Décisions de la Cour d'appel fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Recueil des arrêts de la Cour fédérale
Canada (Procureur général) c. Dunham (C.A.) [1997] 1 C.F. 462

     A-708-95

CORAM:      LE JUGE MARCEAU

     LE JUGE DÉCARY

     LE JUGE SUPPLÉANT CHEVALIER

ENTRE:

     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

     Requérant,

     - et -

     CHRISTINE DUNHAM,

     Intimée.

     MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE MARCEAU

     Il est certes peu de questions relatives à l'application de la Loi sur l'assurance-chômage qui aient donné lieu à autant de décisions jurisprudentielles et de commentaires de doctrine sans complètement sortir du champ des controverses, que celle à laquelle se rattache le pourvoi aujourd'hui devant la Cour. Il s'agit encore de définir les rôles respectifs que la Loi attribue à la Commission de l'emploi et de l'immigration, au Conseil arbitral et au juge-arbitre dans l'application de ces quelques dispositions où elle attribue à la Commission, chargée de son administration, certains pouvoirs qu'elle l'habilite à exercer, dans certaines circonstances, si elle le juge à propos. La question, formulée de façon plus précise et concrète, est celle de savoir à quelles conditions et de quelle façon le Conseil arbitral et le juge-arbitre peuvent intervenir dans l'exercice par la Commission d'un pouvoir que le Parlement avait laissé à sa discrétion. De tels pouvoirs sont peu nombreux mais ne sont pas sans portée. On les trouve définis aux articles 24 (approbation d'un projet créateur d'emploi), 25 (approbation d'un accord de travail partagé), 26 (approbation d'un cours d'instruction), et aux paragraphes 30(1) (temps de disqualification pour perte d'emploi injustifiée), 33(1) (pénalité pour fausse déclaration d'un prestataire), 33(2) (pénalité pour fausse déclaration d'un employeur), 41(10) (exemption relative à une exigence administrative), et 79(1) (extension du délai d'appel). C'est le plus frappant d'entre eux, celui défini au paragraphe 33(1), que le présent pourvoi implique, et j'en reproduis le texte avant de résumer les faits:

              33.      (1)      Lorsque la Commission prend connaissance de faits qui, à son avis, démontrent qu'un prestataire ou une personne agissant pour le compte de celui-ci a, relativement à une demande de prestations ou à l'occasion de renseignements exigés par la présente loi ou par les règlements, sciemment fait une déclaration fausse ou trompeuse, fourni un renseignement faux ou trompeur ou présenté des observations fausses ou trompeuses, elle peut infliger au prestataire, pour chacun des déclarations, renseignements ou observations faux ou trompeurs, une pénalité dont le montant ne dépasse pas le triple de son taux de prestations hebdomadaires.         

     * * *

     L'intimée travaillait comme réceptionniste et expéditrice de voitures-taxis (dispatcher) lorsqu'elle perdit son emploi le 8 avril 1991. Elle fit une demande initiale de prestations qui fut approuvée. Elle commença à toucher ses prestations quelques jours plus tard, et continua à les recevoir, au taux de 245,00$ par semaine, jusqu'à la fin de la période définie en sa faveur. Longtemps après, soit au cours de l'année 1993, la Commission apprenait, au hasard d'une enquête, que l'intimée avait en fait travaillé pour différents employeurs pendant une grande partie de la période au cours de laquelle des prestations lui avaient été payées. La découverte était de conséquence: jamais l'intimée n'avait fait part de ces divers emplois et des gains qu'elle en retirait dans ses rapports hebdomadaires. Interrogée par un agent, l'intimée ne put rien expliquer et se contenta de dire qu'elle ne savait pas ce qui s'était produit. La Commission se devait évidemment de réagir. Elle détermina que l'intimée avait reçu indûment une somme de 5 145,00$ suite à 18 réclamations hebdomadaires appuyées par des déclarations fausses. Étant d'avis que ces déclarations fausses avaient été faites sciemment, elle réclama de l'intimée, en plus du remboursement du trop-payé, une pénalité de 3 762,00$, soit 18 fois le montant des prestations hebdomadaires, cela, bien sûr, sous l'autorité du paragraphe 33(1) de la Loi.

     Saisi d'un appel de la détermination de la Commission, le Conseil arbitral se laissa aisément convaincre par le représentant de l'intimée qu'il s'agissait de 17 déclarations fausses plutôt que 18, ce qui impliquait évidemment une réduction de la pénalité de 245,00$. Mais le Conseil se défendit d'aller au-delà et refusa même de recevoir le témoignage de l'intimée. Il était, en effet, d'avis qu'une fois les fausses déclarations volontaires constatées, l'imposition des pénalités et l'établissement de leur montant relevaient de la Commission seule; lui n'avait aucune juridiction pour intervenir.

