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Date : 20201001


Dossier : A-25-20

Référence : 2020 CAF 153

Présente: LA JUGE RIVOALEN

ENTRE :

BRESSE SYNDICS INC.

AGISSANT POUR LA FAILLITE DE

CO2 SOLUTION TECHNOLOGIES INC.

appelante en reprise d’instance

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

Requête écrite décidée sans comparution des parties.

Ordonnance rendue à Ottawa (Ontario), le 1er octobre 2020.

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LA JUGE RIVOALEN

 


Date : 20200929


Dossier : A-25-20

Référence : 2020 CAF 153

Présente: LA JUGE RIVOALEN

ENTRE :

BRESSE SYNDICS INC.

AGISSANT POUR LA FAILLITE DE

CO2 SOLUTION TECHNOLOGIES INC.

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

LA JUGE RIVOALEN

[1] La Cour est saisie d’une requête de l’intimée visant à obtenir une ordonnance enjoignant l’appelante en reprise d’instance de consigner au greffe de la Cour la somme de 3 420,00$ à titre de cautionnement pour dépens, dans la forme et le délai impartis par cette Cour en vertu des Règles 415 et 416 des Règles des Cours fédérales D.O.R.S./98-106 (les Règles).

[2] Les faits pertinents appuyant cette requête sont les suivants.

[3] Le 20 janvier 2020, CO2 Solution Technologies Inc. (CO2) a déposé devant la Cour un avis d’appel relativement au jugement rendu le 20 décembre 2019 par la Cour canadienne de l’impôt (la CCI) dans le dossier 2015-5635(IT)G. La CCI avait rejeté l’appel de CO2, déterminant que celle-ci n’était pas une société privée sous contrôle canadien et n’avait pas droit, conséquemment, à la majoration du crédit d’impôt à l’investissement pour ses activités de recherche scientifique et de développement expérimental, ni au remboursement de ce crédit. Des dépens de 10 354,46$ ont été réclamés par l’intimée contre CO2 à la suite du jugement rendu par la CCI. Ces dépens n’ont pas été payés.

[4] Le 26 février 2020, CO2 a fait cession de ses biens auprès de la firme Bresse syndics inc. (Bresse syndics), conformément à la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, L.R.C. 1985, ch. B-3. Bresse syndics a par la suite été nommée afin d’agir à titre de syndic aux biens de CO2.

[5] Le 27 avril 2020, Bresse syndics a déposé un avis de reprise d’instance. Le 31 juillet 2020, Bresse syndics a été autorisée par cette Cour pour agir à titre d’appelante en reprise d’instance pour CO2.

[6] CO2 est une personne morale constituée le 20 juin 2005 sous le régime de la Loi sur les sociétés par actions (R.L.R.Q., c S-31.1). Elle ne détient pas d’actifs suffisants pour payer les dépens dans le présent appel. Le bilan déposé par CO2 au moment de la cession de ses biens fait état d’un déficit de 2 759 199$. Les seuls actifs déclarés sont une encaisse de 2 000$ ainsi que la somme à recevoir à titre de crédit d’impôt à l’investissement d’un million de dollars, soit le montant en litige devant notre Cour. Donc, même si elle a gain de cause, CO2 sera toujours dans une position déficitaire de plus de 1,7M$.

[7] Pour la préparation du mémoire des faits et du droit et des procédures judiciaires à venir dans la présente affaire, l’intimée estime les dépens judiciaires à une somme de 3 420$. En conséquence, elle demande à cette Cour d’établir le cautionnement à ce montant.

[8] L’intimée appuie sa requête sur les alinéas 416(1) b) et f) des Règles, puisque CO2 ne détient pas d’actifs suffisants pour payer les dépens advenant qu’il lui soit ordonné de le faire, et que les dépens de l’ordre de 10 354,46$ que la CCI l’a condamnée à payer, demeurent impayés.

[9] Dans son dossier de réponse, Bresse syndics s’appuie sur l’article 417 des Règles et demande à cette Cour de refuser le dépôt du cautionnement pour les dépens sur la base des situations visées aux alinéas 416(1) b) et f) puisque CO2 a fait la preuve de son indigence. De plus, Bresse syndics soumet que l’appel devant cette Cour est bien fondé.

[10] Enfin, Bresse syndics soumet que l’accès équitable à la justice justifie le rejet de la requête.

