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Date : 20080306

Dossier : A-116-06

Référence : 2008 CAF 85

 

CORAM :      LE JUGE NOËL

                        LE JUGE NADON

                        LE JUGE PELLETIER

 

ENTRE :

CHEMIN DE FER CANADIEN PACIFIQUE LIMITÉE

appelante

et

BOUTIQUE JACOB INC.

intimée

 

et

 

Zim Integrated Shipping Services Ltd., A.P. Moller-Maersk A/S,

Hapag-Lloyd Container Line GMBH, Safmarine Container Lines N.V., American Steamship Owners Mutual Protection and Indemnity Association Inc. et autres

 

intervenantes

 

Audience tenue à Montréal (Québec), le 19 novembre 2007

Jugement rendu à Ottawa (Ontario) le 6 mars 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                            LE JUGE NADON

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                                         LE JUGE  NOËL

                                                                                                            LE JUGE PELLETIER


Date : 20080306

 

Dossier : A-116-06

Référence : 2008 CAF 85

 

CORAM :      LE JUGE NOËL

                        LE JUGE NADON

                        LE JUGE PELLETIER

 

ENTRE :

CHEMIN DE FER CANADIEN PACIFIQUE

appelante

et

BOUTIQUE JACOB INC.

intimée

 

et

 

Zim Integrated Shipping Services Ltd., A.P. Moller-Maersk A/S,

Hapag-Lloyd Container Line GMBH, Safmarine Container Lines N.V., American Steamship Owners Mutual Protection and Indemnity Association Inc. et autres

 

intervenantes

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

LE JUGE NADON

 

[1]             Nous sommes saisis d’un appel et d’un appel incident d’un jugement du juge de Montigny de la Cour fédérale, 2006 CF 217, en date du 20 février 2006, qui a accueilli en partie l’action de l’intimée (appelante dans le pourvoi incident) Boutique Jacob Inc. (Boutique Jacob) contre l’appelante (intimée dans le pourvoi incident) Chemin de fer Canadien Pacifique (CFCP) et a par conséquent ordonné à CFCP de payer la somme de 35 116,58$ avec intérêts au taux de 6 % à compter du 27 avril 2003 jusqu’à la date de paiement.

 

[2]             Tant CFCP que Boutique Jacob demandent la modification de la décision de la Cour fédérale. Plus particulièrement, elles demandent la modification du montant des dommages‑intérêts accordés par le juge de Montigny. CFCP fait valoir qu’elle a le droit de limiter sa responsabilité à la somme de 1 432,89 $, tandis que Boutique Jacob prétend que le juge aurait dû lui octroyer la somme de 71 550,47 $.

 

[3]             La principale question soulevée par l’appel est l’interprétation par le juge de première instance de l’article 137 de la Loi sur les transports au Canada (la Loi), L.C. 996, ch. 10. Pour y répondre, il faut déterminer le sens du terme « expéditeur » que l’on trouve dans divers articles de la Loi, y compris à l’article 137. Est également en litige le droit de CFCP de limiter sa responsabilité relativement à la perte subie par Boutique Jacob.

 

LES FAITS

[4]             L’affaire dont le juge de Montigny était saisi avait fait l’objet d’un exposé conjoint des faits qu’il a reproduit intégralement au paragraphe 1 de ses motifs. Pour les fins qui nous occupent, le résumé des faits qui suit suffira.

 

[5]             Boutique Jacob, dont l’établissement commercial se trouve à Montréal, se spécialise dans la vente au détail de vêtements de mode pour dames, jeunes filles et fillettes dans des boutiques situées un peu partout au Canada. À toutes les époques pertinentes en l’espèce, Boutique Jacob était propriétaire d’une cargaison de vêtements et d’accessoires assortis qui comportait un total de 16 740 pièces de textile emballées dans 1 605 caisses et dont le poids brut total atteignait 10 549 kilogrammes (cargaison), achetés de divers fournisseurs à Hong Kong.

 

[6]             Boutique Jacob a retenu les services de Panalpina Inc. (Panalpina Canada), un groupeur de marchandises au Canada, pour effectuer les arrangements nécessaires pour le transport de sa cargaison de Hong Kong à Montréal. Plus particulièrement, par l’entremise de Panalpina Canada, Boutique Jacob a conclu un contrat de transport avec Pantainer Ltd. (Pantainer), un transporteur non maritime, membre du groupe de sociétés Panalpina Group, pour transporter la cargaison de Hong Kong à Montréal.

 

[7]             Pantainer a délivré des connaissements d’Express Line portant les numéros 744870, 744871, 744872, 744873, 744874, 744813, 744726 et 744879. Ces connaissements comportaient des conditions identiques à celles qui figurent au verso pour les envois précédents dont elle s’était occupée pour Boutique Jacob au cours des deux années qui ont précédé l’expédition de la cargaison en cause. Boutique Jacob n’avait déclaré aucune valeur pour sa cargaison.

 

[8]             Par l’entremise de l’agence de Panalpina (China) Ltd. (Panalpina China), et conformément aux directives de Panalpina Canada, Pantainer a conclu un contrat de transport avec Orient Overseas Container Line Ltd. (OOCL) pour transporter la cargaison de Boutique Jacob du port de Hong Kong à Montréal selon le connaissement (lettre de transport) OOLU82922212. En ce qui concerne le connaissement d’OOCL, les paragraphes 19, 20, 22 et 23 de l’exposé conjoint des faits sont pertinents et je les reproduis ici :

[traduction]

19.                                   OOCL n’a pas établi de lettre de transport ou de connaissement, que ce soit un original ou une copie papier, et Pantainer ne lui a pas demandé de le faire non plus. Pantainer et OOCL n’ont signé aucun contrat principal ou note d’engagement de fret. Le document couvrant l’envoi en question a été préparé, établi et mis à exécution par voie électronique. Le document électronique lui-même comporte la clause suivante : [traduction] « Le texte imprimé des conditions figurant au verso et au recto du présent connaissement peut être consulté à www.oocl.com, dans le tarif publié d’OOCL aux États-Unis et dans les brochures » . Ni Pantainer non plus qu’OOCL n’ont de registres de discussions concernant les limitations de la responsabilité ou d’autres conditions d’OOCL ou ne se rappellent avoir discuté de ces questions;

20.                  OOCL exploite un site Web à www.oocl.com par l’entremise duquel les transporteurs non maritimes comme Pantainer peuvent réserver de l’espace à bord de navires selon les horaires de départ correspondant à différentes destinations, fournir les renseignements qui doivent figurer sur le connaissement électronique (lettre de transport) et obtenir une confirmation du chargement des conteneurs présentés pour expédition au terminal ainsi que du nom du navire, de l’itinéraire de celui-ci, de l’heure d’arrivée prévue et de l’arrivée proprement dite. Les transporteurs non maritimes peuvent obtenir une copie électronique du connaissement (lettre de transport), qui ne devient disponible que lorsque les conteneurs sont effectivement chargés à bord d’un porte-conteneurs;

…..

22.                  Le site Web susmentionné d’OOCL comporte un lien précis menant aux conditions du connaissement. Ces conditions sont en vigueur sous leur forme actuelle depuis au moins l’année 2000 et n’ont pas été modifiées. Elles étaient en vigueur lorsque le contrat de transport de la cargaison en cause a été formé et exécuté;

23.                  Pantainer n’était pas au courant des conditions précises du connaissement d’OOCL qui étaient en vigueur à la date de l’expédition en question; que ce soit de son propre chef ou par l’entremise de Panalpina (China) Ltd. ou Panalpina Inc., Pantainer a utilisé à maintes reprises les services en ligne d’OOCL relativement au transport de marchandises pour la demanderesse et d’autres clients dans le passé et elle a effectivement utilisé les services en ligne pour le transport de la cargaison en cause[.]

