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                                                                                                                                 Date : 20100610

Dossier : A-461-09

Référence : 2010 CAF 154

 

CORAM :      LE JUGE NADON

                        LE JUGE PELLETIER                    

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

SYNDICAT UNI DU TRANSPORT, SECTION LOCALE 1624

demandeur

et

SYNDICAT DES TRAVAILLEUSES

ET TRAVAILLEURS DE COACH CANADA - CSN

défendeur

 

et

3329003 CANADA INC.

défenderesse

 

et

TRENTWAY-WAGAR INC.

défenderesse

 

 

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 12 mai 2010.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 10 juin 2010.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                                 LA JUGE TRUDEL

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                            LE JUGE NADON

                                                                                                                         LE JUGE PELLETIER


Date : 20100610

Dossier : A-461-09

Citation : 2010 CAF 154

 

CORAM :      LE JUGE NADON

                        LE JUGE PELLETIER                    

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

SYNDICAT UNI DU TRANSPORT, SECTION LOCALE 1624

 

demandeur

et

SYNDICAT DES TRAVAILLEUSES

ET TRAVAILLEURS DE COACH CANADA - CSN

défendeur

 

et

3329003 CANADA INC.

défenderesse

 

 

et

TRENTWAY-WAGAR INC.

défenderesse

 

 

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE TRUDEL

[1]               En vertu d’une demande présentée sous l’article 24 du Code canadien du travail, L.R.C. 1985, ch. L-2 (Partie I – Relations du travail) [le Code] le 22 juin 2009, le défendeur Syndicat des travailleuses et travailleurs de Coach Canada-CSN [la CSN] a été accrédité à titre d’agent négociateur d’une unité comprenant :

 

[traduction] tous les employés de 3329003 Canada Inc., à l’exception des employés de bureau et de la billetterie travaillant au 5550, boulevard Monk et au 1140, rue Wellington à Montréal (Québec) (certificat du 14 octobre 2009, dossier du défendeur, volume 2, aux pages 356 - 357).

 

[2]               La principale question soulevée par la demande de contrôle judiciaire introduite par le demandeur, le syndicat uni du transport, section locale 1624 [SUT], est de savoir si le Conseil canadien des relations industrielles [le Conseil] a commis une erreur en accordant cette accréditation. Les autres questions soulevées par le SUT portent sur la justice naturelle et l’équité procédurale.

 

[3]               En vertu d’un certificat d’accréditation accordé en 1987 (le certificat d’accréditation de 1987) par le Conseil canadien des relations du travail (l’ancien nom du Conseil), le SUT est l’agent négociateur de :

 

[traduction] tous les employés de Trentway-Wagar Inc. [Trentway] travaillant comme conducteurs d’autocar et conducteurs dans les aéroports, à l’exception des répartiteurs, de ceux dont le rang est plus élevé que répartiteur et des employés de bureau (voir le certificat d’accréditation de 1987, dossier du demandeur, volume 1, onglet C, à la page 81).

 

[4]               Le SUT fait valoir que lorsque la CSN a présenté sa demande d’accréditation, 3329003 Canada Inc. [332] avait fusionné à Trentway. Par conséquent, les employés visés par l’accréditation faisaient déjà partie de l’unité de négociation du SUT « peut-être en 2007, mais au moins avant le 22 juin 2009 » (mémoire du demandeur, au paragraphe 2). Nous reviendrons plus loin sur l’incertitude au sujet du statut d’entreprise de 332.

 

[5]               Le SUT soutient également que le Conseil a commis une erreur :

 

a.       en ne fournissant pas un avis de l’instance adéquat;

b.      en ne tenant pas d’audience;

c.       en rendant sa décision accompagnée de motifs signés par le greffier du Conseil plutôt que par un membre du Conseil, contrairement à l’alinéa 3b) du Règlement de 2001 sur le Conseil canadien des relations industrielles, DORS/2001-520, tel que modifié [le Règlement].

 

[6]               Les défenderesses 332 et Trentway appuient la thèse du demandeur. Puisque 332 et Trentway n’ont soulevé aucune question indépendante, les présents motifs ne réfèrent qu’au SUT.

