and meaning.

[73] Cette règle a un corollaire : « Pour préserver l’intention originale du Parlement ou des législatures, il faut fréquemment interpréter leurs textes de loi au moyen d’une approche dynamique et sensible à l’évolution des réalités sociales et matérielles » (R. c. 974649 Ontario Inc., 2001 CSC 81, au paragraphe 38; R. v. Stucky, 2009 ONCA 151, aux paragraphes 29, 30 et 49, autorisation d’interjeter appel accordée, [2009] SCCA No 186; Ruth Sullivan, Sullivan on the Construction of Statutes, point 6.6).

[74] Ces « réalités sociales et matérielles » qui évoluent peuvent comprendre le progrès de technologies qui n’existaient pas lorsque la disposition interprétée est entrée en vigueur. À titre d’exemple, voir  |  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| John v. Ballingal, 2017 ONCA 579, au paragraphe 24, autorisation d’interjeter appel refusée, [2017] SCCA No 377; Bell Canada c. 7265921 Canada Ltd., 2018 CAF 174, au paragraphe 125. Pour ce qui est de l’espèce, bien sûr, ||||||||||||[l’]|||||| Internet sous sa forme actuelle |||[et d’autres progrès technologiques ne s’étaient pas produits]|||| lorsque les articles 16 et 21 ont été adoptés en 1984.

[75] Pour faire valoir que le juge désigné a interprété l’expression « dans les limites du Canada » sans prendre en considération le progrès technologique, le procureur général s’appuie surtout sur deux arrêts de la Cour suprême du Canada :  |  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[76] Comme l’a reconnu le procureur général dans ses observations orales, ces affaires et l’espèce ne sont pas absolument semblables. D’une part, elles impliquent l’incidence du progrès technologique sur le droit au respect de la vie privée, question qui n’est pas directement en cause en l’espèce. D’autre part, elles font état d’une adaptation, sur le plan judiciaire, de la doctrine ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| qui émane en grande partie de juges, plutôt que d’une question distincte d’interprétation des lois.

[77] Toutefois, la question demeure : le juge désigné a-t-il, comme l’avance le procureur général, commis une erreur en omettant de prendre en considération le progrès technologique, adoptant dans la foulée une approche statique plutôt que dynamique à l’interprétation de l’expression « dans les limites du Canada »? Selon moi, la réponse est négative.

[78] L’approche dynamique n’est pas de mise dans tous les exercices d’interprétation. Des tribunaux ont refusé de l’adopter lorsque, par exemple, cela soulèverait des questions de politique auxquelles une solution législative serait mieux adaptée (Harvard College c. Canada (Commissaire aux brevets), 2002 CSC 7, au paragraphe 155; Bishop c. Stevens, [1990] 2 RCS 467, aux pages 483 et 484; Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Kandola, 2014 CAF 85, aux paragraphes 75 à 80; Bell ExpressVu Inc. v. City of Winnipeg, 2010 MBQB 26, aux paragraphes 62 à 64). Les tribunaux seront aussi réticents à adopter une telle approche lorsque le législateur a déjà traité, bien que d’une autre manière, des « nouvelles réalités sociales » sur lesquelles s’appuie la partie qui requiert l’adoption d’une approche dynamique (Symes c. Canada, [1991] 3 CF 507, aux pages 522, 523 et 529 (C.A.), confirmé dans [1993] 4 RCS 695).

[79] Comme il a été souligné plus haut, la restriction « dans les limites du Canada » visant les fonctions conférées au Service à l’article 16 n’a pas été touchée par les modifications apportées en 2015, par lesquelles le législateur autorisait expressément le Service à exercer d’autres fonctions même à l’extérieur du Canada. J’abonde dans le sens des amici, selon lesquels l’assouplissement éventuel de cette restriction soulève des questions de politique, notamment la possibilité que le Canada procède à la collecte de renseignements étrangers au moyen, notamment, d’activités extraterritoriales, ainsi que l’identité du ministère ou de l’organisme gouvernemental qui serait autorisé à ce faire. Ces questions sont en suspens au moins depuis la publication du rapport de la Commission McDonald en 1981. Leur existence et leur complexité exigent de la circonspection de la part des tribunaux.

