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Date : 20080923

Dossier : A-373-07

Référence : 2008 CAF 283

 

CORAM :      LA JUGE DESJARDINS

                        LE JUGE NOËL

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

ROY THÉRIAULT

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

 

 

Audience tenue à Fredericton (Nouveau-Brunswick), le 23 septembre 2008.

Jugement rendu à Fredericton (Nouveau-Brunswick), le 24 septembre 2008.

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                        LA JUGE DESJARDINS

Y ONT SOUSCRIT :                                                                          LE JUGE NOËL

LA JUGE TRUDEL

 


Date : 20080923

Dossier : A-373-07

Référence : 2008 CAF 283

 

CORAM :      LA JUGE DESJARDINS

                        LE JUGE NOËL

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

ROY THÉRIAULT

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

 

LA JUGE DESJARDINS

Introduction

La question qui se pose en l’espèce, question soulevée proprio motu par la Cour, est celle de savoir si le juge-arbitre pouvait se prononcer sur la rémunération et la répartition de sommes reçues par le demandeur M. Roy Thériault, sans vérifier au préalable s’il y avait eu arrêt de la rémunération au sens de la Loi sur l’assurance emploi  (L.R.C. 1996, c. C-23) et de son Règlement (Règlement sur l’assurance emploi D.O.R.S./96-332).

 

[1]               Nous sommes saisis d’une demande de contrôle judiciaire intentée par le demandeur à l’encontre d’une décision rendue par le juge-arbitre, en date du 28 juin 2007. Cette décision annule celle prise par le conseil arbitral qui accueillait la demande de M. Thériault visant à annuler un avis de répartition selon les articles 35 et 36 du Règlement et un avis de dette au montant de $1901.00 émis par la Commission de l’assurance emploi.

 

[2]               Le litige, tel qu’énoncé par les parties, porte essentiellement sur un trop perçu et sur l’effet juridique, sur le calcul des prestations d’assurance emploi, d’une somme offerte au demandeur par l’assureur de l’employeur à titre d’indemnité de remplacement de salaire, somme que le demandeur refusa d’encaisser.

 

[3]               Préalablement au litige soumis par les parties, se pose toutefois la question de l’admissibilité même du demandeur aux prestations d’assurance emploi.

 

Faits

[4]               Le demandeur a soumis une demande de prestations de type «régulière» d’assurance emploi, laquelle prit effet le 9 octobre 2005 (Mémoire du demandeur, par. 2).

 

[5]               Le demandeur affirme, dans sa demande de prestations initiale (Dossier du demandeur, p. 44), avoir déposé un relevé d’emploi dans un Centre Service Canada situé dans la province du Nouveau-Brunswick.

 

[6]               Le motif évoqué par le demandeur au soutien de sa demande est un « manque de travail » (Dossier du défendeur, pièce 2-7, dossier du demandeur p. 42).

 

[7]               Ni le dossier du demandeur, ni celui du défendeur ne contiennent une copie du relevé d’emploi.

 

[8]               Malgré les motifs de manque de travail énoncés dans sa demande initiale d’octobre 2005, le demandeur affirme avoir été exclu des lieux de travail à compter du 5 janvier 2006 tout en recevant son salaire de l’employeur durant une période approximative de 10 semaines allant du début janvier 2006 au 10 mars 2006 (Mémoire du demandeur, par. 3).

 

[9]               Le demandeur affirme que l’employeur lui a demandé de consulter un médecin ce qu’il dit avoir fait en janvier 2006 sans pour autant avoir obtenu à cette date un arrêt de travail pour cause médicale (Dossier du demandeur, p. 96).

 

[10]           L’employeur déclare pour sa part avoir exclu le demandeur de son lieu de travail « puisqu’il jugeait que Monsieur était dangereux pour lui-même ainsi que pour les autres employés » (Dossier du demandeur p.98).  Le dossier ne comporte aucun élément de preuve au soutien de cette allégation, laquelle est contredite par le demandeur. Ce dernier a même versé au dossier une pétition signée par les autres employés dans laquelle ces derniers nient la déclaration de l’employeur à ce sujet.

 

[11]           Le demandeur soutient au contraire avoir été disponible et apte à travailler à compter de janvier 2006.

