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Date : 20090612

Dossiers : A-557-07

A-556-07

 

Référence : 2009 CAF 188

 

CORAM :      LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LE JUGE NADON

                        LE JUGE BLAIS

 

ENTRE :

A-557-07

ROGER ST-FORT

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

 

A-556-07

ANTONINE ST-FORT

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

 

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 3 juin 2009.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 12 juin 2009.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                       LE JUGE LÉTOURNEAU

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                            LE JUGE NADON

LE JUGE BLAIS


Date : 200906012

Dossiers : A-557-07

A-556-07

 

Référence : 2009 CAF 188

 

CORAM :      LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LE JUGE NADON

                        LE JUGE BLAIS

 

ENTRE :

A-557-07

ROGER ST-FORT

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

 

A-556-07

ANTONINE ST-FORT

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

LE JUGE LÉTOURNEAU

 

La question en litige

[1]               Nous sommes saisis de deux appels réunis pour fins de procédure et d’audition par une ordonnance de notre collègue, Madame la juge Trudel, rendue le 26 février 2008.

[2]               Ils soulèvent comme question le bien-fondé de la décision du juge Archambault de la Cour canadienne de l’impôt (juge) par laquelle il a conclu que, en application de l’article 160 de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, c. 1 (5e suppl.) (Loi), les appelants étaient solidairement responsables du paiement d’une partie de la dette fiscale de leur fils.

 

[3]               Cette ultime conclusion du juge repose sur le fait qu’il y eut un transfert de biens entre personnes ayant entre elles un lien de dépendance.

 

[4]               Pour les raisons qui suivent, je suis d’avis que les deux appels doivent être rejetés.

 

La législation pertinente

 

[5]               Outre les articles 160 et 250 de la Loi, la résolution du présent litige requiert une prise en considération de l’article 476 du Code de procédure civile du Québec, L.R.Q. c. C-25, ainsi que des articles 1651, 1654, 2781, 2941 et 2944 du Code civil du Québec, L.Q., 1991, c. 64.

 

[6]               Ces articles se lisent :

            Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, c. 1 (5e suppl.)

Transfert de biens entre personnes ayant un lien de dépendance

160. (1) Lorsqu’une personne a, depuis le 1er mai 1951, transféré des biens, directement ou indirectement, au moyen d’une fiducie ou de toute autre façon à l’une des personnes suivantes :

a) son époux ou conjoint de fait ou une personne devenue depuis son époux ou conjoint de fait;

b) une personne qui était âgée de moins de 18 ans;

c) une personne avec laquelle elle avait un lien de dépendance,

les règles suivantes s’appliquent :

d) le bénéficiaire et l’auteur du transfert sont solidairement responsables du paiement d’une partie de l’impôt de l’auteur du transfert en vertu de la présente partie pour chaque année d’imposition égale à l’excédent de l’impôt pour l’année sur ce que cet impôt aurait été sans l’application des articles 74.1 à 75.1 de la présente loi et de l’article 74 de la Loi de l’impôt sur le revenu, chapitre 148 des Statuts revisés du Canada de 1952, à l’égard de tout revenu tiré des biens ainsi transférés ou des biens y substitués ou à l’égard de tout gain tiré de la disposition de tels biens;

e) le bénéficiaire et l’auteur du transfert sont solidairement responsables du paiement en vertu de la présente loi d’un montant égal au moins élevé des montants suivants :

(i) l’excédent éventuel de la juste valeur marchande des biens au moment du transfert sur la juste valeur marchande à ce moment de la contrepartie donnée pour le bien,

Tax liability re property transferred not at arm’s length

160. (1) Where a person has, on or after May 1, 1951, transferred property, either directly or indirectly, by means of a trust or by any other means whatever, to

(a) the person’s spouse or common-law partner or a person who has since become the person’s spouse or common- law partner,

(b) a person who was under 18 years of age, or

(c) a person with whom the person was not dealing at arm’s length,

the following rules apply:

(d) the transferee and transferor are jointly and severally liable to pay a part of the transferor’s tax under this Part for each taxation year equal to the amount by which the tax for the year is greater than it would have been if it were not for the operation of sections 74.1 to 75.1 of this Act and section 74 of the Income Tax Act, chapter 148 of the Revised Statutes of Canada, 1952, in respect of any income from, or gain from the disposition of, the property so transferred or property substituted therefor, and

