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Date : 20091202

Dossier : A-171-09

Référence : 2009 CAF 353

 

CORAM :      LA JUGE SHARLOW

                        LE JUGE RYER

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

ISLAND TIMBERLANDS LP

appelante

et

LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES et KEMP FOREST PRODUCTS LTD.

intimés

 

 

 

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 2 décembre 2009.

Jugement rendu à l’audience à Ottawa (Ontario), le 2 décembre 2009.

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                                         LA JUGE TRUDEL

 


Date : 20091202

Dossier : A-171-09

Référence : 2009 CAF 353

 

CORAM :      LA JUGE SHARLOW

                        LE JUGE RYER

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

ISLAND TIMBERLANDS LP

appelante

et

LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES et KEMP FOREST PRODUCTS LTD.

intimés

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Ottawa (Ontario), le 2 décembre 2009)

LA JUGE TRUDEL

[1]               Il s’agit d’un appel interjeté à l’encontre de l’ordonnance rendue par le juge de Montigny (le juge) (2009 CF 258), rejetant la demande de contrôle judiciaire présentée par Island Timberlands LP (Timberlands) à l’encontre d’une décision provisoire du ministre des Affaires étrangères (le ministre), intimé en l’espèce. Par cette décision, le ministre a autorisé une société qui effectue du découpage sur commande, l’intimée Kemp Forest Products Ltd. (Kemp), à présenter des offres pour des billes de bois destinées à l’exportation par l’appelante. Nous sommes d’accord avec la décision du juge, principalement pour les motifs qu’il a exprimés.

 

[2]               Comme l’a affirmé le juge, la décision du ministre a été prise en vertu de la Liste des marchandises d’exportation contrôlée, édictée par règlement (DORS/89-202) sous le régime de la Loi sur les licences d’exportation et d’importation, L.R.C. 1985, ch. E-19, selon laquelle quiconque souhaite exporter des billes du Canada doit d’abord obtenir une licence d’exportation du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (le ministère).

 

[3]               Pour fournir des indications aux exportateurs, le ministère publie des « Avis aux exportateurs » qui exposent la marche à suivre pour demander différents types de licences ainsi que les critères dont le ministre tient normalement compte dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire. La politique générale prévoit la délivrance d’une licence d’exportation uniquement pour les billes provenant de terres fédérales de la Colombie-Britannique qui sont excédentaires par rapport aux besoins nationaux.

 

[4]               L’Avis aux exportateurs, no de série : 102 (l’Avis no 102) présente une importance particulière pour le présent appel. Suivant cet avis, l’exportateur, Timberlands en l’espèce, doit d’abord présenter une demande pour annoncer des billes de bois dans une liste bimensuelle fédérale (la liste) en vue de leur vente sur le marché intérieur, à la suite de quoi les acheteurs canadiens potentiels sont invités à faire une offre d’achat écrite. Si l’offre d’achat répond à certains critères, notamment si le prix correspond à la juste valeur marchande au pays, il est recommandé au ministre que les billes soient considérées comme n’étant pas excédentaires par rapport aux besoins nationaux. Kemp a été autorisée à faire des offres d’achat pour les billes annoncées dans la liste, dont les billes de Timberlands, qui, à l’époque, ne pouvaient pas être considérées comme excédentaires par rapport aux besoins nationaux et que l’appelante ne pouvait pas vendre à un prix supérieur sur le marché international.

 

[5]               En règle générale, en ce qui touche le calcul de l’excédent, le ministère n’étudie que les offres présentées par les particuliers, les personnes ou les entreprises directement intéressés au traitement des billes (voir l’alinéa 4.3 c) de l’Avis 102). Kemp ne fait pas partie de cette catégorie. Il s’agit d’une société qui effectue du découpage sur commande, et à qui le ministère était « disposé à reconnaître […], à titre provisoire, le statut de partie intéressée au traitement de billes » en attendant que Kemp s’acquitte de son obligation de « présenter de nouveaux éléments de preuve attestant ses activités de traitement pour que son statut de partie intéressée soit confirmé » (décision du ministre, 14 février 2008).

 

[6]               Timberlands a contesté devant la Cour fédérale la décision du ministre, tant sur le fond que sur le plan procédural. La société a allégué que la décision du ministre d’inclure Kemp dans le bassin des soumissionnaires admissibles a une incidence sur ses droits de propriété et qu’elle est déraisonnable parce qu’elle est fondée sur une conclusion de fait qui n’est pas étayée par la preuve. Timberlands a également allégué que le ministère a enfreint les principes d’équité procédurale en modifiant les règles relatives aux soumissionnaires potentiels sans consulter la société et en refusant de fournir des motifs écrits à l’appui de sa décision. Le ministre, quant à lui, a contesté ces arguments ainsi que la qualité de l’appelante pour demander le contrôle judiciaire de sa décision concernant Kemp.

 

[7]               En ce qui a trait à la question de la qualité pour agir, le juge a tout d’abord indiqué « qu’une partie qui n’est touchée qu’au sens commercial par une décision ministérielle n’a pas qualité pour solliciter le contrôle judiciaire de cette décision : voir, par exemple, Rothmans of Pall Mall Canada Ltd. c. Canada (Ministre du Revenu national), [1976] 2 C.F. 500 (C.A.F.); Merck Frosst Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé et du Bien‑être social) (1988), 146 F.T.R. 249 (C.A.F.); Aventis Pharma Inc. c. Canada (Ministre de la Santé), 2005 CF 1396 » (motifs de l’ordonnance, au paragraphe 18). Ensuite, il a conclu que l’appelante « cherche […] tout simplement à protéger l’avantage ou l’intérêt commercial apparent que lui procure la possibilité d’exporter des billes plutôt que d’avoir à les vendre sur le marché intérieur, en tentant d’empêcher l’inclusion de Kemp dans le bassin d’acheteurs de billes admissibles au niveau national » (motifs de l’ordonnance, au paragraphe 20).

 

[8]               Bien qu’il ait pu s’arrêter là, le juge a ensuite examiné, par prudence, les motifs sur lesquels s’appuyait la demande de Timberlands. Il a conclu, entre autres, que la décision du ministre était raisonnable, en ce sens qu’elle appartenait aux issues possibles acceptables (motifs de l’ordonnance, au paragraphe 26).

 

[9]               Nous ne sommes pas convaincus que le juge a commis une erreur de droit ou quelque autre erreur justifiant l’intervention de notre Cour. Le juge a bien cerné les questions en litige et les principes juridiques en cause. Il lui était loisible de conclure, comme il l’a fait, sur la foi de la preuve au dossier.  

 

[10]           Par conséquent, le présent appel sera rejeté avec dépens.

 

 

 

« Johanne Trudel »

j.c.a.

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Semra Denise Omer

 

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            A-171-09

 

INTITULÉ :                                                                           Island Timberlands LP c. Le Ministre des Affaires étrangères et Kemp Forest Products Ltd.

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     Ottawa (Ontario)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   Le 2 décembre 2009

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                       (LES JUGES SHARLOW, RYER ET TRUDEL)

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :                               LA JUGE TRUDEL

 

 

COMPARUTIONS :

 

Geoff R. Hall

Orlando Silva

POUR L’APPELANTE

 

 

Patrick Bendin

POUR LES INTIMÉS

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

McCarthy Tétrault LLP

Toronto (Ontario)

POUR L’APPELANTE

 

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LES INTIMÉS

 

 

 

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