[11] En réponse aux prétentions soumises par Bresse syndics, l’intimée soutient que Bresse syndic n’est pas tenu légalement d’agir en justice; elle en a simplement le pouvoir (Caron (Syndic de), 2008 QCCS 457 (CanLII) aux para 14 et 27.) L’intimée ajoute qu’une fois que Bresse syndics eut décidé de poursuivre en l’instance, elle avait le devoir de s’assurer qu’elle avait des garanties suffisantes pour couvrir les frais. (Belhumeur Pronovost inc. c. Bombardier inc., 2010 QCCA 700 (CanLII) aux para. 20-25 [Belhumeur].

[12] Je suis du même avis. Le droit au cautionnement pour dépens existe en l’espèce. On retrouve les situations visées à l’alinéa 416(1) b) selon lequel CO2 ne détient pas des actifs suffisants pour payer les dépens et à l’alinéa 416(1) f) puisque l’intimée a obtenu une ordonnance contre CO2 pour les dépens en première instance devant la CCI pour lesquels elle demeure impayée.

[13] De l’aveu même de Bresse syndic, CO2 est dans l’impossibilité de payer ces dépens et ne pourra non plus respecter une éventuelle ordonnance de cautionnement.

[14] En vertu du paragraphe 197(3) de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, le syndic n’est pas personnellement responsable des frais, à moins que le Tribunal n’en décide autrement. L’exercice de cette discrétion est en fonction des circonstances de chaque espèce.

[15] Dans la présente instance, le syndic agit à ses risques et périls. Même si le syndic agit de bonne foi, l’insuffisance des fonds de l’actif de faillite constitue un motif pour obtenir la condamnation personnelle du syndic aux frais de l’instance. Tel que reconnu par la Cour d’appel du Québec dans l’arrêt Belhumeur, il n’est pas nécessaire d’établir une conduite abusive pour condamner un syndic personnellement aux frais. C’est au syndic de s’assurer qu’il a des garanties suffisantes pour couvrir les frais dans une action où il avait le pouvoir et non le devoir d’agir en demande.

[16] Je suis d’avis que chaque cas en est un d’espèce soumis à l’entière discrétion du Tribunal, lequel doit l’exercer judiciairement en se rappelant que les « trustees in bankruptcy should not be allowed to pursue litigation with immunity against personal liability for costs in circumstances where there is no statutory duty to prosecute the litigation and the trustee knows or ought to know that there will be insufficient assets in the estate to satisfy an award of costs in the event that the trustee is unsuccessful in the litigation. » (Vancouver Trade Mart inc. (Trustee of) c. Creative Prosperity Capital Corp., (1998) 7 C.B.R. (4th) 3 (BCSC) au para. 30).

[17] Selon la Règle 417, la Cour peut refuser d’ordonner le dépôt d’un cautionnement pour les dépens dans les situations visées aux alinéas 416(1) a) à g) si le demandeur fait preuve de son indigence et si elle est convaincue du bien-fondé de la cause. Cependant, il revient toujours à la Cour, dans l’exercice de sa discrétion, d’accueillir ou de rejeter la requête pour cautionnement.

[18] Considérant que CO2 est indigente, que l’ordonnance de dépens préalable demeure impayée, que le syndic n’est pas légalement tenu d’agir en justice et que le montant du cautionnement demandé est raisonnable et justifié selon les critères des alinéas 416(1) b) et f) des Règles, j’exerce ma discrétion en faveur de l’intimée et j’accueille la requête.

[19] Pour tous ces motifs, l’appelante en reprise d’instance est tenue de verser la somme de 3 420,00$ comme cautionnement, laquelle somme devra être consignée au greffe de la Cour, dans un délai de 30 jours à compter de la date de l’ordonnance émise concurremment avec les présents motifs.

« Marianne Rivoalen »

j.c.a.


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


Dossier :

A-25-20

INTITULÉ :

BRESSE SYNDICS INC. AGISSANT POUR LA FAILLITE DE CO2 SOLUTION TECHNOLOGIES INC. c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

REQUÊTE ÉCRITE DÉCIDÉE SANS COMPARUTION DES PARTIES.

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LA JUGE RIVOALEN

 

DATE DES MOTIFS :

LE 1 octobre 2020

 

COMPARUTIONS :

Julie Gaudreault-Martel

 

Pour l'appelante en reprise d’instance

 

Anne Poirier

Simon Petit

 

Pour l'intimée

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

BCF s.e.n.c.r.l.

Montréal (Québec)

 

Pour l'appelante EN REPRISE D’INSTANCE

 

Nathalie G. Drouin

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

Pour l'intimée

SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

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