 

[12]           Ce n’est que le 7 juin 2006 que le demandeur obtient un certificat médical attestant son incapacité à travailler pour causes médicales. Cette période de maladie s’est poursuivie jusqu’en août 2006, alors qu’un autre certificat médical a été émis, attestant que le demandeur était apte à reprendre le travail, ce qu’il a fait à compter du 6 septembre 2006.

 

[13]           Le demandeur affirme avoir demandé un relevé d’emploi en janvier 2006 sans pour autant en avoir reçu un (Dossier du demandeur p. 96). 

 

[14]           Cette affirmation du demandeur est corroborée par la version de l’employeur qui affirme pour sa part n’avoir émis aucun relevé d’emploi (Dossier du demandeur, p. 95).

 

Décision du juge arbitre

[15]              Le juge arbitre fut d’avis que les sommes d’argent reçues par le demandeur à titre de salaire et à titre d’indemnité d’assurance salaire constituaient de la rémunérations au sens du sous-alinéa 35 (2)(c)(i) du Règlement et devaient être réparties, en vertu du paragraphe 36(12) du Règlement, sur les semaines pour lesquelles elles étaient payées ou payables. Il confirmait ainsi la décision de la Commission et renversait celle du conseil arbitral qui avait adjugé en faveur du demandeur.

 

Analyse

[16]           Le dossier tel que constitué ne permet pas de déterminer s’il y a eu arrêt de la rémunération provenant de l’emploi du demandeur. Il s’agit là d’une condition essentielle au droit de recevoir des prestations de chômage. Le paragraphe 7(1) de la Loi prévoit que les prestations de chômage sont payables à un assuré qui remplit les conditions requises pour les recevoir.  Le paragraphe 7(2) de la Loi prévoit qu’une de ces conditions est « l’arrêt de la rémunération provenant de son emploi ».

 

[17]           L’assuré a déclaré qu’il y avait eu « manque de travail » mais l’employeur n’a émis aucun relevé d’emploi, contrairement au paragraphe 19(2) du Règlement qui l’obligeait à le faire lorsqu’une personne, qui exerce un emploi assurable à son service, subit un arrêt de rémunération. L’alinéa 19(3)a) du Règlement oblige en effet l’employeur à émettre un relevé d’emploi «dans les 5 jours suivant le dernier en date des  jours suivants; (i)  le premier jour de l’arrêt de rémunération, (ii) le jour où il prend connaissance de l’arrêt de rémunération». En l’espèce, l’employeur a  continué à rémunérer le demandeur et a lui-même fait les demandes nécessaires pour que ce dernier reçoive les prestations d’assurance invalidité court terme de la Great West Life, assureur de l’employeur.

 

[18]           Le juge-arbitre a commis une erreur de droit en omettant de se demander si, dans les circonstances,  le demandeur était admissible aux prestations de chômage. S’il n’y a pas eu « arrêt de la rémunération » au sens des paragraphes 7(1) de la Loi et 19(2) du Règlement, le demandeur n’était pas admissible aux prestations et la Commission n’avait pas juridiction dans cette affaire. La Commission ne pouvait se prononcer sur la rémunération et la répartition qu’après s’être assurée de l’admissibilité du demandeur aux prestations de chômage.

 

[19]      La demande de contrôle judiciaire devrait être accueillie sans frais aux seules fins de casser  la décision du juge arbitre pour défaut de juridiction de la Commission.

 

« Alice Desjardins »

j.c.a.

 

 

 

« Je suis d’accord.

            M. Noël j.c.a. »

 

« Je suis d’accord.

            Johanne Trudel j.c.a.”

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Appendice

 

 

 

Loi sur l’assurance-emploi

(1996, ch. 23 )

 

Conditions requises pour recevoir des prestations

Versement des prestations

 

7. (1) Les prestations de chômage sont payables, ainsi que le prévoit la présente partie, à un assuré qui remplit les conditions requises pour les recevoir.

 

Conditions requises

 

(2) L’assuré autre qu’une personne qui devient ou redevient membre de la population active remplit les conditions requises si, à la fois :

a) il y a eu arrêt de la rémunération provenant de son emploi;

 

b) il a, au cours de sa période de référence, exercé un emploi assurable pendant au moins le nombre d’heures indiqué au tableau qui suit en fonction du taux régional de chômage qui lui est applicable.