 

[7]               Sur le fond, vu la nature de la question à trancher, de la preuve au dossier et de l’expertise du Conseil en matière de détermination des unités de négociations approuvées, la décision en cause est raisonnable, car son appartenance aux issues possibles acceptables peut se justifier au regard des faits et du Code (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190). En ce qui concerne le traitement procédural du dossier par le Conseil, je ne suis pas convaincue que le Conseil a manqué à son obligation d’équité procédurale.

 

[8]               Par conséquent, je rejetterais la présente demande pour les motifs qui suivent.

 

[9]               Pour bien comprendre la question de la période de présentation de la demande soulevée par le demandeur sous le régime de l’article 24 du Code, je dois décrire la structure d’entreprise dont font partie 332 et Trentway, mais avant de le faire, je réglerai les questions ayant trait à l’équité procédurale.

 

A.        Équité procédurale

            1.         Avis de l’instance

 

[10]           Le SUT soutient que la CSN et le Conseil ne lui ont pas donné d’avis adéquat de l’instance, ce à quoi elle avait droit comme « toute personne que la demande peut intéresser » (alinéa 10b) du Règlement). Le SUT fait valoir ce qui suit :

 

[traduction]… en raison du caractère tardif de l’avis et de sa nature inadéquate, il a été porté préjudice à la capacité du demandeur de contester la demande d’accréditation (mémoire du demandeur, au paragraphe 45).

 

[11]           Le SUT invoque les articles 10 et 11 du Règlement pour défendre sa thèse. Au vu des faits de l’espèce, je ne vois pas en quoi ces articles appuient la thèse du demandeur.

[12]           L’article 10 du Règlement précise ce que toute demande produite auprès du Conseil doit contenir. L’article 11, dans sa partie pertinente, prévoit que le Conseil :

 

… sur réception d’une demande et dans la mesure du possible, en avise par écrit toute personne dont les droits sont directement touchés par la demande.

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[13]           Cette demande fondée sur l’article 24 concernait des employés non syndiqués de 332, mais le SUT fait valoir qu’il était une partie touchée en raison de son certificat d’accréditation de 1987 et de la fusion entre 332 et Trentway, qui a eu lieu entre 2007 et le 22 juin 2009.

 

[14]           D’emblée, rien n’indiquait que le SUT était touché par la demande de la CSN. Quoi qu’il en soit, le dossier montre que le 15 juillet 2009, le SUT a reçu [traduction] « tous les documents produits en l’espèce, y compris la demande d’accréditation de la CSN » dès que le Conseil a pris connaissance de son intention d’intervenir à l’égard de la demande (voir l’affidavit de Maylene Higgins, dossier du demandeur, volume 1, onglet 2, aux paragraphes 7 et 10).

 

[15]           Dès lors, le SUT a été partie aux procédures et a eu l’occasion de présenter un plaidoyer écrit, ce qu’il a fait, en plus de produire sa propre demande sous le régime de l’article 35 du Code en vue d’obtenir une déclaration d’employeur unique.

 

[16]           Au vu de ces faits, je rejetterais cet argument.

 

 

            2.         Omission de tenir une audience

 

[17]           L’article 16.1 du Code prévoit ce qui suit :

Décision sans audience

16.1 Le Conseil peut trancher toute affaire ou question dont il est saisi sans tenir d’audience.

1998, ch. 26, art. 6.

Determination without oral hearing

 

16.1 The Board may decide any matter before it without holding an oral hearing.

 

 

1998, c. 26, s. 6.

 

[18]           Le Conseil est maître de sa procédure : la présente Cour fera preuve de déférence à l’égard de la décision du Conseil, à moins que ce dernier ait manqué à l’équité procédurale à l’égard d’une des parties.

 

[19]           Le SUT fait valoir que la demande de la CSN était exceptionnelle parce qu’elle portait sur des [traduction] « questions complexes d’organisation ou de réorganisation d’entreprise » (mémoire du demandeur au paragraphe 49). Je ne suis pas d’accord.

 

[20]           De plus, le SUT fait valoir qu’il était en droit de s’attendre à être entendu à la suite, selon ses dires, de la promesse d’un agent des relations de travail. À l’audition de la présente demande, l’avocat du SUT a concédé qu’il n’y avait rien au dossier pour appuyer cette affirmation.