 

 

[9]             À son tour, OOCL a retenu les services de CFCP, conformément à un contrat confidentiel par lequel CFCP s’était engagée à transporter la cargaison par rail de Vancouver, en Colombie‑Britannique, à Montréal. Bien que CFCP n’ait pas émis de lettre de transport,  elle a consigné la réception des conteneurs dans lesquels ont été placées les marchandises et les données relatives au train dans son système en ligne dont se servent tant Pantainer qu’OOCL.

 

[10]         Pendant le transport par train de Vancouver à Montréal, la cargaison de Boutique Jacob a été endommagée par suite d’un déraillement survenu vers le 27 avril 2003 près de Sudbury, en Ontario. La cargaison qui a été perdue ou endommagée était visée par les connaissements de Pantainer portant les numéros 744873 et 74879, et par le connaissement d’OOCL. Plus précisément, 3 342 pièces de textile pesant au total 494,1 kilogrammes et ayant une valeur FAB de 26 880,40 $ ont été endommagées ou perdues.

 

[11]         Le 8 janvier 2004, Boutique Jacob a déposé une déclaration contre Pantainer, Panalpina Canada, OOCL et CFCP, sollicitant des dommages équivalant au montant de 71 550,47 $. Après signification de la déclaration la visant, Pantainer a déposé une mise en cause contre OOCL.

 

[12]         L’action de la demanderesse a été entendue à Montréal les 19 et 20 septembre 2005 et, le 20 février 2006, le juge de Montigny a rejeté l’action de Boutique Jacob contre Pantainer, Panalpina Canada et OOCL, et a accueilli l’action à l’encontre de CFCP, condamnant celle‑ci à payer à Boutique Jacob la somme de 35 116,58 $. Je ferais remarquer que le juge a également rejeté la mise en cause contre OOCL.

 

LA DÉCISION DE LA COUR FÉDÉRALE

 

[13]         Bien que le juge ait rejeté l’action de Boutique Jacob contre toutes les défenderesses sauf CFCP, les motifs qu’il a donnés à l’appui du rejet sont pertinents quant à l’issue du présent appel. Je les examinerai donc conjointement avec les motifs pour lesquels il a accueilli l’action contre CFCP.

 

[14]         Le juge a commencé son analyse en faisant remarquer que tant Panalpina Canada que Panalpina China ont agi comme mandataires de Boutique Jacob pour la conclusion du contrat de transport entre Pantainer et Boutique Jacob. Il a ensuite fait observer qu’il ne pouvait y avoir aucun doute que Pantainer, en tant que transporteur contractant, était responsable de tous les dommages subis par Boutique Jacob, à moins qu’elle ne puisse exclure ou limiter sa responsabilité. Se fondant sur la clause  6.5h) du connaissement de Pantainer, qui stipule que Pantainer n’est pas responsable des pertes ou des dommages découlant [traduction] « d’un événement ou d’une cause qu’elle ne pouvait éviter et dont elle n’aurait pu empêcher les conséquences en faisant preuve de diligence raisonnable », le juge a conclu que Pantainer n’était pas responsable des pertes causées par le déraillement du train de CFCP près de Sudbury.

 

[15]         Le juge s’est alors penché sur la question de la responsabilité d’OOCL. Il a commencé par souligner que selon la clause 3.1 de son connaissement, Pantainer pouvait [traduction] « confier en sous‑traitance, directement ou indirectement, selon les conditions qu’elle estime appropriées, tout ou partie de l’entreposage ou du transport des marchandises et des fonctions du transporteur s’y rapportant ». Cela l’a amené à dire que c’est à titre de sous‑baillaire rémunérée que OOCL est responsable envers Boutique Jacob. Au paragraphe 25 de ses motifs, le juge a émis l’opinion suivante :

[25]      Par conséquent, OOCL n’est responsable qu’à titre de baillaire rémunéré, étant donné qu’elle a reçu la cargaison à Hong Kong et s’est engagée à la livrer à Montréal, tel qu’il appert du paragraphe 18 de l’exposé conjoint des faits (voir également la lettre de transport et les conditions figurant dans l’exposé conjoint des faits). Le contrat de baillement est accepté en droit maritime canadien et il est bien reconnu que le propriétaire des marchandises peut poursuivre directement le sous-baillaire en cas de perte ou d’endommagement de celles-ci. La seule question qui se pose est de savoir si la demanderesse est liée par les conditions énoncées  [sic] dans le connaissement d’OOCL.

 

 

[16]         Dans les paragraphes suivants, le juge a répondu à cette question. Il a commencé par se pencher sur la remarque incidente de lord Denning dans Morris c. Martin, [1966] 1 Q.B. 716, où, aux pages 729 et 730, il a dit :

 [TRADUCTION]  La question qui se pose maintenant est la suivante : les nettoyeurs peuvent-ils invoquer les clauses d’exonération contre Mme Morris, même s’ils n’ont conclu aucun contrat directement avec elle? Des arguments valables peuvent être invoqués de part et d’autre. D’une part, Mme Morris risque de voir sa réclamation bien fondée rejetée par l’application de clauses d’exonération qu’elle ignorait et qu’elle n’a pas acceptées. D’autre part, les nettoyeurs pourraient se voir imputer une responsabilité supérieure à celle qu’ils ont prise en charge. (...) À mon avis, la réponse au problème est la suivante : le propriétaire sera lié par les conditions uniquement s’il a expressément ou implicitement consenti à ce que le baillaire confie les articles à un sous-baillaire conformément à un contrat comportant ces conditions. (...) Dans la présente affaire, Mme Morris a accepté que M. Beder envoie la fourrure aux nettoyeurs et, ce faisant, elle a consenti implicitement je pense à ce qu’il conclue un contrat de nettoyage selon les conditions courantes dans l’industrie.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

 

[17]         Le juge a ensuite noté, au paragraphe 27 de ses motifs, que dans le contexte du droit maritime, le Conseil privé a également statué, à de nombreuses occasions, que l’autorisation donnée à un transporteur de [traduction] « … confier en sous-traitance tout ou partie du transport des marchandises, "quelles que soient les conditions", démontrait que le propriétaire "avait expressément consenti" au sous-dépôt de ses marchandises … ». À cet égard, le juge a renvoyé aux décisions du Conseil privé dans K.H. Enterprise (The) c. Pioneer Container (The), [1994] 2 A.C. 324, et dans Singer Co. (U.K.) Ltd. c. Tees and Hartlepool Port Authority, [1988] 2 Lloyd’s Rep. 164.

 

[18]         Le juge a fait remarquer que ce principe avait été accepté par les cours canadiennes et a renvoyé aux arrêts Punch c. Savoy’s Jewellers Ltd. et al. (1986), 14 O.C.A. 4 (C.A. Ont.), et Bombardier Inc. c. Canadian Pacific Ltd. (1991), 85 D.L.R. (4th) 558 (C.A. Ont.). Il s’est ensuite penché sur les faits de l’espèce pour décider si Boutique Jacob et Pantainer avaient consenti expressément ou implicitement aux conditions d’OOCL. À son avis, elles l’avaient fait.