 

 

 

 

 

 

 

 

Règlement sur l’assurance-emploi (DORS/96-332)

 

Relevé d’emploi

19. (2) L’employeur établit un relevé d’emploi, sur le formulaire fourni par la Commission, lorsque la personne qui exerce un emploi assurable à son service subit un arrêt de rémunération.

 

  (3) Sous réserve du paragraphe (4), l’employeur distribue de la façon suivante les exemplaires du relevé d’emploi établi conformément au paragraphe (2) :

 

a) il remet l’exemplaire de l’employé à l’assuré dans les cinq jours suivant le dernier en date des jours suivants :

 

(i) le premier jour de l’arrêt de rémunération,

 

(ii) le jour où il prend connaissance de l’arrêt de rémunération;

 

b) il envoie l’exemplaire de la Commission à celle-ci dans le délai visé à l’alinéa a);

 

c) il garde l’exemplaire de l’employeur et le verse aux registres et livres comptables qu’il est tenu de conserver selon le paragraphe 87(3) de la Loi.

 

 

 

(5) Si l’employeur n’a pas remis de relevé d’emploi à l’assuré ou à la Commission, ou si l’employeur ne peut être rejoint ou est, du fait de la destruction ou de la perte de ses registres, incapable de fournir les renseignements relatifs à l’état des heures d’emploi assurable et de la rémunération assurable de l’assuré, celui-ci peut, dès qu’il devient prestataire, fournir une déclaration, avec preuves à l’appui, de ses heures d’emploi assurable et de sa rémunération assurable.

(mon soulignement)

 

Employment Insurance Act

(1996, c. 23 )

 

Qualifying for Benefits

Benefits payable to persons who qualify

 

7. (1) Unemployment benefits are payable as provided in this Part to an insured person who qualifies to receive them.

 

Qualification requirement

 

(2) An insured person, other than a new entrant or a re-entrant to the labour force, qualifies if the person

(a) has had an interruption of earnings from employment; and

 

(b) has had during their qualifying period at least the number of hours of insurable employment set out in the following table in relation to the regional rate of unemployment that applies to the person.

 

[]

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Employment Insurance Regulations (SOR/96-332)

 

Record of Employment

19. (2) Every employer shall complete a record of employment, on a form supplied by the Commission, in respect of a person employed by the employer in insurable employment who has an interruption of earnings.

 

  (3) Subject to subsection (4), copies of the record of employment completed pursuant to subsection (2) shall be distributed by the employer in the following manner:

 

(a) the employee's copy shall be delivered to the insured person not later than five days after the later of

 

(i) the first day of the interruption of earnings, and

 

(ii) the day on which the employer becomes aware of the interruption of earnings;

 

(b) the Commission's copy shall be sent to the Commission within the time limit set out in paragraph (a); and

 

(c) the employer's copy shall be kept and retained as a part of the employer's records and books of account in accordance with subsection 87(3) of the Act.             

[]

(5) Where an employer has failed to deliver a record of employment to an insured person or to the Commission or the employer is not available or is unable to provide information respecting the record of hours of insurable employment and the insurable earnings of that person because the employer's records are destroyed or lost, the person, on becoming a claimant, may provide, in respect of their hours of insurable employment and insurable earnings, a statement containing evidence of the hours and earnings.

[]

(Emphasis added)

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            A-373-07

 

UNE DEMANDE DE CONTRÔLE JUDICIARE CONCERNANT UNE DÉCISION DU JUGE-ARBITRE DATÉE DU 28 JUIN 2007, N° DU DOSSIER CUB68580

 

INTITULÉ :                                                                           Roy Thériault c. Le Procureur général du Canada         

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     Fredericton (Nouveau-Brunswick)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   23 septembre 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                DESJARDINS J.A.

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                             NOËL J.A.

                                                                                                TRUDEL J.A.

MOTIFS CONCOURANTS :                                              

MOTIFS DISSIDENTS :                                                     

 

DATE DES MOTIFS :                                                          24 septembre 2008

 

 

COMPARUTIONS :

 

Roy Thériault

POUR LE DEMANDEUR

 

Sandra Doucette

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pour soi même

POUR LE DEMANDEUR

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

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