Date : 20050920
Dossier : A-594-04
Référence : 2005 CAF 302
CORAM : LE JUGE LÉTOURNEAU
ENTRE :
CLYDE WILLIAMS
demandeur
et
SECTION LOCALE 938 DE LA FRATERNITÉ
INTERNATIONALE DES TEAMSTERS et
PUROLATOR COURRIER LTÉE
défendeurs
Audience tenue à Toronto (Ontario), le 12 septembre 2005
Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 20 septembre 2005
MOTIFS DU JUGEMENT : LE JUGE MALONE
Y ONT SOUSCRIT : LE JUGE LÉTOURNEAU
LE JUGE ROTHSTEIN
Date : 20050920
Dossier : A-594-04
Référence : 2005 CAF 302
CORAM : LE JUGE LÉTOURNEAU
LE JUGE ROTHSTEIN
LE JUGE MALONE
ENTRE :
CLYDE WILLIAMS
demandeur
et
SECTION LOCALE 938 DE LA FRATERNITÉ
INTERNATIONALE DES TEAMSTERS et
PUROLATOR COURRIER LTÉE
défendeurs
MOTIFS DU JUGEMENT
LE JUGE MALONE
I. Introduction
[1] La présente demande de contrôle judiciaire vise une décision du Conseil canadien des relations industrielles (le Conseil) en date du 18 octobre 2004 (la décision sur la demande de réexamen). Dans cette décision, le Conseil a rejeté la demande présentée par le demandeur en vue d'obtenir le réexamen d'une décision antérieure datée du 26 avril 2004 (la décision initiale) par laquelle le Conseil a rejeté une plainte fondée sur le « devoir de représentation juste » déposée par M. Williams contre la section locale 938 de la Fraternité internationale des Teamsters (le syndicat). Le Conseil a rejeté la plainte sans tenir d'audience après avoir décidé qu'elle ne soulève pas de preuve prima facie contre le syndicat.
II. La question en litige
[2] Les fondements de la demande de réexamen du requérant sont le caractère stéréotypé et abstrait de la décision initiale, ainsi que l'insuffisance des motifs de la décision du Conseil.
[3] Pour une raison ou pour une autre, M. Williams n'a pas demandé le contrôle judiciaire de la décision initiale et le délai qui s'applique aux demandes de contrôle judiciaire a expiréen mai 2004. En conséquence, compte tenu de la jurisprudence, la Cour n'est pas habilitée, dans le cadre du contrôle judiciaire d'une décision sur une demande de réexamen, à réviser une décision initiale du Conseil. (Voir Lamoureux c. Association canadienne des pilotes de ligne et al., [1993] A.C.F. no 1128 (C.A.) ; Sim c. Canada, [1997] A.C.F. no 1382 (C.A.)).
III. Les normes de contrôle
[4] La Cour a toujours statué que les décisions du Conseil commandent la plus grande retenue de la part des tribunaux judiciaires. En l'espèce, tous les critères utilisés pour une analyse pragmatique et fonctionnelle mènent à la conclusion que la décision du Conseil ne doit pas être modifiée à moins qu'elle soit manifestement déraisonnable (voir Dr Q. c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 R.C. S. 226). La seule exception concerne les questions d'équité procédurale auxquelles il appartient à la Cour de donner une réponse juridique (voir S.C.F.P. c. Ontario (Ministre du Travail), [2003] 1 R.C.S. 539, au paragraphe 100).
[5] Le critère de la décision manifestement déraisonnable est très exigeant. Une décision n'est pas manifestement déraisonnable pour la simple raison que la Cour peut ne pas être d'accord avec celle-ci. Pour que la décision du Conseil sur une demande de réexamen soit manifestement déraisonnable, la Cour doit conclure qu'elle est clairement irrationnelle. (Voir Barreau du Nouveau-Brunswick c. Ryan, [2003] 1 R.C.S. 247, au paragraphe 52.)
