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Date : 20061206

Dossier : A-274-06

Référence : 2006 CAF 397

 

CORAM :      LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LE JUGE PELLETIER

                        LE JUGE MALONE

 

ENTRE :

LE CHEF PETER BILL ET LES CONSEILLERS DENNIS LEWIS, ROMEO THOMAS,

FREDERICK WHITEHEAD, WILLIE THOMAS, PETER SAKEBOW,

ET DAVID THOMAS

appelants

et

LE COMITÉ D’APPEL DE LA BANDE DU LAC PÉLICAN (ci‑après le Comité d’appel),

RAYMOND DUMAIS, DEBBIE THOMAS, ALDEN HARRIS, ELMER THOMAS,

JOHN UTZ, ET FRANCIS THOMAS, JIMMY BILL, HARRY THOMAS,

CHARLES RABBITSKIN, WAYNE THOMAS, GARRY THOMAS,

ET CALVIN THOMAS

intimés

 

 

 

 

Audience tenue à Saskatoon (Saskatchewan), le 22 novembre 2006

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 6 décembre 2006.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                LE JUGE LÉTOURNEAU

Y ONT SOUSCRIT :                                                                          LE JUGE PELLETIER

                                                                                                            LE JUGE MALONE

 


Date : 20061206

Dossier : A-274-06

Référence : 2006 CAF 397

 

CORAM :      LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LE JUGE PELLETIER

                        LE JUGE MALONE

 

ENTRE :

LE CHEF PETER BILL ET LES CONSEILLERS DENNIS LEWIS, ROMEO THOMAS,

FREDERICK WHITEHEAD, WILLIE THOMAS, PETER SAKEBOW,

ET DAVID THOMAS

appelants

et

LE COMITÉ D’APPEL DE LA BANDE DU LAC PÉLICAN (ci-après le Comité d’appel),

RAYMOND DUMAIS, DEBBIE THOMAS, ALDEN HARRIS, ELMER THOMAS,

JOHN UTZ, ET FRANCIS THOMAS, JIMMY BILL, HARRY THOMAS,

CHARLES RABBITSKIN, WAYNE THOMAS, GARRY THOMAS,

ET CALVIN THOMAS

intimés

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

LE JUGE LÉTOURNEAU

 

[1]               Il s’agit d’un appel interjeté contre une décision du juge O’Keefe de la Cour fédérale (le juge), rendue dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire, qui annulait deux décisions (15 mars et 23 mars 2004) du Comité d’appel de la bande du lac Pélican (le Comité). Le juge a renvoyé l’affaire devant le Comité pour nouvel examen, conformément au Pelican Lake Election Act (la Loi).

 

[2]               La décision du Comité rendue le 15 mars attestait la nullité du résultat de l’élection du 5 mars 2004. La décision subséquente, rendue le 23 mars, convoquait la tenue d’une élection partielle pour le 16 avril 2004, mais n’admettait de candidats que ceux qui s’étaient présentés à l’élection du 5 mars.

 

[3]               Le juge a accueilli la demande des appelants et a annulé les deux décisions. Cependant, les appelants ont interjeté appel contre la réparation qui leur a été accordée. Ils allèguent que le Comité a fait preuve de partialité ou qu’il a agi d’une manière qui soulevait une crainte raisonnable de partialité. Ils soutiennent que, par conséquent, le juge n’aurait pas dû renvoyer l’affaire devant la même formation du Comité.

 

[4]               Le juge n’a pas abordé la question de la partialité. Il a annulé les deux décisions du Comité au motif que le Comité avait omis de respecter la procédure en matière d’appel prévue par la Loi et de donner aux appelants un préavis suffisant de la tenue de l’audience d’appel. Au paragraphe 59 de sa décision, le juge a mentionné que l’affaire ne pouvait pas être renvoyée à un comité d’appel différemment constitué, parce qu’aucune disposition dans la Loi ne prévoyait une telle nouvelle constitution.

 

[5]               En supposant, sans trancher la question, que le comportement de deux membres du Comité ait pu soulever une crainte raisonnable de partialité, il reste que, comme le juge l’a fait remarquer, il n’existe aucun autre comité que celui constitué en vertu de la Loi pour l’élection du 5 mars 2004.

 

[6]               L’article 11 de la Loi prévoit qu’il incombe au Comité d’attester le résultat de l’élection si un appel est interjeté. Les membres du Comité exercent leurs fonctions tant que tous les appels ne sont pas réglés.

 

[7]               En l’espèce, le juge n’avait d’autre choix que de renvoyer l’affaire au Comité, le seul qui fût saisi de l’appel.

 

[8]               À mon avis, dans de telles circonstances, la théorie de la nécessité s’applique. Dans la décision Sparvier c. Bande indienne Cowessess, [1993] 3 C.F. 142, aux pages 172 et 173, le juge Rothstein, alors juge de la Cour fédérale, a noté que :

 

La théorie de la nécessité peut s'appliquer dans des cas ou, lorsque personne d'autre n'a le pouvoir d'agir, les membres du tribunal qui sont inhabiles par ailleurs (à part Clifford Lerat, dont le parti pris était réel et prouvé) peuvent être habiles à entendre et à juger un appel. Le principe est énoncé par Sir William Wade dans l'ouvrage Administrative Law, 6th ed., 1988, à la page 478 :

 

[traduction]

Dans tous les arrêts mentionnés jusqu'ici, on pouvait se passer de l'arbitre inhabile ou le remplacer par quelqu'un auquel l'objection ne s'appliquait pas. Cependant, il arrive souvent qu'aucune substitution ne soit possible, puisque personne d'autre n'a le pouvoir d'agir. Dans ces cas, la justice naturelle doit céder le pas à la nécessité; autrement, il n'y a plus aucun moyen de décider et le processus judiciaire ou administratif cesse de fonctionner.