[80] À mon avis, une telle circonspection s’impose d’autant plus que le législateur a établi un mécanisme permettant de relever toute lacune présumée dans le cadre législatif régissant la sécurité et le renseignement, et de formuler des recommandations visant à les corriger. En effet, en 2017 a été adoptée la Loi sur le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, LC 2017, ch. 15 [Loi sur le CPSNR], qui constitue un comité composé d’un président et d’au plus dix autres membres qui sont tous des membres de l’une des deux chambres du Parlement, autres que des ministres, des ministres d’État ou des secrétaires parlementaires. Aux termes de l’alinéa 8(1)a) de la Loi sur le CPSNR, le Comité a pour mandat « d’examiner les cadres législatif, réglementaire, stratégique, financier et administratif de la sécurité nationale et du renseignement ». Aux termes de l’alinéa 8(1)c), il est aussi chargé « d’examiner toute question liée à la sécurité nationale ou au renseignement dont il est saisi par un ministre ».

[81] Le large mandat d’examen du Comité est, comme il le décrit lui-même, « sans précédent ». Ainsi, le Comité doit notamment « relever les lacunes dans la loi, les politiques ou la gouvernance » et « se pencher sur des questions d’un point de vue pangouvernemental » (Canada, CPSNR, Rapport annuel 2018, aux paragraphes 25 et 26). Dans son Rapport annuel 2019, le Comité a souligné que l’incidence de l’évolution de la technologie de l’information pourrait faire l’objet d’un examen : « La capacité des organisations de police et du renseignement d’obtenir des renseignements dans le cadre des autorisations juridiques existantes a diminué de façon constante avec l’évolution de la technologie de l’information […] » (Canada, CPSNR, Rapport annuel 2019, Message du président).

[82] Comme il a été souligné plus haut, le juge désigné (au paragraphe 130 de ses motifs) n’avait rien à redire quant à la nécessité que les tribunaux interprètent les lois en fonction du progrès technologique. Il a toutefois conclu qu’en l’espèce, compte tenu du sens ordinaire, de l’objet et du contexte de la disposition législative, le progrès technologique ne saurait servir de fondement à l’interprétation de l’expression « dans les limites du Canada » proposée par le procureur général. Je ne vois en cette conclusion aucune erreur justifiant une intervention, surtout que la question est de nature essentiellement politique et que la Loi sur le CPSNR prévoit un mécanisme permettant de relever les lacunes présumées dans le cadre législatif et de proposer des solutions.

B. Infractions autorisées à des [lois étrangères et/ou internationales et/ou le principe de la non-ingérence reconnu en droit international]| 

[83] Je n’ai pas l’intention d’aborder la question des infractions à des |[lois étrangères et/ou|| internationales et/ou le principe de la non-ingérence reconnu en droit international.]| En fait, cette question n’a pas même lieu d’être soulevée si, de toute façon, le Service n’a pas le pouvoir de mener les activités visées par la demande de mandat. S’il en arrive à juger utile de conférer ce pouvoir au Service, le législateur aura le loisir de régler la question des infractions aux ||[lois étrangères et/ou|| |internationales et/ou le principe de la non-ingérence reconnu en droit international]|| au moyen de modifications législatives, comme il l’a fait, à titre d’exemple, lorsqu’il a adopté en 2015 le paragraphe 21(3.1) de la Loi sur le SCRS. Comme il a été souligné plus haut, ce paragraphe prévoit expressément la délivrance d’un mandat autorisant le Service à mener des activités à l’extérieur du Canada pour faire enquête sur une menace envers la sécurité du Canada « [s]ans égard à toute autre règle de droit, notamment le droit de tout État étranger ».

X. Décision proposée

[84] Je rejetterais l’appel.

J.B. Laskin

Juge

Je suis d’accord.

Le juge Yves de Montigny

Je suis d’accord.

La juge Anne L. Mactavish

ANNEXE

Articles 12, 16, 21 et 21.1 de la
Loi sur le service canadien du renseignement de sécurité
, LRC (1985), ch. C-23

[…]

[…]

Informations et renseignements

Collection, analysis and retention

12 (1) Le Service recueille, au moyen d’enquêtes ou autrement, dans la mesure strictement nécessaire, et analyse et conserve les informations et renseignements sur les activités dont il existe des motifs raisonnables de soupçonner qu’elles constituent des menaces envers la sécurité du Canada; il en fait rapport au gouvernement du Canada et le conseille à cet égard.

12 (1) The Service shall collect, by investigation or otherwise, to the extent that it is strictly necessary, and analyse and retain information and intelligence respecting activities that may on reasonable grounds be suspected of constituting threats to the security of Canada and, in relation thereto, shall report to and advise the Government of Canada.