 

[19]         Il a immédiatement clarifié que le fait que ni Boutique Jacob ni Pantainer n’aient été véritablement au courant des conditions d’OOCL ne constituait pas un obstacle à la conclusion qu’elles avaient consenti à ces conditions. Le juge a estimé que Pantainer, par l’entremise de Panalpina China et Panalpina Canada, avait déjà  fait affaire avec OOCL, notamment en ce qui a trait aux cargaisons en provenance de l’Extrême-Orient. Il a de plus jugé que la documentation d’OOCL comportait clairement un avertissement à l’intention de ses clients au sujet de ces conditions, qui pouvait facilement être trouvé sur son site Web.  Le juge a ensuite fait remarquer que Pantainer avait admis consulter ce site à des fins de réservation et de suivi des cargaisons. Par conséquent, au paragraphe 30 de ses motifs, il a conclu :

[30]     … Pantainer  devait forcément être au courant des conditions courantes de celle-ci en raison de ses pratiques commerciales et des opérations commerciales qu’elle a conclues avec elle ainsi que du fait qu’aucune des conditions qu’OOCL invoque n’est trop contraignante ou répréhensible dans le contexte commercial. Effectivement, comme nous le verrons sous peu, les limitations énoncées dans les conditions d’OOCL sont très semblables à celles de Pantainer quant à la portée et à l’application.

 

 

[20]         Ce qui a amené le juge à la conclusion que Boutique Jacob était liée par les conditions des connaissements tant de Pantainer que d’OOCL, selon lesquels les deux entreprises pouvaient recourir à la sous‑traitance [traduction] « quelles que soient les conditions ». En ce qui concerne les conditions d’OOCL, le juge a dit, au paragraphe 33 de ses motifs :

 

[33]     … Les conditions énoncées dans la lettre de transport d’OOCL sont semblables à celles que comporte normalement ce type de contrat et ne sont certainement pas déraisonnables ou répréhensibles. De plus, elles sont très semblables à celles que Jacob a acceptées et qui figurent dans le connaissement de Pantainer. Par conséquent, Jacob ne peut soutenir qu’elle a été prise par surprise et qu’elle ne pouvait prévoir les limitations d’OOCL.

 

 

[21]         Ayant conclu que Boutique Jacob était liée par les conditions énoncées dans le connaissement d’OOCL, le juge a ensuite examiné les clauses invoquées par OOCL pour exclure ou limiter sa responsabilité. D’abord, il a attiré l’attention sur la clause 4(B)(1)a)(viii) selon laquelle la responsabilité d’OOCL était exclue lorsque les pertes ou les dommages sont causés par [traduction] « un événement ou une cause que le transporteur ne pouvait éviter et dont il n’aurait pu empêcher les conséquences en faisant preuve de diligence raisonnable ».

 

[22]         Le juge s’est également penché sur la clause 4(B)1)c), qui était censée limiter la responsabilité d’OOCL. Plus particulièrement, il a renvoyé à cette partie de la clause qui, à moins d’une déclaration de la valeur des marchandises par le propriétaire de la cargaison, limitait la responsabilité d’OOCL à la somme de 2 $US par kilo de poids brut des marchandises perdues ou endommagées. Se fondant sur ces clauses, le juge a conclu qu’OOCL n’était pas responsable car, même en faisant preuve de diligence, elle n’aurait pas pu empêcher l’événement qui a causé la perte subie par Boutique Jacob, c’est-à-dire un déraillement de train. Le juge a de plus indiqué que, quoi qu’il en soit, la responsabilité d’OOCL ne pouvait dépasser la somme de 1 432,89 $, c’est‑à‑dire 2 $US par kilo, à cause de la clause 4(B)1)c) de son connaissement.

 

[23]         Le juge est allé plus loin. À son avis, même si OOCL n’avait pas le doit d’invoquer les conditions de son connaissement, elle pouvait se prévaloir de la clause 6.5 du connaissement de Pantainer, à cause de la « clause Himalaya » qui est énoncée à la clause 3.2 de ce même document, que je reproduis ici par souci de commodité :

[traduction3.2   Chaque préposé, représentant ou sous-traitant du transporteur peut invoquer les mêmes droits, exonérations de responsabilité, moyens de défense et immunités que ceux dont le transporteur dispose.  À cet égard, le transporteur est considéré comme le mandataire ou fiduciaire de ce préposé ou représentant, qui est réputé être partie au contrat attesté par le présent connaissement.

 

 

[24]         Après avoir reproduit cette clause, le juge a exprimé l’avis qu’il ressortait de la jurisprudence (voir : Midland Silicones Ltd. c. Scruttons Ltd., [1961] 2 Lloyd’s Rep. 365 (H.L.); The Eurymedon (New Zealand Shipping Company Ltd) c. A.M. Satterthwaite & Co. Ltd., [1974] 1 Lloyd’s Rep. 534 (P.C.); International Terminal Operators Ltd. c. Miida Electronics Inc. et al., précité, aux pages 782 et suivantes; Fraser River Pile & Dredge Ltd. c. Can-Dive Services, [1999] 3 R.C.S. 108), que les clauses Himalaya étaient juridiquement contraignantes, malgré le fait que la tierce partie ignore totalement l’existence d’une stipulation qui lui accorde un avantage au moment de l’exécution de son propre contrat.

 

[25]         Par conséquent, le juge, au paragraphe 40 de ses motifs, a conclu que les actions de Boutique Jacob tant contre Pantainer qu’OOCL devaient être rejetées. Il a alors abordé la question de la responsabilité de CFCP et, dans le cadre de cette analyse, il a examiné l’article 137 de la Loi qui permet à un transporteur ferroviaire de limiter sa responsabilité si certaines conditions sont remplies. Par souci de commodité, je reproduis l’article 137 de la Loi :

137.  (1) La compagnie de chemin de fer ne peut limiter sa responsabilité envers un expéditeur pour le transport des marchandises de celui-ci, sauf par accord écrit signé soit par l’expéditeur, soit par une association ou un groupe représentant les expéditeurs.

 

       (2) En l’absence d’un tel accord, la mesure dans laquelle la responsabilité de la compagnie de chemin de fer peut être limitée en ce qui concerne un transport de marchandises est prévue par les conditions de cette limitation soit fixées par l’Office pour le transport, sur demande de la compagnie, soit, si aucune condition n’est fixée, établies par règlement de l’Office.

 

137. (1) A railway company shall not limit or restrict its liability to a shipper for the movement of traffic except by means of a written agreement signed by the shipper or by an association or other body representing shippers.

 

 

(2) If there is no agreement, the railway company’s liability is limited or restricted to the extent provided in any terms and conditions that the Agency may

(a)    on the application of the company, specify for the traffic; or

(b)    prescribe by regulation, if none are specified for the traffic

 

 

 

[26]         Le juge a ensuite insisté sur le fait que CFCP ne contestait pas sa responsabilité pour la perte subie par Boutique Jacob. CFCP avait plutôt fait valoir qu’elle pouvait invoquer les conditions énoncées dans le contrat confidentiel qu’elle a conclu avec OOCL, dans le tarif CPRS 7589, dans les connaissements d’OOCL et de Pantainer et, en conséquence, limiter sa responsabilité à un montant équivalant à 1 432,89 $.

