Décisions de la Cour d'appel fédérale

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Date : 20070312

Dossier : A-140-06

Référence : 2007 CAF 97

 

CORAM :      LE JUGE DÉCARY

                        LE JUGE EVANS

                        LE JUGE MALONE

 

ENTRE :

LE WIKWEMIKONG TRIBAL POLICE SERVICES BOARD

appelant

et

JAMES DARIN CORBIERE

intimé

 

 

 

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 1er février 2007

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 12 mars 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                         LE JUGE MALONE

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                       LE JUGE DÉCARY

                                                                                                                              LE JUGE EVANS

 


 

Date : 20070312

Dossier : A-140-06

Référence : 2007 CAF 97

 

CORAM :      LE JUGE DÉCARY

                        LE JUGE EVANS

                        LE JUGE MALONE

 

ENTRE :

LE WIKWEMIKONG TRIBAL POLICE SERVICES BOARD

appelant

et

JAMES DARIN CORBIERE

intimé

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

LE JUGE MALONE

I.  Introduction

 

[1]               Il s’agit d’un appel interjeté à l’encontre d’une ordonnance rendue par un juge de la Cour fédérale le 9 mars 2006 (2006 CF 312), qui accueillait la demande de contrôle judiciaire présentée par M. Corbiere relativement à une décision de la Commission des droits de la personne (la Commission). Celle‑ci avait rejeté les plaintes déposées par M. Corbiere contre son employeur, le Wikwemikong Tribal Police Services Board (le conseil). Le juge a conclu que la Commission avait commis plusieurs erreurs dans l’enquête qu’elle avait effectuée sur les plaintes de discrimination de M. Corbiere en application de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H‑6 (la Loi). 

 

[2]               J’accueillerais l’appel pour les motifs ci-après énoncés.

 

II. Le contexte factuel

 

[3]               En février 1992, M. Corbiere a commencé à travailler en qualité d’agent de police dans la réserve indienne non cédée de Wikwemikong sur l’île Manitoulin. En octobre 1997, il a subi, à son travail, des blessures au dos qui l’ont contraint à prendre un congé d’invalidité. Il est retourné au travail en janvier 1998, sous la surveillance étroite de son médecin, et ses tâches ont dû être modifiées.

 

[4]               En juin 1998, malgré le fait qu’il exécutait des tâches légères et sédentaires, M. Corbiere s’est plaint qu’il avait trop mal au dos pour continuer à travailler et il a pris un autre congé de maladie. En novembre 1998, il a obtenu l’autorisation de son médecin de retourner au travail, mais il ne pouvait toujours pas remplir ses tâches initiales.

 

[5]               À son retour au travail, M. Corbiere a proposé au conseil de travailler à titre d’« agent‑détective », un nouveau poste devant lui permettre d’exécuter des tâches limitées. Avant que le chef de police fasse savoir s’il acceptait ou non la proposition, M. Corbiere a rempli les tâches décrites dans celle‑ci durant trois mois. Le conseil lui a alors appris que sa proposition ne serait pas acceptée et que son emploi prendrait fin 30 jours plus tard. On l’a aussi informé qu’il pourrait faire valoir son point de vue au sujet de cette décision lors de la réunion du conseil qui devait avoir lieu le 10 février 1999.

 

[6]               M. Corbiere a assisté à cette réunion et a eu la possibilité de s’inscrire en faux contre la décision du conseil, mais la décision de mettre fin à son emploi a été maintenue. Le 28 mars 2000, il a déposé une plainte auprès de la Commission en vertu de l’article 7 de la Loi, alléguant que le conseil avait agi de manière discriminatoire à son endroit dans le cadre de son emploi en ne prenant pas de mesures d’adaptation tenant compte de son invalidité (ses douleurs au dos) et en mettant fin à son emploi en raison de cette invalidité.

