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Date : 20080211

Dossier : A-45-07

Référence : 2008 CAF 52

 

CORAM :      LE JUGE NOËL

                        LA JUGE SHARLOW

                        LE JUGE RYER

 

ENTRE :

LA NATION CRIE D’ERMINESKIN et LE CONSEIL TRIBAL D’ERMINESKIN

appelants

et

GEORGE LESLIE MINDE

intimé

 

 

 

Audience tenue à Edmonton (Alberta), le 14 janvier 2008

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 11 février 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                                      LE JUGE NOËL

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                       LA JUGE SHARLOW

LE JUGE RYER

 


Date : 20080211

Dossier : A-45-07

Référence : 2008 CAF 52

 

CORAM :      LE JUGE NOËL

                        LA JUGE SHARLOW

                        LE JUGE RYER

 

ENTRE :

LA NATION CRIE D’ERMINESKIN et LE CONSEIL TRIBAL D’ERMINESKIN

appelants

et

GEORGE LESLIE MINDE

intimé

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE NOËL

[1]               L’appel vise la décision par laquelle le juge Lemieux de la Cour fédérale (le juge des requêtes) a accueilli la demande de contrôle judiciaire de l’intimé (l’intimé ou M. Minde) et annulé la résolution, adoptée par le Conseil tribal d’Ermineskin (le Conseil tribal) le 4 décembre 2005, confirmant que M. Minde avait quitté son poste de chef conformément à la Constitution de la tribu d’Ermineskin. Cette décision se fondait sur le fait que le Conseil tribal avait adopté cette résolution sans accorder à M. Minde le droit d’être entendu.

 

[2]               Les appelants font valoir que la demande de contrôle judiciaire de M. Minde ne visait pas la bonne décision puisque la décision selon laquelle il avait quitté son poste n’avait pas été prise par le Conseil tribal, mais bien par le Conseil des anciens d’Ermineskin (le Conseil des anciens). Ils soutiennent que le pouvoir de destituer M. Minde relevait de la compétence exclusive du Conseil des anciens.

 

[3]               L’affaire a été instruite par le juge des requêtes sur fondement que les dispositions législatives applicables sont la Constitution et les règlements du Système tribal d’Ermineskin, joints à l’affidavit de J. Wilton Littlechild, c.r., avocat représentant la Nation crie d’Ermineskin (la Constitution de la bande) (dossier d’appel, vol. II, p. 400). Dans ses motifs, le juge des requêtes a notamment fait référence au Règlement 83-01, en sa version modifiée, et en particulier aux sections A et B qui énoncent respectivement les Règles d’éthique applicables au chef et aux conseillers et les conditions d’admissibilité, la nomination et les fonctions des membres du Conseil des anciens. Les dispositions pertinentes du Règlement 83-01 sont reproduites à l’annexe A des présents motifs.

 

FAITS PERTINENTS

[4]               M. Minde était chef de la Nation crie d’Ermineskin. Il a été élu pour la première fois en 2002 et réélu le 31 août 2005, soit après le début du processus qui a mené à sa destitution mais avant sa fin.

 

[5]               Depuis 1983, le chef et les membres du Conseil tribal de la Nation crie d’Ermineskin sont choisis selon la coutume de la bande et, par conséquent, les élections ne sont pas régies par les dispositions de la Loi sur les Indiens (articles 74 à 79).

 

[6]               En apparente conformité avec l’article 12 des Règles d’éthique, M. Minde a signé un protocole d’entente avec le Conseil des anciens (alors appelé le Sénat des anciens) dans lequel il convenait (entre autres choses) de ce qui suit (dossier d’appel, vol. II, p. 318) :

[traduction] En tant que chef, je suis moi‑même au fait de mes responsabilités envers les membres de la Nation crie d’Ermineskin et je conviens ainsi par les présentes que mon poste devient vacant en cas de violation des règles prévues par le Système tribal d’Ermineskin. […]

 

L’article 12 prévoit que, lorsqu’ils prêtent serment et entrent en fonction, le chef et les conseillers expriment leur volonté de se soumettre aux Règles d’éthique en signant publiquement le protocole d’entente à une assemblée générale des membres. Suivant l’affidavit de George Ermineskin, le protocole d’entente a été signé quand M. Minde a prêté serment pour son entrée en fonction (dossier d’appel, vol. II, p. 2, par. 3). Le document n’indique pas si cela a été fait au début du premier ou du second mandat de M. Minde.

 

[7]               Le 8 août 2005, le Conseil tribal a adopté une résolution qui élargit la composition du Conseil des anciens de manière à inclure tous les anciens de la Nation crie d’Ermineskin et fixe le quorum à neuf anciens. Au moment de l’adoption de cette résolution, le Règlement 83-01 prévoyait, aux alinéas 1b) et 2e) de la section B, que le Conseil était constitué de cinq membres et fixait le quorum à trois membres.

 

[8]               Le 12 août 2005, avant la réélection de M. Minde, un Conseil des anciens a été constitué lors d’une assemblée réunissant 34 des 77 anciens et sept des neuf membres du Conseil tribal. Sur la foi de la résolution modifiant la composition et le quorum du Conseil des anciens, neuf anciens (et trois substituts) ont été choisis parmi tous les anciens de la Nation crie d’Ermineskin pour siéger au Conseil des anciens et faire enquête sur les irrégularités reprochées à M. Minde et à un autre membre du Conseil tribal relativement à une opération financière engageant des fonds de la Nation crie d’Ermineskin (motifs, paragraphe 35).