 

[21]           Au contraire, je note que le Conseil a envoyé des lettres à la CSN et 332, qui ont été transmises au SUT, pour leur rappeler qu’il était [traduction] « dans leur meilleur intérêt de produire des plaidoyers complets et précis à l’appui de leur thèse respective et de collaborer pleinement à l’enquête menée par l’agent du Conseil » (dossier du demandeur, volume 1, onglet C, aux pages 68 pour CSN et 73 pour 332), car il était possible que l’affaire soit tranchée sans la tenue d’une audience.

 

[22]           Je note également que le rapport de l’enquêteur reflète les thèses des parties avec précision (dossier du demandeur, volume 1, onglet L aux pages 189 et suivantes). Le Conseil était donc bien au fait de la thèse du SUT.

 

[23]           Par conséquent, je rejetterais le deuxième argument.

 

3.         Omission de rendre des motifs ou omission de rendre des motifs suffisants

 

[24]           Dans son dernier argument sous le titre « équité procédurale », le demandeur soutient que le Conseil a commis une erreur en ne motivant pas sa décision (mémoire du demandeur, aux paragraphes 31 et suivants).

 

[25]           Il appert du dossier que les motifs afférents à l’ordonnance d’accréditation du Conseil du 14 octobre 2009 ont été rendus le même jour et qu’ils comportaient la signature du directeur exécutif du Conseil et du greffier en chef.

 

[26]           Selon le demandeur, cela va à l’encontre des articles 2 et 3 du Règlement, qui prévoient ce qui suit :

Ordonnances

 

2. (1) Seul le président, un vice-président ou un autre membre du Conseil peut signer les décisions ou les ordonnances de celui-ci, un greffier pouvant par ailleurs signer les décisions visées à l’article 3.

(2) À moins d’indication contraire, l’ordonnance du Conseil prend effet à la date à laquelle elle est rendue.

 

Greffier

3. En plus de régler toute question au nom du Conseil, un greffier peut rendre des décisions exécutoires sur des demandes non contestées concernant :

[…]

 

b) les demandes d’accréditation sous le régime de l’article 24 du Code;

 

[…]

Orders

 

2. (1) Only the Chairperson, a Vice-Chairperson, or another member of the Board may sign an order or a decision of the Board, although a Registrar is authorized to sign the decisions referred to in section 3.

(2) Unless it states otherwise, an order of the Board takes effect on the day it is issued.

 

Registrar

3. In addition to processing any matters on behalf of the Board, a Registrar may make binding decisions on uncontested applications on behalf of the Board in respect of

 

(b) applications for certification pursuant to section 24 of the Code;

 

 

 

[27]           Au paragraphe 41 de son mémoire, le SUT résume sa thèse de la manière suivante :

 

41.        [traduction] En ce qui concerne la présente affaire, nous sommes d’avis que les questions soulevées par la demande d’accréditation étaient importantes et contestées. Elles portaient sur le statut des droits de négociation acquis du demandeur, mais également sur la question de l’employeur commun. Nous faisons donc valoir que le Conseil était obligé de motiver sa décision. De plus, compte tenu du lien étroit qui unit le prononcé d’une décision et la formulation des motifs qui la sous-tendent, nous sommes d’avis que le Conseil avait l’obligation de rédiger lui-même ces motifs. En ne le faisant pas, le Conseil n’a pas respecté ses obligations en matière de justice naturelle et d’équité procédurale, et par conséquent, l’ordonnance d’accréditation devrait être annulée.

 

[28]           Encore une fois, je conclus que les articles du Règlement reproduits ci-dessus n’appuient pas la thèse du demandeur : il appert du dossier que l’ordonnance d’accréditation est signée en bonne et due forme par le vice‑président Graham J. Clark, le vice‑président de la formation saisie de la demande de la CSN. À l’inverse, rien au dossier n’indique que les motifs du Conseil aient été préparés ou rédigés par le greffier.

 

[29]           Tout ce qui est établi de façon certaine, c’est que l’ordonnance d’accréditation est assortie de motifs et que ceux-ci ont été signés par le greffier et ont suivi le même processus que l’ordonnance d’accréditation.

 

[30]           Quoiqu’il eût été préférable que les membres du Conseil signent leurs motifs eux-mêmes, j’estime que la procédure suivie en l’espèce ne les invalide ou ne les entache en rien. Je considère donc que les motifs sont ceux du Conseil.