 

[27]         Le juge a exprimé l’avis que CFCP ne pouvait pas profiter des conditions énoncées dans les divers documents qu’elle invoquait. Il a indiqué que l’argument de CFCP « aurait été convaincant » n’eût été de l’article 137 de la Loi. En raison de son interprétation de cet article, il a affirmé que CFCP ne pouvait pas limiter sa responsabilité à l’égard de la perte subie par Boutique Jacob. Premièrement, il a souligné le fait que le paragraphe 137(1) ne permettait pas à une compagnie ferroviaire de restreindre sa responsabilité à l’endroit d’un « expéditeur », sauf par accord écrit signé par l’expéditeur. Comme il n’y avait pas d’accord écrit entre Boutique Jacob et CFCP, il a conclu que CFCP ne pouvait pas restreindre sa responsabilité. Deuxièmement, il ne pouvait pas accepter l’argument de CFCP selon lequel OOCL était l’expéditeur de la cargaison en l’espèce. À son avis, l’article 6 de la Loi établit clairement une distinction entre l’expéditeur et le transporteur et, en conséquence, il ne pouvait accepter qu’« OOCL pouvait être considérée comme une entreprise autre qu’un transporteur pour l’application de cette loi » (paragraphe 45 des motifs du juge).

 

[28]         Le  juge ne s’est pas arrêté là dans son analyse. Il a ajouté que même si CFCP pouvait se prévaloir de l’article 137 de la Loi, elle ne pouvait néanmoins restreindre sa responsabilité à l’égard de la perte subie par Boutique Jacob. Après avoir énoncé l’argument de CFCP selon lequel, en vertu de l’accord confidentiel signé avec OOCL, elle avait le droit d’invoquer le tarif CPRS 7589, qui prévoit que sa responsabilité ne pouvait pas dépasser celle de la compagnie maritime [OOCL] selon le connaissement maritime, le juge a conclu que l’argument de CFCP ne pouvait être accueilli compte tenu de la formulation de la clause 5 du contrat confidentiel qui prévoyait ce qui suit :

 

[traduction] 5.     Limitation de responsabilité. Toutes les expéditions de marchandises en vertu du présent contrat seront assujetties à toutes les conditions applicables des CPRS  série 7589, CPRS série 7690 et CPRS série 700, à l’exception de ce qui suit :

CFCP ne sera pas tenue responsable des pertes, dommages ou retards causés à un conteneur ou au contenu du conteneur sur châssis, appartenant à l’expéditeur ou loué par lui, à l’exception des pertes ou dommages causés par la négligence de CFCP ou résultant de sa négligence, À CONDITION TOUTEFOIS qu’en aucun cas cette responsabilité ne dépasse les montants suivants :

1 – La somme de deux cent cinquante mille dollars (250 000 $) pour le contenu des conteneurs de vingt (20), quarante (40) ou quarante-cinq (45) pieds de longueur. Il est entendu que l’expéditeur ne fournira à CFCP que des conteneurs (et des châssis s’il y a lieu) en bon état.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[29]         De l’avis du juge, étant donné que la clause 5 du contrat confidentiel a annulé clairement les dispositions sur la limitation de responsabilité énoncées au tarif CPRS 7589, [traduction] « … la responsabilité maximale de CFCP serait de 250 000 $ » (non souligné dans l’original). (Voir paragraphe 49 des motifs du juge)

 

[30]         Le juge a ensuite examiné l’argument de CFCP selon lequel elle pouvait invoquer à son avantage les limitations et les exceptions énoncées dans les conditions des connaissements d’OOCL et de Pantainer. Bien qu’il ait reconnu que la clause 1 du connaissement d’OOCL et la clause 3 du connaissement de Pantainer, c’est‑à‑dire les clauses Himalaya, prévoyaient expressément que les sous‑traitants du transporteur pouvaient invoquer les mêmes droits, exonérations de responsabilité, moyens de défense et immunités que ceux dont disposait le transporteur, il a néanmoins rejeté l’argument de CFCP. À son avis, permettre à CFCP d’invoquer les clauses énoncées dans les connaissements de Pantainer et d’OOCL « … irait à l’encontre de l’objet de l’article 137 de la Loi sur les transports au Canada ». Son raisonnement est énoncé au paragraphe 50, où il dit : 

[50]     […] Il serait illogique de protéger l’expéditeur en énonçant qu’une compagnie de chemin de fer ne peut limiter sa responsabilité, sauf au moyen d’un accord écrit signé par celui-ci, si cette même compagnie pouvait atteindre le même résultat au moyen d’une clause Himalaya qui figure dans le contrat d’un autre transporteur. Je reconnais que ce raisonnement place les compagnies de chemin de fer dans une position moins avantageuse comparativement aux autres transporteurs. Cependant, ce principe vaut non seulement aux fins de la responsabilité, mais également à plusieurs autres égards, étant donné que les autres modes de transport ne sont pas aussi fortement réglementés que le transport ferroviaire.

 

 

[31]         Enfin, le juge a évalué les dommages subis par Boutique Jacob. Après un examen minutieux de la preuve et de la jurisprudence pertinente, il a jugé que Boutique Jacob avait subi des dommages d’un montant de 35 116,58 $.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

[32]         L’appel de CFCP soulève deux questions : la première est de savoir si le juge a erronément interprété l’article 137 de la Loi. Plus particulièrement, le juge a‑t‑il commis une erreur en maintenant qu’OOCL n’était pas l’« expéditeur » au sens de cette disposition? Deuxièmement, le juge a‑t‑il commis une erreur en concluant que CFCP ne pouvait pas limiter sa responsabilité en l’espèce conformément au tarif CPRS 7589 ou aux conditions des connaissements de Pantainer et d’OOCL?

 

[33]         Quant à l’appel incident, il ne soulève qu’une seule question : le juge a‑t‑il commis une erreur en évaluant les dommages de Boutique Jacob lorsqu’il a conclu que ceux‑ci devaient être calculés selon le plus bas prix de vente réduit de la cargaison plutôt que selon la moyenne des prix de vente après perte des marchandises de la même nature et du même style que ceux de la cargaison perdue?

 

LES OBSERVATIONS DES PARTIES

[34]         CFCP fait valoir que le juge de Montigny a commis une erreur en décidant que l’article 137 l’empêchait de se prévaloir de l’avantage de la limitation de responsabilité contenue dans le tarif CPRS  7589, la lettre de transport d’OOCL ou le connaissement de Pantainer. Elle prétend, contrairement à la conclusion du juge, que Boutique Jacob n’est pas l’expéditeur au sens de la disposition. CFCP déclare que l’ « expéditeur » ne peut être Boutique Jacob puisque celle‑ci n’a pas signé le contrat avec elle relativement au transport des marchandises de Vancouver à Montréal. À son avis, cette interprétation du juge de l’article 137 est incompatible avec d’autres dispositions de la Loi, à savoir, les articles 111 à 139. CFCP soutient en outre que le Règlement sur la responsabilité à l’égard du transport ferroviaire des marchandises (le Règlement), DORS/91‑448, établit une distinction entre le propriétaire des marchandises et leur expéditeur. À l’appui de sa position, CFCP renvoie à Canadian National Railway Company c. Sumitomo Marine and Fire Insurance Company Ltd., [2007] J.Q. 7207, [2007] Q.C.C.A. 985 (en date du 10 juillet 2007), de la Cour d’appel du Québec, et à l’arrêt Norfolk Southern Railway Co. c. Kirby, 125 S. Ct. 385 (2004), de la Cour suprême des États-Unis, qui, selon l’appelante, s’applique au présent appel étant donné que les États-Unis ont une disposition législative dans le même sens que l’article 137 de la Loi.