 

[9]               Le Conseil des anciens a employé les termes suivant pour décrire son mandat (dossier d’appel, vol. II, p. 608) :

[traduction]

[…] les membres désignés du Conseil des anciens (quorum de neuf) prendront, en fonction de leurs conclusions, les mesures disciplinaires prévues

 

a.       à l’article 2 de la section B du Règlement no E83-01 relatif à l’exercice des activités du Conseil d’Ermineskin;

 

b.       à l’alinéa G, de l’article 28 du Règlement E86-01 relatif aux élections selon la coutume de la Tribu d’Ermineskin.

 

Un rapport final sera présenté, de même que les faits et les infractions que le Conseil des anciens pourrait sanctionner au moyen de mesures disciplinaires contre leurs auteurs.

 

[10]           L’opération visée par l’enquête comportait une série de chèques, totalisant 149 000 $, signés par M. Minde et cosignés par Bob Small, qui était un membre élu du Conseil tribal à ce moment‑là. L’argent a été utilisé pour acheter du nouveau matériel. On allègue qu’un montant excessif avait été versé à une entité pour laquelle l’oncle de M. Minde travaillait comme agent à commission et que l’opération pouvait potentiellement profiter à M. Minde. Le matériel acheté n’a toujours pas été reçu et le montant versé n’a pas été recouvré.

 

[11]           Bob Small, le conseiller qui a cosigné les chèques totalisant la somme de 149 000 $, s’est volontairement présenté devant les membres désignés du Conseil des anciens au moment où on lui a demandé de le faire. Il a répondu aux questions qu’on lui a posées. Il a finalement été démis de ses fonctions et on lui a interdit de se présenter comme candidat à une charge élective pendant 10 ans.

 

[12]           Voici un résumé des principales mesures prises par le Conseil des anciens au cours de l’enquête et ses tentatives en vue d’obtenir la version des faits de M. Minde :

a)         Le 23 août 2005, les membres désignés ont envoyé à M. Minde un avis d’enquête/de suspension indiquant ceci : [traduction] « Après avoir examiné les renseignements concernant la façon dont s’est effectuée l’opération de 149 000 $ […], les neuf membres désignés du Conseil des anciens d’Ermineskin suspendent par les présentes [le chef Minde et Bob Small] de leurs fonctions et imposent la suspension de tous les pouvoirs et privilèges, avec prise d’effet immédiate et sans solde jusqu’à ce que l’enquête soit terminée » et « conformément à la section B, Conseil des anciens, article 2, Fonctions [des Règles d’éthique], enjoignent au Conseil tribal de se conformer immédiatement à cette directive et à faire appliquer cette suspension avec prise d’effet immédiate ». (dossier d’appel, vol. II, p. 324.)

 

b)         Le 24 août 2005, les membres désignés ont envoyé au chef Minde une première invitation à comparaître devant eux. Le 1er septembre 2005, une deuxième invitation à comparaître a été signifiée à M. Minde (dossier d’appel, vol. II, p. 325 et 326).

 

c)         Le 8 septembre 2005, le président du Conseil des anciens, George P. Ermineskin, a écrit à M. Minde pour lui rappeler qu’il avait omis de comparaître à deux occasions (dossier d’appel, vol. II, p. 330).

 

d)         Le 22 septembre 2005, le président du Conseil des anciens a donné à M. Minde un autre avis de convocation et l’a informé qu’il serait destitué de ses fonctions de chef s’il ne comparaissait pas. Une autre lettre a été envoyée le 17 octobre 2005 pour aviser M. Minde qu’il était toujours suspendu et qu’il devait comparaître devant les membres désignés au plus tard le 31 octobre 2005. Un dernier avis de convocation a ensuite été envoyé le 27 octobre 2005 (dossier d’appel, vol. II, p. 330, 342 et 352).

 

e)         Le 31 octobre 2005, les membres désignés ont informé M. Minde qu’il avait été démis de ses fonctions de chef (dossier d’appel, vol. II, p. 358).

 

f)          Le 14 novembre 2005, le Conseil des anciens a avisé M. Minde de la mesure suivante :

 

[traduction] Par conséquent, nous, les membres désignés du Conseil des anciens, enjoignons au Conseil tribal d’Ermineskin de mettre en application la présente décision, également par voie de motion du Conseil de bande, dans le respect des pouvoirs conférés par la Constitution de la Tribu d’Ermineskin et les politiques, règlements, coutumes et traditions de la Première nation d’Ermineskin. (dossier d’appel, vol. II, p. 361)

 

[13]           Rien n’indique que M. Minde a répondu à l’une ou l’autre des communications du Conseil des anciens.

 

[14]           Le 4 décembre 2005, à l’occasion d’une assemblée spéciale du Conseil tribal à laquelle M. Minde n’a pas assisté et n’avait pas été convoqué (affidavit de M. Minde, dossier d’appel, vol. I, p. 50, par. 9), la résolution suivante (la résolution du Conseil de bande du 4 décembre) a été adoptée :

[traduction]

 

Il est résolu, à une réunion dûment convoquée, que nous, le Conseil tribal d’Ermineskin, prenons la décision qui suit en vertu du Code d’éthique du Conseil faisant partie de la Constitution de la Tribu d’Ermineskin :

 

Attendu que le Conseil tribal d’Ermineskin a accepté la recommandation faite par le Conseil des anciens d’Ermineskin de mettre en application l’article 15 le 31 octobre 2005, et

 

Attendu que George L. Minde n’a pas comparu devant le Conseil des anciens d’Ermineskin dans le délai imparti,

 

Par conséquent, le Conseil tribal d’Ermineskin exerce par les présentes le pouvoir que lui confère l’article 11, par suite de quoi George L. Minde est réputé avoir quitté son poste de chef, en raison de la violation des articles 4, 5 et 9 du Code d’éthique faisant partie de la Constitution de la Tribu d’Ermineskin.