 

[31]           Étant donné que je rejette également cet argument, j’examinerai maintenant l’ordonnance d’accréditation.

 

B.        Article 24 – l’ordonnance d’accréditation et la question de la période de présentation de la demande

 

[32]           Comme je l’ai écrit ci-dessus, la demande d’accréditation de la CSN avait été présentée sous le régime de l’article 24 du Code. L’alinéa 24(2)a) prévoit ce qui suit :

… la demande d’accréditation d’un syndicat à titre d’agent négociateur d’une unité peut être présentée a) à tout moment, si l’unité n’est ni régie par une convention collective en vigueur ni représentée par un syndicat accrédité à titre d’agent négociateur aux termes de la présente partie.

 

 

[33]           Le Conseil, dans Ledcor Industries Ltd. (Re), 106 di 122, [1998] 41 C.L.R.B.R. (2d) 145 [Ledcor], confirmée dans Ledcor Industries Ltd. c. Union internationale des journaliers d’Amérique du Nord, section locale 92 (Construction & General Workers’ Union), [1999] 251 N.R. 285 (C.A.F,), a expliqué l’article 24 de la manière suivante :

 

29         Le paragraphe 24(1) prévoit qu’« un syndicat peut solliciter l’accréditation à titre d’agent négociateur d’une unité qu’il juge habile à négocier collectivement », sous réserve des délais prévus. Le syndicat jouit d’une bonne marge de manœuvre, relativement à une demande fondée sur l’article 24, pour définir l’unité qu’il juge habile à négocier. Si l’unité « est régie » par une convention collective ou « est représentée » par un syndicat accrédité au moment de la présentation de la demande et que cette unité est sensiblement la même unité que celle décrite dans la demande présentée en vertu du paragraphe 24(1), le caractère opportun de la demande doit être déterminé aux termes des dispositions du paragraphe 24(2).

 

30.        Avant d’appliquer les délais prévus au paragraphe 24(2), le Conseil est souvent appelé à décider si l’unité décrite par le syndicat dans sa demande fondée sur le paragraphe 24(1) est la même, ou sensiblement la même, que celle à l’égard de laquelle il existe déjà une ordonnance d’accréditation ou une convention collective (conclue volontairement ou non). En fin de compte, c’est également le Conseil, aux termes de l’article 28, qui doit décider si l’unité que le syndicat a décrite dans la demande fondée sur le paragraphe 24(1) constitue « une unité qu’il juge habile à négocier collectivement ». [Non souligné dans l’original.]

 

[34]           Par conséquent, le Conseil ne pouvait pas accorder l’accréditation demandée par la CSN s’il était convaincu que l’unité projetée était « la même, ou sensiblement la même » que celle visée dans le certificat d’accréditation que détient le SUT. Concernant les allégations du demandeur, le Conseil devait conclure que [traduction] « [332] avait été fusionnée en une seule entité avec [Trentway] » (mémoire du demandeur, au paragraphe 25) et qu’au 22 juin 2009, les employés de Montréal dont il est question dans la demande de la CSN avaient le même employeur que ceux couverts par le certificat d’accréditation de 1987.

 

[35]           Dans ses motifs, le Conseil a affirmé ce qui suit :

 

Le banc est convaincu qu’il peut maintenant procéder à l’accréditation de la CSN à l’égard de l’unité de négociation visée par la demande. Malgré les arguments valables des procureurs concernant les circonstances changeantes des entreprises qui sont à l’origine de la demande parallèle de déclaration d’employeur unique, le fait d’attendre qu’une décision définitive soit rendue pourrait sérieusement porter atteinte aux droits des employés en poste de se syndiquer en vertu du Code. La question des unités de négociation peut bien entendu être réexaminée si le Conseil était convaincu plus tard qu’il devait formuler une déclaration d’employeur unique.

 

Le Conseil n’a pas été convaincu par les arguments des parties que les employés qui travaillent pour un autre employeur à Montréal sont devenus visés par l’accréditation d’une unité de négociation en Ontario. Il demeure saisi de la question des unités de négociation; d’ailleurs, on ne lui a jamais demandé de réexaminer la portée de tout certificat d’accréditation existant. De même, si une déclaration d’employeur unique est formulée, la question des unités de négociation multiples pourrait être réexaminée.