 

[35]         CFCP prétend en outre qu’elle a le droit d’invoquer les dispositions sur la limitation de responsabilité contenues dans la lettre de transport d’OOCL et dans le connaissement de Pantainer en raison des clauses Himalaya énoncées dans ces documents. Par conséquent, CFCP fait valoir que sa responsabilité maximale en l’espèce ne peut dépasser celle d’OOCL, c’est‑à‑dire 1 433,89 $.

 

[36]         En ce qui a trait à la conclusion du juge que le contrat confidentiel prévoyait une limitation des responsabilités de 250 000 $, CFCP déclare que ce document ne stipule qu’une responsabilité maximale et ne l’empêche pas de bénéficier des dispositions plus généreuses sur la limitation de responsabilité énoncées au tarif CPRS 7589 et dans les connaissements d’OOCL et de Pantainer.

 

[37]         Subsidiairement, CFCP déclare que Boutique Jacob devrait se voir accorder des dommages‑intérêts d’un montant de 33 598,64 $, ce qui représente le coût d’acquisition des marchandises plus assurances et fret, c’est‑à‑dire la valeur FAB.

 

[38]         Boutique Jacob adopte une position complètement différente. Elle déclare que les articles 6 et 137 de la Loi et les dispositions contenues dans le Règlement n’appuient pas l’argument de CFCP que l’ « expéditeur » doit être la personne avec laquelle le transporteur ferroviaire a un lien contractuel direct. Boutique Jacob ajoute que l’ « expéditeur » est la personne qui envoie ou reçoit les marchandises, et qu’elle peut être le propriétaire des marchandises, selon les circonstances. Boutique Jacob déclare encore que l’utilisation du terme « expéditeur » dans d’autres lois canadiennes, notamment dans la Loi sur la marine marchande du Canada, L.C. 2001, ch. 26, et la Loi sur la responsabilité en matière maritime, L.C. 2001, ch. 6, indiquent que ce terme n’inclut pas le transporteur.

 

[39]         Quant à la deuxième question soulevée dans le présent appel, à savoir si le juge a commis une erreur en concluant que ni le contrat confidentiel ni le tarif CPRS 7589 ne pouvaient limiter la responsabilité de CFCP en l’espèce, Boutique Jacob soutient que le juge n’a pas commis d’erreur en concluant comme il l’a fait. À son avis, le sens ordinaire de l’article 5 du contrat confidentiel est que CFCP a accepté de limiter sa responsabilité à un montant de 250 000 $.

 

[40]         Enfin, en ce qui a trait au montant, Boutique Jacob déclare que le juge de première instance n’a pas commis d’erreur en refusant d’accepter l’argument de CFCP selon lequel l’évaluation des dommages aurait dû être faite selon le prix d’achat de la cargaison plus assurances et fret.

 

[41]         En ce qui concerne son appel incident, Boutique Jacob déclare que bien que le juge ait bien compris les principes pertinents, il ne les a pas appliqués correctement en évaluant ses dommages. Elle soutient que le juge a commis une erreur en évaluant ses dommages selon le plus bas prix de vente réduit de la marchandise plutôt que selon la moyenne des ventes, après pertes, des marchandises de la même nature et du même style que contenait la cargaison perdue. Par conséquent, Boutique Jacob prétend que la Cour doit intervenir et condamner CFCP à lui verser des dommages‑intérêts d’un montant de 71 550,47 $.

 

[42]         Les intervenantes appuient la position adoptée par CFCP dans le présent appel, soulignant le fait que le terme « expéditeur » figurant à l’article 137 de la Loi doit être interprété dans le contexte global du transport multimodal. À leur avis, il n’y a aucun doute que le terme « expéditeur » en l’espèce est OOCL. Donc, sur cette base,  les intervenantes prétendent que CFCP a le droit d’invoquer tous les moyens de défense, limites et exonérations énoncées dans les connaissements de l’OOCL ou de Pantainer, sous réserve de toute disposition applicable du contrat confidentiel. Subsidiairement, elles prétendent que CFCP peut invoquer les limites de responsabilité énoncées au tarif CPRS 7589, sous réserve de toute disposition applicable du contrat confidentiel.

 

ANALYSE

[43]         Pour les motifs qui suivent, je conclus que le juge a commis une erreur en décidant que Boutique Jacob était l’« expéditeur » au sens de l’article 137 de la Loi. Je conclus également que le juge a commis une erreur en affirmant que la limitation de responsabilité de CFCP était de 250 000 $ et, en conséquence, qu’elle ne pouvait pas limiter sa responsabilité à l’égard de la perte subie par Boutique Jacob.

 

[44]         Avant de poursuivre, il sera utile, à ce stade-ci, de reproduire les dispositions pertinentes de la Loi, y compris l’article 137, que je reproduis ici par souci de commodité :

6.  […] « expéditeur » Personne qui expédie des marchandises par transporteur, ou en reçoit de celui-ci, ou qui a l’intention de le faire.

 

[…]

 

113.  (1) Chaque compagnie de chemin de fer, dans le cadre de ses attributions, relativement au chemin de fer qui lui appartient ou qu’elle exploite :

 

[…]

 

c) reçoit, transporte et livre ces marchandises sans délai et avec le soin et la diligence voulus;

 

[…]

 

       (4) Un expéditeur et une compagnie peuvent s’entendre, par contrat confidentiel ou autre accord écrit, sur les moyens à prendre par la compagnie pour s’acquitter de ses obligations.

 

[…]

 

 

116.  (5) Quiconque souffre préjudice de la négligence ou du refus d’une compagnie de s’acquitter de ses obligations prévues par les articles 113 ou 114 possède, sous réserve de la présente loi, un droit d’action contre la compagnie.

 

       (6) Sous réserve des stipulations d’un contrat confidentiel visé au paragraphe 113(4) ou d’un tarif établissant un prix de ligne concurrentiel visé au paragraphe 136(4), une compagnie n’est pas soustraite à une action intentée en vertu du paragraphe (5) par un avis, une condition ou une déclaration, si les dommages-intérêts réclamés sont causés par la négligence ou les omissions de la compagnie ou d’un de ses employés.

 

117.  (1) Sous réserve de l’article 126, une compagnie de chemin de fer ne peut exiger un prix pour le transport de marchandises ou de passagers que s’il est indiqué dans un tarif en vigueur qui a été établi et publié conformément à la présente section.

 

[…]

 

118.  Chaque compagnie de chemin de fer doit, sur demande d’un expéditeur, établir un tarif relatif au transport de marchandises sur son chemin de fer.

 

[…]

 

121.  (1) Les compagnies de chemin de fer qui exploitent des parties d’un parcours continu au Canada sur lequel un transport de marchandises s’effectue doivent, sur demande de l’expéditeur qui veut les faire transporter sur le parcours :

a) soit s’entendre sur un tarif commun pour le parcours et la répartition du prix dans le tarif;

b) soit conclure un contrat confidentiel pour le parcours.

 

 

       (2) En l’absence d’une telle entente ou d’un tel contrat, l’Office peut, sur demande de l’expéditeur :

a) soit ordonner aux compagnies de s’entendre, dans le délai fixé par lui et selon les termes qu’il estime indiqués, sur le tarif commun et la répartition du prix pour le parcours;

b) soit, par arrêté pris dans les quatre-vingt-dix jours suivant la réception de la demande par lui, fixer le parcours, le prix pour celui-ci et répartir ce prix entre ces compagnies et fixer la date, non antérieure à celle où il a reçu la demande, de prise d’effet et de publication du prix.