(e) the transferee and transferor are jointly and severally liable to pay under this Act an amount equal to the lesser of

(i) the amount, if any, by which the fair market value of the property at the time it was transferred exceeds the fair market value at that time of the consideration given for the property, and

 

 

 

 

 

Lien de dépendance

251. (1) Pour l’application de la présente loi :

a) des personnes liées sont réputées avoir entre elles un lien de dépendance;

[…]

 

Définition de « personnes liées »

(2) Pour l’application de la présente loi, sont des « personnes liées » ou des personnes liées entre elles :

a) des particuliers unis par les liens du sang, du mariage, de l’union de fait ou de l’adoption;

 

Arm’s length

251. (1) For the purposes of this Act,

(a) related persons shall be deemed not to deal with each other at arm’s length;

[…]

 

Definition of “related persons”

(2) For the purpose of this Act, “related persons”, or persons related to each other, are

(a) individuals connected by blood relationship, marriage or common-law partnership or adoption;

 

[Nous soulignons.]

 

            Code de procédure civile, L.R.Q. c. C-25

476.  Une partie peut renoncer aux droits qui lui résultent d'un jugement rendu en sa faveur, en produisant au greffe un désistement total ou partiel, signé d'elle-même ou de son fondé de procuration spéciale. Le désistement total accepté par la partie adverse a pour effet de remettre la cause dans l'état où elle était immédiatement avant le jugement.

476.  A party may renounce rights arising from a judgment rendered in his favour, by filing in the office of the court a total or partial renunciation signed by him or by his special attorney. A total renunciation accepted by the opposite party places the case in the position it was in immediately before the judgment.

 

 

            Code civil du Québec, L.Q., 1991, c. 64.

1651.  La personne qui paie à la place du débiteur peut être subrogée dans les droits du créancier.

 

Elle n'a pas plus de droits que le subrogeant.

 

 

1654.  La subrogation consentie par le créancier doit l'être en même temps qu'il reçoit le paiement. Elle s'opère sans le consentement du débiteur, malgré toute stipulation contraire.

 

 

2781.  Lorsqu'il n'a pas été remédié au défaut ou que le paiement n'a pas été fait dans le délai imparti pour délaisser, le créancier prend le bien en paiement par l'effet du jugement en délaissement, ou par un acte volontairement consenti par celui contre qui le droit hypothécaire est exercé, et accepté par le créancier, si les créanciers subséquents ou le débiteur n'ont pas exigé qu'il procède à la vente.

 

Le jugement en délaissement ou l'acte volontairement consenti et accepté constitue le titre de propriété du créancier.

 

 

 

2941.  La publicité des droits les rend opposables aux tiers, établit leur rang et, lorsque la loi le prévoit, leur donne effet.

 

Entre les parties, les droits produisent leurs effets, encore qu'ils ne soient pas publiés, sauf disposition expresse de la loi.

 

 

 

2944.  L'inscription d'un droit sur le registre des droits personnels et réels mobiliers ou sur le registre foncier emporte, à l'égard de tous, présomption simple de l'existence de ce droit.

 

1651.  A person who pays in the place of a debtor may be subrogated to the rights of the creditor.

 

He does not have more rights than the subrogating creditor.

 

 

1654.  Subrogation may be made by the creditor only at the same time as he receives payment. It takes effect without the consent of the debtor, notwithstanding any stipulation to the contrary.

 

 

2781.  Where the default has not been remedied or the payment has not been made in the time allotted for surrender, the creditor takes the property in payment by the effect of the judgment of surrender, or of a deed voluntarily made by the person against whom the hypothecary right is exercised, and accepted by the creditor, if neither the subsequent creditors nor the debtor have required him to proceed with the sale.

 

The judgment of surrender or the deed voluntarily made and accepted constitutes the creditor's title of ownership.

 

 

2941.  Publication of rights allows them to be set up against third persons, establishes their rank and, where the law so provides, gives them effect.

 

Rights produce their effects between the parties even before publication, unless the law expressly provides otherwise.

 

 

2944.  Registration of a right in the register of personal and movable real rights or the land register carries, in respect of all persons, simple presumption of the existence of that right.

