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Date : 20050128

Dossier: A-589-04

Référence :2005 CAF 39

PRÉSENT : LE JUGE EVANS

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                               appelant

et

NINA LAZAREVA

                                                                                                                                                  intimée

« Requête jugée sur dossier sans comparution des parties. »

Ordonnance prononcée à Ottawa (Ontario), le 28 janvier 2005.

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                                                                          LE JUGE EVANS


Date : 20050128

Dossier: A-589-04

Référence :2005 CAF 39

PRÉSENT : LE JUGE EVANS

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                               appelant

et

NINA LAZAREVA

                                                                                                                                                  intimée

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE EVANS

[1]        Je suis saisi d'une requête présentée par l'intimée, Nina Lazareva, en vertu de l'article 369 des Règles des Cours fédérales (les Règles), en annulation de l'appel que le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a interjeté de la décision rendue par le juge Phelan de la Cour fédérale le 6 octobre 2004 : Lazareva c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 1392. Dans sa décision, le juge Phelan a rejeté une requête présentée par le ministre en vertu de l'article 397 des Règles en réexamen d'une décision qu'il avait rendue le 20 juillet 2004 : Lazareva c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 1019.

[2]        Le ministre a présenté une requête incidente sollicitant un sursis d'exécution de l'ordonnance du juge Phelan dans l'attente qu'il soit statué sur l'appel, au cas où la requête en rejet de l'appel du Ministre présentée par l'intimée serait rejetée.

[3]        Le juge Phelan avait refusé de certifier une question en vue d'un appel avant de rendre la décision de juillet, et a refusé de certifier une question lorsqu'il a réexaminé cette décision en octobre. L'intimée soutient que, en l'absence d'une question certifiée, la Cour n'a pas compétence pour entendre l'appel du ministre, en raison de l'alinéa 74d) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.

[4]        Le ministre prétend que l'interdiction légale du droit d'appel à la Cour dans les causes d'immigration en l'absence d'une question certifiée n'est pas absolue. Plus précisément, elle n'empêche pas une partie d'interjeter appel d'une décision que le juge de la Cour fédérale n'avait pas compétence de rendre.

[5]        Après que les parties eurent deposé leurs documents au dossier, la Cour a accepté d'entendre un appel dans une autre cause d'immigration, en dépit de l'absence d'une question certifiée, au motif que le juge avait refusé d'exercer sa compétence et de statuer sur une demande de sursis d'exécution d'une ordonnance de renvoi dans l'attente d'une décision relative à une demande d'autorisation et, si elle était accordée, sur la demande elle-même : Canada (Solliciteur général) c. Subhaschandran, 2005 CAF 27.

[6]        En l'espèce, le ministre soutient que le juge Phelan a outrepassé sa compétence lorsqu'il a rendu sa décision parce qu'il a pris sur lui d'exercer un pouvoir discrétionnaire conféré par le législateur fédéral au ministre, c'est-à-dire le pouvoir d'autoriser des personnes à faire une demande de résidence permanente à partir du Canada pour des raisons humanitaires. Le ministre allègue aussi que le juge n'avait pas compétence pour lui ordonner de considérer la demande de résidence permanente de l'intimée comme une demande faite à partir du Canada, ou de surseoir à son renvoi du Canada.

[7]        Je ne peux accueillir la requête en rejet de l'appel pour manque de compétence. Eu égard à l'arrêt Subhaschandran, il est clair qu'il y a des cas où une partie peut porter en appel une cause d'immigration devant la Cour, même si aucune question n'a été certifiée. Cependant, je ne suis pas certain que les faits de la présente espèce donnent lieu à l'application du principe consacré par l'arrêt Subhaschandran. Par conséquent, la question de savoir si l'appel peut, en dépit de l'absence d'une question certifiée, suivre son cours au motif que la Cour fédérale aurait outrepassé sa compétence, doit faire l'objet de débats oraux lorsque l'appel sera entendu.

[8]        Puisque j'ai décidé que l'appel doit suivre son cours, je dois maintenant examiner la requête incidente en sursis d'exécution, de l'ordonnance du juge Phelan présentée par le ministre. L'intimée prétend que la décision du juge qui doit être suivie est la première, c'est-à-dire l'ordonnance du 20 juillet 2004. De plus, comme cette décision elle-même n'est pas frappée d'appel, elle ne peut pas faire l'objet d'un sursis d'exécution en attendant qu'il soit statué sur l'appel du ministre interjeté contre la décision rendue le 6 octobre 2004 sur le réexamen.

[9]        Je conviens avec l'avocat du ministre qu'il s'agit là d'une approche trop formaliste qui pourrait priver le ministre d'une mesure efficace, car les deux ordonnances du juge Phelan sont indissociables. En ce qui a trait au critère tripartite applicable aux demandes de sursis, j'ai déjà indiqué que cet appel met en jeu une question défendable, ce que ne semble pas contester l'intimée.

[10]      En outre, je suis convaincu que si l'appel était accueilli, le ministre subirait un préjudice irréparable s'il était obligé de consacrer les ressources nécessaires au traitement de la demande du droit d'établissement à partir du Canada de l'intimée, et d'entamer un processus qu'il n'avait pas le pouvoir d'entreprendre. En ce qui concerne la prépondérance des inconvénients, je ne peux pas conclure que les inconvénients causés à l'intimée par le sursis d'exécution l'emportent sur le préjudice qui serait causé au ministre, d'autant plus que l'intimée a déjà vécu au Canada pendant dix ans sans statut de résidente permanente.

[11]      Par conséquent, j'abonde dans le sens du ministre et lui ordonnerai de ne pas traiter la demande du droit d'établissement à partir du Canada de l'intimée tant qu'il n'aura pas été statué sur l'appel. Cependant, reconnaissant les inconvénients qui pourraient être causés à l'intimée et à son mari (qui sont tous deux âgés de plus de quatre-vingts ans) par l'attente et l'incertitude, j'ordonnerai aussi que l'audition de l'appel ait lieu dans les plus brefs délais.

                                                                                                      « John M. Evans »                 

                                                                                                            Juge                        

Traduction certifiée conforme

François Brunet, LL.B., B.C.L.


COUR D'APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                                                                                                                           

                 

DOSSIER :                                                                             A-589-04

INTITULÉ :                                                                            Le ministre de la

                                                                                                Citoyenneté et de

                                                                                                l'Immigration

                                                                                                c.

                                                                                                Nina Lazareva

Requête jugée sur dossier sans comparution des parties

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE EVANS

DATE DES MOTIFS :                                                           LE 28 JANVIER 2005

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Greg G. George                                                                         POUR L'APPELANT

Inna Kogan                                                                               POUR L'INTIMÉE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

John H. Sims, c.r.                                                                      POUR L'APPELANT

Sous-procureur général du Canada

Inna Kogan                                                                               POUR L'INTIMÉE

Avocate

Toronto (Ontario)



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