 

 

 

 

       (3) Les compagnies visées par l’arrêté payent à l’expéditeur qui a fait transporter des marchandises sur le parcours un montant égal à la différence éventuelle entre le prix qu’il a payé et le prix fixé par l’arrêté et applicable à tout le transport fait par lui sur le parcours entre la date de la présentation de la demande et celle de la prise d’effet de l’arrêté.

 

[…]

 

 

 

 

126.  (1) Les compagnies de chemin de fer peuvent conclure avec les expéditeurs un contrat, que les parties conviennent de garder confidentiel, en ce qui concerne :

a) les prix exigés de l’expéditeur par la compagnie;

b) les baisses de prix, ou allocations afférentes à ceux-ci, indiquées dans les tarifs établis et publiés conformément à la présente section;

c) les rabais sur les prix, ou allocations afférentes à ceux-ci, établis dans les tarifs ou dans les contrats confidentiels, qui ont antérieurement été exigés licitement;

d) les conditions relatives au transport à effectuer par la compagnie;

e) les moyens pris par la compagnie pour s’acquitter de ses obligations en application de l’article 113.

 

       (2) Toute demande d’arbitrage au titre de l’article 161 est subordonnée à l’assentiment de toutes les parties au contrat confidentiel.

 

[…]

 

137. (1) La compagnie de chemin de fer ne peut limiter sa responsabilité envers un expéditeur pour le transport des marchandises de celui-ci, sauf par accord écrit signé soit par l’expéditeur, soit par une association ou un groupe représentant les expéditeurs.

 

      (2) En l’absence d’un tel accord, la mesure dans laquelle la responsabilité de la compagnie de chemin de fer peut être limitée en ce qui concerne un transport de marchandises est prévue par les conditions de cette limitation soit fixées par l’Office pour le transport, sur demande de la compagnie, soit, si aucune condition n’est fixée, établies par règlement de l’Office.

 

[…]

 

164. (1) Dans un cas d’arbitrage entre un expéditeur et un transporteur, l’arbitre tient compte des renseignements que lui fournissent les parties à l’appui de leurs dernières offres et, sauf accord entre les parties à l’effet de restreindre la quantité des renseignements à fournir à l’arbitre, des renseignements supplémentaires que celles-ci lui ont fournis à sa demande.

 

 

(2) Sauf accord entre les parties à l’effet contraire, l’arbitre tient également compte de la possibilité pour l’expéditeur de faire appel à un autre mode de transport efficace, bien adapté et concurrentiel, des marchandises en question ainsi que de tout autre élément utile.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

6.   … "shipper" means a person who sends or receives goods by means of a carrier or intends to do so;

 

 

 

113.  (1) A railway company shall, according to its powers, in respect of a railway owned or operated by it,

 

 

 

(c) without delay, and with due care and diligence, receive, carry and deliver the traffic;

 

 

       (4) A shipper and a railway company may, by means of a confidential contract or other written agreement, agree on the manner in which the obligations under this section are to be fulfilled by the company.

 

 

116.  (5) Every person aggrieved by any neglect or refusal of a company to fulfill its service obligations has, subject to this Act, an action for the neglect or refusal against the company.

 

 

       (6) Subject to the terms of a confidential contract referred to in subsection 113(4) or a tariff setting out a competitive line rate referred to in subsection 136(4), a company is not relieved from an action taken under subsection (5) by any notice, condition or declaration if the damage claimed in the action arises from any negligence or omission of the company or any of its employees.

 

117.  (1) Subject to section 126, a railway company shall not charge a rate in respect of the movement of traffic or passengers unless the rate is set out in a tariff that has been issued and published in accordance with this Division and is in effect.

 

 

 

118.  A railway company shall, at the request of a shipper, issue a tariff in respect of the movement of traffic on its railway.

 

 

121.  (1) If traffic is to move over a continuous route in Canada and portions of it are operated by two or more railway companies, the companies shall, at the request of a shipper intending to move the traffic,

(a) agree on a joint tariff for the continuous route and on the apportionment of the rate in the joint tariff; or

(b) enter into a confidential contract for the continuous route.

 

       (2) If the railway companies fail to agree or to enter into a confidential contract, the Agency, on the application of the shipper, may

(a) direct the companies, within any time that the Agency may specify, to agree on a joint tariff for the continuous route and an apportionment of the rate that is satisfactory to the Agency; or

(b) within ninety days after the application is received by the Agency,

     (i) determine the route and the rate and apportion the rate among the companies, and

     (ii) determine the dates, not earlier than the date of receipt by the Agency of the application, when the rate comes into effect and when it must be published.

 

       (3) If the Agency determines a rate under paragraph (2)(b), the companies that operate the route shall pay a shipper who moved traffic over the route an amount equal to the difference, if any, between the rate that was paid by the shipper and the rate determined by the Agency, applicable to all movements of traffic by the shipper over the route from the date on which the application was made to the date on which the determined rate comes into effect.

 

 

126.  (1) A railway company may enter into a contract with a shipper that the parties agree to keep confidential respecting

(a) the rates to be charged by the company to the shipper;

(b) reductions or allowances pertaining to rates in tariffs that have been issued and published in accordance with this Division;

(c) rebates or allowances pertaining to rates in tariffs or confidential contracts that have previously been lawfully charged;

(d) any conditions relating to the traffic to be moved by the company; and

(e) the manner in which the company shall fulfill its service obligations under section 113.

 

       (2) No party to a confidential contract is entitled to submit a matter governed by the contract to the Agency for final offer arbitration under section 161, without the consent of all the parties to the contract.

 

137. (1) A railway company shall not limit or restrict its liability to a shipper for the movement of traffic except by means of a written agreement signed by the shipper or by an association or other body representing shippers.

 

 

      (2) If there is no agreement, the railway company’s liability is limited or restricted to the extent provided in any terms and conditions that the Agency may

(a) on the application of the company, specify for the traffic; or

(b) prescribe by regulation, if none are specified for the traffic.

 

 

 

 

164. (1) The arbitrator shall, in conducting a final offer arbitration between a shipper and a carrier, have regard to the information provided to the arbitrator by the parties in support of their final offers and, unless the parties agree to limit the amount of information to be provided, to any additional information that is provided by the parties at the arbitrator’s request.

 

(2) Unless the parties agree otherwise, in rendering a decision the arbitrator shall have regard to whether there is available to the shipper an alternative, effective, adequate and competitive means of transporting the goods to which the matter relates and to all considerations that appear to the arbitrator to be relevant to the matter.

[Emphasis added]

 

 

[45]         L’article 137 de la Loi permet à une compagnie ferroviaire de limiter sa responsabilité relativement aux réclamations d’un expéditeur, par accord écrit signé par l’expéditeur. Le juge de première instance a conclu que, puisqu’il n’y avait pas d’accord écrit entre CFCP et l’expéditeur, Boutique Jacob, CFCP ne pouvait pas limiter sa responsabilité.