IV. Analyse
[6] Pour rendre sa décision sur la demande de réexamen, le Conseil était tenu de se conformer aux dispositions de l'article 44 du Règlement de 2001 sur le Conseil canadien des relations industrielles, DORS/2001-520 (le Règlement). Le fondement du pouvoir de réexamen est clair; il s'agit de la survenance de faits nouveaux qui n'auraient pas pu être portés à la connaissance du Conseil quand il a rendu sa décision initiale, de la présence
d'erreurs de droit ou de principe, ou du non-respect d'un principe de justice naturelle par la formation initiale du Conseil.
[7] Il m'est impossible de dire que la décision du Conseil sur la demande de réexamen était manifestement déraisonnable. Une demande de réexamen n'est pas une possibilité d'obtenir une nouvelle audience et ne constitue pas non plus un appel. Dans son examen de la décision initiale, la formation chargée du réexamen ne pouvait substituer sa propre appréciation des faits à celle de la formation initiale. En l'espèce, vu les faits dont elle a été saisie, la formation initiale a conclu que le syndicat avait le droit de ne pas poursuivre l'affaire et le demandeur n'invoque aucun fait ou motif nouveau qui pourrait modifier cette conclusion.
[8] Bien que cela ne soit pas nécessaire, j'examinerai brièvement la plainte de M. William selon laquelle la formation initiale n'a pas satisfait à l'obligation de motiver sa décision comme l'exige l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, au paragraphe 43.
[9] Ni le Code canadien du travail, L.R.C. 1985, ch. L-2, ni le Règlement n'obligent le Conseil à motiver ses décisions par écrit; toutefois, une forme quelconque de motifs est requise lorsque de la décision revêt une grande importance pour l'individu (voir Baker, au paragraphe 43). En l'espèce, même si la décision initiale était brève, les motifs expliquent suffisamment à M. Williams pourquoi la formation n'a pas conclu que le syndicat avait contrevenu à son devoir de représentation juste.
[10] La Cour suprême du Canada a dit qu'un syndicat jouit d'une latitude considérable dans les décisions concernant la représentation de ses membres. Un employé n'a pas un droit absolu à l'arbitrage, mais lorsqu'il refuse de donner suite à un grief, le syndicat ne doit pas se comporter d'une manière arbitraire ou discriminatoire ni faire preuve de mauvaise foi (Guilde de la marine marchande du Canada c. Guy Gagnon et al., [1984] 1 R.C.S. 509, à la page 527).
[11] En l'espèce, la formation était convaincue que le syndicat avait étudié le grief et n'avait pas agi d'une manière arbitraire ou discriminatoire ni fait preuve de mauvaise foi. Une fois que l'employeur a rejeté le grief, le Conseil a conclu que le syndicat avait légalement le droit de refuser de poursuivre la procédure de grief. En vertu des principes établis dans l'arrêt Guilde de la marine marchande du Canada, rien de plus n'était exigé du Conseil dans ses motifs écrits.
[12] La demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée. Le syndicat a demandé les dépens, lesquels devraient être accordés.
« B. Malone »
Juge
« Je souscris aux présents motifs
Gilles Létourneau, juge »
« Je souscris aux présents motifs
Marshall Rothstein, juge »
Traduction certifiée conforme
Suzanne Bolduc, LL.B.
COUR D'APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A-594-04
INTITULÉ : CLYDE WILLIAMS
demandeur
- et -
SECTION LOCALE 938 DE LA FRATERNITÉ INTERNATIONALE DES TEAMSTERS et PUROLATOR COURRIER LTÉE
défendeurs
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE LUNDI 12 SEPTEMBRE 2005
MOTIFS DU JUGEMENT: LE JUGE MALONE
Y ONT SOUSCRIT : LE JUGE LÉTOURNEAU
LE JUGE ROTHSTEIN
DATE DES MOTIFS : LE 20 SEPTEMBRE 2005
COMPARUTIONS :
Joseph Markin POUR LE DEMANDEUR
Howard Goldblatt POUR LES DÉFENDEURS
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Joseph Markin POUR LE DEMANDEUR
Avocat
Toronto (Ontario)
Sack Goldblatt Mitchell POUR LES DÉFENDEURS
Avocats
Toronto (Ontario)