 

[15]           Le 16 décembre 2005, la Nation crie d’Ermineskin et le Conseil tribal ont déposé devant la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta une déclaration dans laquelle ils alléguaient ce qui suit à l’encontre de M. Minde :

[traduction]

 

i.    Au moment où il a prêté serment d’entrée en fonction, M. Minde a signé avec le Sénat des anciens d’Ermineskin une entente, en date du 27 octobre 2004, par laquelle il convenait que, s’il devait enfreindre les règles du Système tribal d’Ermineskin, son poste serait réputé vacant.

 

ii.    M. Minde a enfreint le Code d’éthique et, par conséquent, l’entente signée le 27 octobre 2004.

 

iii.   M. Minde a manqué à son obligation fiduciaire en tant que chef du fait de ses transactions avec un concessionnaire d’automobiles et de sa participation à l’acquisition frauduleuse d’équipement lourd à prix excessif.

 

iv.   M. Minde est coupable d’abus de confiance pour avoir comploté en vue de l’achat de l’équipement lourd par la Nation crie d’Ermineskin.

 

v.   M. Minde est coupable de tromperie et de fausse représentation en raison de ses transactions avec un membre de la tribu et du fait qu’il s’est arrangé pour que trois chèques soient endossés et remis au concessionnaire sans que le Conseil tribal soit au courant ou y consente.

 

[16]           Le 30 janvier 2006, M. Minde a présenté une demande de contrôle judiciaire visant la résolution du Conseil de bande du 4 décembre. Il a demandé réparation en raison du manquement à l’équité procédurale dans l’adoption de cette résolution par le Conseil tribal étant donné qu’il n’avait pas été avisé de la tenue de l’assemblée spéciale, qu’il n’était pas au courant de la mesure proposée ni des allégations formulées à son endroit et qu’il n’avait pas eu la possibilité de se défendre.

 

[17]           Le 8 février 2006, le Conseil tribal a obtenu une injonction interlocutoire de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta (juge Belzil) interdisant à M. Minde d’entrer dans les bureaux de la Nation crie d’Ermineskin et d’effectuer des opérations financières pour le compte de la Nation crie d’Ermineskin. On lui a également interdit toute ingérence à l’endroit du personnel de la Nation crie d’Ermineskin.

 

[18]           Le 31 octobre 2006, le juge des requêtes a rendu les motifs de sa décision dans la présente affaire. Il a conclu que le Conseil tribal avait manqué à ses obligations en matière d’équité procédurale en adoptant la résolution du Conseil de bande du 4 décembre. Par ailleurs, il a reporté le prononcé de l’ordonnance jusqu’à ce que les parties aient formulé d’autres observations.

 

[19]           Le 20 décembre 2006, le juge des requêtes a ordonné que la résolution du Conseil de bande du 4 décembre soit annulée.

 

[20]           Toutefois, le 11 avril 2007, le juge Pelletier de la Cour d’appel fédérale a ordonné qu’il soit sursis à l’exécution de l’ordonnance du juge des requêtes jusqu’à ce que le présent appel soit instruit et qu’une décision soit rendue (2007 CAF 16). Il a estimé qu’un préjudice irréparable avait été établi pour les motifs suivants (par. 4) :

[…] Les appelants ont cherché à obtenir de la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta une injonction empêchant l’intimé d’entrer dans le bureau de la bande. [M. Minde] a obtenu un ajournement de cette demande en s’engageant à ne pas s’approcher de ce bureau en attendant la décision sur la demande d’injonction. [M. Minde] a manqué à son engagement en entrant dans le bureau de la bande et en prenant l’initiative de verser approximativement 1,8 million de dollars à des membres de la bande, une dépense non autorisée et pour laquelle aucun budget n’existait, ce qui a eu de graves conséquences financières sur les opérations de la bande. Principalement en raison de la gravité de cet incident, le juge Belzil a conclu que les appelants subiraient un préjudice irréparable s’il n’accordait pas une injonction. Je partage son opinion quant à la requête en sursis à l’exécution de l’ordonnance qui m’a été présentée.

 

[21]           Dans l’état actuel des choses, la résolution du Conseil de bande du 4 décembre qui confirmait que M. Minde avait quitté ses fonctions de chef demeure en vigueur, tout comme l’injonction par laquelle la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta a interdit à M. Minde d’entrer dans les bureaux de la bande et d’effectuer des opérations financières pour le compte de la bande.

 

DÉCISION DE LA COUR FÉDÉRALE

[22]           Pour déterminer si le Conseil tribal a manqué aux règles d’équité procédurale, le juge des requêtes a appliqué la norme de la décision correcte. Il a conclu que le Conseil tribal avait manqué aux règles d’équité procédurale en n’entendant pas M. Minde avant d’adopter la résolution du Conseil de bande du 4 décembre (motifs, par. 44) :

Même s’il est bien établi que la portée des règles d’équité procédurale varie en fonction des circonstances, je suis d’avis qu’on ne peut mettre en cause que le demandeur avait droit au respect des règles d’équité procédurale quant à la Résolution [du Conseil de bande] du 4 décembre 2005, où l’on déclarait qu’en application des Règles d’éthique faisant partie de la Constitution de la Tribu d’Ermineskin, le demandeur avait quitté son poste de chef. Le droit du chef Minde de demeurer en fonction était directement touché. Je m’appuie sur ce point sur les arrêts bien connus de la Cour suprême du Canada Nicholson c. Haldeman‑Norfolk (Regional Municipality) Commissioners of Police, [1979] 1 R.C.S. 311; Cardinal c. Établissement de Kent, [1985] 2 R.C.S. 643; et Lakeside Colony of Hutterian Bretherin c. Hofer, [1992] 3 R.C.S. 165.