Aucune limite territoriale

No territorial limit

(2) Il est entendu que le Service peut exercer les fonctions que le paragraphe (1) lui confère même à l’extérieur du Canada.

(2) For greater certainty, the Service may perform its duties and functions under subsection (1) within or outside Canada.

 

Mesures pour réduire les menaces envers la sécurité du Canada

Measures to reduce threats to the security of Canada

12.1 (1) S’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une activité donnée constitue une menace envers la sécurité du Canada, le Service peut prendre des mesures, même à l’extérieur du Canada, pour réduire la menace.

12.1 (1) If there are reasonable grounds to believe that a particular activity constitutes a threat to the security of Canada, the Service may take measures, within or outside Canada, to reduce the threat.

Limites

Limits

(2) Les mesures doivent être justes et adaptées aux circonstances, compte tenu de la nature de la menace et des mesures, des solutions de rechange acceptables pour réduire la menace et des conséquences raisonnablement prévisibles sur les tierces parties, notamment sur leur droit à la vie privée.

(2) The measures shall be reasonable and proportional in the circumstances, having regard to the nature of the threat, the nature of the measures, the reasonable availability of other means to reduce the threat and the reasonably foreseeable effects on third parties, including on their right to privacy.

Autres options

Alternatives

(3) Avant de prendre des mesures en vertu du paragraphe (1), le Service consulte, au besoin, d’autres ministères ou organismes fédéraux afin d’établir s’ils sont en mesure de réduire la menace.

(3) Before taking measures under subsection (1), the Service shall consult, as appropriate, with other federal departments or agencies as to whether they are in a position to reduce the threat.

Charte canadienne des droits et libertés

Canadian Charter of Rights and Freedoms

(3.1) La Charte canadienne des droits et libertés fait partie de la loi suprême du Canada et toutes les mesures prises par le Service en vertu du paragraphe (1) s’y conforment.

(3.1) The Canadian Charter of Rights and Freedoms is part of the supreme law of Canada and all measures taken by the Service under subsection (1) shall comply with it.

Mandat — Charte canadienne des droits et libertés

Warrant — Canadian Charter of Rights and Freedoms

 

(3.2) Le Service ne peut, en vertu du paragraphe (1), prendre des mesures qui limiteraient un droit ou une liberté garanti par la Charte canadienne des droits et libertés que si, sur demande présentée au titre de l’article 21.1, un juge décerne un mandat autorisant la prise de ces mesures.

(3.2) The Service may take measures under subsection (1) that would limit a right or freedom guaranteed by the Canadian Charter of Rights and Freedoms only if a judge, on an application made under section 21.1, issues a warrant authorizing the taking of those measures.

Condition

Condition for issuance

(3.3) Le juge ne peut décerner le mandat visé au paragraphe (3.2) que s’il est convaincu que les mesures, telles qu’autorisées par le mandat, sont conformes à la Charte canadienne des droits et libertés.

(3.3) The judge may issue the warrant referred to in subsection (3.2) only if he or she is satisfied that the measures, as authorized by the warrant, comply with the Canadian Charter of Rights and Freedoms.

Mandat — droit canadien

Warrant — Canadian law

(3.4) Le Service ne peut, en vertu du paragraphe (1), prendre des mesures qui seraient par ailleurs contraires au droit canadien que si ces mesures ont été autorisées par un mandat décerné au titre de l’article 21.1.

(3.4) The Service may take measures under subsection (1) that would otherwise be contrary to Canadian law only if the measures have been authorized by a warrant issued under section 21.1.

Avis à l’Office de surveillance

Notification of Review Agency

(3.5) Dans les plus brefs délais possible après la prise de mesures en vertu du paragraphe (1), le Service avise l’Office de surveillance de ces mesures.

(3.5) The Service shall, after taking measures under subsection (1), notify the Review Agency of the measures as soon as the circumstances permit.

Précision

Clarification

(4) Il est entendu que le paragraphe (1) ne confère au Service aucun pouvoir de contrôle d’application de la loi.

(4) For greater certainty, nothing in subsection (1) confers on the Service any law enforcement power.

