CORAM : LE JUGE EN CHEF RICHARD
ENTRE :
THE ACCESS INFORMATION AGENCY INC.
et
(TRANSPORTS CANADA)
Défendeur
et
IRENA LANG CONSULTING
Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 16 janvier 2008.
Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 18 janvier 2008.
MOTIFS DU JUGEMENT : LE JUGE LÉTOURNEAU
Y ONT SOUSCRIT : LE JUGE EN CHEF RICHARD
LE JUGE PELLETIER
Dossier : A-184-07
Référence : 2008 CAF 19
CORAM : LE JUGE EN CHEF RICHARD
LE JUGE LÉTOURNEAU
LE JUGE PELLETIER
ENTRE :
THE ACCESS INFORMATION AGENCY INC.
Demanderesse
et
PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
(TRANSPORTS CANADA)
Défendeur
et
IRENA LANG CONSULTING
Défenderesse
MOTIFS DU JUGEMENT
Les questions en litige
[1] Nous sommes saisis d’une demande de contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision du Tribunal canadien du commerce extérieur (Tribunal).
[2] Victorieuse devant le Tribunal où sa plainte à l’égard d’un marché public passé par le ministère des Transports fut maintenue, la demanderesse s’en prend néanmoins à la décision du Tribunal.
[3] Elle a soulevé plusieurs griefs à l’endroit de la décision sous attaque. Il n’est pas nécessaire de tous les reprendre. Seuls deux de ces griefs méritent que l’on s’y attarde. Les deux se rapportent aux remèdes que le Tribunal a accordés à la demanderesse. En fait, je devrais plutôt dire aux remèdes que le Tribunal a refusés de lui octroyer. L’un est d’ordre procédural, l’autre, substantif.
La question d’ordre procédural
[4] Au niveau procédural, la demanderesse prétend qu’elle n’a pas eu l’occasion de soumettre ses observations quant à sa demande d’être indemnisée pour « avoir perdu l’occasion de participer, d’une façon utile à la procédure de passation du marché public » et pour la « totalité des frais raisonnables [qu’elle a engagés] pour la préparation de sa soumission » : voir au dossier de la demanderesse, volume 1, aux pages 108 et 120, la plainte formulée par la demanderesse et les mesures correctives sollicitées.
[5] La demanderesse a soumis une première série d’observations sur la question dans sa formule de plainte : ibidem. Elle les a réitérées le 12 décembre 2006 dans sa réponse au rapport du ministère des Transports en y indiquant qu’elle aimerait éventuellement pouvoir soumettre des observations supplémentaires : voir le dossier de la demanderesse, volume 2, aux pages 457 et 458. Enfin, elle les a explicitées plus amplement le 14 janvier 2007 dans sa réponse supplémentaire au rapport du ministère des Transports : voir le dossier de la demanderesse, volume 3, aux pages 692 à 694.
[6] Malgré cela, la demanderesse soutient que le Tribunal aurait dû l’entendre à nouveau avant d’adjuger sur les mesures rectificatives. Elle appuie sa prétention sur l’article 8 du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics, C.P. 1993-2102, 15 décembre 1993.
[7] Or, l’article 8 s’applique uniquement dans les cas où le Tribunal produit un rapport provisoire relatif à la plainte. En pareille situation, le Tribunal doit remettre une copie du rapport au plaignant, à l’institution fédérale et à toute partie que le Tribunal juge intéressée. Toutes ces personnes peuvent alors présenter des observations au sujet de tout aspect du rapport.
[8] Dans le cas présent, le Tribunal n’a pas produit de rapport provisoire de sorte que l’article 8 ne peut servir de fondement valable à la revendication de la demanderesse.
[9] En conclusion sur ce premier grief d’ordre procédural, je crois que les règles de justice naturelle ont été respectées. Comme on le verra ci-après, l’analyse du deuxième grief de la demanderesse confirme qu’il n’était pas nécessaire pour le Tribunal d’entendre à nouveau la demanderesse sur les deux indemnisations refusées.
La question d’ordre substantif
[10] Dans son mémoire des faits et du droit produit en l’instance, la demanderesse réclame une troisième indemnisation, soit une indemnisation pour perte de profits. À l’audience, elle a abandonné cette revendication pour se limiter aux deux indemnisations précédemment mentionnées. Ceci m’amène à l’examen du mérite du deuxième grief de la demanderesse.