 

[7]               Une enquête a été entreprise, à la suite de laquelle un rapport (le rapport d’enquête) a été rédigé par Silvilyn Holt en date du 12 septembre 2003. Dans ce rapport, Mme Holt recommandait que la Commission rejette la plainte, principalement parce que la décision de mettre fin à l’emploi de M. Corbiere était fondée sur une preuve médicale, qui indiquait que M. Corbiere ne serait pas en mesure de remplir toutes les fonctions d’un agent de police, et que le conseil ne disposait pas de ressources financières permettant de créer le poste d’agent‑détective.

 

[8]               Par une lettre datée du 15 décembre 2003, la Commission a informé M. Corbiere que sa plainte avait été rejetée en vertu de l’article 44 de la Loi. Cette disposition prévoit que, sur réception d’un rapport d’enquête, la Commission rejette la plainte si elle est convaincue que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l’examen de celle-ci n’est pas justifié. M. Corbiere a ensuite déposé une demande de contrôle judiciaire à la Cour fédérale, alléguant que la Commission avait commis des erreurs de fait.

 

III. La décision de la Cour fédérale

 

[9]               M. Corbiere n’était pas représenté par un avocat lors de l’audience devant le juge. Il soutenait que la Commission avait eu tort de rejeter sa preuve et avait commis une erreur dans son interprétation et son application du critère à trois volets concernant l’accommodement qui a été établi par la Cour suprême du Canada dans Colombie‑Britannique (Public Service Employee Relations Commission) c. British Columbia Government and Service Employees’ Union (BCGSEU), [1999] 3 R.C.S. 3 (Meiorin).

 

[10]           Après avoir procédé à l’analyse pragmatique et fonctionnelle, le juge a conclu que c’est la norme de contrôle de la décision correcte qui s’appliquait. Selon lui, la Commission avait commis deux erreurs en rejetant la plainte de M. Corbiere. D’abord, elle n’avait pas conclu, comme il était nécessaire de le faire, que M. Corbiere souffrait d’une déficience et, ensuite, elle n’avait pas appliqué le critère de Meiorin pour décider si les éléments de la notion d’exigence professionnelle justifiée existaient. En conséquence, le juge a accueilli la demande de contrôle judiciaire de M. Corbiere.

 


IV. Le cadre législatif

 

[11]           Les dispositions de la Loi qui sont pertinentes relativement au présent appel sont reproduites ci‑dessous.

3. (1) Pour l’application de la présente loi, les motifs de distinction illicite sont ceux qui sont fondés sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état matrimonial, la situation de famille, l’état de personne graciée ou la déficience.

 

3. (1) For all purposes of this Act, the prohibited grounds of discrimination are race, national or ethnic origin, colour, religion, age, sex, sexual orientation, marital status, family status, disability and conviction for which a pardon has been granted.

 

7. Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, par des moyens directs ou indirects :

 

7. It is a discriminatory practice, directly or indirectly,

 

a) de refuser d’employer ou de continuer d’employer un individu;

(a) to refuse to employ or continue to employ any individual, or

b) de le défavoriser en cours d’emploi.

(b) in the course of employment, to differentiate adversely in relation to an employee, on a prohibited ground of discrimination.

 

44. (3) Sur réception du rapport d’enquête prévu au paragraphe (1), la Commission :

[…]

44. (3) On receipt of a report referred to in subsection (1), the Commission

b) rejette la plainte, si elle est convaincue :

(b) shall dismiss the complaint to which the report relates if it is satisfied

(i) soit que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l’examen de celle-ci n’est pas justifié,

(i) that, having regard to all the circumstances of the complaint, an inquiry into the complaint is not warranted, or

(ii) soit que la plainte doit être rejetée pour l’un des motifs énoncés aux alinéas 41c) à e).

 

(ii) that the complaint should be dismissed on any ground mentioned in paragraphs 41(c) to (e).