[…]

[…]

Assistance

Collection of information concerning foreign states and persons

16 (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article, le Service peut, dans les domaines de la défense et de la conduite des affaires internationales du Canada, prêter son assistance au ministre de la Défense nationale ou au ministre des Affaires étrangères, dans les limites du Canada, à la collecte d’informations ou de renseignements sur les moyens, les intentions ou les activités :

16 (1) Subject to this section, the Service may, in relation to the defence of Canada or the conduct of the international affairs of Canada, assist the Minister of National Defence or the Minister of Foreign Affairs, within Canada, in the collection of information or intelligence relating to the capabilities, intentions or activities of

a) d’un État étranger ou d’un groupe d’États étrangers;

(a) any foreign state or group of foreign states; or

b) d’une personne qui n’appartient à aucune des catégories suivantes :

(b) any person other than.

(i) les citoyens canadiens,

(i) a Canadian citizen,

(ii) les résidents permanents au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés,

(ii) a permanent resident within the meaning of subsection 2(1) of the Immigration and Refugee Protection Act, or

(iii) les personnes morales constituées sous le régime d’une loi fédérale ou provinciale.

(iii) a corporation incorporated by or under an Act of Parliament or of the legislature of a province.

Restriction

Limitation

(2) L’assistance autorisée au paragraphe (1) est subordonnée au fait qu’elle ne vise pas des personnes mentionnées à l’alinéa (1)b). L’assistance autorisée au paragraphe (1) est subordonnée au fait qu’elle ne vise pas des personnes mentionnées à l’alinéa (1)b).

 

(2) The assistance provided pursuant to subsection (1) shall not be directed at any person referred to in subparagraph (1)(b)(i), (ii) or (iii).

Consentement personnel des ministres

Personal consent of Ministers required

(3) L’exercice par le Service des fonctions visées au paragraphe (1) est subordonné :

(3) The Service shall not perform its duties and functions under subsection (1) unless it does so

a) à une demande personnelle écrite du ministre de la Défense nationale ou du ministre des Affaires étrangères;

(a) on the personal request in writing of the Minister of National Defence or the Minister of Foreign Affairs; and

b) au consentement personnel écrit du ministre.

(b) with the personal consent in writing of the Minister.

[…]

[…]

Demande de mandat

Application for warrant

21 (1) Le directeur ou un employé désigné à cette fin par le ministre peut, après avoir obtenu l’approbation du ministre, demander à un juge de décerner un mandat en conformité avec le présent article s’il a des motifs raisonnables de croire que le mandat est nécessaire pour permettre au Service de faire enquête, au Canada ou à l’extérieur du Canada, sur des menaces envers la sécurité du Canada ou d’exercer les fonctions qui lui sont conférées en vertu de l’article 16.

21 (1) If the Director or any employee designated by the Minister for the purpose believes, on reasonable grounds, that a warrant under this section is required to enable the Service to investigate, within or outside Canada, a threat to the security of Canada or to perform its duties and functions under section 16, the Director or employee may, after having obtained the Minister’s approval, make an application in accordance with subsection (2) to a judge for a warrant under this section.

Conservation d’informations recueillies de manière incidente

Retention of information — incidental collection

(1.1) Le demandeur peut, dans le cadre d’une demande visée au paragraphe (1), demander au juge d’autoriser la conservation d’informations recueillies de manière incidente lors de l’exécution d’un mandat décerné au titre de l’article 12 en vue de la constitution d’un ensemble de données.

(1.1) The applicant may, in an application made under subsection (1), request the judge to authorize the retention of the information that is incidentally collected in the execution of a warrant issued for the purpose of section 12, in order to constitute a dataset.

Contenu de la demande

Matters to be specified in application for warrant

(2) La demande visée au paragraphe (1) est présentée par écrit et accompagnée de l’affidavit du demandeur portant sur les points suivants :

(2) An application to a judge under subsection (1) shall be made in writing and be accompanied by an affidavit of the applicant deposing to the following matters, namely,

a) les faits sur lesquels le demandeur s’appuie pour avoir des motifs raisonnables de croire que le mandat est nécessaire aux fins visées au paragraphe (1);

(a) the facts relied on to justify the belief, on reasonable grounds, that a warrant under this section is required to enable the Service to investigate a threat to the security of Canada or to perform its duties and functions under section 16;

b) le fait que d’autres méthodes d’enquête ont été essayées en vain, ou la raison pour laquelle elles semblent avoir peu de chances de succès, le fait que l’urgence de l’affaire est telle qu’il serait très difficile de mener l’enquête sans mandat ou le fait que, sans mandat, il est probable que des informations importantes concernant les menaces ou les fonctions visées au paragraphe (1) ne pourraient être acquises;