 

[23]           En concluant ainsi, le juge des requêtes a rejeté la prétention des appelants suivant laquelle la décision de destituer M. Minde avait été prise par le Conseil des anciens qui lui avait donné à maintes reprises la possibilité de se faire entendre et M. Minde avait demandé le contrôle judiciaire de la mauvaise décision. Selon le juge des requêtes, le pouvoir de prendre des mesures disciplinaires à l’endroit du chef et de déclarer son poste vacant relevait du Conseil tribal.

 

[24]           Pour parvenir à cette conclusion, le juge des requêtes s’est d’abord appuyé sur quatre facteurs extrinsèques à la Constitution de la bande en vertu de laquelle M. Minde était réputé avoir quitté son poste de chef (motifs, par. 53 à 66) :

1.   La preuve ne démontrait pas que la modification apportée à la composition et au quorum du Conseil des anciens avait été ratifiée par une majorité des membres de la Nation crie d’Ermineskin et, par conséquent, les actions prises par le Conseil des anciens étaient invalides.

 

2.   La preuve révélait que les membres désignés du Conseil des anciens considéraient eux‑mêmes ne pas avoir le pouvoir de prendre une décision exécutoire relativement à M. Minde.

 

3.   Le Conseil tribal ne pouvait faire valoir devant la Cour qu’il n’était pas le décideur puisqu’il avait soutenu le contraire devant la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta.

 

4.   Le libellé de la résolution du Conseil de bande montrait que le Conseil tribal agissait en vertu de son propre pouvoir de destituer le chef Minde.

 

[25]           Le juge des requêtes a ensuite examiné les dispositions pertinentes de la Constitution de la bande. Il a fait remarquer que les questions touchant l’exercice d’une charge élective de chef et de conseiller devaient être traitées au premier palier par le Conseil tribal lui‑même, avec possibilité d’appel au Conseil des anciens dont la décision était définitive, ce qui laisse entendre que le Conseil des anciens était habilité à décider en premier ressort que le chef avait quitté son poste (motifs, par. 67 et 68).

 

[26]           Le juge des requêtes a effectivement fait observer que les Règles d’éthique contiennent des dispositions qui prévoient qu’un chef ou un conseiller est réputé avoir quitté ses fonctions et que son poste devient vacant lorsqu’il a commis certains actes interdits, sans élaborer davantage. Toutefois, il a inféré qu’un droit à une audition devant le Conseil tribal existe également en pareilles circonstances (motifs, par. 69). Enfin, il a affirmé qu’il ne fallait pas tenir compte du protocole d’entente signé par M. Minde à son entrée en fonction comme chef de la Nation crie d’Ermineskin (motifs, par. 71).

 

POSITION DES PARTIES

[27]           À l’appui de leur appel, les appelants prétendent que le juge des requêtes n’a pas tenu compte de la Constitution de la Tribu d’Ermineskin et des Règles d’éthique applicables au chef et aux conseillers. En particulier, les appelants soutiennent que le Conseil des anciens jouit du pouvoir exclusif de surveiller la conduite du chef et de prendre à son endroit des mesures disciplinaires qui pourront être indiquées le cas échéant (Règlement 83-01, section B, alinéa 2a)) et que M. Minde était réputé avoir quitté son poste par suite de l’exercice de ce pouvoir.

 

[28]           Selon les appelants, la résolution adoptée par la suite par le Conseil tribal, qui confirmait que M. Minde avait été démis de ses fonctions, n’était requise qu’à des fins de mise en application, comme l’indique clairement l’avis du 14 novembre 2005 (voir le paragraphe 12 des présents motifs, alinéa f)). Toutefois, la décision était celle du Conseil des anciens et elle était exécutoire à l’égard de tous, y compris du Conseil tribal et de ses membres. Les appelants prétendent que le juge des requêtes a commis une erreur en tirant une conclusion différente.

 

[29]           Les appelants allèguent en outre que le juge des requêtes a commis une erreur de droit lorsqu’il a conclu que les actions du Conseil des anciens étaient invalides en raison de sa composition et son quorum. Selon les appelants, les dispositions du Règlement 83‑01, section B, régissant la composition et le quorum sont directives et le fait d’élargir la composition du Conseil des anciens pour inclure tous les anciens et de fixer le quorum à neuf anciens n’entraîne aucune injustice.

 

[30]           Enfin, les appelants avancent que le juge des requêtes a commis une autre erreur en concluant que le protocole d’entente signé par M. Minde lorsqu’il a prêté serment n’avait qu’une valeur protocolaire.

 

[31]           Pour sa part, M. Minde soulève comme question préliminaire l’argument selon lequel la décision du Conseil des anciens, s’il s’agissait du décideur, ne peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire puisque le Conseil des anciens n’est pas un office fédéral au sens de l’article 18 de la Loi sur les Cours fédérales. Par ailleurs, M. Minde soutient la décision du juge des requêtes et sa conclusion suivant laquelle le pouvoir du Conseil des anciens ne va pas jusqu’à la destitution du chef ou la prise de mesures disciplinaires à son endroit.