The panel is satisfied that it can proceed at this time to certify the CSN for the requested bargaining unit. Despite the able arguments of counsel concerning the changing corporate situation behind the concurrent single employer application, the delay in waiting for a final decision could significantly prejudice the rights of existing employees to organize themselves under the Code. The issue of bargaining units can, of course, be revisited should the Board later be convinced to make a single employer declaration.

 

 

 

 

The Board was not convinced by the parties’ arguments that any Ontario-based bargaining unit had started to apply to employees in Montreal working for a different employer. The Board retains its jurisdiction over bargaining units and has never been requested to re-examine the scope of any of its outstanding bargaining unit certificates. Similarly, if ever a single employer declaration is issued, the issue of multiple bargaining units could again be revisited.

 

[36]           Dans sa demande de contrôle judiciaire, le demandeur plaide que l’extrait précédent des motifs du Conseil contient trois erreurs :

 

[traduction]

10.        Le Conseil a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée en décidant que le SUT était un syndicat « ontarien », plutôt que de reconnaître son statut international et national ainsi que son accréditation pour tout le Canada.

 

13.        Le Conseil a commis une erreur de droit en concluant que la question des unités de négociation pouvait être réexaminée dans le cas où le Conseil déciderait de formuler une déclaration d’employeur unique, dans la mesure où le fait qu’il y ait déjà un agent de négociation exclusif empêche nécessairement la présentation d’une demande d’accréditation qui serait hors délai.

 

14.        Le Conseil a commis une erreur de droit en laissant entendre que le SUT aurait dû demander que le Conseil réexamine la portée de tout certificat d’accréditation existant étant donné que le SUT avait déjà détenu un certificat d’accréditation sans limite géographique concernant tous les employés de l’employeur.

 

 

[37]           En toute déférence, le premier argument n’est pas appuyé par le dossier. Dans ses motifs, le Conseil fait référence à une « unité de négociation en Ontario » (« Ontario-based bargaining unit ») avant d’affirmer que les employés de 332 à Montréal ne font pas partie de cette unité. Le Conseil ne fait nulle part référence à un syndicat en Ontario. Cela est compatible avec l’obligation du Conseil, prévue à l’article 24, de faire porter son examen sur les caractéristiques distinctes d’une « unité » à l’égard de laquelle une accréditation est demandée.

 

[38]           En ce qui concerne les arguments restants, je ne suis pas convaincue que le Conseil a commis une erreur. Il est nécessaire d’expliquer un peu le contexte de l’entreprise pour mieux comprendre la décision du Conseil.

 

[39]           La société 332 est une société sœur de Trentway. Les deux sociétés font partie du groupe Stagecoach, un des plus grands groupes gérant des autocars et des trains au Royaume-Uni et en Amérique du Nord (dossier du demandeur, volume 1, onglets E et M, aux pages 153 et 230). Le groupe de sociétés Stagecoach a procédé à des changements au cours des années. Les événements importants, du point de vue du SUT, sont survenus en 2007 et en 2009 et justifient son argument fondé sur le caractère opportun.

 

[40]           À l’origine, la société 332 avait été créée en tant que société de portefeuille. Suivant les changements effectués, l’entreprise a fait affaires sous les noms Autocar Connaisseur, Coach Canada et Grayline (MC) (dossier des [sociétés] défenderesses, onglet 1, affidavit de James J. Devlin, au paragraphe 10; voir également le dossier du demandeur, volume 1, onglet M, aux pages 243 à 245).

 

[41]           Dans une lettre du 8 juillet 2009 adressée au Conseil, l’avocat de 332 analyse le principal événement présumé de 2007 :

 