 

V. Les questions en litige

 

[12]           Les deux questions en litige dans le présent appel consistent à déterminer si le juge a commis une erreur :

1.    en ne choisissant pas la bonne norme de contrôle;

2.    en concluant que la Commission n’avait pas appliqué correctement le critère de Meiorin.

 

VI. Analyse

 

Question no 1 : Le juge a-t-il choisi la bonne norme de contrôle?

[13]           Le rôle de la Commission est d’enquêter sur les plaintes et, si leur examen est justifié, de les renvoyer au Tribunal canadien des droits de la personne (le Tribunal). La Commission dispose d’un très large pouvoir discrétionnaire en matière d’enquête et d’examen préalable. Le degré de retenue dont il doit être fait preuve à l’égard de ses décisions a été examiné par la Cour dans Bell Canada c. Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, [1999] 1 C.F. 113 (C.A.) (Bell Canada), où le juge Décary a expliqué que la Loi confère à la Commission un degré remarquable de latitude dans l’exécution de sa fonction d’examen préalable lors de la réception d’un rapport d’enquête. Il a déclaré ce qui suit au paragraphe 38 :

Les paragraphes 40(2) et 40(4), et les articles 41 et 44 regorgent d’expressions comme « à son avis », « devrait », « normalement ouverts », « pourrait avantageusement être instruite », « des circonstances », « estime indiqué dans les circonstances », qui ne laissent aucun doute quant à l’intention du législateur. […] [O]n peut dire sans risque de se tromper qu’en règle générale, le législateur ne voulait pas que les cours interviennent à la légère dans les décisions prises par la Commission à cette étape.

 

[14]           La Cour a repris la même déclaration dans de nombreux arrêts et a considéré que c’est la norme de contrôle de la décision raisonnable qui s’appliquait en conséquence (voir Bradley c. Canada (Procureur général) (1999), 238 N.R. 76 (C.A.F.), au paragraphe 9; Zündel c. Canada (Procureur général) (2000), 267 N.R. 92 (C.A.F.), au paragraphe 5; Gee c. Canada (Ministre du Revenu national) (2002), 284 N.R. 321 (C.A.F.), au paragraphe 13). Dans Holmes c. Canada (Procureur général) (1999), 242 N.R. 148 (C.A.F.), le juge Décary a fait la même analyse qu’il avait faite dans Bell Canada et a caractérisé la décision de la Commission en affirmant, au paragraphe 5, que celle‑ci a le droit et l’obligation de prendre en considération tous les faits et allégations soumis à son examen.

 

[15]           Le rôle d’une cour d’appel, après avoir établi la norme de contrôle appropriée, consiste à appliquer cette norme directement à la décision du Tribunal. La Cour a récemment examiné son rôle lorsqu’elle a été saisie de l’appel d’une décision rendue par la Cour fédérale dans le cadre d’un contrôle judiciaire dans Prairie Acid Rain Coalition c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans), 2006 CAF 31, [2006] 3 C.F. 610. Le juge Rothstein (maintenant juge à la Cour suprême du Canada), qui a rédigé les motifs de la Cour, a déclaré ce qui suit :

Cependant, dans une jurisprudence plus récente, la Cour suprême a adopté le point de vue selon lequel la cour d’appel se met à la place du tribunal de première instance pour réviser la décision administrative. […] La cour d’appel établit la norme de contrôle appropriée puis décide si elle a été appliquée correctement […] Concrètement, cela signifie que la cour d’appel elle‑même révise la décision administrative en appliquant la norme de contrôle appropriée.

 

[16]           En résumé, comme il doit être fait preuve d’une certaine retenue à l’égard des décisions de la Commission, la Cour interviendra seulement si la décision de la Commission est déraisonnable. Par conséquent, le juge a commis une erreur lorsqu’il a révisé la décision de la Commission à l’aide de la norme de la décision correcte. La Cour doit appliquer la norme de la décision raisonnable simpliciter directement à la décision de la Commission.

 

Question no 2 : Le juge a-t-il commis une erreur en concluant que la Commission n’avait pas appliqué correctement le critère de Meiorin?