 

ANALYSE ET DÉCISION

[32]           La norme de contrôle de la décision du juge des requêtes est celle de la décision correcte en ce qui a trait aux questions de droit et celle de la décision raisonnable en ce qui a trait aux conclusions mixtes de fait et de droit (Housen c. Nikolaisen, [2002] 2 R.C.S. 235). Il est bien établi que l’examen de la question de savoir si les règles de l’équité procédurale ont été appliquées dans une situation donnée s’effectue suivant la norme de la décision correcte (Syndicat canadien de la fonction publique c. Ontario (Ministre du Travail), [2003] 1 R.C.S. 539, par. 100). La question à trancher dans le présent appel est de savoir s’il était loisible au juge des requêtes de conclure que la décision déclarant que M. Minde avait quitté son poste était celle du Conseil tribal et non celle du Conseil des anciens. Pour les motifs exposés ci‑dessous, je suis d’avis que cette question devra finalement être tranchée suivant une interprétation appropriée de la Constitution de la bande, exercice qui exige l’application de la norme de la décision correcte.

 

[33]           En ce qui concerne l’argument préliminaire de M. Minde suivant lequel la décision du Conseil des anciens, s’il s’agissait du décideur, ne peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire parce qu’il n’est pas un office fédéral au sens de l’article 18 de la Loi sur les Cours fédérales, il me suffit de dire que la compétence de la Cour fédérale prévue à l’article 18 ne dépend pas de la forme de l’entité mais de son pouvoir de décider. Dans la mesure où le Conseil des anciens est habilité à démettre M. Minde de sa fonction de chef conformément à la Constitution de la bande et c’est ce qu’il a fait, sa décision peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire en vertu de l’article 18.

 

[34]           Dans ses motifs, le juge des requêtes a averti qu’il était difficile d’interpréter la Constitution de la bande et que toute conclusion devait être tirée sous réserve compte tenu du fait que le document était entaché de lacunes et avait besoin d’une mise à jour (motifs, paragraphe 66) :

[…] C’est d’ailleurs là l’opinion qu’a exprimée M. Littlechild lors de la première lecture d’une mise à jour projetée de la Loi coutumière relative à l’exercice des activités du Conseil d’Ermineskin. M. Littlechild a déclaré (page 84 du dossier des défendeurs) : [TRADUCTION] « ce règlement remontait à 1983 et nécessitait d’être mis à jour d’une manière qui ait du sens et soit de portée pratique ».

 

[35]           En raison de ces difficultés, qui sont bien réelles, le juge des requêtes a d’abord examiné des facteurs extrinsèques à la Constitution de la bande pour parvenir à sa décision. Premièrement, il a constaté que la résolution du 8 août 2005, qui était censée augmenter la composition et le quorum du Conseil des anciens, n’avait jamais été ratifiée par les membres de la bande. Par conséquent, le Conseil des anciens ne respectait pas les exigences du Règlement 83-01, qui prévoyait une formation de cinq membres et un quorum de trois membres. Le juge des requêtes a ensuite conclu que ces exigences avaient un caractère impératif (par opposition à directif) et que, par conséquent, les actions prises par le Conseil des anciens étaient invalides du début à la fin (motifs, par. 53 à 58).

 

[36]           À mon humble avis, il s’agirait d’une considération pertinente si la décision à l’étude était celle du Conseil des anciens. De plus, je m’interroge sur la conclusion du juge des requêtes voulant que les actions prises par le Conseil des anciens au cours de l’enquête sur les opérations financières effectuées par M. Minde soient invalides. Le raisonnement exact du juge est que les actions en question ont été prises par un Conseil d’anciens constitué de tous les anciens de la Nation crie d’Ermineskin dont le quorum était fixé à neuf, alors que l’exigence impérative de l’époque, énoncée à la section B du Règlement 83-01, était une composition de cinq membres et un quorum de trois membres (motifs, par. 54 et 55).

 

[37]           La question de savoir si une exigence législative possède un caractère impératif (plutôt que directif), en ce sens que les actes non conformes à cette exigence doivent être écartés, doit être analysée à la lumière de l’objet de la loi à l’étude et de l’action particulière que l’on cherche à faire invalider. La question à trancher dans le présent contexte est de savoir si le fait d’écarter les actions prises par le Conseil des anciens en raison du non‑respect des exigences énoncées au Règlement 83‑01 favorise ou contrecarre l’objet de la Constitution de la Tribu d’Ermineskin (voir Sparvier c. Bande indienne Cowessess (1re inst.), [1993] 3 C.F. 142, par. 22, et la jurisprudence citée aux par. 23, 24 et 25).

 

[38]           Le juge des requêtes n’a pas examiné cette question. S’il l’avait fait, il serait peut‑être arrivé à une conclusion différente. J’ai particulièrement à l’esprit le fait qu’il semble, au vu du dossier, que l’élargissement de la composition du Conseil des anciens de manière à inclure tous les anciens et l’établissement du quorum à neuf anciens, au lieu de trois, visaient à donner au Conseil des anciens plus de légitimité (et non moins) compte tenu de l’importance du mandat entrepris. Rien dans la preuve n’indique que l’augmentation du nombre de personnes siégeant au Conseil des anciens ou que l’augmentation concomitante du quorum a été adoptée dans un but illégitime ou qu’elle a causé, ou visait à causer, un préjudice à M. Minde. Dans ces circonstances, je doute que les actions du Conseil des anciens puissent être annulées au seul motif qu’il a exercé ses fonctions avec un plus grand nombre de personnes et un quorum accru. Toutefois, il n’est pas nécessaire de trancher maintenant cette question étant donné que la décision du Conseil des anciens n’est pas visée par la demande de contrôle judiciaire présentée par M. Minde.

