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Date : 20101019

Dossier : A-493-09

Référence : 2010 CAF 272

CORAM :      LE JUGE EVANS

                        LA JUGE DAWSON

                        LE JUGE STRATAS

 

ENTRE :

MICHAEL EDWARDS

appelant

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

 

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 13 octobre 2010.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 19 octobre 2010.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                           LA JUGE DAWSON

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                          LE JUGE EVANS

                                                                                                                        LE JUGE STRATAS

 

 


Date : 20101019

Dossier : A-493-09

Référence : 2010 CAF 272

CORAM :      LE JUGE EVANS

                        LA JUGE DAWSON

                        LE JUGE STRATAS

 

ENTRE :

MICHAEL EDWARDS

appelant

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’un appel d’une ordonnance interlocutoire d’un juge de la Cour canadienne de l’impôt. Dans des motifs publiés sous la référence 2009 CCI 606, 2010 DTC 1006, le juge a rejeté la requête en radiation de tout ou partie de deux alinéas de la réponse modifiée à l’avis d’appel.  Les deux alinéas font partie des hypothèses sur lesquelles le ministre du Revenu national (le ministre) s’est fondé en établissant la nouvelle cotisation de l’appelant. La requête en radiation avait été présentée au motif que le ministre n’avait pas émis les hypothèses de fait énoncées dans les alinéas. Les deux alinéas en question sont les suivants :

[Traduction]

13. h)   La juste valeur marchande de l'accord de redevances était symbolique;

 

13. cc)  Les parties suivantes participaient volontairement au stratagème et agissaient de concert en vue de faciliter sa mise en œuvre :

 

i)                    Trafalgar Trading;

 

ii)                   ParkLane;

 

iii)                 Plaza Capital;

 

iv)                 Plaza Capital Finance Corporation (Plaza Capital Finance);

 

v)                  Specialty Insurance;

 

vi)                 Les associations désignées

 

vii)               Le participant.

 

[2]               L’appelant soutient que le juge a commis une erreur de droit en statuant que, pour les besoins de l’alinéa 49(1)d) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale), DORS/90-688, les hypothèses peuvent être des conclusions implicites que le ministre pourrait logiquement avoir tirées en établissant la nouvelle cotisation. En plaidoirie, l’avocat de l’appelant a d’abord soutenu que l’analyse devait être textuelle, c’est-à-dire que l’hypothèse précise doit être consignée dans les dossiers sur lesquels la délivrance de l’avis de nouvelle cotisation (le dossier de vérification) est fondée. Cependant, l’avocat de l’appelant a ensuite convenu qu’il était possible, en droit, d’inférer certaines hypothèses du contenu du dossier de vérification lorsqu’elles sont tout à fait manifestes. À mon avis, le dossier de vérification peut permettre d’inférer des hypothèses dans des circonstances appropriées. Dans chaque cas, l’existence d’éléments au dossier de vérification permettant d’étayer la conclusion portant qu’un fait particulier est bien une hypothèse sur laquelle le ministre s’est fondé en établissant la cotisation ou la nouvelle cotisation est une question de fait.

 

[3]               Il s’ensuit que le juge n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’il a conclu qu’il était possible d’inférer des hypothèses du dossier de vérification. Il s’ensuit également que, dans le cas où le juge est disposé à inférer l’existence d’une hypothèse, une telle conclusion en est une de fait, ou mixte de fait et de droit, susceptible de révision selon la norme de l’erreur manifeste et dominante. Voir Housen c. Nikolaisen, [2002] 2 R.C.S. 235.

 

[4]               Examinant les alinéas contestés, le juge a tenu pour avéré, en ce qui a trait à l’alinéa 13h), que cette hypothèse avait été émise et que le ministre s’était fondé sur cette hypothèse en établissant la cotisation. Cette conclusion était fondée sur le contenu d’une lettre envoyée à l’appelant une fois la vérification terminée et sur le témoignage du vérificateur à l’interrogatoire préalable. La conclusion est également compatible avec la note de la RGAE et du rapport de vérification. Aucune erreur manifeste ou dominante n’a été démontrée relativement à la conclusion de fait du juge selon laquelle l’hypothèse avait été émise et que le ministre s’était fondé sur cette hypothèse en établissant la nouvelle cotisation.

 

[5]               En ce qui a trait à l’alinéa 13cc), le juge a reconnu qu’il se pouvait fort bien que le vérificateur n’ait pas tenu compte de la signification juridique des termes « agissaient de concert ». Cependant, le juge a considéré qu’il était préférable de laisser à l’appréciation du juge du procès la question de savoir si les faits justifiaient l’emploi des mots [traduction] « agissaient de concert ».

 

[6]               Il est bien établi en droit que les faits allégués comme hypothèses doivent être complets, précis et exacts. Voir, par exemple, Canada c. Anchor Pointe Energy Ltd., 2007 DTC 5379, (C.A.F), au paragraphe 29.

