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Date : 20030613

Dossier : A-538-02

Référence : 2003 CAF 267

CORAM :       LE JUGE EN CHEF RICHARD      

LE JUGE ISAAC

LE JUGE PELLETIER

ENTRE :

                                                              SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                                         appelante

                                                                                   et

                                                                 BRIAN ROY FINCH

                                                                                                                                                               intimé

                                                                                                                                                                       

                                 Audience tenue à Saskatoon (Saskatchewan), le 22 mai 2003.

                                          Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 13 juin 2003.

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                           LE JUGE EN CHEF RICHARD

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                                    LE JUGE ISAAC

                                                                                                                              LE JUGE PELLETIER


Date : 20030613

Dossier : A-538-02

Référence : 2003 CAF 267

CORAM :       LE JUGE EN CHEF RICHARD

LE JUGE ISAAC

LE JUGE PELLETIER

ENTRE :

                                                              SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                                         appelante

                                                                                   et

                                                                 BRIAN ROY FINCH

                                                                                                                                                               intimé

                                                           MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE EN CHEF RICHARD

[1]                 Il s'agit d'un appel de la décision de la Cour canadienne de l'impôt, en date du 17 septembre 2002, qui a adjugé les dépens à l'avocat de l'intimé au montant forfaitaire de 25 000 $ : Finch c. Canada, [2002] A.C.I. no 492 (QL). La décision en appel (la « décision de réexamen » ) a été rendue par suite d'une décision de la Cour d'appel fédérale qui ordonnait au juge de la Cour de l'impôt de procéder à un nouvel examen de la question des dépens conformément à ses motifs et après avoir donné aux parties la possibilité de se faire entendre : Finch c. Canada, 2002 CAF 194, [2002] A.C.F. no 754 (QL).


[2]                 Bien que le juge de la Cour de l'impôt ait donné aux parties la possibilité de se faire entendre relativement à la question des dépens, il a rendu sa décision sans se conformer aux directives de la Cour d'appel fédérale. En conséquence, l'appel doit être accueilli.

Contexte

[3]                 Une brève description du contexte de la présente instance illustrera les failles de la décision du juge de la Cour de l'impôt.

La Cour canadienne de l'impôt : la décision initiale

[4]                 L'intimé dans la présente instance, M. Finch, a interjeté appel de ses cotisations d'impôt établies pour les années d'imposition 1992, 1993 et 1994, qui avaient restreint ses pertes agricoles en application de l'article 31 de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.). Dans sa décision initiale, en date du 23 août 2000, le juge de la Cour de l'impôt a accueilli l'appel du contribuable : Finch c. Canada, [2000] A.C.I. no 529. Le juge de la Cour de l'impôt a adjugé les dépens au contribuable au montant forfaitaire de 25 000 $. Il a expliqué sa décision au paragraphe 44 :


Dans ces circonstances, il s'agit en l'espèce d'un abus à l'égard de l'appelant et du processus judiciaire. Cela a obligé M. Finch à embaucher un avocat très compétent et connu exerçant le droit commercial et le droit agricole, possédant environ 45 ans d'expérience et beaucoup d'expérience en matière de contestation fiscale. Il a bien mené l'affaire, avec efficacité. L'appelant a droit à l'équivalent des frais sur la base procureur-client. L'affaire a commencé en 1998, et le procès a duré une journée et demie à Saskatoon, même si deux journées complètes ont été correctement prévues pour l'audience. Le présent juge a exercé le droit en Saskatchewan pendant plus de 25 ans. La préparation et la conduite d'un procès de deux jours, par un avocat adjoint de Me Sanderson, auraient entraîné des honoraires modestes d'environ 30 000 $ pour un procès de deux jours en 1990. La présente audience n'a duré qu'une journée et demie en raison de la préparation minutieuse et de l'efficacité de l'avocat. Pour ces motifs, l'appelant se voit adjuger les dépens, lesquels sont fixés au montant forfaitaire de 25 000 $.

[5]                 Le ministre a interjeté appel de l'adjudication des dépens devant la Cour d'appel fédérale.

