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Date : 20180920


Dossier : A-390-17

Référence : 2018 CAF 169

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE NEAR

LE JUGE DE MONTIGNY

LA JUGE WOODS

 

 

ENTRE :

GRACE JOUBARNE

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 19 septembre 2018.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 20 septembre 2018.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE NEAR

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE DE MONTIGNY

LA JUGE WOODS

 


Date : 20180920


Dossier : A-390-17

Référence : 2018 CAF 169

CORAM :

LE JUGE NEAR

LE JUGE DE MONTIGNY

LA JUGE WOODS

 

 

ENTRE :

GRACE JOUBARNE

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE NEAR

[1]  L’appelante, Grace Joubarne, interjette appel de l’ordonnance et des motifs rendus par la Cour fédérale le 15 novembre 2017 (T-1480-17). À la suite de la requête présentée par l’intimée, Sa Majesté la Reine (Sa Majesté), le juge des requêtes a radié la déclaration de l’appelante sans autorisation de la modifier, avec adjudication des dépens à l’intimée. L’appel vise à déterminer si le juge des requêtes a commis une erreur en radiant la déclaration de l’appelante. À titre de question préliminaire, et à la suggestion de notre Cour, les parties ont accepté de modifier l’intitulé afin que Sa Majesté y soit désignée comme intimée, en remplacement du procureur général du Canada qui était initialement mentionné dans l’avis d’appel de l’appelante.

I.  Énoncé des faits

[2]  Aux alentours du 29 septembre 2017, l’appelante a déposé une demande de mesure de redressement déclaratoire par voie d’action simplifiée à l’encontre de l’intimée, au sujet d’un litige portant sur des taxes foncières réclamées par la ville de Belleville (la ville) sur deux biens immeubles (les biens immeubles) que possède l’appelante dans cette municipalité. L’appelante fait valoir que les biens immeubles répondent à la définition de « propriété fédérale » au sens des paragraphes 2(1) et 2(3) de la Loi sur les paiements versés en remplacement d’impôts, L.R.C. 1985, ch. M-13 (la LPRI), et que, pour percevoir des taxes municipales sur ces biens immeubles, la ville doit faire une demande au ministre fédéral des Travaux publics et des Services gouvernementaux en vertu de la LPRI afin que les taxes soient prélevées à même le Trésor.

[3]  La ville refuse de présenter une demande en ce sens, car elle soutient que la LPRI ne s’applique pas à ces biens immeubles. Selon l’appelante, toutefois, ce refus de la ville brime son droit de ne pas être dépossédée de sa richesse et de ses ressources, un droit qui, allègue-t-elle, lui est garanti par divers instruments de droit international et qui a été intégré au droit national, notamment par la LPRI et la Constitution canadienne. Elle soutient également que le refus de la ville de présenter une demande en application de la LPRI équivaut au délit civil de l’exécution fautive d’une charge publique qui engage la responsabilité civile de l’État en vertu de l’article 3 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif, L.R.C. 1985, ch. C-50.

[4]  À mon avis, rien ne justifie l’intervention de la Cour à l’encontre de l’ordonnance et des motifs du juge des requêtes. Les arguments de l’appelante demeurent, à première vue, non fondés. Je conviens avec le juge des requêtes qu’il est évident et manifeste que les biens immeubles que l’appelante possède dans la ville de Belleville ne sont pas des « propriétés fédérales » au sens de la LPRI. La LPRI vise à atténuer le fait que les biens immeubles appartenant à l’État sont exempts d’imposition provinciale et municipale aux termes de la Constitution (Halifax (Regional Municipality) c. Canada (Travaux publics et Services gouvernementaux), 2012 CSC 29), mais cette mesure législative ne s’applique pas aux biens immeubles dans la ville qui sont détenus et contrôlés par des intérêts privés.

[5]  Par ailleurs, l’argument voulant que l’article 297 des Règles des Cours fédérales (les Règles) interdise les requêtes en radiation n’est pas fondé. Cette disposition interdit la présentation de requêtes en jugement sommaire ou en procès sommaire dans une action simplifiée, mais elle ne vise pas les requêtes en radiation qui, comme l’a expliqué le juge des requêtes, sont clairement autorisées dans le cadre d’une action simplifiée en vertu du paragraphe 298(2) des Règles. Je conclus que le juge qui a été saisi de la requête a appliqué le bon critère pour statuer sur la requête en radiation, à savoir qu’une demande ne sera radiée que s’il est « évident et manifeste », dans l’hypothèse où les faits allégués seraient avérés, que la demande n’a aucune possibilité raisonnable d’être accueillie (R. c. Imperial Tobacco Canada Ltée, 2011 CSC 42, au paragraphe 17).

[6]  En outre, je conclus qu’il n’existe aucun fondement à l’argument de l’appelante selon lequel l’intimée a agi de manière inadéquate ou malveillante en présentant des arguments portant sur l’interprétation de la LPRI ou en tentant de quelque autre manière d’induire la Cour en erreur. Je considère également comme non fondé l’argument de l’appelante voulant que l’intimée ait volontairement omis de sa requête en radiation la page sept de la déclaration de l’appelante. À cet égard, j’accepte l’argument de l’intimée qui soutient que cette omission est accidentelle et que, quoi qu’il en soit, elle n’a causé aucun préjudice à l’appelante, puisque le juge des requêtes a été saisi de l’ensemble de la déclaration de l’appelante avant de statuer sur la requête.

[7]  Bien que l’appelante soutienne fermement le contraire, je conclus que le juge des requêtes n’a pas commis d’erreur de fait ou de droit en accueillant la requête en radiation de l’intimée, et qu’aucune injustice manifeste ne découle de sa décision. La déclaration de l’appelante était dénuée de tout fondement juridique et n’avait aucune chance d’être accueillie.

II.  Dispositif

[8]  L’appel est rejeté avec dépens de 750 $ adjugés à l’intimée.

« David G. Near »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

Yves de Montigny, j.c.a. »

« Je suis d’accord.

J. Woods, j.c.a. »

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


APPEL D’UNE ORDONNANCE ET DES MOTIFS DU JUGE LEBLANC DU 15 NOVEMBRE 2017, DANS LE DOSSIER T-1480-17

DOSSIER :

A-390-17

 

 

INTITULÉ :

GRACE JOUBARNE c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 19 septembre 2018

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE NEAR

 

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE DE MONTIGNY

LA JUGE WOODS

 

DATE DES MOTIFS :

Le 20 septembre 2018

 

COMPARUTIONS :

Grace Joubarne

 

L’APPELANTE

POUR SON PROPRE COMPTE

 

Jennifer Bond

Michael Roach

POUR L’INTIMÉE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

POUR L’INTIMÉE

 

 

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