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Date : 20101028

Dossier : A-515-09

Référence : 2010 CAF 288

 

CORAM :      LE JUGE NADON

                        LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

                        LE JUGE MAINVILLE

 

ENTRE :

OWEN & COMPANY LIMITED

demanderesse

et

GLOBE SPRING & CUSHION CO. LTD.

SIMMONS CANADA INC.

KEYNOR ASIA & I/E CO. LTD.

KEYNOR SPRING MANUFACTURING INC.

PACIFIC BEDSPRING ASSEMBLIES LTD.

RESTWELL SLEEP PRODUCTS

SPRING AIR SOMMEX CORPORATION

SPRINGWALL SLEEP PRODUCTS INC.

défenderesses

 

 

 

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 27 octobre 2010

Jugement rendu à l’audience à Ottawa (Ontario), le 28 octobre 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                       LA JUGE LAYDEN-STEVENSON


Date : 20101028

Dossier : A-515-09

Référence : 2010 CAF 288

 

CORAM :      LE JUGE NADON

                        LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

                        LE JUGE MAINVILLE

 

ENTRE :

OWEN & COMPANY LIMITED

demanderesse

et

GLOBE SPRING & CUSHION CO. LTD.

SIMMONS CANADA INC.

KEYNOR ASIA & I/E CO. LTD.

KEYNOR SPRING MANUFACTURING INC.

PACIFIC BEDSPRING ASSEMBLIES LTD.

RESTWELL SLEEP PRODUCTS

SPRING AIR SOMMEX CORPORATION

SPRINGWALL SLEEP PRODUCTS INC.

défenderesses

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Ottawa (Ontario), le 28 octobre 2010)

LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

[1]        Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire visant une décision de dommage rendue par le Tribunal canadien du commerce extérieur (le tribunal) aux termes de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, L.R.C. 1985, ch. S‑15 (la Loi) dans le dossier no NQ‑2009‑002. Le tribunal a déterminé que le dumping de certains blocs-ressorts pour matelas originaires ou exportés de la République populaire de Chine (les marchandises en cause) avait causé un dommage à la branche de production nationale de marchandises similaires au Canada. Le tribunal a en outre rejeté les exclusions de produits demandées par la demanderesse Owen & Company Limited (Owen).

 

[2]        Owen soutient que le tribunal a commis plusieurs erreurs, plus précisément :

·        le tribunal a commis une erreur en ne faisant pas de distinction entre l’effet des marchandises non sous-évaluées et celui des marchandises sous-évaluées;

·        le tribunal a commis une erreur en déterminant que les marchandises en cause non sous-évaluées auraient pu être sous-évaluées;

·        le tribunal a commis une erreur en rejetant les demandes d’exclusion de produits d’Owen.

 

[3]        Les défenderesses Globe Spring & Cushion Co. Ltd (Globe) et Simmons Canada Inc. (Simmons) soutiennent que le tribunal n’a pas commis de telles erreurs.

 

[4]        Le tribunal est hautement spécialisé et ses décisions appellent une grande retenue. Seules les questions ayant trait à sa compétence sont susceptibles de révision selon la norme de décision correcte. Toutes les autres questions requièrent l’application de la norme de décision raisonnable : Construction de Défense (1951) Limitée c. Zenix Engineering Ltd., 2008 CAF 109, 377 N.R. 47, aux paragraphes 17 à 20. Pour les motifs qui suivent, nous sommes d’avis que la présente demande doit être rejetée.

 

[5]        Owen soutient que le tribunal était tenu de faire expressément une distinction entre les effets des marchandises sous-évaluées et les effets de celles qui ne l’étaient pas. Nous sommes d’accord que l’un des facteurs énoncés dans le Règlement sur les mesures spéciales d’importation, DORS/84‑927 (le Règlement) consiste à se demander s’il existe des facteurs autres que le dumping des marchandises qui ont causé un dommage ou qui menacent de causer un dommage eu égard aux valeurs ou aux prix des importations de marchandises similaires qui ne sont pas sous-évaluées (sous-alinéa 37.1(3)b)(i)).

 

[6]        Dans ses motifs, le tribunal a analysé de façon approfondie la question du volume des marchandises en cause. Au paragraphe 70, il a conclu que les importations provenant de la Chine s’étaient traduites par une augmentation de parts de marché de cinq points de pourcentage durant la période de l’enquête, ce qui correspondait exactement aux pertes de parts de marché subies par la branche de production nationale. Owen soutient qu’ [traduction] « une proportion importante, sinon la totalité, de cette augmentation de parts de marché était attribuable aux importations non sous-évaluées » (mémoire des faits et du droit d’Owen, au paragraphe 47). Le dossier ne confirme pas cette prétention. Au contraire, il montre que l’augmentation de parts de marché était essentiellement attribuable aux marchandises sous-évaluées (dossier de demande d’Owen, onglet 3, pages 43 et 61; dossier confidentiel de Globe, onglet 8, pages 92, 94 et 95; dossier confidentiel de Simmons, onglet 3, pages 47 et 51; dossier confidentiel d’Owen, onglet 48). Owen ne signale aucun élément de preuve dans le dossier qui indiquerait le contraire.

 

[7]        De même, le tribunal a effectué une analyse tout aussi approfondie de la question des effets des marchandises en cause sur les prix. Après être parvenu à un certain nombre de conclusions clés quant aux prix, il a reconnu que l’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC) avait déterminé que certaines des marchandises en cause n’étaient pas sous-évaluées (motifs du tribunal, au paragraphe 85). Le tribunal semble avoir conclu, du moins de façon implicite, que le dommage causé par les marchandises sous-évaluées était important.

