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Date : 20210526


Dossier : A-108-20

Référence : 2021 CAF 99

CORAM :

LE JUGE BOIVIN

LE JUGE DE MONTIGNY

LE JUGE LOCKE

 

 

ENTRE :

RÉGIS BENIEY

demandeur

et

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

défenderesse

Audience tenue par vidéoconférence en ligne organisée par le greffe, le 20 mai 2021.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 26 mai 2021.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE LOCKE

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE BOIVIN

LE JUGE DE MONTIGNY

 


Date : 20210526


Dossier : A-108-20

Référence : 2021 CAF 99

CORAM :

LE JUGE BOIVIN

LE JUGE DE MONTIGNY

LE JUGE LOCKE

 

 

ENTRE :

RÉGIS BENIEY

demandeur

et

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

défenderesse

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE LOCKE

[1] Le demandeur, Régis Beniey, est un ancien employé de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) qui a perdu son emploi en 2017. Suite à l’incident qu’il allègue avoir provoqué son licenciement, il a déposé un grief. Afin d’appuyer ce grief, M. Beniey a tenté d’obtenir plusieurs enregistrements vidéo en soumettant une demande d’accès à l’information auprès de l’ASFC.

[2] En réponse à la demande de M. Beniey, l’ASFC lui a fait parvenir certains des enregistrements vidéo réclamés, mais dont une partie du contenu avait été caviardé. Insatisfait des enregistrements qu’il a reçus, M. Beniey a déposé en mars 2018 une plainte auprès du Commissariat à l’information du Canada. Sa plainte fut rejetée en décembre 2018. Par la suite, M. Beniey a communiqué avec son syndicat, la défenderesse l’Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC), afin d’obtenir leur appui pour déposer une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale à l’encontre de cette décision.

[3] Cependant, M. Beniey ne parvint pas à un accord avec l’AFPC. Il engagea alors une avocate afin de déposer lui-même un avis de demande auprès de la Cour fédérale, ce qui a été fait le vendredi 25 janvier 2019. Trois jours plus tard, l’AFPC a déposé un second avis de demande auprès de la Cour fédérale au nom de M. Beniey, prétendument à son insu et sans son consentement. Se disant d’avis que l’AFPC avait commis une erreur de droit dans son avis de demande, M. Beniey a demandé à cette dernière de retirer sa demande et de lui rembourser les frais juridiques liés à sa propre demande. L’AFPC a acquiescé à la demande de M. Beniey de retirer la demande de contrôle judiciaire qu’elle avait déposée en son nom, en précisant bien qu’elle ne lui rembourserait pas les dépenses de l’avocate qu’il avait lui-même retenue.

[4] Suite à ces développements, M. Beniey déposa en avril 2019 une plainte contre l’AFPC auprès de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la Commission). La plainte, déposée en vertu de l’alinéa 190(1) g) de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral, L.C. 2003, ch. 22, allègue que l’AFPC se serait livrée à une pratique déloyale à l’égard de sa représentation de M. Beniey, et plus spécifiquement, que l’AFPC aurait agi « de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi ». M. Beniey reproche à l’AFPC d’avoir agi de façon contraire à ses directives et en faisant fi de ses droits. M. Beniey affirme que l’AFPC aurait utilisé ses informations personnelles et confidentielles sans son autorisation en déposant la seconde demande de contrôle judiciaire, sachant qu’il avait déjà déposé sa propre demande auprès de la Cour fédérale.

[5] En mars 2020, la Commission a rejeté cette plainte dans une décision longuement motivée, au motif que M. Beniey n’avait pas présenté d’argument défendable selon lequel l’AFPC aurait agi de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi à son encontre. C’est de cette décision de la Commission que M. Beniey en appelle.