(b) that other investigative procedures have been tried and have failed or why it appears that they are unlikely to succeed, that the urgency of the matter is such that it would be impractical to carry out the investigation using only other investigative procedures or that without a warrant under this section it is likely that information of importance with respect to the threat to the security of Canada or the performance of the duties and functions under section 16 referred to in paragraph (a) would not be obtained;

c) les catégories de communications dont l’interception, les catégories d’informations, de documents ou d’objets dont l’acquisition, ou les pouvoirs visés aux alinéas (3)a) à c) dont l’exercice, sont à autoriser;

(c) the type of communication proposed to be intercepted, the type of information, records, documents or things proposed to be obtained and the powers referred to in paragraphs (3)(a) to (c) proposed to be exercised for that purpose;

d) l’identité de la personne, si elle est connue, dont les communications sont à intercepter ou qui est en possession des informations, documents ou objets à acquérir;

(d) the identity of the person, if known, whose communication is proposed to be intercepted or who has possession of the information, record, document or thing proposed to be obtained;

d.1) lorsqu’il est envisagé que des informations seront recueillies de manière incidente lors de l’exécution du mandat, sur quels motifs il est probable que la conservation de ces informations aidera le Service dans l’exercice des fonctions qui lui sont conférées en vertu des articles 12, 12.1 et 16;

(d.1) when it is anticipated that information would be incidentally collected in the execution of a warrant, the grounds on which the retention of the information by the Service is likely to assist it in the performance of its duties or functions under sections 12, 12.1 and 16;

e) les personnes ou catégories de personnes destinataires du mandat demandé;

(e) the persons or classes of persons to whom the warrant is proposed to be directed;

f) si possible, une description générale du lieu où le mandat demandé est à exécuter;

(f) a general description of the place where the warrant is proposed to be executed, if a general description of that place can be given;

g) la durée de validité applicable en vertu du paragraphe (6), de soixante jours ou de cent vingt jours au maximum, selon le cas, demandée pour le mandat;

(g) the period, not exceeding sixty days or one year, as the case may be, for which the warrant is requested to be in force that is applicable by virtue of subsection (5); and

h) la mention des demandes antérieures présentées au titre du paragraphe (1) touchant des personnes visées à l’alinéa d), la date de chacune de ces demandes, le nom du juge à qui elles ont été présentées et la décision de celui-ci dans chaque cas.

(h) any previous application made under subsection (1) in relation to a person who is identified in the affidavit in accordance with paragraph (d), the date on which each such application was made, the name of the judge to whom it was made and the judge’s decision on it.

Délivrance du mandat

Issuance of warrant

(3) Par dérogation à toute autre règle de droit mais sous réserve de la Loi sur la statistique, le juge à qui est présentée la demande visée au paragraphe (1) peut décerner le mandat s’il est convaincu de l’existence des faits qui sont mentionnés aux alinéas (2)a) et c) et énoncés dans l’affidavit qui accompagne la demande; le mandat autorise ses destinataires à prendre les mesures qui y sont indiquées. À cette fin, il peut autoriser aussi, de leur part:

(3) Notwithstanding any other law but subject to the Statistics Act, where the judge to whom an application under subsection (1) is made is satisfied of the matters referred to in paragraphs (2)(a) and (b) set out in the affidavit accompanying the application, the judge may issue a warrant authorizing the persons to whom it is directed to intercept any communication or obtain any information, record, document or thing and, for that purpose,

a) l’accès à un lieu ou un objet ou l’ouverture d’un objet;

(a) to enter any place or open or obtain access to any thing;

b) la recherche, l’enlèvement ou la remise en place de tout document ou objet, leur examen, le prélèvement des informations qui s’y trouvent, ainsi que leur enregistrement et l’établissement de copies ou d’extraits par tout procédé;

(b) to search for, remove or return, or examine, take extracts from or make copies of or record in any other manner the information, record, document or thing; or

c) l’installation, l’entretien et l’enlèvement d’objets;

(c) to install, maintain or remove any thing.

Conservation d’informations

Retention of information

(3.01) S’il est convaincu qu’il est probable que la conservation d’informations recueillies de manière incidente lors de l’exécution du mandat aidera le Service dans l’exercice des fonctions qui lui sont conférées en vertu des articles 12, 12.1 et 16, le juge à qui est présentée la demande visée au paragraphe (1.1) peut autoriser, dans le mandat décerné en vertu du présent article, la conservation des données recueillies en vue de la constitution d’un ensemble de données.

