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Date : 20040419

Dossier : A-393-02

Référence : 2004 CAF 156

CORAM :       LE JUGE ROTHSTEIN

LE JUGE PELLETIER

LE JUGE MALONE

ENTRE :

                                                               IRVINE FORREST

                                                                                                                                               appelant

                                                                             et

                                          LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                   intimé

                                       Audience tenue à Toronto (Ontario), le 3 mars 2004

                                       Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 19 avril 2004

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                      LE JUGE PELLETIER

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                 LE JUGE ROTHSTEIN

                                                                                                                         LE JUGE MALONE


Date : 20040419

Dossier : A-393-02

Référence : 2004 CAF 156

CORAM :       LE JUGE ROTHSTEIN

LE JUGE PELLETIER

LE JUGE MALONE

ENTRE :

                                                               IRVINE FORREST

                                                                                                                                               appelant

                                                                             et

                                          LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                   intimé

                                                       MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE PELLETIER


[1]                Il s'agit d'un appel d'une décision dans laquelle le juge Kelen a rejeté les deux demandes dans lesquelles l'appelant sollicitait le contrôle judiciaire des décisions rendues par un président indépendant nommé en application de l'article 24 du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (le Règlement) pour procéder à l'audition des accusations d'infraction disciplinaire. Dans la première décision, l'appelant a été reconnu coupable d'avoir enfreint le paragraphe 40(1) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20 (la Loi), en refusant de fournir un échantillon d'urine. Dans la deuxième décision, l'appelant a été reconnu coupable d'avoir désobéi à l'ordre légitime d'un agent et d'avoir créé des troubles susceptibles de mettre en danger la sécurité du pénitencier. L'appelant a demandé le contrôle judiciaire de chacune de ces deux décisions. Les demandes ont été instruites ensemble, et la Cour a statué sur elles dans les mêmes motifs.

[2]                En ce qui concerne l'accusation relative à son omission de fournir un échantillon d'urine, l'appelant a essentiellement soutenu devant le président indépendant qu'il s'est vu refuser le droit de présenter ses observations lorsque trois agents de correction l'ont abordé de façon agressive et lui ont demandé de fournir un échantillon d'urine. Devant le juge Kelen, l'appelant a fait valoir qu'il y avait eu un manquement aux principes de justice naturelle lorsqu'on ne lui a pas permis d'appeler des témoins qui, selon lui, auraient témoigné qu'il n'avait pas refusé de fournir un échantillon d'urine.


[3]                La Loi fait état de deux cas dans lesquels une prise d'échantillon d'urine peut être faite. Un agent de correction qui a des motifs raisonnables et vraisemblables de croire qu'un détenu a introduit dans son corps une substance intoxicante peut obliger celui-ci à lui fournir un échantillon d'urine (alinéa 54a) de la Loi). La Loi prévoit également qu'on peut obliger un détenu à fournir un échantillon d'urine dans le cadre d'un programme de contrôle au hasard destiné à combattre l'utilisation des substances intoxicantes dans les pénitenciers. Une des différences qui existent entre les deux cas tient à ce que le détenu a le droit de présenter ses observations (alinéa 54a) et paragraphe 57(1) de la Loi) lorsque la raison pour laquelle on l'oblige à fournir un échantillon d'urine est que l'agent de correction a des motifs raisonnables et vraisemblables de croire qu'il a introduit dans son corps une substance intoxicante. Le détenu ne bénéficie pas du droit de présenter ses observations lorsqu'il s'agit d'un contrôle au hasard. Par conséquent, l'appelant n'avait pas le droit de présenter ses observations lorsqu'on lui a demandé de fournir un échantillon d'urine dans le cadre d'un contrôle au hasard.

[4]                Le président indépendant a conclu que l'appelant avait contrevenu à l'alinéa 40l) de la Loi en omettant de fournir un échantillon d'urine sur demande. Le juge Kelen a conclu que la décision du président indépendant sur ce point était raisonnable et n'était donc pas susceptible de contrôle judiciaire.