     Le juge-arbitre ne le vit pas du tout de la même façon et il s'employa à faire valoir ses vues dans une longue décision. Se plaçant d'abord au niveau des principes, le juge-arbitre, dans ses notes, conteste que la Commission puisse être vue comme ayant seule juridiction pour décider des pénalités qu'elle peut imposer sous l'autorité du paragraphe 33(1). Le pouvoir de la Commission, comme tout pouvoir discrétionnaire, doit être exercé de bonne foi en tenant compte de tous les facteurs pertinents et sans se laisser influencer par des facteurs qui ne le sont pas, et il appartient au Conseil arbitral comme au juge-arbitre d'intervenir et de rendre une décision conforme, si celle de la Commission n'a pas été rendue comme elle le devait. Puis, venant aux faits de la cause, le juge-arbitre considère que la décision de la Commission effectivement n'a pas été rendue comme elle le devait car le quantum de la pénalité semble avoir été établi en fonction de directives que les autorités de la Commission avaient émises à l'adresse des agents responsables de l'application de la Loi, ce qui avait eu pour effet d'empêcher l'agent ici en cause d'apprécier toutes les circonstances de l'espèce. Il annule donc la décision du Conseil arbitral en autant qu'elle confirmait celle de la Commission quant au quantum de la pénalité et fixe celle-ci à la somme de 850,00$.

     C'est là la décision qu'attaque le procureur-général dans sa demande de contrôle judiciaire au motif que le juge-arbitre aurait excédé sa juridiction et commis une erreur de droit en la rendant.

     * * *

     Ainsi se soulève au départ et directement, comme je l'annonçais dans mes remarques introductives, la question générale de savoir si le Conseil arbitral et le juge-arbitre ont un pouvoir d'intervention face à une décision de la Commission rendue dans l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire comme celui du paragraphe 33(1) de la Loi.

     Cette question, rattachée qu'elle est à des dispositions d'application courante, ne pouvait pas ne pas se poser dès les premiers temps de la mise en vigueur de la Loi. Elle a, en fait, je le répète, été soulevée à de multiples reprises mais toujours est-elle revenue à la surface sous quelque aspect. La raison de cette étonnante survivance est, sans doute, la présence de conclusions équivoques dans quelques décisions initiales et de commentaires ambigus dans les notes de juges. Mais la Cour, dans quelques décisions récentes, spécialement la dernière significative en date, celle de Morin c. Le Procureur général du Canada, 134 D.L.R. 4th 724 (1er avril 1996), s'est ressaisie et a mis fin à plusieurs de ces équivoques et ambiguïtés. De sorte que la question a considérablement perdu de son ampleur aujourd'hui, encadrée qu'elle est maintenant dans des données fermes. Je ne vois aucun intérêt à reprendre l'histoire des tergiversations de la jurisprudence; elle a été si souvent reprise. Ce qui m'importe, c'est de rappeler ces données que je considère acquises et à partir desquelles il sera peut-être possible de voir ce qu'il reste à préciser pour clarifier pleinement la situation.

     1o      On n'a vraiment jamais douté que les décisions de la Commission rendues dans l'exercice de pouvoirs de nature discrétionnaire ne restaient pas à l'abri de toute contestation devant les deux autres instances décisionnelles créées par la Loi: le Conseil arbitral et le juge-arbitre. Les termes clairs et sans réserve de la Loi ne permettent pas de penser autrement (articles 79, 80, 81). Toutes les décisions de la Commission sont, en principe, sujettes à appel et toutes les décisions du Conseil arbitral, sujettes à révision. Au reste, en excluant expressément le droit d'appel pour certaines décisions spécifiques de la Commission, celles prises en vertu des articles 24, 25 et 26 " sans doute à cause de leur caractère purement politique " le Parlement ne permettait pas d'hésitation possible à cet égard.

     2o      On n'a vraiment jamais douté, non plus, que la contestation d'une décision de la Commission devant le Conseil arbitral se faisait par voie d'appel donnant lieu à un procès de novo alors que le rôle du juge-arbitre en est un de révision de la décision du Conseil arbitral. Il est vrai que l'article 81 accorde au juge-arbitre, entre autres possibilités, celle de rendre la décision que le Conseil arbitral aurait dû rendre, mais ses pouvoirs d'intervention tels que définis à l'article 80 sont strictement ceux d'une instance de révision. Dans une autre de ses décisions récentes, celle de Purcell c. Procureur général du Canada, [1996] 1 C.F. 644, cette Cour s'est employée à mettre en lumière la nature de ces recours, et a insisté sur ce caractère de novo de l'appel devant le Conseil arbitral et son importance dans l'esprit de la Loi en tant que pivot du système de protection des droits des bénéficiaires en vertu de la Loi.