 

Les faits à l’origine du transfert et des présentes procédures

 

[7]               Le 2 juin 1992, le fils des appelants, M. René St-Fort, et sa conjointe font l’acquisition d’une maison à Chelsea, Québec. Le prix d’achat est de 250,000$. Une mise de fonds de 50,000$ est versée au vendeur. La balance du prix de vente est financée par le biais de deux hypothèques. Celle de premier rang s’élevait à 150,000$ et fut consentie par la Banque nationale du Canada (Banque). Celle de second rang était détenue par la Banque de Hong Kong pour un montant de 50,000$. Comme cette seconde hypothèque fut réglée, il n’en sera plus question dans les présents motifs.

 

[8]               En décembre de la même année, la conjointe de M. René St-Fort lui cède, par acte notarié dûment enregistré au Bureau d’enregistrement de Gatineau, sa part dans l’immeuble : voir au dossier des appelants l’onglet 10.

 

[9]               À compter d’avril 1996, M. René St-Fort cesse de faire les remboursements mensuels de capital et intérêts auprès de la Banque.

 

[10]           Le 18 septembre 1996, la Banque fait valoir ses droits de créancier. Elle signifie à M. René St-Fort et à sa conjointe un préavis d’exercice d’un droit hypothécaire selon l’article 2757 du Code civil du Québec : ibidem à l’onglet 11.

 

[11]           Comme aucune suite n’est donnée par les débiteurs à ce préavis, la Banque dépose en Cour supérieure une requête en délaissement forcé et pour prise en paiement : ibidem. La requête qui se fonde sur l’article 795 du Code de procédure civile est déposée le 13 décembre 1996.

 

[12]           Par jugement du 10 janvier 1997, la Cour supérieure du district de Hull ordonne aux débiteurs de délaisser volontairement l’immeuble, sans quoi la Banque sera mise en possession de l’immeuble par le truchement d’un bref de possession : ibidem, à l’onglet 12.

 

[13]           Le jugement déclare également la Banque seule et unique propriétaire de l’immeuble à compter de l’inscription du préavis ci-auparavant mentionné faite le 27 septembre 1996. Ce jugement en faveur de la Banque n’est pas inscrit au registre foncier : ibidem, à l’onglet 18 où l’on retrouve l’index des immeubles.

 

[14]           Le 31 janvier 1997, suite à des discussions avec la Banque et ses procureurs, les appelants enregistrent une hypothèque de 130,000$ sur l’immeuble en faveur de la Caisse populaire St-Jean-Bosco de Hull : ibidem, à l’onglet 13.

 

[15]           Subséquemment, soit plus précisément le 13 février 1997, la Banque se désiste du jugement du 10 janvier 1997 en sa faveur : ibidem, à l’onglet 14.

 

[16]           Ce désistement est suivi d’une subrogation par la Banque, en faveur des appelants, de tous les droits qu’elle détient relativement aux recours hypothécaires découlant du défaut de M. René St-Fort de s’acquitter de sa dette hypothécaire envers la Banque. La subrogation se fait par acte notarié intervenu le 1er avril 1997, moyennant le paiement à la Banque d’une somme de 142,016.52$ : ibidem, à l’onglet 15. L’acte notarié est publié le 7 avril 1997 à la circonscription foncière de Gatineau : ibidem.

 

[17]           Toujours dans le même dossier en Cour supérieure, la Banque et les appelants, représentés par le même procureur, font une comparution en reprise d’instance le 27 mai 1997. La Banque s’y décrit comme partie demanderesse originale, et les appelants, comme demandeurs en reprise d’instance : ibidem, à l’onglet 16.

 

[18]           Le dossier ayant repris vie, la comparution en reprise d’instance est suivie d’un avis indiquant que la requête en délaissement forcé et pour prise en paiement, laquelle avait donné lieu au jugement du 10 janvier 1997 dont il y eut désistement, sera présentée à nouveau à la Cour supérieure pour adjudication en date du 23 juin 1997 : ibidem.

 

[19]           Le 27 juin 1997 intervient dans le dossier un nouveau jugement de la Cour supérieure qui ordonne le délaissement de l’immeuble et en octroie la possession aux appelants. En outre, il déclare que les appelants ont pris l’immeuble en paiement et qu’ils sont les seuls et uniques propriétaires de celui-ci, rétroactivement à compter de l’inscription du préavis faite le 27 septembre 1996.

