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Date : 20081023

Dossier : A-366-08

Référence : 2008 CAF 323

 

[TRADUCTION FRANÇAISE]

 

En présence de monsieur le juge Pelletier

 

ENTRE :

KERSHAW NANAVATY

appelant

et

MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

intimé

 

 

 

Requête jugée sur dossier sans comparution des parties.

 

Ordonnance prononcée à Ottawa (Ontario), le 23 octobre 2008.

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE PAR :                                                          LE JUGE PELLETIER

 


Date :

Dossier : A-366-08

Référence : 2008 CAF 323

 

[TRADUCTION FRANÇAISE]

 

En présence de monsieur le juge Pelletier

 

ENTRE :

KERSHAW NANAVATY

appelant

et

MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

intimé

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

LE JUGE PELLETIER

[1]               Il s’agit d’une requête en vue d’une ordonnance établissant le contenu du dossier d’appel dans un appel d’une ordonnance rejetant une demande de prorogation du délai pour introduire une demande de contrôle judiciaire.

 

[2]               La présente requête est rendue nécessaire par l’insistance de l’appelant/demandeur selon laquelle les documents dont n’était pas saisi le juge des requêtes devraient être inclus dans le dossier d’appel. L’avocat du demandeur allègue que les documents n’étaient pas présentés au juge des requêtes, car les membres du personnel du greffe ont illégalement refusé d’accepter leur dépôt. L’avocat poursuit en affirmant que les documents en question abordent la question du bien-fondé de la demande principale et, par conséquent, ils sont pertinents à l’issue de l’appel.

[3]               Il a été jugé que l’appelant, dans le cadre des procédures administratives, a omis de déclarer des biens au moment de les importer au Canada. Il cherche à contester cette conclusion et à recouvrer le montant confisqué en raison du défaut de déclaration. Malgré les modalités des articles 131 et 133 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985, ch. 1 (2e suppl.), ainsi que des indications claires quant à la procédure à suivre dans la lettre du délégué du ministre, datée du 21 février 2008, l’avocat a tenté de contester la conclusion selon laquelle il y avait eu une contravention et de recouvrer le montant confisqué pour obtenir la libération des biens par voie d’action devant la Cour fédérale. Lorsque la Couronne a plaidé dans sa défense que le montant confisqué pouvait uniquement être recouvré par voie de demande de contrôle judiciaire, l’avocat du demandeur a tenté de lancer une demande de contrôle judiciaire, après que le délai pour ce fait a expiré. La chronologie des événements est décrite dans l’affidavit de Korrie Dang, l’assistante juridique de M. Winstanley, l’avocat de l’appelant :

e) Le 26 mai 2008, il [M. Winstanley] s’est personnellement présenté au greffe de la Cour fédérale à Vancouver, en C.-B., avec l’avis de demande de contrôle judiciaire nécessaire appuyé par l’affidavit de M. Nanavaty, souscrit le 22 mai 2008, et un avis de requête pour une prorogation du délai pour produire sa demande, appuyé par son affidavit, souscrit de manière similaire le 22 mai 2008.

 

f) À cette date, il a tenté de produire l’avis de demande et son affidavit à l’appui et l’avis de requête et son affidavit à l’appui; cependant, les membres du personnel du greffe l’ont informé que cela ne pouvait pas être fait avant d’avoir réussi à obtenir la réparation demandée par l’avis de requête. En conséquence, seul le dépôt de l’avis de requête et de son affidavit a été accepté par le personnel du greffe le 22 mai 2008.

 

 

[4]               Le juge des requêtes a rejeté la demande de prorogation du délai pour plusieurs motifs connexes. Le juge a fait remarquer que, puisque l’affidavit en appui de la requête de prorogation du délai était celui de l’avocat comparaissant aux fins de la requête et non celui du demandeur [traduction] « la Cour n’a pas présenté un portrait complet du point de vue du demandeur à l’égard de tous les facteurs pertinents à l’examen d’une prorogation du délai ». La Cour s’est fondée sur la jurisprudence de notre Cour voulant que l’affidavit à l’appui d’une requête en prorogation du délai doive être souscrit par le demandeur, qui peut être contre-interrogé.

 

[5]               La Cour a souligné que l’avocat du demandeur était conscient de la distinction entre l’action pour contester la conclusion d’une contravention avec la Loi et une demande de contrôle judiciaire afin d’annuler la décision de conserver les fonds payés, et confisqués, en vue d’obtenir la libération des biens. Le juge des requêtes a conclu ce qui suit :

[traduction]

 

8. Étant donné que le demandeur n’a pas produit son propre affidavit, la Cour ne peut pas dire si le défaut de produire à temps était le résultat de l’erreur de l’avocat, le point de vue de l’avocat concernant le caractère irrationnel du régime législatif, ou en quoi les actes de l’avocat sont liés aux propres actes, motifs et directives du demandeur à son avocat.

 

 

[6]               Pour ce motif, le juge des requêtes a rejeté la demande de prorogation du délai pour produire une demande de contrôle judiciaire.

 

[7]               Dans le cadre de la présente requête en vue de régler le contenu du dossier d’appel, l’avocat soutient que, s’il n’avait été de l’interprétation illégale des membres du personnel du greffe, le juge des requêtes aurait été saisi de l’avis de demande et de l’affidavit à l’appui, et ils devraient donc être portés à la connaissance de la Cour d’appel.

 

[8]               L’argument de l’avocat figure aux paragraphes 6 à 8 du mémoire de l’appelante, qui sont reproduits ci-dessous :

[traduction]

 

6. Si l’on examine le présent avis de requête (pièce « B » à l’affidavit de Korrie Dang [...]), on constatera qu’on lui a attribué le numéro de dossier « 08-T-23 ». En l’apparence, cette numérotation signifie qu’il s’agit « uniquement d’un dossier préliminaire, et non une instance réelle ».

