Décisions de la Cour d'appel fédérale

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Date : 20040929

Dossier : A-75-03

Référence : 2004 CAF 323

ENTRE :

                                              FORESTEX MANAGEMENT CORP.

                                           J.M.C. FOREST MAINTENANCE LTD.

                                                                                                                                          appelantes

                                                                          - et -

                                M. DORNOCH REPRÉSENTANT LES ASSUREURS,

                             MEMBRES DE LLOYD'S, LONDRES (ANGLETERRE),

                                               MURRAY UNDERWRITERS LTD.

                         CANADIAN NORTHERN SHIELD INSURANCE COMPANY

                                  COMMERCIAL ASSURANCE UNION COMPANY

                                         CHRISTIE - PHOENIX (VICTORIA) LTD.

                                                                                                                                                intimés

                                              TAXATION DES DÉPENS - MOTIFS

Charles E. Stinson

Officier taxateur


[1]                J'ai fixé un échéancier pour la taxation par écrit des dépens réclamés par les intimés autres que Christie - Phoenix (Victoria) Ltd. (ci-après les intimés Dornoch). Les appelantes ont engagé une procédure dans le dossier T-1421-01 devant la Cour fédérale afin d'obtenir un redressement en matière d'assurance maritime et en ce qui a trait à l'échouement du navire « Texada » . Les intimés Dornoch ont déposé une défense dans ladite action. Après avoir souligné que les appelantes (demanderesses) n'avaient pas répondu à temps à un avis d'examen de l'état de l'instance, la Cour fédérale a rejeté l'action pour cause de retard, mais n'a pas abordé la question des dépens. Dans les observations qu'elles ont déposées dans le dossier A-75-03 en réponse à l'avis de l'état de leur appel de ladite ordonnance, les appelantes ont indiqué qu'elles prendraient certaines mesures pour faire avancer l'appel. La Cour d'appel fédérale a finalement rejeté l'appel pour retard injustifié, avec dépens en faveur des intimés.

[2]                Si je comprends bien, dans leurs observations, les appelantes contestent principalement l'adjudication des dépens et le droit aux dépens en vertu de l'article 400 des Règles. Elles demandent également la possibilité [Traduction] « d'aborder cette question » , demande à laquelle se sont opposés les intimés Dornoch. Pour les motifs exposés ci-dessous, je considère que les observations des appelantes ne me sont d'aucune utilité pour la taxation des dépens et je ne pense pas que la tenue d'une audience permettrait de corriger la situation.


[3]                Un mémoire des dépens, comportant un intitulé combiné visant à la fois les dossiers A-75-03 et T-1421-01 et faisant état des dépens pour les deux affaires, a été déposé dans chacun des dossiers. Dans l'arrêt IBM Canada c. Xerox of Canada Ltd. et al., [1977] 1 C.F. 181, 182 (C.A.F.), la Cour a critiqué la présentation de mémoires des dépens communs pour des instances engagées devant les deux différentes sections de la Cour fédérale du Canada. En règle générale, lorsqu'on m'a soumis comme en l'espèce des mémoires communs, j'ai fait remarquer que cette pratique est à déconseiller, mais je les ai taxés tels qu'ils ont été présentés lorsque j'ai considéré qu'aucun préjudice ne découlerait de l'absence de dépens additionnels pour préparer un mémoire des dépens distinct pour chacune des sections ou de l'absence d'obstacles à la présentation de pièces contradictoires. Une décision a ensuite été déposée dans chaque dossier en ce qui concerne la taxation des dépens devant chacune des sections de la Cour fédérale du Canada.


[4]                Cette pratique est devenue difficile à appliquer à partir du 2 juillet 2003, date d'entrée en vigueur de la Loi sur le Service administratif des tribunaux judiciaires (ci-après la LSATJ). En vertu de l'article 16 de la LSATJ, les deux sections de la Cour fédérale du Canada sont maintenues mais en tant que deux cours distinctes appelées la Cour d'appel fédérale du Canada et la Cour fédérale. L'article 3 de la LSATJ a créé le Service administratif des tribunaux judiciaires qui est chargé d'assurer le fonctionnement des greffes de ces deux cours ainsi que de ceux de la Cour d'appel de la cour martiale et de la Cour canadienne de l'impôt. Le paragraphe 187(2) de la LSATJ prévoit que les « ordonnances régissant la pratique et la procédure devant la Cour fédérale du Canada [...] demeurent en vigueur, dans la mesure où elles ne sont pas incompatibles avec les dispositions de celle-ci, jusqu'à ce qu'elles soient modifiées, abrogées ou qu'il en ait été autrement disposé » . Par conséquent, je peux taxer les dépens réclamés dans les dossiers A-75-03 et T-1421-01 respectivement et, même si je pense qu'on ne devrait pas encourager la pratique consistant à présenter un mémoire de dépens commun pour deux cours différentes, les sommes en jeu et l'effet de la loi applicable sont tels, à mon avis, qu'il serait inutile à ce stade d'exiger des intimés Dornoch qu'ils ventilent leurs dépens dans deux mémoires distincts.


