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Cour d’appel fédérale

  CANADA

Federal Court of Appeal

 

 

Date : 20091020

Dossier : A-200-09

Référence : 2009 CAF 303

 

CORAM :      LE JUGE NOËL

                        LE JUGE PELLETIER

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

demandeur

et

PATRICK JOLIN

défendeur

 

 

 

 

Audience tenue à Montréal (Québec), le 20 octobre 2009.

Jugement rendu à l’audience à Montréal (Québec), le 20 octobre 2009.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                                   LE JUGE PELLETIER

 


Cour d’appel fédérale

  CANADA

Federal Court of Appeal

 

 

Date : 20091020

Dossier : A-200-09

Référence : 2009 CAF 303

 

CORAM :      LE JUGE NOËL

                        LE JUGE PELLETIER

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

demandeur

et

PATRICK JOLIN

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Montréal (Québec), le 20 octobre 2009)

LE JUGE PELLETIER

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision rendue par le juge Maximilien Polak siégeant en qualité de juge-arbitre rejetant l’appel de la Commission de l’assurance-emploi au motif que le conseil arbitral n’avait commis aucune erreur en statuant que la conduite de monsieur Jolin en quittant son lieu de travail comme il l’a fait le 22 avril 2008 n’était pas de l’inconduite au sens de l’article 30 de la Loi sur l’assurance-emploi, L.C. 1996, ch. 23.

 

[2]               Le défendeur, monsieur Jolin, n’a pas produit de mémoire et n’était pas présent à l’audition.

 

[3]               Les faits se résument en quelques lignes. Monsieur Jolin était un employé chez Supra formules d’affaires inc. Lorsqu’il se présenta au travail à 5 h 25 le 22 avril 2008, la presse sur laquelle il devait travailler était brisée et il n’y avait aucune pièce de rechange disponible. Au lieu d’attendre l’arrivée de son superviseur à 7 h 45, il laissa un message pour son employeur lui disant qu’il rentrait chez lui parce qu’il était en colère et ne se sentait pas bien. L’employeur l’appela vers 10 h et lui communiqua son désaccord avec sa décision de quitter les lieux de travail. Monsieur Jolin s’attendait a être suspendu, mais lorsque l’employeur l’a rappelé vers 17 h, c’était pour le congédier.

 

[4]               Monsieur Jolin a fait une demande de prestations et une période de prestations a été établie à son profit. Par la suite, la Commission l’avisa qu’elle ne pouvait lui payer les prestations parce qu’il avait perdu son emploi en raison de son inconduite. Monsieur Jolin en appela de cette décision au conseil arbitral. Le conseil arbitral a accueilli son appel pour le motif que le comportement qu’on lui reprochait n’était pas un manquement sérieux permettant à monsieur Jolin de croire qu’il pourrait être congédié.

 

[5]               Le juge-arbitre a rejeté l’appel de la Commission, disant qu’il avait de la difficulté à accepter ou à comprendre le « refus de travail » comme motif de congédiement d’un employé avec 10 ans de service. Selon lui, le conseil arbitral n’a commis aucune erreur de fait ou de droit.

 

[6]               L’application de la définition d’inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi aux faits en l’espèce est une question mixte de fait et de droit qui est révisable selon la norme de la décision raisonnable. D’autre part, le conseil arbitral doit respecter les limites de sa compétence et toute décision qui excède ces limites est révisable selon la norme de la décision correcte. Si le conseil arbitral outrepasse sa compétence, le juge-arbitre doit intervenir pour corriger cette erreur de droit.

 

[7]               Dans l’arrêt Canada (procureure générale) c. Marion, [2002] A.C.F. no 711, cette Cour, sous la plume du juge Létourneau, souligne que le conseil n’est pas habilité à déterminer si « la sévérité de la sanction imposée par l’employeur était justifiée ou non ou si le geste de l’employé constituait un motif valable de congédiement ». La question sur laquelle le conseil doit se pencher est celle de savoir si le comportement du prestataire est de l’inconduite au sens de la Loi.

 

[8]               En l’instance, le conseil arbitral a conclu que le comportement de monsieur Jolin ne justifiait pas son congédiement. Il était d’avis que le fait de quitter les lieux de travail ne constituait pas de l’insubordination, que monsieur Jolin n’avait pas à retirer la pièce défectueuse comme le soutenait l’employeur parce qu’il y avait des mécaniciens affectés à cette fonction, et que monsieur Jolin n’avait aucune raison de croire qu’il pouvait être congédié à cause de son départ non autorisé des lieux de travail.

 

[9]               Le juge-arbitre, pour sa part, ne pouvait accepter qu’un employé avec 10 ans de service puisse être congédié pour un « refus de travailler ».

 

[10]           Dans l’arrêt Mishibinijima c. Canada (Procureur généra), [2007] A.C.F. no 169, au paragraphe 14, cette Cour s’est prononcée sur le sens du mot « inconduite » aux fins de la Loi :

Il y a donc inconduite lorsque la conduite du prestataire est délibérée, c’est-à-dire que les actes qui ont mené au congédiement sont conscients, voulus ou intentionnels.  Autrement dit, il y a inconduite lorsque le prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite était de nature à entraver l’exécution de ses obligations envers son employeur et que, de ce fait, il était réellement possible qu’il soit congédié.

 

 

[11]           En l’instance, il ne peut faire de doute que la conduite du prestataire était délibérée et que le prestataire était conscient que ce comportement pouvait avoir des conséquences disciplinaires sérieuses. De fait, il s’attendait à recevoir une suspension. Ce n’est pas parce que la sanction disciplinaire s’avère plus sévère que celle prévue par le prestataire que son comportement n’est pas de l’inconduite.

 

[12]           Le conseil arbitral a dépassé sa compétence en statuant sur la justification du congédiement du prestataire, erreur que le juge-arbitre se devait de corriger. En conséquence, la demande de contrôle judiciaire sera accueillie, la décision du juge-arbitre sera annulée et l’affaire sera retournée au juge-arbitre en chef ou à la personne qu’il désignera, pour qu’elle soit décidée de nouveau en tenant pour acquis que monsieur Jolin doit être exclu du bénéfice des prestations en raison de son inconduite au sens de l’article 30 de la Loi sur l’assurance-emploi.

 

 

« J.D. Denis Pelletier »

j.c.a.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            A-200-09

 

 

INTITULÉ :                                                                           LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA  c. PATRICK JOLIN

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     Montréal (Québec)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   le 20 octobre 2009

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                       LE JUGE NOËL

                                                                                                LE JUGE PELLETIER

                                                                                                LA JUGE TRUDEL

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE :                                        LE JUGE PELLETIER

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Pauline Leroux

Chantal Labonté

POUR LE DEMANDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur general du Canada

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Véronique Coutin

St-Alphonse-de-Granby (Québec)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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