 

7. La thèse de l’appelant est que cette pratique ne trouve aucun fondement dans les Règles; et, en fait, est inadéquate. Les articles 62 et 63 établissent clairement qu’une procédure comme celle que l’avocat de l’appelant tentait de produire le 26 mai 2008 peut uniquement être instruite au moyen d’un avis de demande. L’instance dont était saisie notre Cour d’appel a été instruite au moyen d’un avis de requête. Le fait de désigner une procédure instruite au moyen d’un avis de requête comme un « dépôt préliminaire » n’en fait pas une réalité. Ce tour de passe-passe administratif ne transforme pas un avis de requête en un avis de demande, car un avis de requête n’est pas et ne peut pas être un « acte d’introductif d’instance » au sens des Règles. En résumé, il n’y a simplement aucun motif qui sous-tend cette pratique du greffe.

 

8. Si les membres du personnel du greffe avaient respecté les articles 62 et 63 (et la pratique devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique), ils auraient été acceptés le dépôt de l’avis de demande de contrôle judiciaire et l’affidavit à l’appui de l’appelant; ensuite, dans le cadre de cette instance, ils auraient accepté le dépôt de la demande de prorogation du délai.

 

 

 

[9]               L’attaque de l’avocat à l’égard de la pratique des membres du personnel du greffe omet de mentionner le paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales L.R.C. 1985, ch. F-7, qui dispose comme suit :

18.1 (2) Les demandes de contrôle judiciaire sont à présenter dans les trente jours qui suivent la première communication, par l’office fédéral, de sa décision ou de son ordonnance au bureau du sous-procureur général du Canada ou à la partie concernée, ou dans le délai supplémentaire qu’un juge de la Cour fédérale peut, avant ou après l’expiration de ces trente jours, fixer ou accorder.

18.1 (2) An application for judicial review in respect of a decision or an order of a federal board, commission or other tribunal shall be made within 30 days after the time the decision or order was first communicated by the federal board, commission or other tribunal to the office of the Deputy Attorney General of Canada or to the party directly affected by it, or within any further time that a judge of the Federal Court may fix or allow before or after the end of those 30 days.

 

 

[10]           Une demande de contrôle judiciaire doit être présentée dans les 30 jours suivant la date à laquelle la décision a été communiquée pour la première fois à la partie directement touchée par celle-ci, qui en l’espèce, est l’appelant. Si elle doit être produite dans les 30 jours et qu’elle ne l’est pas, il doit donc se produire autre chose avant qu’elle puisse être produite. Ce « quelque chose d’autre » est la requête de production du délai. Tant qu’un demandeur est autorisé à produire un avis de demande à l’extérieure de la période prévue par la loi, il ne peut pas être produit. Le faire, nonobstant les affirmations judiciaires de l’avocat, constituerait une atteinte à la Loi.

 

[11]           Les articles 62 et 63 traitent d’actions, de demandes et d’appels, ce qui constitue une liste non exhaustive d’instances, comme l’indique clairement le paragraphe 63(2). Les requêtes sont tranchées au moyen de la partie 7 des Règles. Il n’y a aucune exigence selon laquelle une requête peut uniquement être déposée dans le cadre d’une procédure intentée par un acte introductif d’instance, ce qui constitue apparemment le fondement de l’argument de l’avocat. Sans prétendre avoir des connaissances approfondies à propos des Règles de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, je fais remarquer que les requêtes sont tranchées en vertu de l’article 44, qui traite des demandes interlocutoires, ce qui semble incompatible avec le point de vue de l’avocat à l’égard de l’affaire. En fin de compte, les Règles des Cours fédérales ne sont pas structurées de la même façon.

 

[12]           Par conséquent, l’argument de l’avocat selon lequel la pratique du greffe en ce qui concerne les requêtes de prorogation du délai est irréfléchi. La demande de contrôle judiciaire de l’appelant est introduite par le dépôt d’un avis de demande, qui constitue l’acte introductif d’instance. Si un avis de demande n’a pas été produit à l’intérieur du délai prévu par la Loi, alors une prorogation du délai doit être obtenue. La requête en prorogation du délai n’introduit pas la demande de contrôle judiciaire. Si la demande est accueillie, elle permet au demandeur de produire son avis de demande; si la demande est rejetée, il n’y a aucune demande de contrôle judiciaire.

[13]           La tentative de l’avocat de renforcer son argument en faisant mention du [traduction] « tour de passe-passe administratif », laissant entendre, comme il le fait, une ruse ou une tromperie, constitue une offense et un affront à l’intégrité du personnel du greffe.

 

[14]           En conséquence, le contenu du dossier d’appel devrait correspondre à la description énoncée au paragraphe 10 du mémoire des faits et du droit de l’intimée. L’intimée a droit à ses dépens, quelle que soit l’issue de la cause.

 

 

« J.D. Denis Pelletier »

j.c.a.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            A-366-08

 

INTITULÉ :                                                                           Kershaw Nanavaty c.

                                                                                                Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile

 

 

REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :                                      LE JUGE PELLETIER

 

DATE DES MOTIFS :                                                          Le 23 octobre 2008

 

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

 

 

Me Andrew J. Winstanley

POUR L’APPELANT

 

Me Liliane Bantourakis

POUR L’INTIMÉ

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Me Andrew J. Winstanley

Vancouver (ColombieBritannique)

POUR L’APPELANT

 

 

John H. Sims, c.r.

Sousprocureur général du Canada

 

POUR L’INTIMÉ

 

 

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