 

[20]           M. René St-Fort n’a jamais délaissé l’immeuble qu’il occupe depuis son achat en juin 1992. En date du 7 avril 1997, la juste valeur marchande de celui-ci s’élevait à 220,000$. La dette de M. René St-Fort envers le ministère du Revenu national se chiffrait à 365,238.69$.

 

[21]           Le 15 novembre 2001, le ministre du Revenu national émet une cotisation aux appelants pour une somme de 77,983.48$, représentant la différence entre la juste valeur marchande de la maison, soit 220,000$ et le montant qu’ils ont payé en contrepartie pour la subrogation aux droits de la Banque, soit 142,016.52$. La cotisation avait pour fondement le paragraphe 160(1) de la Loi.

 

[22]           Les appelants ont interjeté appel de cette cotisation à la Cour canadienne de l’impôt. Jugement et motifs furent prononcés oralement à l’audience le 5 novembre 2007, mais les motifs du jugement alors rendu furent par la suite « modifiés pour plus de clarté et de précision », soit le 21 janvier 2008. Ils concluaient au rejet des appels. De là la demande des appelants que la décision de la Cour canadienne de l’impôt soit infirmée.

 

Analyse de la décision du juge et des prétentions des parties

 

a)         L’existence d’un lien de dépendance

 

[23]           Le lien de filiation entre le débiteur fiscal, M. René St-Fort, et les appelants satisfait la définition de « personnes liées » ainsi que la présomption de dépendance de l’article 251 de la Loi. Ce n’est pas à ce niveau que se situe l’objection des appelants. Ils soutiennent plutôt qu’ils ont acquis l’immeuble de la Banque et non de leur fils, de sorte qu’il n’y a pas eu de transfert entre personnes liées au sens de la Loi.

 

[24]           Les appelants ne sont pas représentés par avocat. Avec respect je crois qu’ils se méprennent quant à l’effet juridique des diverses transactions qui ont mené à leur droit de propriété sur l’immeuble, ou qu’ils sont guidés par une mauvaise interprétation des conséquences de ces transactions.

 

b)         La validité du désistement par la Banque

 

[25]           Les appelants contestent les conclusions du juge selon lesquelles la Banque pouvait, en vertu de l’article 476 du Code de procédure civile, renoncer aux droits que lui conférait le jugement du 10 janvier 1997, il y eu désistement valable de ce jugement et ce désistement a eu pour effet de remettre la cause dans l’état où elle était avant le jugement du 10 janvier 1997 : voir le paragraphe 11 des motifs de la décision du juge. Selon eux, le désistement n’est pas valable parce qu’il n’est pas signé par la Banque. En outre, il ne peut avoir l’effet que lui reconnaît le juge parce que M. René St-Fort et sa conjointe n’ont jamais accepté le désistement total de la Banque.

 

[26]           Il ne fait pas de doute, à mon avis, qu’il y a eu de la part de la Banque nationale un désistement total valable du jugement du 10 janvier 1997. Il est clair que le désistement, signé par les procureurs représentant la Banque, « constitue en droit et en fait un véritable désistement du jugement » puisque la Banque « a renoncé à l’avantage qui lui en résultait » : voir le paragraphe 21 des motifs de la décision du juge Dalphond dans l’affaire Vernet c. Forage expert Québec inc., 2007 J.E. 2007-1095 (C.A.Q.).

 

[27]           Le comportement subséquent de la Banque, sans l’ombre d’un doute, confirme la validité du mandat confié à ses procureurs de préparer et de produire au dossier un désistement. Je suis d’accord avec le juge Dalphond que « nous n’avons pas à aller plus loin et tenter de nous immiscer dans la relation entre l’avocat et sa cliente » : ibidem, voir aussi Assurance-vie Desjardins inc c. Succession de Richard Proulx, [1995] R.D.J. 479 (C.A.Q.).

 

[28]           Ceci m’amène à déterminer s’il y a eu acceptation du désistement par les deux débiteurs de la Banque, M. René St-Fort et sa conjointe.