(3.01) If the judge to whom the application is made is satisfied that the retention of the information that is incidentally collected in the execution of a warrant is likely to assist the Service in the performance of its duties or functions under sections 12, 12.1 and 16, the judge may, in a warrant issued under this section, authorize the retention of the information requested in subsection (1.1), in order to constitute a dataset.

Activités à l’extérieur du Canada

Activities outside Canada

(3.1) Sans égard à toute autre règle de droit, notamment le droit de tout État étranger, le juge peut autoriser l’exercice à l’extérieur du Canada des activités autorisées par le mandat décerné, en vertu du paragraphe (3), pour permettre au Service de faire enquête sur des menaces envers la sécurité du Canada.

(3.1) Without regard to any other law, including that of any foreign state, a judge may, in a warrant issued under subsection (3), authorize activities outside Canada to enable the Service to investigate a threat to the security of Canada.

Contenu du mandat

Matters to be specified in warrant

(4) Le mandat décerné en vertu du paragraphe (3) porte les indications suivantes :

(4) There shall be specified in a warrant issued under subsection (3)

a) les catégories de communications dont l’interception, les catégories d’informations, de documents ou d’objets dont l’acquisition, ou les pouvoirs visés aux alinéas (3)a) à c) dont l’exercice, sont autorisés;

(a) the type of communication authorized to be intercepted, the type of information, records, documents or things authorized to be obtained and the powers referred to in paragraphs (3)(a) to (c) authorized to be exercised for that purpose;

b) l’identité de la personne, si elle est connue, dont les communications sont à intercepter ou qui est en possession des informations, documents ou objets à acquérir;

(b) the identity of the person, if known, whose communication is to be intercepted or who has possession of the information, record, document or thing to be obtained;

c) les personnes ou catégories de personnes destinataires du mandat;

(c) the persons or classes of persons to whom the warrant is directed;

d) si possible, une description générale du lieu où le mandat peut être exécuté;

(d) a general description of the place where the warrant may be executed, if a general description of that place can be given;

d.1) la réponse à la question de savoir si des informations recueillies de manière incidente lors de l’exécution du mandat peuvent être conservées aux termes du paragraphe (1.1);

(d.1) an indication as to whether information collected incidentally in the execution of the warrant may be retained under subsection (1.1);

e) la durée de validité du mandat;

(e) the period for which the warrant is in force; and

f) les conditions que le juge estime indiquées dans l’intérêt public.

(f) such terms and conditions as the judge considers advisable in the public interest.

Ensembles de données

Datasets

(4.1) Lorsque le Service conserve des données en vertu d’une autorisation accordée au titre du paragraphe (1.1) en vue de la constitution d’un ensemble de données qu’il peut recueillir en vertu de la présente loi, cet ensemble est réputé recueilli en vertu de l’article 11.05 en date du premier jour prévu pour la période de validité du mandat.

(4.1) If the Service is authorized to retain information in accordance with subsection (1.1) in order to constitute a dataset that the Service may collect under this Act, that dataset is deemed to be collected under section 11.05 on the first day of the period for which the warrant is in force.

Durée maximale

Maximum duration of warrant

(5) Il ne peut être décerné de mandat en vertu du paragraphe (3) que pour une période maximale :

(5) A warrant shall not be issued under subsection (3) for a period exceeding

a) de soixante jours, lorsque le mandat est décerné pour permettre au Service de faire enquête sur des menaces envers la sécurité du Canada au sens de l’alinéa d) de la définition de telles menaces contenue à l’article 2;

(a) sixty days where the warrant is issued to enable the Service to investigate a threat to the security of Canada within the meaning of paragraph (d) of the definition of that expression in section 2; or

b) d’un an, dans tout autre cas.

(b) one year in any other case.

Demande de mandat — mesures pour réduire les menaces envers la sécurité du Canada

Application for warrant — measures to reduce threats to security of Canada

21.1 (1) Le directeur ou un employé désigné à cette fin par le ministre peut, après avoir obtenu l’approbation du ministre, demander à un juge de décerner un mandat en conformité avec le présent article s’il a des motifs raisonnables de croire que le mandat est nécessaire pour permettre au Service de prendre, au Canada ou à l’extérieur du Canada, les mesures prévues au paragraphe (1.1) pour réduire une menace envers la sécurité du Canada.

21.1 (1) If the Director or any employee who is designated by the Minister for the purpose believes on reasonable grounds that a warrant under this section is required to enable the Service to take measures referred to in subsection (1.1), within or outside Canada, to reduce a threat to the security of Canada, the Director or employee may, after having obtained the Minister’s approval, make an application in accordance with subsection (2) to a judge for a warrant under this section.