     3o      Il n'y a aucune raison de penser que la Loi sur l'assurance-chômage soit d'un caractère unique et que les pouvoirs qu'elle confère à l'organisme chargé de son administration doivent être analysés isolément, sans égard aux principes généraux de notre système juridique. Les pouvoirs discrétionnaires attribués à la Commission ne sont pas de nature autre que les pouvoirs discrétionnaires attribués à n'importe quel organisme ou tribunal inférieur de même ordre. Or, les possibilités d'intervention d'une instance d'appel ou de révision d'une décision discrétionnaire d'une autorité sujette à contrôle sont bien connues. La décision discrétionnaire qui aurait été prise sur la base de considérations non pertinentes ou encore sans égard à toutes les considérations pertinentes devra être sanctionnée et cassée par l'instance d'appel ou de révision. La Cour a répété à maintes reprises que les décisions discrétionnaires de la Commission n'échappaient pas à la règle.

     La décision Purcell, à laquelle je viens de me référer, n'exprime pas les pouvoirs d'intervention de l'instance d'appel de même façon. La raison est qu'il ne s'agissait pas là de l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire proprement dit, mais de la mise en oeuvre de l'autorité qu'a la Commission de donner effet à "l'opinion" qu'elle peut se faire de l'existence d'une situation. C'était la présence de la condition requise pour l'imposition d'une pénalité en vertu du paragraphe 33(1) qui était en cause, i.e. que la Commission soit d'avis que les fausses déclarations ont été faites sciemment. Mais se former une opinion n'est pas exercer une discrétion. Il ne saurait être question là de considérations étrangères ou pertinentes. Comme la Cour le dit, la condition d'intervention dans ces cas est tout simplement la constatation que la Commission aurait formé cet avis ou cette opinion à laquelle elle a donné effet sur la base d'une vue incomplète, ou d'une perception ou interprétation fausse, des faits.

     4o      L'arrêt Morin a définitivement mis fin à la seule vraie controverse qui existait en doctrine et jurisprudence depuis l'arrêt Procureur général du Canada c. Frank Von Findenigg, [1984] 1 C.F. 65, sur le point particulier de savoir si le pouvoir d'intervention du Conseil arbitral et du juge-arbitre leur donnait juridiction pour exercer eux-mêmes la discrétion conférée à la Commission. La Cour, dans Morin, a pris définitivement parti. Pour le Conseil arbitral, elle a appliqué la règle générale qui veut qu'un tribunal d'appel soit habilité à exercer lui-même le pouvoir discrétionnaire qu'à son jugement l'autorité inférieure a incorrectement exercé. Pour le juge-arbitre, elle a donné effet aux termes de l'article 81 qui prévoit formellement la possibilité pour le juge-arbitre de rendre la décision que le Conseil aurait dû rendre sans faire de distinction basée sur la nature de la décision. Il est donc aujourd'hui acquis que le Conseil arbitral et le juge-arbitre ont juridiction pour exercer le pouvoir discrétionnaire que la Commission aurait exercé de façon judiciairement incorrecte. Mais je me permets de rappeler que, pour l'un comme pour l'autre, rendre la décision qu'on aurait dû rendre n'est qu'une option parallèle à celle de retourner le dossier à l'autorité initialement habilitée pour nouvelle décision, et que le choix entre les deux options exige, je pense, sérieuse considération. C'est l'autorité la mieux habilitée à prendre la décision qui devrait décider. À mon avis, c'est un peu ce que le juge Thurlow avait à l'esprit lorsqu'il rendit la décision Findenigg, cette décision qui a amorcé l'imbroglio parce qu'on lui a donné une portée générale, car il faut se rappeler que ce qui était en cause là était le pouvoir discrétionnaire du paragraphe 41(10) (à ce moment 51(10)) qui donne à la Commission la possibilité d'exempter un prestataire ou un groupe de prestataires d'exigences purement administratives, d'exigences conçues strictement pour les fins de sa propre administration. On aurait dû, je pense, réaliser plus tôt que, s'il n'est que raisonnable de vouloir laisser à la Commission le soin de décider finalement dans le cas d'une discrétion sous le paragraphe 41(10), il n'en est certes pas ainsi a priori dans le cas d'une décision sous les paragraphes 30(1) ou 33(1) qui n'a rien à voir avec l'expertise administrative, une décision de nature punitive qui dépend des réactions subjectives de l'autorité qui la prend, même en présence d'instructions venant d'une politique générale.

     Voilà donc les données que je crois acquises quant à la détermination du rôle respectif des trois degrés de juridiction appelés à juger des cas d'espèce au niveau de l'application des dispositions de la Loi attributives de pouvoirs discrétionnaires. Elles couvrent la très grande partie des difficultés, mais il en reste au moins une que les faits particuliers de l'espèce, à mon sens, mettent précisément en lumière. C'est la suivante que je formulerai sous forme de question fort simple.