 

c)         L’acceptation du désistement par les deux débiteurs de la Banque

 

[29]           Les appelants soutiennent que le désistement n’est pas opposable à leur fils René St-Fort parce que ce dernier ne l’a pas signé. En vertu de l’article 476 du Code de procédure civile, un désistement n’a pas à être signé par la partie adverse : il suffit qu’il soit accepté par celle-ci. Si la signature peut constituer la meilleure preuve d’une acceptation, elle n’est cependant pas le seul moyen d’établir ce fait. L’acceptation peut aussi se prouver par le comportement des parties, incluant celui de la partie adverse.

 

[30]           Dans l’affaire Vernet, précitée, le juge Dalphond a, de l’entente de déroulement de l’instance signée par les parties pour reprendre celle-ci, inféré l’acceptation du désistement du jugement : voir les paragraphes 10 et 21 des motifs de sa décision où il conclut qu’il est « clair que les parties adverses ont accepté ce désistement total ».

 

[31]           Dans le cas qui nous occupe, il n’existe aucune preuve que les débiteurs hypothécaires se soient opposés au désistement total par la Banque du jugement du 10 janvier 1997. Au contraire, en fait, la preuve suivante au dossier permet d’inférer l’acceptation des débiteurs hypothécaires.

 

[32]           Tout d’abord, les deux débiteurs étaient parties intimées à l’acte de désistement : voir au dossier des appelants l’onglet 14. Ils étaient également parties défenderesses dans la comparution en reprise d’instance en Cour supérieure : ibidem, à l’onglet 16. De même, étaient-ils parties défenderesses à la reprise de la requête en délaissement forcé et pour prise en paiement présentée à nouveau à la Cour supérieure en conséquence du désistement du jugement du 10 janvier 1997 : ibidem. Enfin, les deux débiteurs avaient statut de parties défenderesses dans le jugement du 27 juin 1997, rendu suite au désistement et à la reprise d’instance : ibidem, à l’onglet 17.

 

[33]           Ce qui à mon sens est significatif dans cette série d’événements débutant par l’acte de désistement, c’est qu’en aucun temps les deux débiteurs n’ont manifesté quelqu’opposition que ce soit à l’une quelconque ou l’autre des procédures consécutives au désistement et lui donnant effet. Dans les circonstances, il n’est certes pas déraisonnable, et encore moins erroné, de conclure que les deux débiteurs hypothécaires ont accepté le désistement.

 

[34]           Quoiqu’il en soit, selon l’interprétation de l’article 476 du Code de procédure civile faite par la Cour d’appel du Québec, « le désistement est essentiellement un acte unilatéral ». Et le bénéficiaire d’un jugement peut s’en désister unilatéralement, sans le concours de l’autre partie, si le jugement ne confère pas en soi un ou des avantages à cette autre partie : voir l’arrêt 2632-8419 Québec Inc. c. 3170578 Canada Inc., J.E. 97-1817, aux paragraphes 6 à 10; voir aussi 118372 Canada inc. c. Groupe Tecnum inc., 2007 QCCS ; 4283; Caisse populaire Desjardins Saint-Jérôme (reprise d’instance) c. 3099-1947 Québec inc. (reprise d’instance de), [2002] J.Q. no 5467.

 

[35]           Dans la présente instance, le jugement du 10 janvier 1997, qui fut l’objet du désistement, ne conférait aucun avantage aux deux débiteurs hypothécaires. Il pouvait donc faire l’objet d’un acte de désistement unilatéral.

 

d)         La capacité des appelants d’invoquer l’invalidité du désistement

 

[36]           Bien qu’il ne soit pas nécessaire de décider la question pour solutionner le présent litige, il y a certes lieu de s’interroger sérieusement sur la capacité des appelants de contester la validité d’un désistement d’un jugement dans une procédure à laquelle ils n’étaient pas parties, lorsqu’en plus, ils ont été les bénéficiaires de ce désistement et qu’ils y ont en tout temps acquiescé.

 

[37]           En rétrospective, il eut probablement été préférable pour les appelants de procéder d’une manière autre que celle à laquelle ils ont acquiescé pour acquérir l’immeuble.