 

 

[9]               Par conséquent, le juge n’a commis aucune erreur en renvoyant l’affaire au Comité, le seul qui eût le pouvoir de la traiter.

 

[10]           Je ne peux clore le présent appel sans mentionner l’état déplorable du processus d’élection de la Première nation du lac Pélican. Bien que l’un des appelants, le chef Peter Bill, ait été élu quatre fois depuis 1999, il n’a jamais été attesté chef de la Première nation du lac Pélican : voir le mémoire des faits et du droit des intimés, au paragraphe 4. Toutes les élections ont été contestées et le processus s’éternise.

 

[11]           En l’espèce, l’élection du 5 mars 2004 a été déclarée nulle en raison d’allégations de corruption, de mauvaise utilisation des fonds et de menaces. La contestation de la décision du Comité a été accueillie en partie. Une nouvelle procédure a ensuite été engagée contre le Comité pour l’empêcher de tenir l’audience que le juge a ordonnée. De plus, une demande de sursis à l’exécution du jugement du juge a été accueillie; l’appel porté contre l’élection du 5 mars ne peut donc pas se poursuivre. Entre-temps, des injonctions ont été rendues maintenant les parties élues dans leurs postes élus respectifs en date du 6 mars 2004 : voir le Dossier d’appel, volume I, onglets III d), e), h), i), j) et k). La prochaine élection doit avoir lieu dans environ trois mois, et l’issue de l’élection du 5 mars 2004 n’a toujours pas été réglée. Notre décision lèvera le sursis à l’exécution de la décision du juge, mais des procédures seront toujours en instance à la Cour fédérale contre le Comité pour l’empêcher de tenir l’audience que le juge a ordonnée. Il est évident que la nouvelle élection aura lieu avant que l’audience au sujet de l’élection du 5 mars soit tenue et, par conséquent, la nouvelle élection rendra théorique la contestation de l’élection précédente. Dans un certain sens, notre décision aussi est théorique et n’a pas d’intérêt pratique.

 

[12]           Il s’agit d’une situation inacceptable et très coûteuse pour tous les participants, y compris l’appareil judiciaire, qui mine et compromet l’intégrité du processus électoral de la Première nation du lac Pélican. Les membres de la bande ont le droit d’élire leurs représentants et d’être gouvernés par des représentants dûment élus. Compte tenu de ce qui s’est passé jusqu’à maintenant, il est évident qu’à moins qu’un tiers n’intervienne dans le processus électoral et en assure l’intégrité, la situation se répétera très probablement.

 

[13]           Pour ces motifs, je rejetterais l’appel sans dépens.

 

 

« Gilles Létourneau »

Juge

 

« Je souscris aux présents motifs

            J.D. Denis Pelletier, juge »

 

« Je souscris aux présents motifs

            B. Malone, juge »

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    A-274-06

 

(APPEL D’UN JUGEMENT DE LA COUR FÉDÉRALE RENDU LE 1er JUIN 2006, DOSSIER No T-616-04)

 

INTITULÉ :                                                   CHEF PETER BILL et al c. LE COMITÉ D’APPEL

                                                                        DE LA BANDE DU LAC PÉLICAN et al

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Saskatoon (Saskatchewan)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 22 novembre 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                        LE JUGE LÉTOURNEAU

 

Y ONT SOUSCRIT :                                     LE JUGE PELLETIER

                                                                        LE JUGE MALONE

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 6 décembre 2006

 

COMPARUTIONS :

 

Anil K. Pandila, c.r.

POUR LES APPELANTS

 

Brenda McLeod

(représentante non-juriste)

POUR LES INTIMÉS

FRANCIS THOMAS, JIMMY BILL, CALVIN THOMAS ET GARRY THOMAS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pandila & Company

Prince Albert (Saskatchewan)

POUR LES APPELANTS

 

 

Stephens Law Office

Prince Albert (Saskatchewan)

POUR LES INTIMÉS

HARRY THOMAS, CHARLES RABBITSKIN ET WAYNE THOMAS


Date : 20061206

Dossier : A-274-06

 

Ottawa (Ontario), le 6 décembre 2006

 

CORAM :      LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LE JUGE PELLETIER

                        LE JUGE MALONE

 

ENTRE :

LE CHEF PETER BILL ET LES CONSEILLERS DENNIS LEWIS, ROMEO THOMAS,

FREDERICK WHITEHEAD, WILLIE THOMAS, PETER SAKEBOW,

ET DAVID THOMAS

appelants

et

LE COMITÉ D’APPEL DE LA BANDE DU LAC PÉLICAN (ci‑après le Comité d’appel),

RAYMOND DUMAIS, DEBBIE THOMAS, ALDEN HARRIS, ELMER THOMAS,

JOHN UTZ, ET FRANCIS THOMAS, JIMMY BILL, HARRY THOMAS,

CHARLES RABBITSKIN, WAYNE THOMAS, GARRY THOMAS,

ET CALVIN THOMAS

intimés

 

JUGEMENT

 

            L’appel est rejeté sans dépens.

 

« Gilles Létourneau »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice

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