Mesures

Measures

(1.1) Pour l’application du paragraphe (1), les mesures sont les suivantes :

(1.1) For the purpose of subsection (1), the measures are the following:

a) modifier, enlever, remplacer, détruire, interrompre ou détériorer des communications ou des moyens de communication;

(a) altering, removing, replacing, destroying, disrupting or degrading a communication or means of communication;

b) modifier, enlever, remplacer, détruire, détériorer ou fournir tout ou partie d’un objet, notamment des registres, des documents, des biens, des composants et du matériel, ou en entraver la livraison ou l’utilisation;

(b) altering, removing, replacing, destroying, degrading or providing — or interfering with the use or delivery of — any thing or part of a thing, including records, documents, goods, components and equipment;

c) fabriquer ou diffuser de l’information, des registres ou des documents;

(c) fabricating or disseminating any information, record or document;

d) effectuer ou tenter d’effectuer, directement ou indirectement, des opérations financières qui font intervenir ou qui paraissent faire intervenir des espèces ou des effets;

(d) making or attempting to make, directly or indirectly, any financial transaction that involves or purports to involve currency or a monetary instrument;

e) interrompre ou détourner, directement ou indirectement, des opérations financières qui font intervenir des espèces ou des effets;

(e) interrupting or redirecting, directly or indirectly, any financial transaction that involves currency or a monetary instrument;

f) entraver les déplacements de toute personne, à l’exception de la détention d’un individu;

(f) interfering with the movement of any person, excluding the detention of an individual; and

g) se faire passer pour une autre personne, à l’exception d’un policier, dans le but de prendre l’une des mesures prévues aux alinéas a) à f).

(g) personating a person, other than a police officer, in order to take a measure referred to in any of paragraphs (a) to (f).

Contenu de la demande

Matters to be specified in application

(2) La demande est présentée par écrit et accompagnée de l’affidavit du demandeur portant sur les points suivants :

(2) An application to a judge under subsection (1) shall be made in writing and be accompanied by the applicant’s affidavit deposing to the following matters:

a) les faits sur lesquels le demandeur s’appuie pour avoir des motifs raisonnables de croire que le mandat est nécessaire pour permettre au Service de prendre des mesures pour réduire une menace envers la sécurité du Canada;

(a) the facts relied on to justify the belief on reasonable grounds that a warrant under this section is required to enable the Service to take measures to reduce a threat to the security of Canada;

b) les mesures envisagées;

(b) the measures proposed to be taken;

c) le fait que les mesures envisagées sont justes et adaptées aux circonstances, compte tenu de la nature de la menace et des mesures, des solutions de rechange acceptables pour réduire la menace et des conséquences raisonnablement prévisibles sur les tierces parties, notamment sur leur droit à la vie privée;

(c) the reasonableness and proportionality, in the circumstances, of the proposed measures, having regard to the nature of the threat, the nature of the measures, the reasonable availability of other means to reduce the threat and the reasonably foreseeable effects on third parties, including on their right to privacy;

d) l’identité des personnes qui sont touchées directement par les mesures envisagées, si elle est connue;

(d) the identity of the persons, if known, who are directly affected by the proposed measures;

e) les personnes ou catégories de personnes destinataires du mandat demandé;

(e) the persons or classes of persons to whom the warrant is proposed to be directed;

f) si possible, une description générale du lieu où le mandat demandé est à exécuter;

(f) a general description of the place where the warrant is proposed to be executed, if a general description of that place can be given;

g) la durée de validité applicable en vertu du paragraphe (6), de soixante jours ou de cent vingt jours au maximum, selon le cas, demandée pour le mandat;

(g) the period, not exceeding 60 days or 120 days, as the case may be, for which the warrant is requested to be in force that is applicable by virtue of subsection (6); and

h) la mention des demandes antérieures présentées au titre du paragraphe (1) touchant des personnes visées à l’alinéa d), la date de chacune de ces demandes, le nom du juge à qui elles ont été présentées et la décision de celui-ci dans chaque cas.

(h) any previous application made under subsection (1) in relation to a person who is identified in the affidavit in accordance with paragraph (d), the date on which each such application was made, the name of the judge to whom it was made and the judge’s decision on it.