[traduction] Il est important que le Conseil comprenne que le groupe Coach Canada est composé de deux entreprises principales, qui sont Trentway-Wagar Inc. et Autocar Connaisseur Inc. La première fait affaires en Ontario, au Québec et aux É.-U. et la deuxième fait affaires au Québec, en Ontario et aux É.-U. Les deux entreprises exploitent des autocars pour le transport interprovincial et international et elles ont les mêmes administrateurs et dirigeants. Cette direction et ce contrôle communs résultent de la fusion survenue en 2007 entre Trentway-Wagar Inc. et Autocar Connaisseur Inc. À cette époque, pour des raisons d’ordre fiscal, une grande partie des actifs d’Autocar Connaisseur Inc. ont été transférés à 3329003 Canada Inc., la société mère. À la suite de cette fusion, Autocar Connaisseur Inc. a continué ses activités sous le régime des lois de l’Ontario et a fusionné avec Trentway-Wagar Inc. (dossier du demandeur, volume 1, onglet C, à la page 97)

 

[42]           M. Devlin, président de Trentway et de 332, traite de l’événement de 2009 dans son affidavit. Il déclare que Trentway a pris le contrôle effectif de 332 à la fin de mai 2009 lorsqu’il en a congédié le directeur général après avoir découvert que [traduction] « la section locale de Montréal avait frustré [332], par la fraude, de très importantes sommes d’argent » (dossier des [sociétés] défenderesses, onglet 1, affidavit de James J. Devlin, au paragraphe 16.

 

[43]           Ce sont là les arguments qu’ont présentés le SUT, Trentway et 332 en réponse à la demande d’accréditation de la CSN produite sous le régime de l’article 24 du Code. Ils constituent également la base de la demande des sociétés défenderesses visant l’obtention d’une déclaration « d’employeur unique » en vertu de l’article 35, qui n’a toujours pas été entendue par le Conseil.

 

[44]           D’un autre côté, il appert également du dossier qu’en date du 22 juin 2009, aucune accréditation antérieure ne couvrait les employés de 332, que 332 était l’employeur au dossier et que depuis 2002, aucune tentative n’a été faite par le SUT ou tout autre syndicat pour agir à titre d’agent négociateur pour les employés (dossier des [sociétés] défenderesses, onglet 1, affidavit de James J. Devlin, aux paragraphes 19-23). En vérité, à l’audience l’avocat du SUT a dit que son client a appris l’existence de cette unité le 7 juillet 2009.

 

[45]           Suivant la norme de la raisonnabilité, non seulement il m’est impossible de voir comment ces faits auraient pu mener le Conseil à rejeter la demande de la CSN fondée sur l’article 24, mais j’estime également que le Conseil disposait de suffisamment d’éléments pour conclure comme il l’a fait et pour accréditer la CSN pour agir à titre d’agent négociateur des employés.

 

[46]           Par conséquent, je rejetterais la présente demande de contrôle judiciaire et je n’adjugerais aucuns dépens puisque le demandeur n’en a pas fait la demande.

 

« Johanne Trudel »

j.c.a.

 

 

 

« Je suis d’accord

            M. Nadon j.c.a. »

 

« Je suis d’accord

            J.D. Denis Pelletier j.c.a. »

 

 

Traduction certifiée conforme

Jean-François Vincent

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            A-461-09

 

INTITULÉ :                                                                           SYNDICAT UNI DU TRANSPORT, SECTION LOCALE 1624 c. SYNDICAT DES TRAVAILLEUSES ET TRAVAILLEURS DE COACH CANADA-CSN et 3329003 CANADA INC. et TRENTWAY-WAGAR INC.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   12 MAI 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                LA JUGE TRUDEL

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                             LE JUGE NADON

                                                                                                LE JUGE PELLETIER

 

DATE DES MOTIFS :                                                          10 JUIN 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Beverley Burns

POUR LE DEMANDEUR

 

Guy Martin

 

 

 

 

 

Philippe-André Tessier

Louise Baillargeon

POUR LE DÉFENDEUR SYNDICAT DES TRAVAILLEUSES ET TRAVAILLEURS DE COACH CANADA-CSN

 

POUR LES DÉFENDERESSES

3329003 CANADA INC. ET TRENTWAY-WAGAR INC.

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Watson Burns s.r.l.,

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Pepin et Roy,

Montréal (Québec)

 

 

 

 

Robinson Sheppard Shapiro s.r.l.,

Montréal (Québec)

POUR LE DÉFENDEUR

SYNDICAT DES TRAVAILLEUSES ET TRAVAILLEURS DE COACH CANADA-CSN

 

POUR LES DÉFENDERESSES

3329003 CANADA INC. ET TRENTWAY-WAGAR INC.

 

 

 

 

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