 

[7]               La transcription de l’interrogatoire du vérificateur faisait partie de la preuve dont le juge était saisi. Lors de l’interrogatoire préalable, le vérificateur a rendu le témoignage suivant :

[Traduction]

Q.        Vous dites dans ce passage que les participants, les numéros un à sept en chiffres romains, agissaient de concert. Que voulez-vous dire par ces mots : « agissaient de concert »?

 

A.        Je veux dire qu’en agissant de concert, ils agissaient ensemble.

 

Q.        Qu’est-ce que ça veut dire?

 

A.        Cela veut dire qu’ils prenaient part à une série d’opérations ou d’événements comme cela est décrit à l’article 248(10). Et je ne lis pas dans leurs pensées, je ne dis pas ni ne laisse entendre que – ou nous ne tenons pas pour acquis qu’il y avait entre eux un lien de dépendance.

 

[…]

 

Q.        Je voulais simplement que ce soit clair, vous ne dites pas qu’Edwards agissait de concert avec, par exemple, l’association de lutte.

 

A.        Supprimons les mots « agissaient de concert » parce que –

 

Q.        C’est pourtant ce que vous alléguez.

 

A.        OK, agissaient ensemble. « Agissaient ensemble » est peut-être plus juste –  un synonyme pour « agissaient de concert »

 

[…]

 

Q.        Pour revenir à « agissaient de concert », je comprends ce que vous avez dit à propos de ces termes. Où dans les documents de vérification, y compris dans la lettre d’avis de trente jours, y a-t-il une référence quelconque à des actions de concert?

 

A.        Où – il est fait référence à une série d’opérations où nous n’avons pas employé les termes exacts « agissaient de concert », mais l’idée d’une série revient à dire qu’il y avait plus d’une opération ou que vous avez plus d’une opération. Il a peut-être voulu plus d’une partie.

C’est donc – il y a une série – une référence à un série, dans certaines parties de ce concept.

 

[…]

 

Q.        Nous ne voyons non plus aucune référence, outre le rapport de vérification, ni dans l’exposé de position ni dans la note concernant la RGAE ni dans la lettre concernant la RGAE ni dans la lettre de proposition au contribuable, à un lien de dépendance entre le donateur et l’un quelconque des participants dans le programme ou toute référence au donateur ou au fait que tout participant ait agi de concert.

 

A.        Oui, mais nous avons mentionné une série d’opérations ou d’événements.

 

Q.        Vous convenez que la réponse à ma question est « oui »?

 

A.        Oui.

                                                                        [Non souligné dans l’original.]

 

[8]               L’expression « agissaient de concert » fait partie du critère juridique permettant de décider s’il y avait entre les parties un lien de dépendance. Lors de l’interrogatoire préalable, le vérificateur a nié avoir allégué l’existence d’opérations effectuées avec un lien de dépendance. La question de savoir si les parties ont agi sans lien de dépendance peut être importante dans la présente instance. Lors de sa plaidoirie, l’avocat de l’intimée a concédé que, à la lumière des réponses du vérificateur à l’interrogatoire préalable, le texte de l’alinéa 13cc) de la réponse modifiée du ministre à l’avis d’appel n’était pas aussi précis qu’il aurait pu l’être. Selon le témoignage du vérificateur, l’alinéa 13cc) n’étant pas complet, précis et exact il ne répond pas aux exigences. Il s’ensuit que l’hypothèse aurait dû être radiée.

 

[9]               L’avocat de l’appelant a reconnu durant sa réplique que le vérificateur avait supposé au cours de la vérification que les participants agissaient ensemble dans une série d’opérations. À la lumière de cette information, il convient d’autoriser l’intimée à modifier l’alinéa 13cc) de sa réponse d’une manière conforme au témoignage donné par le vérificateur à l’interrogatoire préalable.

 

[10]           Pour ces motifs, j’accueillerais l’appel en partie. Rendant l’ordonnance qui aurait dû être rendue par le juge, je radierais l’alinéa 13cc) de la réponse modifiée du ministre et lui donnerais l’autorisation de la modifier conformément aux présents motifs. Les deux parties ayant gain de cause, je n’adjugerais aucuns dépens.

 

« Eleanor R. Dawson »

j.c.a.

 

« Je suis d’accord.

            John M. Evans »

 

« Je suis d’accord.

            David Stratas »

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                                                            A-493-09

 

INTITULÉ :                                                                           MICHAEL EDWARDS c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   LE 13 OCTOBRE 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT:                                                 LA JUGE DAWSON

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                             LE JUGE EVANS

                                                                                                LE JUGE STRATAS

 

DATE DES MOTIFS :                                                          LE 19 OCTOBRE 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Ian S. MacGregor, c.r.

Pooja Samtani

 

POUR L’APPELANT

 

Martin Hickey

 

POUR L’INTIMÉE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Osler, Hoskin & Harcourt LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

POUR L’APPELANT

 

 

 

POUR L’INTIMÉE

 

 

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