 

[46]         L’article 6 de la Loi définit comme suit le terme « expéditeur » : personne qui expédie des marchandises par transporteur, ou en reçoit de celui‑ci, ou qui a l’intention de le faire. Cette définition large doit, à mon sens, être lue dans le contexte des autres dispositions de la Loi. Cette question a été directement abordée par la Cour d’appel du Québec dans l’arrêt Canadian National Railway Company Ltd., précité, où elle a conclu que l’« expéditeur » au sens de l’article 137 de la Loi est la personne qui a un lien direct avec la compagnie ferroviaire. Aux paragraphes 48 et 49 de ses motifs pour la Cour, le juge  Dussault a écrit ce qui suit :

 

 

[48]          En lisant ces prétentions, je constate que les parties débattent du sens et de la portée qu’il convient de donner à la notion d’« expéditeur » définie à l’article 6 de la Loi sans véritablement recourir aux autres dispositions de la Loi. Il est vrai qu’en raison de sa généralité la définition qu’en donne cet article — « Personne qui expédie des marchandises par transporteur » — peut, à première vue, sembler imprécise. Cependant, si on examine les articles 117(1), 118, 121(1), 126 et 164(2) de la Loi, qui traitent de l’établissement des tarifs et des prix pour le transport de marchandises, il en va tout autrement.

 

[49]           Ainsi, en lisant l’article 121(1), je constate que la détermination des prix se fait soit en vertu d’un tarif commun aux divers transporteurs ferroviaires, soit par une entente ou un contrat confidentiel. Dans ce dernier cas, l’alinéa 121(1)b), l’article 126 et le paragraphe 164(2) précisent tous qu’il s’agit nécessairement d’une relation entre le transporteur ferroviaire et l’expéditeur qui, dans les faits, négocie avec le transporteur les modalités relatives aux prix. La partie IV de la Loi qui prévoit un arbitrage lorsqu’une mésentente survient entre l’expéditeur et le transporteur sur les prix proposés ou appliqués confirme d’ailleurs cette conception dite « réaliste » de la notion d’expéditeur. Le paragraphe 164(2) précise à ce sujet que, « sauf accord entre les parties à l’effet contraire, l’arbitre tient également compte de la possibilité pour l’expéditeur de faire appel à un autre mode de transport efficace, bien adapté et concurrentiel, des marchandises en question […] ». L’expéditeur est donc celui qui, eu égard à la possibilité offerte, a concrètement choisi de faire appel à un transporteur ferroviaire plutôt qu’à un autre transporteur. Autrement dit, il est la personne qui a un lien direct et, surtout, un contrôle effectif et réel sur la négociation d’une entente ou d’un contrat conclu avec le transporteur.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[47]         Compte tenu du sens grammatical et ordinaire du terme « expéditeur », de l’article 6 de la Loi et de l’économie de la Loi, je ne peux que souscrire à l’interprétation que la Cour d’appel du Québec donne au terme « expéditeur » utilisé à l’article  137 et d’autres dispositions de la Loi. Par conséquent, il ne fait aucun doute que l’ « expéditeur » en l’espèce était OOCL et non Boutique Jacob. En effet, non seulement OOCL est l’entité qui a conclu directement un contrat avec CFCP par voie de contrat confidentiel, mais c’est aussi OOCL qui a remis le conteneur à CFCP à Vancouver. Donc, il y avait, comme l’exigeait l’article 137, un accord écrit entre le transporteur ferroviaire, CFCP, et l’expéditeur, OOCL. Le fait qu’OOCL était le transporteur retenu par Pantainer pour transporter les marchandises de Hong Kong à Montréal ne s’oppose pas au fait qu’OOCL était l’ « expéditeur » en ce qui a trait au contrat de transport par rail.

 

[48]         L’avocat de Boutique Jacob a fait valoir, subsidiairement, que même si nous avons estimé qu’OOCL était l’« expéditeur », CFCP ne pouvait en aucun cas limiter sa responsabilité parce que l’accord écrit présenté en preuve n’était pas signé. À mon avis, cet argument est sans fondement juridique puisqu’aucune des deux parties au contrat confidentiel n’a contesté la validité de l’entente.

 

[49]         Je vais maintenant examiner la question de savoir si CFCP peut limiter sa responsabilité au montant de 1 432,89 $.

 

[50]         Les arguments qu’invoque CFCP relativement à son droit de limiter sa responsabilité sont dans une grande mesure les mêmes que ceux invoqués par OOCL pour se défendre contre l’action intentée par Boutique Jacob. Ces arguments ont été examinés en profondeur par le juge de première instance et c’est pourquoi j’ai examiné minutieusement les motifs qu’il a donnés à l’appui de sa conclusion qu’OOCL n’était pas responsable et que, si elle l’était, sa responsabilité serait limitée à 2 $US par kilo du poids total de la cargaison perdue ou endommagée.

 

[51]         Je tiens à souligner à ce stade-ci que ni la validité ni l’effet des clauses sous-contractuelles et des clauses Himalaya n’ont été contestées par Boutique Jacob dans le présent appel. J’ajouterais que compte tenu de la longue liste de causes qui ont porté sur ces clauses, la décision de Boutique Jacob de ne pas les contester est tout à fait compréhensible et, en fait, est une bonne décision. Par souci de commodité, je reproduis ces clauses qui sont énoncées dans les connaissements de Pantainer et d’OOCL :

 

[traduction]

1.  CONNAISSEMENTS D’OOCL

 

1) Identité et définition du transporteur

 

Orient Overseas Container Line Limited est le seul transporteur aux présentes. « Orient Overseas Container Line » et « OOCL » sont des dénominations commerciales pour le transport fourni par le transporteur.

 

S’il est en dernier ressort déclaré qu’une deuxième personne ou entité, notamment le navire, son propriétaire, l’affréteur d’exploitation, l’affréteur en coque, l’affréteur à temps, l’affréteur à compartiments et l’affréteur d’espaces et/ou le membre d’une alliance et/ou d’un consortium et/ou d’un arrangement conjoint dont le transporteur peut être membre, est également un transporteur/baillaire, alors cette personne ou entité jouit de tous les droits et moyens de défense prévus dans le présent connaissement ou par la loi.

 

Avis est donné par les présentes que le transporteur est un membre des alliances et/ou des consortiums et/ou des arrangements conjoints. Les membres de tels groupes, y compris le transporteur, se réservent le droit de transporter les cargaisons pour d’autres membres et de coopérer autrement pour le transport de cargaisons, sans en aviser le marchand. Dans le cas d’un tel transport, toutefois, les conditions du présent connaissement s’appliquent et le marchand y est lié et le transporteur est réputé dans tous les cas être le transporteur des marchandises, sous réserve des conditions du présent connaissement.

 

2) DÉFINITIONS

 

Sans limitation d’une définition donnée dans une loi applicable mentionnée aux présentes : « NAVIRE » inclut le navire désigné dans le présent connaissement, tout navire de remplacement, tout navire auquel peut s’effectuer un transbordement dans l’exécution du présent contrat et tout navire, embarcation, barge ou autre moyen de transport quel qu’il soit, appartenant au transporteur ou au transporteur participant, ou affrété, exploité ou contrôlé et utilisé par lui dans l’exécution du présent contrat; .… « TRANSPORTEUR PARTICIPANT » inclut tout autre transporteur maritime, fluvial, terrestre ou aérien exécutant une partie du transport prévu aux présentes;

 

 

25) SOUS-TRAITANCE ET INDEMNISATION

 

a) Le transporteur a le droit de donner en sous-traitance , aux conditions conformes à toute loi applicable, la totalité ou une partie des tâches accomplies par le transporteur dans le présent connaissement relativement aux marchandises.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

2.  CONNAISSEMENTS DE PANTAINER

 

3. SOUS-TRAITANCE :

 

3.1    Le transporteur a le droit de sous-traiter directement ou indirectement à n’importe quelle condition la totalité ou une partie de la manutention, de l’entreposage ou du transport des marchandises ainsi que toutes les tâches effectuées par le transporteur relativement aux marchandises.