 

e)         L’effet juridique du désistement

 

[38]           Comme le prévoit l’article 476 du Code de procédure civile, l’effet du désistement total fut de remettre la cause dans l’état où elle était immédiatement avant le jugement. C’est ce qui explique la comparution en reprise d’instance, la présentation pour une nouvelle audition de la requête en délaissement forcé et pour prise en paiement, ainsi que le jugement du 27 juin 1997 octroyant aux appelants (qui étaient la partie requérante en reprise d’instance) le droit de propriété sur l’immeuble.

 

f)          L’effet juridique de la subrogation des appelants dans les droits du créancier hypothécaire

 

 

[39]           Tel que déjà mentionné, les appelants soutiennent qu’ils ont acquis l’immeuble de la Banque et non de leur fils. Mais cette prétention n’est pas, au plan juridique, soutenue par la preuve au dossier.

 

[40]           L’acquisition de l’immeuble par les appelants s’est faite par la voie d’une prise en paiement rendue possible par l’acte de subrogation du 1er avril 1997. Au terme de cet acte, les appelants ont acquis les droits de créance de la Banque sur les débiteurs hypothécaires et plus spécifiquement celui d’exercer « le recours hypothécaire de prise en paiement constitué le 13 décembre 1996 sous le no 550 05 004282961 des dossiers de la Cour supérieur du district de Hull » : voir l’acte de subrogation, dossier des appelants, à la page 92. Ils n’ont pas plus de droits que le subrogeant : voir l’article 1651, du Code civil du Québec. Dans le cas présent, le droit du subrogeant était de prendre en paiement l’immeuble à l’égard duquel les débiteurs hypothécaires étaient en défaut : ibidem, article 2781.

 

[41]           La prise en paiement par les appelants fut confirmée par le jugement du 27 juin 1997 avec, en ce qui a trait au droit de propriété des appelants sur l’immeuble, un effet rétroactif au 27 septembre 1996 alors que le fils des appelants en était le possesseur et le propriétaire. Le transfert de l’immeuble ne s’est donc pas fait juridiquement de la Banque aux appelants, comme cela aurait pu être le cas s’il y avait eu vente par la Banque, mais bien par prise en paiement, autorisée par la Cour supérieure, entre les mains de M. René St-Fort, à ce moment-là débiteur hypothécaire de la Banque et débiteur fiscal du ministère du Revenu national.

 

Conclusion

 

[42]           En conclusion, je suis d’avis que le juge n’a pas eu tort de conclure que les conditions d’application de l’article 160 de la Loi étaient rencontrées et, en conséquence, de rejeter les appels des appelants.

 

[43]           Pour ces motifs, je rejetterais les appels, mais avec un seul jeu de dépens payables en part égale par les appelants. Copie des présents motifs ainsi qu’un autre original du présent jugement seront déposés dans le dossier A-556-07.

 

 

« Gilles Létourneau »

j.c.a.

 

 

« Je suis d’accord

            M. Nadon, j.c.a. »

 

« Je suis d’accord

            Pierre Blais, j.c.a. »

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            A-557-07

 

Appel d’une décision de l’honorable Archambault, juge de la Cour canadienne de l’impôt le 5 novembre 2007, 2008CCI23.

 

 

INTITULÉ :                                                                           ROGER ST-FORT c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   Le 3 juin 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                LE JUGE LÉTOURNEAU

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                             LE JUGE NADON

                                                                                                LE JUGE BLAIS

                                                                                               

 

DATE DES MOTIFS :                                                          Le 12 juin 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

Roger St-Fort

POUR L’APPELANT

 

Marie-Ève Aubry

Catherine Letellier de St-Just

POUR L’INTIMÉE

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR L’INTIMÉE

 

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            A-556-07

 

Appel d’une décision de l’honorable Archambault, juge de la Cour canadienne de l’impôt le 5 novembre 2007, 2008CCI23.

 

 

INTITULÉ :                                                                           ANTONINE ST-FORT c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   Le 3 juin 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                LE JUGE LÉTOURNEAU

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                             LE JUGE NADON

                                                                                                LE JUGE BLAIS

                                                                                               

 

DATE DES MOTIFS :                                                          Le 12 juin 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

Roger St-Fort

POUR L’APPELANTE

 

Marie-Ève Aubry

Catherine Letellier de St-Just

POUR L’INTIMÉE

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR L’INTIMÉE

 

 

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