La Cour d'appel fédérale

[6]                 La Cour d'appel fédérale a annulé l'adjudication des dépens décidée par la Cour de l'impôt considérant qu'aucun des avocats n'avait été entendu par le juge sur la question des dépens, que le contribuable n'avait pas demandé de dépens dans son avis d'appel et que rien ni dans le dossier ni dans les motifs du juge de la Cour de l'impôt ne justifiait l'adjudication des dépens.      

[5] À notre avis, il incombait au juge de la Cour de l'impôt de donner aux parties la possibilité de se faire entendre sur la question des dépens avant de procéder à l'adjudication. En outre, nous ne pouvons rien trouver dans le dossier ou dans les motifs du juge de la Cour de l'impôt qui puisse justifier une adjudication sur la base avocat-client. La thèse du juge de la Cour de l'impôt selon laquelle la cotisation résultait peut-être de l'application d'une politique non écrite n'est pas établie par la preuve. Finch c. Canada, 2002 CAF 194, [2002] A.C.F. no 754.

[7]                 En conséquence, la Cour d'appel fédérale a accueilli l'appel du ministre relativement à l'adjudication des dépens et a renvoyé l'affaire à la Cour de l'impôt pour que celle-ci procède à un nouvel examen après avoir donné aux parties la possibilité de se faire entendre :

[6] __L'appel sera accueilli et l'affaire sera renvoyée au juge de la Cour de l'impôt pour que celui-ci puisse encore une fois trancher la question des dépens d'une façon compatible avec les présents motifs, après avoir donné aux parties la possibilité de se faire entendre. L'appelante aura droit aux dépens de l'appel.


La Cour canadienne de l'impôt : la décision de réexamen

[8]                 Après audition des parties relativement à la question des dépens, le juge de la Cour de l'impôt a de nouveau adjugé les dépens au montant forfaitaire de 25 000 $, cette fois-ci à l'avocat du contribuable. Il a expliqué sa décision au paragraphe 15 :

[15] En l'espèce, un avocat chevronné en matière de causes fiscales portant sur les pertes agricoles a dû intervenir. Clairement, le montant prévu au tarif ne convient pas, compte tenu de l'objet du procès, des arguments et de la preuve. Par ailleurs, l'avocate de l'intimée est également très aguerrie en matière de procès sur les pertes agricoles. Enfin, la cause était compliquée par la jurisprudence complexe créée par les tribunaux relativement aux « combinaisons » de revenus et à la notion d'attente de profit dans le cas de pertes agricoles restreintes.

Les arguments des parties

L'appelante

[9]                 L'appelante a soutenu que le juge de la Cour de l'impôt a commis une erreur en adjugeant des dépens d'un montant supérieur à celui prévu au Tarif B de l'annexe II des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) DORS 90-688 (les « Règles de la Cour de l'impôt » ). De plus, elle a soutenu que le juge de la Cour de l'impôt a commis une erreur en adjugeant des dépens à l'avocat du contribuable.


[10]            Le mémoire des faits et du droit de l'appelante souligne l'écart entre le montant adjugé par le juge de la Cour de l'impôt et le montant prévu par les Règles de la Cour de l'impôt. L'appel initial du contribuable devant la Cour de l'impôt était une instance de la catégorie A au sens du Tarif A de l'annexe II des Règles de la Cour de l'impôt parce que le total des montants en cause dans l'appel était de 50 000 $ ou moins. En conséquence, sans compter les débours, les dépens en vertu du Tarif B de l'annexe II des Règles de la Cour de l'impôt, pour lesquels il y a eu une journée consacrée à l'interrogatoire préalable, à l'audience sur l'état de l'instance et une journée et demie d'audience, s'élèveraient à 2 625 $ :

Pour tous les services fournis avant l'interrogatoire préalable                                       250 $

250 $ pour chaque journée ou partie de journée consacrée à l'interrogatoire

préalable et à l'audience sur l'état de l'instance                                                                  500 $

Préparation de l'audience                                                                                                            250 $

750 $ pour chaque journée ou partie de journée d'audience                                           1500 $

Pour tous les services fournis après le prononcé du jugement                                       125 $

En conséquence, l'adjudication des dépens décidée par le juge de la Cour de l'impôt au montant de 25 000 $ est de 22 375 $ supérieure aux dépens prévus aux Tarifs.

