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Date : 20190917


Dossier : A-194-19

Référence : 2019 CAF 231

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Présent : le juge Stratas

ENTRE :

SYNDICAT INTERNATIONAL DES EMPLOYÉS

PROFESSIONNELS ET DE BUREAU

demandeur

et

COUGAR HELICOPTERS INC.

défenderesse

Requête jugée sur dossier sans comparution des parties.

Ordonnance rendue à Ottawa (Ontario), le 17 septembre 2019.

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LE JUGE STRATAS

 


Date : 20190917


Dossier : A-194-19

Référence : 2019 CAF 231

Présent : le juge STRATAS

ENTRE :

SYNDICAT INTERNATIONAL DES EMPLOYÉS

PROFESSIONNELS ET DE BUREAU

demandeur

et

COUGAR HELICOPTERS INC.

défenderesse

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

LE JUGE STRATAS

[1]  Le demandeur a présenté une demande de contrôle judiciaire d’une décision du Conseil canadien des relations industrielles. À l’appui de sa demande, il a déposé deux affidavits, dont un a provoqué une réaction.

[2]  La défenderesse présente une requête en radiation des paragraphes 6, 7 et 16, ainsi que de la dernière phrase du paragraphe 8 de cet affidavit.

[3]  Elle soutient que le Conseil ne disposait pas des renseignements factuels figurant dans ces sections de l’affidavit au moment de rendre sa décision. La défenderesse invoque la règle générale voulant que seuls les documents dont disposait le Conseil puissent figurer au dossier de preuve présenté à notre Cour dans le cadre du contrôle judiciaire. Elle appuie sa thèse sur des décisions comme Association des universités et collèges du Canada c. Canadian Copyright Licensing Agency (Access Copyright), 2012 CAF 22 et Delios c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 117.

[4]  La défenderesse ajoute qu’aucun doute ne subsiste quant aux documents dont disposait, ou non, le Conseil, car ce dernier a produit tous les documents pertinents en réponse à une demande présentée sous le régime de l’article 317 des Règles. Cette disposition permet à toute partie de « demander la transmission des documents ou des éléments matériels pertinents quant à la demande, qu’elle n’a pas mais qui sont en la possession de l’office fédéral dont l’ordonnance fait l’objet de la demande [...] ». Le Conseil a produit, conformément à l’article 318, tous les documents sollicités en réponse à la demande présentée en application de l’article 317. Les renseignements factuels énoncés aux parties contestées de l’affidavit ne figurent pas dans ces documents.

[5]  Le demandeur s’oppose à la requête de la défenderesse. Il soutient que, nonobstant les documents produits par le Conseil conformément à l’article 318 des Règles, celui-ci disposait de ces renseignements factuels. En conséquence, ils peuvent dûment figurer au dossier de preuve constitué en vue du contrôle judiciaire.

[6]  Subsidiairement, le demandeur soutient que les parties contestées de l’affidavit sont admissibles devant notre Cour, car elles fournissent des renseignements contextuels ou informatifs utiles. Il s’agit d’une exception reconnue à la règle d’admissibilité générale énoncée au paragraphe 3 des présents motifs.

[7]  Je rejette l’argument subsidiaire du demandeur. Les énoncés contestés sont plus que des « [...] “renseignements généraux” vis[ant] les observations pur[e]s et simples propres à diriger la réflexion du juge réformateur afin qu’il puisse comprendre l’historique et la nature de l’affaire dont le décideur administratif était saisi » (Delios, au paragraphe 45). Il s’agit d’éléments de preuve de faits dont le Conseil disposait, selon le demandeur.

[8]  L’argument principal du demandeur, selon lequel les renseignements factuels dont il est question dans les sections contestées de l’affidavit étaient à la disposition du Conseil, reste à voir. Sur ce point, je formulerai des observations juridiques.

[9]  Premièrement, l’article 317 des Règles est un mécanisme limité d’obtention des « documents ou des éléments matériels » pertinents dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire. Je souligne l’expression. L’article 317 peut être utile lorsqu’il s’agit de recueillir les documents ou les transcriptions qui ont été examinés et pris en compte par le Conseil. Les « documents ou des éléments matériels » comprennent des renseignements factuels; toutefois, tous les renseignements factuels examinés par le Conseil ne figurent pas nécessairement dans les « documents ou des éléments matériels ». Le Conseil pourrait avoir eu connaissance de certains renseignements factuels par le truchement d’instances antérieures ou connexes.

[10]  Ce point a été abordé par notre Cour dans l’affaire Bell Canada c. 7262591 Canada Ltd. (Gusto TV), 2016 CAF 123. Dans l’arrêt Gusto TV (au paragraphe 15), notre Cour a reconnu que les renseignements issus d’instances antérieures ou connexes impliquant les mêmes parties et connus du décideur administratif « peuvent faire partie des données sur lesquelles le décideur administratif fonde sa décision ». En conséquence, elles « peuvent être versées au dossier présenté au juge réformateur à titre d’éléments de preuve ». Les renseignements de ce type pourraient ne pas figurer dans les éléments « matériels » présentés au décideur. Ils peuvent néanmoins avoir fait partie du fondement factuel de la décision.

[11]  L’arrêt Gusto TV semble appuyer la position du demandeur dans la présente requête. Le demandeur soutient que le Conseil connaissait tous les renseignements factuels indiqués aux paragraphes contestés, ou la majeure partie de ceux-ci, et qu’il a tenu compte de ceux-ci dans sa décision.

[12]  Selon les éléments de preuve et les observations formulées par les parties jusqu’à maintenant, je ne peux pas trancher la présente requête. La situation n’est pas claire. En conséquence, il ne s’agit pas d’une requête qu’un juge seul peut trancher (Collins c. Canada, 2014 CAF 240, paragraphes 6 et 7, et la jurisprudence qui y est mentionnée).

[13]  En conséquence, j’ordonnerai l’ajournement de la requête en vue d’un examen et d’une décision par la formation saisie de la demande de contrôle judiciaire. La formation pourra alors tirer une constatation de fait sur les renseignements dont était saisi le Conseil au moment de rendre sa décision. Une fois cette question réglée, la formation pourra alors procéder à l’examen de la décision du Conseil.

[14]  Le demandeur pourra déposer un mémoire des faits et du droit révisé pour remplacer celui qu’il a déjà déposé afin de faire valoir ses observations sur la question de l’admissibilité des renseignements visés, et ce, dans un délai de dix jours suivant l’ordonnance de notre Cour ajournant la requête. La défenderesse pourra présenter des observations en réponse dans son mémoire en réponse. Notre Cour établira également, dans son ordonnance, le calendrier pour le dépôt du dossier et du mémoire de la défenderesse.

« David Stratas »

j.c.a.

Traduction certifiée conforme

Marie-Luc Simoneau, jurilinguiste


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-194-19

 

INTITULÉ :

SYNDICAT DES EMPLOYÉS PROFESSIONNELS ET DE BUREAU c. COUGAR HELICOPTERS INC.

 

REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LE JUGE STRATAS

 

DATE DES MOTIFS :

Le 17 septembre 2019

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Wassim Garzouzi

Julia Williams

 

Pour le demandeur

 

Stephanie Sheppard

 

Pour la défenderesse

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Raven, Cameron, Ballantyne & Yazbeck LLP

Ottawa (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

McInnes Cooper

St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador)

 

Pour la défenderesse

 

 

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