[6] M. Beniey accepte que la norme de contrôle applicable au présent appel est celle de la décision raisonnable. Il allègue que la décision contestée est déraisonnable pour les raisons suivantes :

  1. La Commission n’a pas répondu à la question dont elle était saisie;

  2. La Commission aurait dû obliger l’AFPC à produire les documents que M. Beniey demandait;

  3. La Commission aurait dû permettre à M. Beniey de contre-interroger les témoins de l’AFPC;

  4. La Commission a considéré des éléments de preuve auxquels M. Beniey n’a jamais eu accès;

  5. La Commission en est arrivée à des conclusions sur la crédibilité de M. Beniey sans qu’il lui soit permis de répondre aux arguments avancés à cet égard; et

  6. La Commission a agi de manière partiale à l’égard de M. Beniey.

[7] Malgré les représentations très habiles de M. Beniey, je suis d’avis qu’aucune des raisons qu’il soulève ne tient la route.

[8] La Commission a reconnu qu’elle devait considérer les faits allégués par M. Beniey comme avérés, mais a noté que cette obligation ne lui impose pas d’accepter ses arguments. De plus, la Commission a noté que les limites du devoir de représentation équitable sont décrites dans l’arrêt Mangat c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2010 CRTFP 52. En particulier, la Commission a indiqué qu’elle doit « déterminer si l'agent négociateur a agi de mauvaise foi ou de manière arbitraire ou discriminatoire en matière de représentation du plaignant. » Elle « ne détermine pas si l'agent négociateur a pris de bonnes décisions concernant son choix de représenter ou non le plaignant ou concernant la façon de le représenter. »

[9] M. Beniey ne semble pas prétendre que la Commission ait erré dans sa description du droit applicable. Il nous demande plutôt de déduire des documents au dossier qu’il était déraisonnable de la part de la Commission de conclure que la preuve était insuffisante pour démontrer un argument défendable. Pour avoir gain de cause, le demandeur doit nous convaincre que l'AFPC a agi de mauvaise foi en déposant son avis de demande en janvier 2019. Le demandeur ne m’a pas convaincu du bien-fondé de sa position, et encore moins du caractère déraisonnable des conclusions de la Commission à cet égard. Comme l'affirme la Commission, le dépôt des deux demandes de contrôle judiciaire semblait résulter de problèmes de communication et du désir de l'AFPC de respecter le délai pour intenter un contrôle judiciaire.

[10] Je ne suis pas d’avis que la Commission a erré en ne répondant pas à toutes les questions que M. Beniey prétend être pertinentes. La Commission a bien identifié la question pertinente à la plainte devant elle (l’existence de conduite arbitraire, discriminatoire ou de mauvaise foi), et est arrivée à une conclusion raisonnable. M. Beniey ne m’a pas convaincu de la pertinence des documents à l’origine de sa demande. Par ailleurs, je ne suis pas convaincu que les contre-interrogatoires des témoins de l’AFPC auraient fourni des informations pertinentes.

[11] Je ne suis pas davantage convaincu que la Commission a considéré des éléments de preuve auxquels M. Beniey n’a pas eu accès. À cet égard, M. Beniey nous demande de tirer des conclusions basées sur des inférences que je n’accepte pas. J’estime également que l’argument de M. Beniey selon lequel sa crédibilité était en jeu devant la Commission ne peut être retenu. Les exemples qu’il cite au soutien de sa prétention ne sont pas concluants. Par voie de conséquence, je suis incapable de conclure que la Commission a agi avec partialité.

[12] Pour ces motifs, je rejetterais la présente demande de contrôle judiciaire avec dépens.

« George R. Locke »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

Richard Boivin j.c.a. »

« Je suis d’accord.

Yves de Montigny j.c.a. »


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-108-20

 

INTITULÉ :

RÉGIS BENIEY c. ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

par vidéoconférence en ligne

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 20 mai 2021

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE LOCKE

 

 

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE BOIVIN

LE JUGE DE MONTIGNY

 

 

DATE DES MOTIFS :

LE 26 mai 2021

 

 

COMPARUTIONS :

Régis Beniey

 

Pour le demandeur

(Se représentant lui-même)

 

Daria A. Strachan

 

Pour lA défenderesse

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

SHIELDS HUNT DUFF STRACHAN

Ottawa (Ontario)

 

Pour lA défenderesse

 

 

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