L'intimé

[11]            L'intimé a soutenu que l'adjudication des dépens devrait être maintenue parce que l'appelante n'avait pas prouvé que le montant était incorrect ou déraisonnable au point de justifier une ingérence dans le pouvoir discrétionnaire du juge de la Cour de l'impôt.


Analyse

[12]            La Cour est confrontée à la même question que celle qu'a affrontée la formation de la Cour d'appel fédérale qui a ordonné un nouvel examen de l'affaire, en ce qu'il n'y a rien dans le dossier qui justifierait une adjudication des dépens de cette ampleur. Le juge de la Cour de l'impôt lui-même a décrit cette adjudication comme étant « une somme forfaitaire qui se rapproche plus des dépens calculés sur la base procureur-client que selon le tarif. » : Finch, précitée au paragraphe 17. Le dossier dont était saisi le juge de la Cour de l'impôt était le même que celui qui était devant lui lors de la décision initiale. L'adjudication des dépens décidée par le juge de la Cour de l'impôt doit être annulée parce qu'elle n'est pas justifiée par le dossier et qu'elle n'est manifestement pas conforme aux conclusions de notre Cour.

[13]            Le juge de la Cour de l'impôt a également commis une erreur en adjugeant des dépens à l'avocat du contribuable plutôt qu'à la partie. Il est bien établi que les dépens doivent être adjugés à la partie et non à l'avocat de la partie. Les Règles de la Cour de l'impôt ne prévoient aucune exception.                


[14]            Le sous-alinéa 52c)(i) de la Loi sur la Cour fédérale confère à la Cour le pouvoir de rejeter l'appel ou de rendre la décision qui aurait dû être rendue. En vue d'épargner aux parties le temps et les frais qu'entraîne un renvoi au juge de la Cour de l'impôt, la Cour invoque le pouvoir prévu au sous-alinéa 52c)(i) et ordonne les dépens que la Cour de l'impôt aurait dû adjuger.

[15]            En définitive, l'appel sera accueilli avec dépens. Les dépens de la décision initiale seront adjugés au contribuable conformément aux tarifs prévus par le Tarif A et le Tarif B des Règles de la Cour de l'impôt.

« J. Richard »

Juge en chef

« Je souscris aux présents motifs

Julius A. Isaac, juge »

« Je souscris aux présents motifs

J.D. Denis Pelletier, juge »

Traduction certifiée conforme

Jean Maurice Djossou, LL.D.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION D'APPEL

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                         A-538-02

INTITULÉ :                                                        Sa Majesté la Reine

c.

Brian Roy Finch                         

LIEU DE L'AUDIENCE :                                             Saskatoon (Saskatchewan)

DATE DE L'AUDIENCE :                                           le 22 mai 2003

MOTIFS DU JUGEMENT :                                      le juge en chef Richard

Y ONT SOUSCRIT :                                                     le juge Isaac

le juge Pelletier

DATE DES MOTIFS :                                                  le 13 juin 2003

COMPARUTIONS :

Karen Janke                                                          POUR L'APPELANTE

James H.W. Sanderson                                                    POUR L'INTIMÉ

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Morris Rosenberg                                                 POUR L'APPELANTE

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

Sanderson Balicki Popescul and Forsyth            POUR L'INTIMÉ

Prince Albert (Saskatchewan)


Date : 20030613

Dossier : A-538-02

Ottawa (Ontario), le 13 juin 2003

CORAM :                                                           LE JUGE EN CHEF RICHARD

LE JUGE ISAAC

LE JUGE PELLETIER

ENTRE :

                                    SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                     appelante

                                                         et

                                       BRIAN ROY FINCH

                                                                                                           intimé

                                              JUGEMENT

L'appel est accueilli avec dépens. Les dépens de la décision initiale sont adjugés au contribuable conformément aux tarifs prévus par le Tarif A et le Tarif B des Règles de la Cour de l'impôt.

« J. Richard »

Juge en chef

Traduction certifiée conforme

Jean Maurice Djossou, LL.D.



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