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Date : 20101108

Dossier : A‑392‑09

Référence : 2010 CAF 300

 

CORAM :      LE JUGE EVANS

                        LA JUGE SHARLOW

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

MARCEL PELLETIER

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

 

Audience tenue à Winnipeg (Manitoba), le 8 novembre 2010.

Jugement rendu à l’audience à Winnipeg (Manitoba), le 8 novembre 2010.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                                   LE JUGE EVANS

Y A SOUSCRIT :                                                                                                 LA JUGE TRUDEL

MOTIFS DISSIDENTS :                                                                                 LA JUGE SHARLOW

 


Date : 20101108

Dossier : A‑392‑09

Référence : 2010 CAF 300

 

CORAM :      LE JUGE EVANS

                        LA JUGE SHARLOW

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

MARCEL PELLETIER

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

(Prononcés à l’audience à Winnipeg (Manitoba), le 8 novembre 2010)

 

LE JUGE EVANS

[1]               Marcel Pelletier est un Indien inscrit appartenant à la Première Nation Red Rock. Il interjette appel d’une décision de la Cour canadienne de l’impôt (2009 CCI 358), par laquelle le juge Bowie a rejeté les appels interjetés par M. Pelletier des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 ch. 1 (5suppl.) (LIR) pour les années d’imposition 1999, 2000, 2001 et 2002.

 

[2]               Le juge a statué que le revenu tiré par M. Pelletier de son entreprise forestière pendant ces années n’était pas exonéré d’impôt en vertu des alinéas 81(1)a) de la LIR et 87(1)b) de la Loi sur les Indiens, L.R.C. 1985, ch. I‑5, M. Pelletier n’ayant pas démontré que son revenu était un bien « situé sur une réserve ».

 

[3]               Après avoir examiné la preuve, le juge a conclu sur le fondement des facteurs établis par la jurisprudence, en particulier dans Southwind c. Canada (1998), 156 D.L.R. (4th) 87 (CAF) (Southwind), que le revenu n’était pas lié à une réserve de manière suffisamment étroite pour constituer un bien meuble situé sur une réserve au sens de l’alinéa 87(1)b) de Loi sur les Indiens.

 

[4]               Le juge a statué que le fait que les activités et les clients de l’entreprise étaient situés hors de la réserve indiquait que le revenu de l’entreprise n’était pas situé sur la réserve. De plus, il a déclaré que le type d’entreprise et la nature du travail indiquaient que l’entreprise participait au commerce général.

 

[5]               L’avocat de M. Pelletier soutient que le juge a commis une erreur en ne tenant pas compte des circonstances entourant la nature de l’emploi et la façon dont le revenu était gagné. Il fait également valoir que le juge n’a pas accordé suffisamment de poids au fait que M. Pelletier avait une résidence sur la réserve, outre sa résidence familiale située hors de la réserve, et que le bureau de l’entreprise était situé sur la réserve.

 

[6]               Au fond, l’avocat allègue que le juge a commis une erreur dans son application aux faits du critère à plusieurs volets visant à déterminer le situs du revenu d’emploi ou d’entreprise pour les besoins de l’alinéa 87(1)b). Il s’agit là d’une question mixte de fait et de droit sur laquelle la Cour n’est disposée à intervenir que si elle est convaincue que le juge a commis une erreur manifeste et dominante dans son application du droit aux faits ou qu’il a commis une erreur de droit : Housen c. Nikolaisen, 2001 CSC 33, [2002] 2 C.S.C. 235, au paragraphe 28.

 

[7]               À mon avis, le juge n’a commis aucune erreur de la sorte. Premièrement, il ressort clairement de l’énoncé des faits que le juge a bien pris connaissance de la totalité de la preuve et des [traduction] « autres circonstances » rattachant l’entreprise à la réserve et procurant un avantage à celle‑ci, alors que selon M. Pelletier, il n’en aurait pas tenu compte. Le fait que le juge n’a pas fait de nouveau mention des faits particuliers de l’affaire lors de l’examen des facteurs établis dans Southwind ne signifie pas qu’il n’en a pas tenu compte dans sa décision. Il convient d’interpréter les motifs du juge dans leur ensemble.

 

[8]               Deuxièmement, M. Pelletier allègue que le juge a accordé trop peu de poids au fait qu’il résidait dans la réserve durant les mois d’hiver et que le bureau de son entreprise était dans la réserve. Il invite donc la Cour à réexaminer la preuve soumise au juge du procès, ce qu’un tribunal d’appel n’est pas disposé à faire, à moins d’une erreur manifeste et dominante ou d’une erreur de droit, et nous ne voyons aucune erreur de la sorte en l’espèce.

 

[9]               Pour ces motifs, l’appel sera rejeté avec dépens.

 

« John M. Evans »

j.c.a.

 

« Je suis d’accord.

Johanne Trudel, j.c.a. »

 

 

LA JUGE SHARLOW (motifs dissidents)

 

 

[10]           Avec respect, je ne suis pas d’accord avec mes collègues que l’appel doit être rejeté.

 

[11]           Dans l’application du critère des facteurs de rattachement, le fait ne pas accorder de poids à un facteur pertinent constitue une erreur de droit. À mon avis, pour déterminer si le revenu tiré par M. Pelletier de son entreprise forestière était un bien situé sur la réserve de la Première Nation Red Rock, le fait que la capacité de M. Pelletier à gagner un revenu à titre d’entrepreneur forestier avait pour fondement économique un bien appartenant à la Première Nation Red Rock était pertinent. Était également pertinent le fait que M. Pelletier avait le droit, en vertu d’un contrat, d’exploiter ce bien, à la condition qu’il paie une redevance à la Première Nation Red Rock et qu’il s’engage à offrir de la formation et de l’emploi à ses membres.

 

[12]           De toute évidence, le juge a compris ces éléments de la relation contractuelle entre la Première Nation Red Rock et l’entreprise forestière de M. Pelletier. Cependant, selon mon interprétation de ses motifs, on ne sait pas s’il a jugé qu’il s’agissait là de facteurs de rattachement qui devraient être favorables à la conclusion que, pour l’application de l’article 87 de la Loi sur les Indiens, l’entreprise forestière de M. Pelletier était située sur la réserve. Je ne dis pas que ces facteurs sont nécessairement concluants. Cependant, ils auraient dû être expressément pris en considération par le juge et, à mon avis, tel n’a pas été le cas.

 

[13]           Pour ces motifs, je serais d’avis de renvoyer l’affaire à la Cour de l’impôt pour qu’elle procède à un nouvel examen.

 

« K. Sharlow »

j.c.a.

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    A‑392‑09

 

APPEL D’UNE ORDONNANCE DE LA COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT DATÉE DU 3 JUILLET 2009, DOSSIER NO 2005‑2632(IT)G.

 

INTITULÉ :                                                   MARCEL PELLETIER c.
SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Winnipeg (Manitoba)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 8 novembre 2010

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

DE LA COUR :                                              LES JUGES EVANS, SHARLOW, TRUDEL

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :       LE JUGE EVANS

 

 

COMPARUTIONS :

 

Michael Harris

POUR L’APPELANT

 

Brooke Sittler

POUR L’INTIMÉE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

MACIVOR HARRIS RODDY

Winnipeg (Manitoba)

POUR L’APPELANT

 

 

Myles J. Kirvan, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

POUR L’INTIMÉE

 

 

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