[8]        Comme nous l’avons mentionné précédemment, aux termes du sous-alinéa 37.1(3)b)(i) du Règlement, le tribunal doit déterminer si des facteurs autres que le dumping des marchandises ont causé le dommage. Le volume et les prix des marchandises non sous-évaluées sont l’un des facteurs. Comme nous l’avons mentionné, le tribunal a analysé de façon approfondie les questions du volume et des prix des marchandises en cause.

 

[9]        Il aurait été préférable que le tribunal explique de façon plus complète pourquoi il n’a pas jugé nécessaire d’éliminer les effets des marchandises non sous-évaluées. Dans certaines circonstances, une telle explication peut s’avérer nécessaire. Toutefois, dans les circonstances de l’espèce, il était raisonnable que le tribunal procède à une enquête sur les marchandises en cause et tire des conclusions en ce qui concerne les effets des marchandises sous-évaluées en se fondant sur des séries de données qui portaient sur les marchandises en cause, à la condition qu’il prenne en considération les marchandises non sous-évaluées. Le tribunal s’est penché sur les marchandises non sous-évaluées.

 

[10]      À notre avis, il ressort de la décision du tribunal qu’il était convaincu, malgré l’effet possible des marchandises non sous-évaluées, qu’un tel effet ne modifierait nullement sa conclusion que les marchandises sous-évaluées avaient causé un dommage au marché national. Bref, les motifs du tribunal, lorsqu’on les lit intégralement, mènent à la conclusion que le dommage causé par les marchandises sous-évaluées était important, en dépit des marchandises non sous-évaluées. Sur le fondement du dossier, il était loisible au tribunal de parvenir à cette conclusion.

 

[11]      Le deuxième argument d’Owen est fondé sur la dernière phrase du paragraphe 85 des motifs du tribunal. Owen soutient qu’il était inopportun de la part du tribunal d’affirmer que des envois individuels auraient pu être sous-évalués puisqu’on ne peut conclure au dumping qu’en procédant à une évaluation globale et que, en tout état de cause, seule l’ASFC peut tirer une telle conclusion. À notre avis, la phrase contestée ne fait rien de plus que reconnaître que les analyses modernes déterminent s’il y a dumping en tenant compte de l’ensemble de la situation, et cela en dépit du fait qu’il est possible que des importations individuelles puissent avoir eu lieu sous leur valeur normale. Le tribunal aurait pu renvoyer à des [traduction] « importations individuelles sous leur valeur normale » plutôt qu’à des importations individuelles « sous-évaluées ». Quoi qu’il en soit, si l’on tient compte du contexte, le tribunal a effectué son analyse du dommage sur le fondement des conclusions de l’ASFC quant à l’existence d’un dumping important et de marges de dumping particulières. La phrase du tribunal n’est qu’une observation.

 

[12]      Le troisième argument d’Owen concerne le rejet des demandes d’exclusion d’Owen. Cet argument a deux volets. Il ne sera toutefois pas nécessaire de traiter du deuxième volet parce que le premier volet règle la question.

 

[13]      La Loi confère au tribunal un pouvoir discrétionnaire très large d’accorder des exclusions selon ce qui est requis eu égard à la nature de la question. Dans Sacilor Aciéries c. Canada (Anti-dumping Tribunal) (1985), 60 N.R. 371, 9 C.E.R. 210 (C.A.F.), notre Cour a conclu que la question de savoir s’il convenait d’exclure des produits au motif qu’ils n’avaient pas été sous‑évalués devait être tranchée selon les faits ou que cette question relevait du pouvoir discrétionnaire du tribunal, mais qu’il ne s’agissait pas d’une question de droit.

 

[14]      Il convient de noter que, bien que les demandes d’exclusion de produits aient été formulées en termes génériques, le tribunal a traité des circonstances de fait d’Owen. La conclusion du tribunal selon laquelle la preuve indique que Globe est capable de produire des produits de substitution n’est pas contestée. Sur le fondement de ce seul fait, il était loisible au tribunal de rejeter les demandes d’exclusion d’Owen. Le rejet des demandes d’exclusion d’Owen n’était pas déraisonnable.

 

[15]      Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée avec dépens en faveur des défenderesses.

 

« Carolyn Layden-Stevenson »

j.c.a.

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                                    A-515-09

 

INTITULÉ :                                                   OWEN & COMPANY LIMITED et GLOBE SPRING & CUSHION CO. LTD. et al

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Ottawa (Ontario)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 27 octobre 2010

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

DE LA COUR                                                LE JUGE NADON

                                                                        LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

                                                                        LE JUGE MAINVILLE

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :       LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

 

 

COMPARUTIONS :

 

M. Paul D. Conlin

M. Benjamin P. Bedard

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

M. Geoffrey C. Kubrick

 

 

M. Christopher Kent

POUR LA DÉFENDERESSE : Globe Spring & Cushion Company

 

POUR LA DÉFENDERESSE : Simmons Canada Inc.

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

OGILVY RENAULT LLP

POUR LA DEMANDERESSE

 

LANG MICHENER LLP

 

 

FRASER MILNER CASGRAIN LLP

POUR LA DÉFENDERESSE : Globe Spring & Cushion Company

 

POUR LA DÉFENDERESSE : Simmons Canada Inc.

 

 

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