 

[17]           Dans l’arrêt Centre universitaire de santé McGill (Hôpital général de Montréal) c. Syndicat des employés de l’Hôpital général de Montréal, 2007 CSC 4, la Cour suprême du Canada a récemment réaffirmé que le demandeur a un fardeau de preuve qui consiste à démontrer prima facie l’existence de discrimination. Il ne suffit pas de contester le comportement d’un employeur pour le motif que ce qu’il a fait a eu une incidence négative sur un membre d’un groupe protégé : « C’est le lien qui existe entre l’appartenance à ce groupe et le caractère arbitraire du critère ou comportement désavantageux – à première vue ou de par son effet – qui suscite la possibilité de réparation » (au paragraphe 49). En l’espèce, il ressort implicitement de la lettre de la Commission datée du 15 décembre 2003 (ci‑dessus, au paragraphe 8) qu’un tel lien a été établi, M. Corbiere étant l’employé du conseil et ayant été congédié à cause de son incapacité physique de remplir toutes les fonctions d’un agent de police. Le lien est donc établi et le critère de Meiorin s’applique. 

 

[18]           Dans le cadre de son examen de la décision de la Commission de ne pas renvoyer les plaintes de M. Corbiere au Tribunal, le juge a déclaré que la Commission n’avait pas appliqué correctement le critère de Meiorin, plus précisément que l’enquêteuse ne s’était pas penchée sur les deux premiers volets de ce critère dans son rapport.

 

[19]           La Cour suprême a établi le critère de Meiorin pour déterminer si une norme discriminatoire à première vue est une exigence professionnelle justifiée. Ce critère comporte les trois facteurs suivants :

1.       l’employeur a adopté la norme dans un but rationnellement lié à l’exécution du travail en cause;

 

2.       l’employeur a adopté la norme particulière en croyant sincèrement qu’elle était nécessaire pour réaliser ce but légitime lié au travail;

 

3.       la norme est raisonnablement nécessaire pour réaliser ce but légitime lié au travail. Pour prouver que la norme est raisonnablement nécessaire, il faut démontrer qu’il est impossible de composer avec les employés qui ont les mêmes caractéristiques que le demandeur sans que l’employeur subisse une contrainte excessive.

 

 

[20]           La première étape consiste à déterminer s’il existe un lien rationnel entre le but général dans lequel la norme contestée a été adoptée et les exigences objectives du travail. À mon avis, le but général du conseil en exigeant des agents de police qu’ils aient la capacité physique de remplir toutes les fonctions d’un agent de police est de faire en sorte que ses employés soient en mesure d’exécuter le travail d’un agent de police efficacement et en toute sécurité. Il est indiqué ce qui suit au paragraphe 19 du rapport d’enquête :

[traduction]

19. En ce qui concerne la patrouille policière, le témoin affirme qu’il s’agit d’une caractéristique du travail des agents de police. Le temps consacré à la patrouille varie quotidiennement en fonction de la situation. Le travail de patrouille comporte cependant un risque inhérent en matière de sécurité car il est impossible de prévoir comment une personne réagira à l’interpellation d’un agent de police. L’agent se fie à son partenaire pour « le couvrir. Si votre partenaire n’est pas physiquement capable de vous couvrir, vous ne vous sentez pas en sécurité, vous ne vous sentez pas à l’aise ».

 

Par conséquent, il ne fait aucun doute qu’il existe un lien rationnel entre cette caractéristique générale et l’exécution de tâches particulières incombant à un agent de police.

 

[21]           Deuxièmement, rien ne permet de croire que le conseil n’a pas cru sincèrement que la norme était nécessaire pour faire en sorte que ses employés travaillent efficacement et en toute sécurité. Le conseil n’avait pas l’intention d’agir de manière discriminatoire à l’endroit de M. Corbiere à cause de sa déficience.