 

[39]           Le deuxième facteur extrinsèque sur lequel le juge des requêtes s’est appuyé est l’état d’esprit des membres du Conseil des anciens. À son avis, il était fort révélateur que les membres considéraient eux‑mêmes ne pas avoir le pouvoir de rendre une décision définitive puisqu’ils estimaient que leur décision devait être ratifiée par le Conseil tribal (motifs, par. 59 et 60).

 

[40]           Parallèlement, le juge des requêtes s’est fondé sur la position adoptée par les appelants devant la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta. Il a statué que les appelants ne pouvaient faire valoir dans la demande dont il était saisi que le Conseil des anciens était le décideur compte tenu du fait qu’ils avaient soutenu le contraire devant la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta (motifs, par. 63). En tirant cette conclusion, le juge des requêtes faisait apparemment référence à la déclaration suivante du juge Belzil (2006 ABQB 118) :

[traduction] 35.  Selon les prétentions des [appelants], [M. Minde] a été destitué de son poste de chef de la Nation crie d’Ermineskin par suite de l’adoption d’une résolution du [Conseil tribal] le 4 décembre 2005.

 

[41]           L’avocat des appelants insiste sur ce passage. Il a toujours fait valoir que la décision du Conseil des anciens selon laquelle M. Minde avait quitté son poste devait être mise en application par une résolution du Conseil tribal. Il soutient toutefois que la décision du Conseil des anciens était définitive et exécutoire à l’endroit du Conseil tribal. En toute déférence, le fait que les membres du Conseil des anciens considéraient qu’une résolution du Conseil tribal était nécessaire pour mettre en application leur décision n’apporte aucune solution.

 

[42]           Enfin, le juge des requêtes a conclu que le libellé de la résolution du Conseil de bande du 4 décembre indiquait que le Conseil tribal avait adopté cette résolution dans l’exercice de son propre pouvoir de destitution de M. Minde comme chef (motifs, par. 64). Il a insisté sur le passage suivant de la résolution :

[traduction] […] le Conseil tribal d’Ermineskin exerce par les présentes le pouvoir que lui confère l’article 11, par suite de quoi George L. Minde est réputé avoir quitté son poste de chef, en raison de la violation des articles 4, 5 et 9 du Code d’éthique faisant partie de la Constitution de la Tribu d’Ermineskin […]

 

[43]           Cette déclaration soulève la question de savoir si le Conseil tribal entérinait la décision exécutoire du Conseil des anciens comme les appelants le prétendent ou s’il exerçait un pouvoir indépendant pour suivre (ou ne pas suivre) la décision du Conseil des anciens.

 

[44]           En toute déférence, la question en l’espèce doit, finalement, être tranchée eu égard à la Constitution de la bande. La question qui se pose est de savoir quelle entité – le Conseil des anciens ou le Conseil tribal – était habilitée à prendre des mesures disciplinaires à l’endroit du chef et à déclarer qu’il avait cessé d’occuper sa fonction. Le juge des requêtes a abordé cette question vers la fin de ses motifs (par. 66 à 71). Le raisonnement qui l’a amené à conclure que le Conseil tribal était le décideur repose essentiellement sur le fait que, dans le cas d’une suspension d’une charge élective fondée sur les articles 7, 8 et 9 des Règles d’éthique énoncées au Règlement 83-01 (voir l’annexe A), il existe un droit à une audition devant le Conseil tribal comme le prévoit l’article 10, avec appel au Conseil des anciens en vertu de l’article 15 (motifs, paragraphe 68). Si tel est le cas, le Conseil des anciens ne peut avoir été le décideur en l’espèce.

 

[45]           Le droit d’appel prévu à l’article 15 ne s’applique toutefois qu’à l’égard des « suspensions » (ou réprimandes). Or, il n’est pas question de suspension en l’espèce. Les articles 7 et 9 sont les seules dispositions à l’égard desquelles une suspension est prévue comme seule sanction et le droit d’être entendu par le Conseil tribal est limité à ces deux dispositions. Fait important, aucun droit d’audition devant le Conseil tribal n’est prévu relativement à la violation des articles 8 ou 11, ces deux dispositions pouvant mener à la perte de la charge par la personne concernée.

 

[46]           Le juge des requêtes a surmonté cet obstacle en inférant qu’un droit à une audition devant le Conseil tribal devait néanmoins exister dans les cas susceptibles d’entraîner la perte d’une charge (motifs, par. 69). Il a inféré l’existence de ce droit de l’alinéa 32a) du Règlement E86‑01 qui régit [traduction] « l’établissement du Conseil de bande et l’élection de ses membres »:

[traduction]

32a)     Conformément aux articles 8, 9 et 10 du Code d’éthique du Système tribal d’Ermineskin, le chef ou un conseiller élu est destitué dans les cas suivants :

 

i.    il décède;

 

ii.    il présente en bonne et due forme sa démission par écrit;

 

iii.   il est reconnu coupable d’un acte criminel;

 

iv.   il ne prend pas part, sans motif valable, à l’administration de la tribu pendant quatre (4) jours ouvrables consécutifs.