[5]                Dans leurs observations, les appelantes n'ont pas abordé les dispositions pertinentes régissant ma compétence pour la taxation des dépens devant la Cour fédérale (T-1421-01). Il suffit simplement de souligner qu'elles s'opposent au droit aux dépens, mais je ne m'appuie pas par ailleurs sur ces observations. Le paragraphe 400(1) des Règles, qui donne à la Cour entière discrétion pour déterminer le montant des dépens, signifie que les ordonnances et les jugements doivent contenir des instructions claires indiquant que des dépens ont été adjugés. Étant donné l'article 4 et le paragraphe 5.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales, qui définissent la Cour, et l'article 2 des Règles de la Cour fédérale (1998), qui définit ce qu'est un officier taxateur, l'absence, comme en l'espèce, de l'exercice préalable du pouvoir discrétionnaire par la Cour fédérale ou par la Cour d'appel fédérale me laisse sans compétence en vertu de l'article 405 des Règles pour taxer les dépens dans le dossier T-1421-01. L'article 409 des Règles n'est d'aucune utilité puisqu'il prévoit que les facteurs visés au paragraphe 400(3) des Règles entrent en jeu une fois seulement qu'il est évident que la Cour a exercé le pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré par le paragraphe 400(1) des Règles. Les intimés Dornoch ont invoqué la décision Sax c. Chomyn et al., (1999) 173 F.T.R. 318 (C.F. 1re inst.), mais elle n'est guère utile puisqu'elle porte sur le droit aux dépens relevant du pouvoir discrétionnaire de la Cour plutôt que de celui de l'officier taxateur. Une copie des motifs de cette décision est déposée aujourd'hui dans le dossier T-1421-01 et les dépens qui, dans le mémoire, sont liés à ladite action sont refusés. Il y aurait toutefois pu y avoir des adjudications interlocutoires des dépens, mais il n'y en a eu aucune.

[6]                Les observations faites par les appelantes dans le dossier A-75-03 n'étaient pas non plus utiles. Les appelantes ont soutenu que lorsqu'elle a adjugé les dépens, la Cour d'appel fédérale ignorait que l'appel n'avait pas été signifié en bonne et due forme aux intimés Dornoch et elles ont prétendu que lesdits intimés, même s'ils étaient officieusement au courant de l'appel, n'avaient donc pas droit aux dépens parce qu'ils ne relevaient pas de la compétence de la Cour. De plus, la Cour n'avait pas compétence pour adjuger des dépens en l'absence d'une signification à personne de l'appel aux intimés.

[7]                Je souligne que le préambule du jugement daté du 13 janvier 2004 indique que la Cour a examiné certains faits au dossier, notamment ceux qui montrent clairement que l'appel n'a pas été signifié en bonne et due forme aux intimés. Compte tenu de l'article 3 et du paragraphe 5(1) de la Loi sur les Cours fédérales, qui définissent la Cour, et de l'article 2 des Règles de la Cour fédérale (1998), qui définit ce qu'est un officier taxateur, et compte tenu des motifs exposés ci-dessus, je n'exerce pas la compétence conférée à la Cour par le paragraphe 400(1) des Règles. De toute façon, la Cour a exercé cette compétence en l'espèce et je ne suis pas habilité par l'article 405 des Règles à modifier son jugement.


[8]                En effet, en raison de l'absence de la part des appelantes d'observations pertinentes qui pourraient m'aider à déterminer les questions en litige et à rendre une décision, il n'y a pas eu opposition au mémoire des intimés Dornoch. Comme je l'ai souvent dit dans des situations semblables, j'estime que les Règles de la Cour fédérale (1998) ne permettent pas qu'un officier taxateur abandonne à l'avantage d'une partie au litige sa position de neutralité afin de contester pour cette partie un article du mémoire des dépens. L'officier taxateur ne peut toutefois pas certifier des articles illégitimes, c'est-à-dire ceux qui ne sont pas visés par le jugement et le tarif. J'ai examiné en tenant compte de ces paramètres chacun des articles réclamés dans le mémoire des dépens ainsi que les pièces justificatives. Certains articles se rapportant aux services d'avocat auraient pu être contestés, mais le montant total réclamé pour ces services dans le mémoire des dépens se situe dans les limites pour l'octroi des dépens jugés raisonnables dans les circonstances du présent litige. Il ressort de mon examen de la preuve que les débours de 228,09 $ dans les mémoires communs s'appliquent aux deux instances. Comme je l'ai souvent dit au sujet de mon interprétation dans Carlile c. Sa Majesté la Reine (1997), 97 D.T.C. 5284, 5287 (O.T.) et compte tenu de l'opinion du lord juge Russell dans Re Eastwood (deceased) (1974), 3 All. E.R. 603, 608, savoir qu'en matière de taxation des dépens [Traduction] « la justice est rendue d'une façon sommaire, en ce sens que de nombreuses approximations sensées sont faites » , j'estime qu'il est possible d'exercer mon pouvoir discrétionnaire de manière à adjuger des dépens équitables pour les deux parties. J'accorde une somme de 50,00 $, comprenant la TPS, à titre de débours, une partie de cette somme représentant les dépenses engagées pour la taxation des dépens. Le mémoire des dépens des intimés Dornoch qui s'élevaient à 2 495,19 $ est taxé et accueilli pour la somme de 679,75 $.

(Signé) « Charles E. Stinson »

________________________

     Officier taxateur

Vancouver (C.-B.)

29 septembre 2004

Traduction certifiée conforme

Suzanne Bolduc, LL.B.


                                                     COUR D'APPEL FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                       A-75-03

INTITULÉ :                                      FORESTEX MANAGEMENT CORP. et al.

c. M. DORNOCH et al.

TAXATION DES DÉPENS SUR DOSSIER

SANS COMPARUTION PERSONNELLE

DES PARTIES

MOTIFS DE LA TAXATION

DES DÉPENS :                                 CHARLES E. STINSON

DATE DES MOTIFS :                    Le 29 septembre 2004

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Spears & Company

West Vancouver (C.-B.)

Pour les appelantes

Bromley Chapelski

Vancouver (C.-B.)

Pour les intimés M. Dornoch et al.


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