[5]                Pour ce qui est du refus du président indépendant de permettre à l'appelant d'appeler ses témoins, les déclarations fournies par les témoins révèlent que leur témoignage avait trait à la question du comportement des agents qui étaient présents, et ne portait pas sur la question de l'échantillon d'urine. Le juge Kelen a conclu qu'il n'y avait pas de manquement aux principes de justice naturelle dans la façon dont le président indépendant a mené l'audience.


[6]                En ce qui concerne la deuxième accusation, l'appelant a fait valoir que le président indépendant a contrevenu aux principes de justice naturelle en statuant sur l'accusation en son absence. À la date de l'audience, l'appelant recevait la visite de son épouse et de sa famille. Lorsqu'on l'a avisé que l'audience allait débuter, il a apparemment déclaré que le président indépendant ne pouvait pas procéder en son absence. Le président indépendant a conclu qu'il lui était loisible de procéder en l'absence de l'appelant en se fondant sur l'alinéa 42(2)a) de la Loi, qui prévoit que l'audience peut avoir lieu en l'absence du détenu quand celui-ci décide de ne pas y assister. Pour ce qui est du bien-fondé de l'accusation, le président indépendant a conclu que l'appelant était coupable sur la foi de la preuve présentée par l'agent de correction concerné.

[7]                L'appelant a soutenu devant le juge Kelen qu'il n'avait pas été informé de la date de l'audience, une allégation qui n'a pas été acceptée par le juge qui a entendu la demande. En ce qui concerne le bien-fondé de l'accusation, le juge Kelen a conclu qu'on ne pouvait qualifier la décision du président indépendant de déraisonnable, et il a donc refusé d'intervenir.


[8]                Le rôle d'une cour d'appel qui siège en appel d'une décision portant sur une demande de contrôle judiciaire consiste à vérifier si la cour de révision a appliqué la norme de contrôle appropriée et, dans la négative, à examiner la décision en appliquant la norme que la cour de révision aurait dû appliquer (Dr. Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 R.C.S. 226 au paragraphe 43, 2003 CSC 19). En l'espèce, le juge Kelen a conclu que la norme de contrôle qu'il convenait d'appliquer aux questions de fait était la norme de la décision manifestement déraisonnable, et que la norme de la décision raisonnable simpliciter devait être appliquée aux questions mixtes de fait et de droit. Je souscris à son opinion concernant la norme de contrôle applicable aux questions dont il était saisi, et je suis d'avis qu'il a correctement appliqué la norme en question. Dans les circonstances, rien ne justifie l'intervention de la Cour.

[9]                L'appel sera rejeté. Les dépens, fixés au montant global de 1 500 $ pour les deux demandes, seront adjugés à l'intimé.

                                                                                                                         _ J.D. Denis Pelletier _          

                                                                                                                                                     Juge                        

_ Je souscris aux présents motifs

Marshall Rothstein, juge _

_ Je souscris aux présents motifs

B. Malone, juge _

Traduction certifiée conforme

Aleksandra Koziorowska, LL.B.


                                                     COUR D'APPEL FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                          A-393-02

INTITULÉ :                                                          IRVINE FORREST

c.

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L'AUDIENCE :                                    TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                                  LE 3 MARS 2004

MOTIFS DU JUGEMENT :                              LE JUGE PELLETIER

Y ONT SOUSCRIT :                                           LE JUGE ROTHSTEIN

LE JUGE MALONE

DATE DES MOTIFS :                                        LE 19 AVRIL 2004

COMPARUTIONS :

Irvine Forrest                                                           POUR SON PROPRE COMPTE

Jeff Anderson                                                          POUR L'INTIMÉ

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Irvine Forrest                                                           POUR SON PROPRE COMPTE

Numéro SED 119382 D

Établissement de Warkworth

Campbellford (Ontario)

Morris Rosenberg                                                    POUR L'INTIMÉ

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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