Délivrance du mandat

Issuance of warrant

(3) Par dérogation à toute autre règle de droit mais sous réserve de la Loi sur la statistique, le juge à qui est présentée la demande visée au paragraphe (1) peut décerner le mandat s’il est convaincu de l’existence des faits qui sont mentionnés aux alinéas (2)a) et c) et énoncés dans l’affidavit qui accompagne la demande; le mandat autorise ses destinataires à prendre les mesures qui y sont indiquées. À cette fin, il peut autoriser aussi, de leur part :

(3) Despite any other law but subject to the Statistics Act, if the judge to whom an application under subsection (1) is made is satisfied of the matters referred to in paragraphs (2)(a) and (c) that are set out in the affidavit accompanying the application, the judge may issue a warrant authorizing the persons to whom it is directed to take the measures specified in it and, for that purpose,

a) l’accès à un lieu ou un objet ou l’ouverture d’un objet;

(a) to enter any place or open or obtain access to any thing;

b) la recherche, l’enlèvement ou la remise en place de tout document ou objet, leur examen, le prélèvement des informations qui s’y trouvent, ainsi que leur enregistrement et l’établissement de copies ou d’extraits par tout procédé;

(b) to search for, remove or return, or examine, take extracts from or make copies of or record in any other manner the information, record, document or thing;

c) l’installation, l’entretien et l’enlèvement d’objets;

(c) to install, maintain or remove any thing; or

d) les autres actes nécessaires dans les circonstances à la prise des mesures.

(d) to do any other thing that is reasonably necessary to take those measures.

Mesures à l’extérieur du Canada

Measures taken outside Canada

(4) Sans égard à toute autre règle de droit, notamment le droit de tout État étranger, le juge peut autoriser la prise à l’extérieur du Canada des mesures indiquées dans le mandat décerné en vertu du paragraphe (3).

 

(4) Without regard to any other law, including that of any foreign state, a judge may, in a warrant issued under subsection (3), authorize the measures specified in it to be taken outside Canada.

Contenu du mandat

Matters to be specified in warrant

(5) Le mandat décerné en vertu du paragraphe (3) porte les indications suivantes :

(5) There shall be specified in a warrant issued under subsection (3)

a) les mesures autorisées;

(a) the measures authorized to be taken;

b) l’identité des personnes qui sont touchées directement par les mesures, si elle est connue;

(b) the identity of the persons, if known, who are directly affected by the measures;

c) les personnes ou catégories de personnes destinataires du mandat;

(c) the persons or classes of persons to whom the warrant is directed;

d) si possible, une description générale du lieu où le mandat peut être exécuté;

(d) a general description of the place where the warrant may be executed, if a general description of that place can be given;

e) la durée de validité du mandat;

(e) the period for which the warrant is in force; and

f) les conditions que le juge estime indiquées dans l’intérêt public.

(f) any terms and conditions that the judge considers advisable in the public interest.

Durée maximale

Maximum duration of warrant

(6) Il ne peut être décerné de mandat en vertu du paragraphe (3) que pour une période maximale :

(6) A warrant shall not be issued under subsection (3) for a period exceeding

a) de soixante jours, lorsque le mandat est décerné pour permettre au Service de prendre des mesures pour réduire une menace envers la sécurité du Canada au sens de l’alinéa d) de la définition de telles menaces à l’article 2;

(a) 60 days if the warrant is issued to enable the Service to take measures to reduce a threat to the security of Canada within the meaning of paragraph (d) of the definition threats to the security of Canada in section 2; or

b) de cent vingt jours, dans tout autre cas.

(b) 120 days in any other case.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS AU DOSSIER

DOSSIER :

A-243-20

 

 

INTITULÉ :

DANS L’AFFAIRE d’une demande de mandats présentée par |||||||||||||||| en vertu des articles 16 et 21 de la Loi sur le service canadien du renseignement de sécurité, LRC (1985), ch. C-23

 

ET DANS L’AFFAIRE VISANT ||[un état étranger, groupe d’états ou personne]||

 

 

lIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa, Ontario

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 10 FÉVRIER 2021

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE LASKIN

 

Y ont SOUSCRIT :

le juge DE MONTIGNY

LA JUGE MACTAVISH

 

DATE :

LE 6 AOÛT 2021

 

COMPARUTIONS

||||||||||||||||||||||||

||||||||||||||||||||

 

POUR L’APPELANT

 

Gordon Cameron

Shantona Chaudhury

 

AMICI CURIAE

 


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

 

POUR L’APPELANT

 

Blake, Cassels and Graydon

Ottawa (Ontario)

 

amici curiae

 

Pape Chaudhury

Toronto (Ontario)

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