 

[47]           Après avoir discuté de ces dispositions et cité le paragraphe introductif, le juge des requêtes a affirmé ce qui suit (motifs, par. 69) :

[…] Pour que ces dispositions aient un sens, il semble qu’on doit supposer qu’a été intégré par renvoi au Règlement E‑86‑01 le pouvoir décisionnel et en matière d’audience du Conseil tribal quant au renvoi du chef et des conseillers, sous réserve d’un appel auprès du Conseil des anciens.

 

[48]           Je ferais d’abord observer que, si tel avait été le cas, le recours qui se serait offert à M. Minde en l’espèce aurait été un appel au Conseil des anciens. Mais, plus important encore, une audition devant le Conseil tribal n’a pas à être inférée pour que ces dispositions aient un sens. Les causes de destitution prévues aux sous‑alinéas i) et ii) ne relèvent pas du pouvoir du Conseil des anciens puisqu’il ne s’agit pas de questions de discipline. Les causes énoncées aux sous‑alinéas iii) et iv) sont des questions de discipline qui sont susceptibles d’entraîner la perte d’une charge élective et qui, par conséquent, relèvent de la compétence exclusive du Conseil des anciens, aux termes de l’alinéa 2a) de la section B des Règles d’éthique. En pareil cas, les Règles d’éthique ne prévoient pas d’audition devant le Conseil tribal.

 

[49]           L’alinéa 2a) de la section B des Règles d’éthique est la seule disposition qui prévoit la surveillance du chef et des conseillers concernant des questions susceptibles d’entraîner la perte de la charge. Cette disposition est rédigée en ces termes :

2a)       Le Conseil des anciens conseille le chef et les conseillers et il surveille la conduite du chef et des conseillers, à l’égard desquels il peut prendre les mesures disciplinaires qui pourront être indiquées le cas échéant, et selon ce qui est prévu au protocole d’entente joint aux présentes à titre d’annexe B.

[Non souligné dans l’original.]

 

[50]           Dans la présente affaire, M. Minde a signé un protocole d’entente avec le Conseil des anciens (qui s’appelait à l’époque le Sénat des anciens) dans lequel il reconnaissait que sa charge deviendrait vacante s’il ne respectait pas les Règles d’éthique (voir le paragraphe 6 des présents motifs). Même si M. Minde propose maintenant que cette entente n’était pas prévue par les Règles d’éthique, il n’existe aucune autre explication pour justifier son existence.

 

[51]           Le juge des requêtes a également écarté le protocole d’entente en le jugeant sans importance. Il a déclaré qu’il avait été signé à des fins protocolaires (Motifs, paragraphe 71). En toute déférence, le fait que le protocole d’entente ait été signé au cours de la cérémonie d’assermentation de M. Minde n’altère en rien son importance. Il n’y a pas lieu d’écarter le protocole d’entente et la reconnaissance par M. Minde, au cours de l’un de ses deux mandats, que l’exercice de sa charge de chef était assujetti au pouvoir du Conseil des anciens de prendre les mesures disciplinaires indiquées à son endroit conformément à l’alinéa 2a) de la section B des Règles d’éthique.

 

[52]           Mis à part le pouvoir de prendre des mesures disciplinaires à l’égard du chef et des conseillers que l’alinéa 2a) confère au Conseil des anciens, la Constitution de la bande ne comporte aucune disposition autorisant d’autres corps dirigeants d’Ermineskin à exercer une surveillance sur le chef et les conseillers concernant des questions susceptibles d’entraîner la perte de leur charge.

 

[53]           Si l’on tient compte des Règles d’éthique dans leur ensemble et des dispositions particulières que nous avons examinées, il devient clair que le pouvoir de prendre des mesures disciplinaires à l’endroit du chef, en cas de violations susceptibles d’entraîner la perte de la charge, appartient au Conseil des anciens. La décision initiale à cet égard et toute révision ou tout réexamen subséquent de cette décision relèvent de la compétence exclusive du Conseil des anciens.

 

[54]           En toute déférence, le juge des requêtes a commis une erreur en interprétant la Constitution de la bande lorsqu’il a considéré qu’elle accordait au Conseil tribal le pouvoir de décider du sort de M. Minde. Seul le Conseil des anciens avait ce pouvoir. Il s’ensuit que M. Minde n’a pas contesté la bonne décision dans sa demande de contrôle judiciaire. Rien n’empêche évidemment M. Minde de demander une prorogation de délai en vue de contester la décision du Conseil des anciens, s’il souhaite le faire.

 

[55]           Pour ces motifs, j’accueillerais l’appel, j’annulerais la décision du juge des requêtes et, rendant la décision qu’il aurait dû rendre, je rejetterais la demande de contrôle judiciaire de M. Minde avec dépens en faveur des appelants.

 

« Marc Noël »

j.c.a.

 

« Je suis d’accord

       K. Sharlow, j.c.a. »

 

« Je suis d’accord

       C. Michael Ryer, j.c.a. »

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 


ANNEXE A

 

[traduction]

 

A. Règles d’éthique – Constitution de la Tribu d’Ermineskin (Règlement 83‑01), en sa version modifiée

 

1.  Le chef et les conseillers de la Nation crie d’Ermineskin disposent du salaire fixé au moyen du processus budgétaire de la Tribu d’Ermineskin.