 

3.2    Chaque préposé, représentant ou sous-traitant du transporteur peut invoquer les mêmes droits, exonérations de responsabilité, moyens de défense et immunités que ceux dont dispose le transporteur. À cet égard, le transporteur est considéré comme le mandataire ou fiduciaire de ce préposé ou représentant, qui est réputé être partie au contrat attesté par le présent connaissement.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

[52]         Il est également important de répéter ce que le juge a clairement dit dans ses motifs, c’est‑à‑dire qu’en raison de la clause sous-contractuelle figurant dans le connaissement de Pantainer (clause 3.1), Boutique Jacob a été clairement informée de la possibilité que la totalité ou une partie du transport de ses marchandises serait effectuée par des sous-traitants et que ceux‑ci s’acquitteraient de leurs obligations aux conditions applicables à elle. Donc, Boutique Jacob savait ou aurait dû savoir que la partie du transport par chemin de fer pourrait être effectuée par un sous‑traitant dont les conditions s’appliqueraient à elle.

 

[53]         Le point de départ du droit de CFCP de limiter sa responsabilité est manifestement le contrat confidentiel, que je vais maintenant examiner. Sous le titre CONDITIONS GÉNÉRALES, le contrat confidentiel prévoit en termes clairs que le contrat est assujetti à toutes les conditions énoncées, entre autres, au tarif CPRS 7589 (clause 1). Il prévoit encore que [traduction] « toutes les expéditions de marchandises en vertu du présent contrat seront assujetties à toutes les conditions applicables d[u] CPRS 7589… » et que la responsabilité de CFCP ne dépassera en aucun cas la somme de 250 000 $ pour le contenu de tout conteneur de 20, 40 ou 45 pieds de long (clause 5).

 

[54]         Je vais examiner maintenant le tarif CPRS 7589, intitulé [traductionConditions spéciales concernant le transport par chemin de fer de conteneurs d’importation et d’exportation, chargés ou vides, appartenant à d’autres entreprises que les transporteurs ferroviaires ou ordinaires. La clause 1.A. du tarif prévoit, relativement au contenu des conteneurs de 20 et 40 pieds, que la responsabilité de CFCP sera limitée au moindre des montants suivants : [traduction] « … 1) La valeur du contenu à l’endroit et au moment où il a été chargé dans le conteneur … 2) La somme de 10 000 $ [pour les conteneurs de 20 pieds] ou de 20 000 $ [pour les conteneurs de 40 pieds]…; 3) un montant égal à la responsabilité de la compagnie maritime selon le connaissement maritime … ». [Non souligné dans l’original.]

 

[55]         CFCP déclare qu’en raison du tarif CPRS 7589, qui a été incorporé au contrat confidentiel, elle a le droit de limiter sa responsabilité à celle énoncée dans le connaissement d’OOCL. À mon avis, l’argument de CFCP doit être retenu. Comme je l’ai mentionné plus haut, Boutique Jacob savait ou aurait dû savoir que le contrat de transport signé par Pantainer pourrait être donné en sous-traitance à d’autres entreprises dont les conditions seraient applicables à elle. Les dispositions énoncées au tarif CPRS 7589 sont les conditions en question.

 

[56]         Le juge n’a pas pu arriver à cette conclusion parce qu’il a estimé que les dispositions relatives à la limitation de responsabilité énoncées au tarif CPRS 7589 étaient remplacées par la limitation de responsabilité prévue au contrat confidentiel, c’est‑à‑dire 250 000 $. À mon avis, le juge a clairement eu tort à cet égard. Ses termes, au paragraphe 49 de ses motifs, valent la peine d’être reproduits :

 

[traduction] [49]     Cette disposition, dont le paragraphe d’introduction est exactement le même que celui du tarif CPRS 7589, remplace clairement la limitation de responsabilité énoncée dans le tarif. Par conséquent, même si nous voulions appliquer l’entente conclue entre CFCP et OOCL, la responsabilité maximale de CFCP serait de 250 000 $.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

[57]         Comme le juge l’explique très clairement dans le passage susmentionné, la clause 5 du contrat confidentiel est censée établir non pas une responsabilité minimale, mais une responsabilité maximale de 250 000 $ et, de ce fait, elle n’est pas incompatible avec les dispositions relatives à la limitation de responsabilité énoncée dans le tarif CPRS 7589.

 

[58]         Je conclus donc qu’en raison du tarif CPRS 7589, CFCP avait le droit de limiter sa responsabilité à un montant équivalant à celui figurant dans le connaissement d’OOCL, c’est‑à‑dire  à 2 $US le kilo du poids brut des marchandises perdues ou endommagées.

 

[59]         Quoi qu’il en soit, même si CFCP ne pouvait pas invoquer les dispositions relatives à la limitation de responsabilité du tarif CPRS 7589, elle pouvait néanmoins, en raison des clauses Himalaya énoncées dans les connaissements tant de Pantainer que d’OOCL (clause 3.2 de Pantainer et clause 1 d’OOCL),  invoquer les dispositions relatives à la limitation de responsabilité qu’on retrouve dans ces connaissements. Je n’ai pas besoin de répéter le fondement de cette conclusion, que le juge de première instance a correctement exprimé dans ses motifs relatifs à la responsabilité d’OOCL. Par conséquent, que ce soit par le truchement du tarif CPRS 7589 ou par celui des dispositions relatives à la limitation de responsabilité énoncée dans les connaissements susmentionnés, CFCP a le droit de limiter sa responsabilité à la somme de 1 432,89 $.

 

[60]         Vu ma conclusion relativement au droit de CFCP de limiter sa responsabilité pour la perte subie par Boutique Jacob, il n’est pas nécessaire que j’examine la question soulevée par Boutique Jacob dans son appel incident.

 


DISPOSITIF

[61]         En conséquence, j’accueillerais l’appel, j’annulerais la décision de la Cour fédérale et, rendant le jugement qui aurait dû être rendu, je condamnerais CFCP à verser à Boutique Jacob la somme de 1 432,89 $ avec intérêts au taux de 6 % à compter du 27 avril 2003 jusqu’à la date du paiement. Enfin, j’adjugerais à CFCP ses dépens tant en appel qu’en première instance, et devant l’instance inférieure et je rejetterais l’appel au pourvoi incident avec dépens.

 

 

« M. Nadon »

j.c.a.

 

 

« Je suis d’accord

            Marc Noël, j.c.a. »

 

« Je suis d’accord

            Denis Pelletier, j.c.a. »

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                                                            A-116-06

 

INTITULÉ :                                                                           CFCP c. BOUTIQUE JACOB INC. ET AUTRES

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   le 19 novembre 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                le juge Nadon

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                             le juge Noël

                                                                                                le juge Pelletier

 

DATE DES MOTIFS :                                                          le 6 mars 2008

 

 

COMPARUTIONS :

 

David Rheault

Karine Joizil

 

 

POUR L’APPELANTE

 

 

J. Kendrick Sproule

Shawn Faguy

POUR L’INTIMÉE

 

 

Jean-Marie Fontaine

Peter Pamel

 

 

POUR LES INTERVENANTES

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Fasken Martineau DuMoulin

Montréal (Québec)

 

POUR L’APPELANTE

 

 

 

Le cabinet de J. Kendrick Sproule

Montréal (Québec)

 

POUR L’INTIMÉE

 

 

 

Borden Ladner Gervais, s.r.l.

Montréal (Québec)

POUR LES INTERVENANTES

 

 

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