 

[22]           Finalement, pour déterminer si une norme existante est raisonnablement nécessaire pour réaliser son but, il faut démontrer qu’il est impossible de composer avec les employés qui ont les mêmes caractéristiques que le demandeur sans que l’employeur subisse une contrainte excessive. Au paragraphe 63 de Meiorin, la juge McLachlin (maintenant juge en chef de la Cour suprême du Canada) a traité des facteurs qui peuvent être pertinents lorsqu’on évalue l’obligation d’un employeur de composer avec un employé tant qu’il n’en résulte pas pour lui une contrainte excessive. Parmi ces facteurs, il y a le coût de la méthode d’accommodement possible et la perspective d’atteinte réelle aux droits d’autres employés.

 

[23]           Ainsi, il est nécessaire, à la troisième étape de l’analyse de Meiorin, de prendre en considération l’ensemble du rapport d’enquête, lequel révélait les neuf faits importants suivants :

 

a.        le conseil est un petit service de police ne comptant pas plus de 10 agents;

 

b.       le conseil reçoit des fonds du Canada et de l’Ontario selon des règles prédéterminées; le montant des fonds est calculé de la manière suivante : le nombre d’agents multiplié par environ 100 000 $;

 

c.        le conseil a laissé à M. Corbiere beaucoup de temps pour récupérer dans l’espoir qu’il se remettrait de ses blessures au dos;

 

d.       lorsque M. Corbiere est retourné au travail après son congé d’invalidité, il a proposé de travailler à titre d’agent‑détective. Il a effectué ce travail pendant trois mois. Il ressort clairement de la preuve dont disposait la Commission, mais non l’enquêteuse, que M. Corbiere n’a jamais finalement rempli toutes les fonctions du poste d’agent‑détective qu’il proposait;

 

e.        le conseil a collaboré activement avec la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (CSPAAT) pour composer avec les limitations de M. Corbiere et les collègues de celui‑ci se sont chargés de toutes les tâches additionnelles sur le terrain pendant son absence et pendant qu’il exécutait des tâches limitées. En outre, le conseil a collaboré activement avec M. Corbiere et l’a encouragé à exécuter des tâches limitées qui exigeaient peu d’efforts physiques ou comportaient peu de risques, voire aucun;

 

f.         à cause d’inquiétudes concernant sa sécurité et celle de ses collègues, M. Corbiere était incapable de remplir les fonctions suivantes qu’un agent de police remplit normalement :

 

                                 i.      l’interrogatoire des suspects;

                               ii.      l’application des lois provinciales;

                              iii.      les arrestations en vertu des lois fédérales et provinciales;

                             iv.      l’escorte des prisonniers, la sécurité en salle d’audience ou le placement sous garde des personnes arrêtées;

                               v.      l’exécution des mandats de dépôt et des mandats d’arrêt;

                             vi.      l’escorte et le transport des personnes atteintes d’incapacité mentale vers l’hôpital ou un autre endroit ou en provenance de l’hôpital ou d’un autre endroit;

 

g.        le conseil a indiqué qu’il avait gardé M. Corbiere occupé pendant ces trois mois dans l’espoir qu’il pourrait recouvrer la santé suffisamment pour être en mesure de remplir une quantité acceptable de tâches. Il a décidé de mettre fin à l’emploi de M. Corbiere seulement après avoir reçu un rapport médical révélant que ce dernier était incapable de manière permanente de remplir les fonctions habituelles essentielles d’un agent de police;

 

h.        le conseil a conclu qu’il n’était pas possible de réunir suffisamment de fonctions pour créer un nouveau poste permanent d’agent‑détective. Comme les agents de police effectuaient leurs propres enquêtes et leur propre suivi, il n’y avait pas suffisamment de travail d’enquête pour justifier la création d’un poste d’agent‑détective. En outre, le conseil ne pouvait pas créer un tel poste alors que le chef de police avait lui‑même, de son propre avis, moins de tâches policières à effectuer. Même si le conseil pouvait réunir suffisamment de fonctions, il n’avait pas les ressources financières nécessaires pour ce poste; 

 

i.          la question de l’accommodement dans d’autres emplois non reliés dans le cadre des activités du conseil de bande de Wikwemikong a été posée. Le conseil de bande a répondu qu’aucun emploi semblable n’était disponible. M. Corbiere s’est finalement fait offrir le poste de coordonnateur pour la cour, qu’il a refusé parce qu’une autre personne aurait dû être mise à pied.