2.  Aucune autre forme de salaire n’est versée au chef ou aux conseillers à même les ressources de la Tribu.

3.  Le chef et les conseillers ne touchent pas d’honoraires pour les réunions de comité auxquels ils assistent pendant le jour pour y discuter des affaires de la Tribu d’Ermineskin. Les salaires versés tiennent lieu de tels paiements.

4.  Nul individu ou conseiller ne peut autoriser, au nom de la Nation crie d’Ermineskin ou du Conseil, que des fonds soient versés ou engagés, sauf par suite d’une décision du Conseil avec quorum prise à une réunion ordinaire du Conseil. Le pouvoir d’ainsi verser ou engager des fonds doit être délégué à l’Administrateur de la Tribu ou, subsidiairement, le pouvoir à cet égard du chef et des conseillers doit être assorti de limites lors d’une réunion dûment convoquée du Conseil et ratifié lors d’une assemblée générale des membres. Le chef a le pouvoir d’engager des sommes ne dépassant pas 500 $, si la dépense faite satisfait aux critères suivants :

5.  Lorsqu’est traitée une question pouvant conférer un avantage à lui‑même ou à un membre de sa famille, le chef ou le conseiller concerné s’abstient de prendre part à toute discussion ou à toute décision liée à cette question et il s’abstient de voter à son égard.

6.  Les conseillers assistent à toutes les réunions et assemblées, ordinaires, extraordinaires ou générales, convoquées par le chef, à moins qu’ils ne soient malades ou que le chef n’ait autorisé leur absence.

7.  Tout membre du Conseil tribal d’Ermineskin, y compris le chef, absent sans autorisation d’une réunion ordinaire est soustrait de la liste de paye du Conseil et le versement de ses allocations de présence est suspendu jusqu’à ce que le Conseil en décide autrement en application de l’article 10 de la présente Loi coutumière.

8.  Tout membre du Conseil, y compris le chef, qui s’est absenté de trois (3) réunions ordinaires consécutives sans autorisation est réputé avoir quitté ses fonctions et son poste devient vacant.

9.  Tout membre du Conseil, y compris le chef, dont le comportement est inconvenant est immédiatement suspendu de ses fonctions, et le versement de son salaire, de ses frais de déplacement et de ses allocations de présence est suspendu jusqu’à ce que le Conseil en décide autrement en application de l’article 10 ci‑dessous.

10.  Toute violation des articles 7 et 9 entraîne la suspension automatique du membre du Conseil concerné, qui en est avisé par écrit, par suite de quoi il dispose du droit d’être entendu du Conseil. Le Conseil peut réinstaller la personne suspendue dans ses fonctions, avec ou sans salaire, par trois voix sur quatre.

11.  Tout membre du conseil qui enfreint trois (3) quelconques règles d’éthique se voit suspendre le versement de ses allocations de présence et est réputé avoir quitté ses fonctions, de sorte que son poste devient vacant.

12.  Le chef et les conseillers expriment leur volonté de se soumettre aux présentes règles de conduite pendant leur mandat lorsqu’ils prêtent serment à titre de chef ou de conseillers, tel qu’il est prévu à l’annexe A jointe à la présente loi coutumière et au protocole d’entente signé publiquement à une assemblée générale des membres.

13.  […]

14.  […]

15.  Le conseiller concerné a le droit d’en appeler de toute suspension ou réprimande résultant de violations des règles d’éthique ci‑dessus. L’appel est interjeté directement devant le Conseil des anciens établi conformément à la clause B ci‑dessous, dont les décisions sur ces questions sont finales.

 

 

B. Conseil des anciens

1. Conditions d’admissibilité et nomination

a)  Les membres du Conseil des anciens sont choisis parmi une liste de candidats soumise par les anciens.

b)  Le Conseil des anciens est constitué de cinq (5) anciens qui sont membres de la Nation d’Ermineskin.

c)  Un ancien est une personne âgée d’au moins soixante (60) ans qui jouit de l’estime de la collectivité.

d)  L’ancien qui démissionne ou dont la conduite est jugée inconvenante par les anciens est remplacé.

e)  Le Conseil des anciens doit être bien informé relativement au Conseil tribal d’Ermineskin.

2 Fonctions

a)  Le Conseil des anciens conseille le chef et les conseillers et il surveille la conduite du chef et des conseillers, à l’égard desquels il peut prendre les mesures disciplinaires qui pourront être indiquées le cas échéant, et selon ce qui est prévu au protocole d’entente joint aux présentes à titre d’annexe B.

b)  Des anciens sont membres d’office de tous les comités du Système tribal d’Ermineskin.

c)  […]

d)  […]

e)  Le quorum est constitué de trois (3) anciens.

f)  […]

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                             A-45-07

 

INTITULÉ :                                                           LA NATION CRIE D’ERMINESKIN et LE CONSEIL TRIBAL D’ERMINESKIN

                                                                                c.

                                                                                GEORGE LESLIE MINDE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                     EDMONTON (ALBERTA)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                   LE 14 JANVIER 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                 LE JUGE NOËL

 

Y ONT SOUSCRIT :                                             LA JUGE SHARLOW

                                                                                LE JUGE RYER

 

DATE DES MOTIFS :                                          LE 11 FÉVRIER 2008

 

 

COMPARUTIONS :

 

David F. Holt

POUR LES APPELANTS

 

James L. Dixon, c.r.

POUR L’INTIMÉ

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Hladun & Company

Edmonton (Alberta)

 

POUR LES APPELANTS

 

Dixon & Associates

Red Deer (Alberta)

 

POUR L’INTIMÉ

 

 

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