ENTRE :
appelant
et
MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET
DE LA PROTECTION CIVILE
Audience tenue à Vancouver (Colombie-Britannique), le 14 mai 2008.
Jugement prononcé à l’audience à Vancouver (Colombie-Britannique), le 14 mai 2008.
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR : LE JUGE EVANS
Date : 20080514
Dossier : A-425-07
Référence : 2008 CAF 185
CORAM : LA JUGE DESJARDINS
LE JUGE SEXTON
LE JUGE EVANS
ENTRE :
PLAMEN KOZAROV
appelant
et
MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET
DE LA PROTECTION CIVILE
intimé
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR
(Motifs prononcés à l’audience à Vancouver (Colombie-Britannique), le 14 mai 2008)
[1] Il s’agit d’un appel formé par Plamen Kozarov contre la décision (2007 CF 866) par laquelle le juge Harrington de la Cour fédérale a rejeté sa demande de contrôle judiciaire de la décision du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile. Dans cette décision, le ministre avait refusé que M. Kozarov rentre au Canada afin de purger le reste de la peine que lui avait imposée un tribunal des États-Unis après qu’il eut été déclaré coupable d’infractions graves liées à la drogue.
[2] En décembre 2007, après le prononcé de la décision du juge Harrington, M. Kozarov, un citoyen canadien, a été déporté au Canada. Selon nous, le retour de M. Kozarov confère au présent appel un caractère théorique. Toutefois, les avocats des deux parties soutiennent que nous devrions néanmoins exercer notre pouvoir discrétionnaire pour entendre l’appel.
[3] Ils affirment que l’appel soulève une importante question de droit constitutionnel, soit celle de l’applicabilité de l’article 6 de la Charte canadienne des droits et libertés aux dispositions de la Loi sur le transfèrement international des délinquants, L.C. 2004, ch. 21. La Cour fédérale a rendu des décisions contradictoires sur cette question. De plus, d’autres affaires soulevant cette même question sont en instance et d’autres encore sont en suspens en attendant l’issue du présent appel. Selon eux, l’appel devrait être entendu parce que la question en litige continue de se poser dans un contexte contradictoire et que les deux parties sont maintenant prêtes à en débattre pleinement. Des raisons liées à l’économie des ressources judiciaires de même que l’intérêt du public à ce que soit rapidement éliminée l’incertitude au sujet d’une importante question purement juridique et ayant une incidence sur beaucoup d’autres citoyens canadiens emprisonnés à l’étranger justifieraient aussi que la Cour entende et tranche l’appel sur le fond.
[4] Malgré les habiles arguments des avocats, nous ne sommes pas convaincus que nous devrions nous éloigner du principe général suivant lequel les tribunaux ne devraient pas juger les affaires qui sont théoriques. Le fait que la question soulevée en l’espèce ressurgira vraisemblablement et que, du reste, elle a reparu, ne justifie pas en soi l’instruction d’une cause théorique. Le passage suivant des motifs rédigés par le juge Sopinka dans Borowski c. Canada (Procureur général), [1989] 1 R.C.S. 342, à la page 361, est particulièrement à propos en l’espèce :
Le simple fait, cependant, que la même question puisse se présenter de nouveau, et même fréquemment, ne justifie pas à lui seul l’audition de l’appel s’il est devenu théorique. Il est préférable d’attendre et de trancher la question dans un véritable contexte contradictoire, à moins qu’il ressorte des circonstances que le différend aura toujours disparu avant d’être résolu.
[5] Il importe de souligner que le présent litige ne soulève pas une question qui pourrait « ne jamais être soumise aux tribunaux » : (Borowski, p. 364). L’avocat de M. Kozarov représente des clients dans des causes similaires : étant donné la durée des peines et ce qu’il reste à purger, il disposera d’amplement de temps pour faire en sorte que l’une de ces affaires parvienne à la Cour avant que le délinquant n’ait purgé la totalité de sa peine et ne soit renvoyé au Canada. Dans ce contexte, notons également qu’on a mis deux ans, à compter du refus du ministre de consentir au transfèrement, avant de soumettre à la Cour l’affaire et qu’au moins une des autres causes est déjà devant la Cour fédérale et a été ajournée en attendant la décision en l’espèce.
[6] Dans ces circonstances, il ne nous semble pas que la dépense de ressources judiciaires et le « coût social [élevé] de l’incertitude du droit » (Borowski, p. 361) occasionnés par le fait de retarder la résolution de la question constitutionnelle en cause jusqu’à ce qu’un dossier actif soit présenté à la Cour soient tels qu’ils surpassent les avantages découlant du respect du principe général suivant lequel les tribunaux ne devraient pas juger les affaires théoriques.
[7] Nous ne sommes pas non plus convaincus que le fait de trancher l’appel aurait vraisemblablement d’importants « effets accessoires pratiques sur les droits des parties » (Borowski, p. 364).
[8] Pour ces motifs, l’appel sera rejeté en raison de son caractère théorique.
Traduction certifiée conforme
Sandra de Azevedo, LL.B.
COUR D’APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A-425-07
INTITULÉ : PLAMEN KOZAROV c. MSPPC
LIEU DE L’AUDIENCE : Vancouver (C.-B.)
DATE DE L’AUDIENCE : le 14 mai 2008
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR LA JUGE DESJARDINS
LE JUGE SEXTON
LE JUGE EVANS
PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR : LE JUGE EVANS
COMPARUTIONS :
POUR L’APPELANT
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POUR L’INTIMÉ
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Avocats Abbotsford (C.-B.)
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POUR L’APPELANT |
Sous-procureur général du Canada Vancouver (C.-B.) |
POUR L’INTIMÉ |