 

 

[24]           Par conséquent, l’enquêteuse a écrit ce qui suit dans son rapport :

[traduction]

37. L’enquête révèle que, bien que le plaignant affirme qu’il aurait pu remplir les tâches d’un agent de police, son médecin était plutôt d’avis qu’il ne pouvait pas remplir « toutes » les tâches. De plus, des obstacles particuliers l’empêchaient d’exécuter ses tâches; il y avait notamment des inquiétudes sur le plan de la sécurité, p. ex. lors de situations comportant de la violence et mettant la santé en danger. Le fait que le plaignant a lui‑même proposé qu’un nouveau poste soit créé indique qu’il connaissait et partageait ces inquiétudes.

 

[25]           Il s’agit essentiellement de savoir si la Commission pouvait raisonnablement être convaincue que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, il n’était pas nécessaire de la renvoyer au Tribunal. L’enquête a révélé que le conseil avait pris des mesures pour répondre aux besoins de M. Corbiere en modifiant ses tâches et en facilitant sa participation au plan de réadaptation de la CSPAAT. En outre, ce plan couvrait tous les frais relatifs à l’obtention par M. Corbiere d’un baccalauréat et d’un brevet d’enseignement – estimés à 690 000 $. La décision ultime de mettre fin à son emploi était fondée sur une preuve médicale qui confirmait que M. Corbiere serait incapable de remplir toutes les tâches d’un agent de police. L’emploi que M. Corbiere croyait que le conseil devait lui donner n’existait tout simplement pas et le conseil ne disposait pas de ressources financières pour le créer.

 

[26]           Par conséquent, il y avait, à mon avis, un fondement rationnel à la conclusion tirée par la Commission. Compte tenu des circonstances qu’elle pouvait prendre en compte, sa décision ne peut être considérée comme une décision déraisonnable.

 

VII. Conclusion

[27]           Par conséquent, la Commission pouvait raisonnablement conclure que le renvoi des plaintes au Tribunal n’était pas justifié en vertu de l’article 44. Par conséquent, j’accueillerais l’appel, j’annulerais l’ordonnance rendue par le juge en date du 9 mars 2006 et je rejetterais la demande de contrôle judiciaire. J’accorderais les dépens en appel et devant la Cour fédérale.

 

 

« B. Malone »

Juge

« Je souscris aux présents motifs

Robert Décary, juge »

 

« Je souscris aux présents motifs

John M. Evans, juge »

 

 

Traduction certifiée conforme

 

D. Laberge, LL.L.


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                                 A-140-06

 

INTITULÉ :                                                                LE WIKWEMINKONG TRIBAL POLICE SERVICES BOARD

                                                                                     c.

                                                                                     JAMES DARIN CORBIERE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                          TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                        LE 1er FÉVRIER 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                     LE JUGE MALONE

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                  LE JUGE DÉCARY

                                                                                     LE JUGE EVANS

 

DATE DES MOTIFS :                                               LE 12 MARS 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Hugh N. MacDonald                                                     POUR L’APPELANT

 

James Darin Corbiere                                                    L’INTIMÉ – POUR SON PROPRE COMPTE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Hugh N. MacDonald                                                     POUR L’APPELANT

Sault Ste. Marie (Ontario)

 

James Darin Corbiere                                                    L’INTIMÉ – POUR SON PROPRE COMPTE

Sudbury (Ontario)

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