[11] Essentiellement, la demanderesse se plaint de deux choses. Premièrement, le Tibunal aurait dû lui consentir les deux indemnisations demandées. Deuxièmement, le lui ayant refusé, il se devait de fournir des motifs pour son refus.
a) Le refus d’indemnisation pour la perte de l’occasion de participer d’une façon utile à la procédure de passation du marché public
[12] Compte tenu de la nature du manquement identifié par le Tribunal, ce dernier, dans l’exercice de sa discrétion et faisant usage de son expérience, a jugé que le remède approprié consistait à ordonner un réexamen de la proposition soumise par la demanderesse à la lumière d’un critère élargi d’analyse, ce qui fut fait. Ainsi, la demanderesse a pu participer d’une façon utile à la procédure de passation du marché public.
[13] Je comprends que la proposition de la demanderesse n’a pas été retenue au terme de cette réévaluation. Je comprends également que la demanderesse puisse être déçue de ce fait. Mais, en l’absence de contestation de la deuxième évaluation et d’une décision annulant cette dernière, il n’est non seulement pas raisonnable, il est impossible de conclure que la demanderesse n’a pu participer de façon utile à la procédure de marché public en cours. Je ne crois pas que la participation d’un soumissionnaire à une procédure de passation d’un marché public constitue ou ne constitue pas une participation utile selon que sa soumission est acceptée ou rejetée.
[14] À mon humble avis, le remède choisi par le Tribunal ne laissait, de toute évidence, aucune place à une indemnisation pour perte d’occasion d’une participation utile au processus en litige. Je ne crois pas que le Tribunal était requis dans les circonstances d’en dire plus.
b) Le refus d’indemnisation pour les frais raisonnables engagés pour la préparation de la soumission de la demanderesse
[15] Le Tribunal possède le pouvoir discrétionnaire d’accorder à un plaignant le remboursement des frais qu’il a encourus pour préparer une réponse à un appel d’offres : voir le paragraphe 30.15(4) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985, c. 47 (4e suppl.); Canada (Procureur général) c. Envoy Relocation Services, [2007] A.C.F. no. 626, 2007 CAF 176.
[16] Dans l’affaire The Impact Group c. Conseil national de recherches du Canada, dossier no. PR-2005-050, le 14 juin 2006, à laquelle la demanderesse nous réfère, le Tribunal a indemnisé la partie plaignante pour la totalité des frais encourus pour répondre à l’appel d’offres. Il y avait eu une irrégularité grave dans la procédure de passation du marché public en raison de lacunes au niveau du processus d’évaluation, lesquelles étaient reliées à l’évaluation des critères pertinents.
[17] Cependant, cette affaire se distingue de la nôtre en ce qu’il n’y a pas eu, comme c’est le cas dans la cause qui nous occupe, de réévaluation de la soumission de la partie plaignante. En d’autres termes, il n’y avait pas eu de réparation du préjudice subi. Le Tribunal a jugé dans les circonstances qu’une indemnité de la nature de celle consentie était le moyen convenable de réparer le préjudice subi par Impact Group : voir la décision du Tribunal aux paragraphes 44 et 47 à 49.
[18] Dans la présente instance, le remède choisi par le Tribunal réparait, selon son estimation, le préjudice subi par la demanderesse, sans qu’il ne soit nécessaire d’y ajouter l’indemnité réclamée pour les frais de préparation de la réponse à l’appel d’offres. Je ne saurais dire que ce choix du Tribunal est erroné en droit ou déraisonnable en l’espèce. À nouveau, je ne crois pas qu’il lui fut nécessaire d’épiloguer sur la question, encore que s’il l’eût fait, un débat du genre de celui dont nous fûmes saisis aurait pu être évité.
Conclusion
[19] Pour ces motifs, je rejetterais la demande de contrôle judiciaire avec dépens.
« Je suis d’accord
J. Richard, j.c. »
« Je suis d’accord
J.D. Denis Pelletier, j.c.a. »
COUR D’APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A-184-07
INTITULÉ : THE ACCESS INFORMATION AGENCY
INC. c. PROCUREUR GÉNÉRAL DU
CANADA (TRANSPORTS CANADA) et
IRENA LANG CONSULTING
LIEU DE L’AUDIENCE : Ottawa (Ontario)
DATE DE L’AUDIENCE : Le 16 janvier 2008
MOTIFS DU JUGEMENT : LE JUGE LÉTOURNEAU
Y ONT SOUSCRIT : LE JUGE EN CHEF RICHARD
LE JUGE PELLETIER
DATE DES MOTIFS : Le 18 janvier 2008
COMPARUTIONS :
POUR LA DEMANDERESSE
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POUR LE DÉFENDEUR (P.G. du Canada (Transports)) |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Sous-procureur général du Canada
|
POUR LA DEMANDERESSE
|
Thomas Dastous, LL.B., D.D.N., N.C.A. Ottawa (Ontario) |
POUR LE DÉFENDEUR (P.G. du Canada (Transports)) |