     Une des conditions essentielles requises pour que le Conseil arbitral puisse intervenir et contrer une décision discrétionnaire de la Commission est, comme nous venons de le rappeler, qu'il lui apparaisse que la décision a été prise sans égard à une considération pertinente. Soit! Mais pour arriver à cette conclusion, le Conseil est-il limité à regarder les faits que la Commission avait devant elle ou peut-il se baser sur la preuve qu'il a lui-même reçue? On voit tout de suite l'importance de la question pour la détermination du rôle véritable et intégral du Conseil arbitral. Ma réponse est la suivante. Considérant que la Commission n'exerce pas une fonction quasi-judiciaire mais purement administrative; considérant la nature du recours porté devant le Conseil arbitral, le caractère de novo de l'enquête qu'il doit faire, le rôle central attribué à sa décision; considérant aussi les limites des possibilités et méthodes de vérification des agents de la Commission, étant donné le nombre et la diversité des espèces; considérant enfin la vulnérabilité et le manque d'information des personnes impliquées quant aux faits qui peuvent être pertinents, je n'hésite pas à penser que ce n'est pas trahir l'intention du Parlement de dire que le Conseil arbitral n'est pas limité aux faits qui étaient devant la Commission. Il peut, en vérifiant l'exercice de la discrétion, tenir compte des faits dont il prend lui-même connaissance. Il se doit de constater qu'une considération essentielle a été ignorée, car il ne lui revient pas de substituer purement et simplement sa discrétion à celle de la Commission; c'est la discrétion de la Commission à laquelle le Parlement essentiellement se réfère. Mais cette considération essentielle ignorée, le Conseil peut la voir dans ce qu'il a pu lui-même constater. Je ne crois pas que cette conclusion aille directement à l'encontre des principes de base relatifs à l'exercice de pouvoirs discrétionnaires, et il me semble qu'elle est tellement plus en harmonie avec l'esprit du système qui ne donne pas au Conseil arbitral un simple rôle de vérification des actes des agents de la Commission mais en fait l'organe de protection central des droits des assurés nécessaire à l'application saine des dispositions de la Loi. Cette possibilité reconnue au Conseil arbitral de reprendre l'étude des faits est peut-être susceptible de susciter des appels futiles, mais la jurisprudence qui pourra se développer à ce niveau sous la surveillance du juge-arbitre devrait rapidement y mettre fin.

     * * *

     J'en viens maintenant à la décision qui est devant la Cour. M'étant déjà expliqué sur les principes applicables tels que je les comprends, mes commentaires pourront être brefs.

     Je n'ai aucune réticence à l'égard de plusieurs des propos tenus par le juge-arbitre sur les problèmes de juridiction impliqués. Il avait évidemment raison de soutenir que le Conseil arbitral et le juge-arbitre peuvent intervenir et annuler une décision même discrétionnaire de la Commission et rendre la décision qui aurait dû être rendue au départ. L'arrêt Morin a confirmé tous ces principes. Je dois toutefois dire avec égards que je n'admets pas que le juge-arbitre ait pu tirer des faits de la cause les conditions qui étaient requises pour lui permettre d'intervenir et de décider comme il l'a fait. On a vu que ce que le juge-arbitre invoque pour s'autoriser à intervenir est l'existence d'une politique de la Commission qui aurait eu pour effet d'empêcher l'agent responsable d'apprécier toutes les circonstances. Or, cette politique n'était pas devant lui; rien ne permet de penser qu'il s'agissait d'une politique plus astreignante que plusieurs autres dont le but est de guider, non de contraindre, et dont l'objet est d'assurer une certaine cohérence dans les décisions prises par la multitude de fonctionnaires appelés à traiter au jour le jour des cas d'espèce, politiques internes que la saine administration d'un organisme public aussi vaste non seulement permet, mais exige; rien, non plus, ne permet de penser que la politique suggérait des paramètres incompatibles avec ceux que la Loi ou les Règlements imposent; et, enfin et surtout, rien au dossier ne permet d'identifier une seule circonstance pertinente qui aurait pu avoir été mal perçue ou ignorée.

     Mais, en fait, c'est sur un autre plan que je situe mes principales réticences à l'égard de la décision. Ces réticences, on le voit bien, je les tire des derniers commentaires que je faisais plus haut en dégageant les principes. Il est, je suggère, du devoir du Conseil arbitral d'intervenir, s'il lui apparaît, dans le cadre de son enquête de novo, que la décision discrétionnaire de la Commission a été prise sans égard à une considération pertinente, peu importe que ce soit par ignorance que la Commission n'en ait pas tenu compte, et alors de renvoyer le dossier à la Commission ou de décider lui-même s'il juge être en mesure de le faire valablement. Il est clair qu'en l'espèce le Conseil arbitral s'est soustrait à ce devoir, en refusant même d'entendre le témoignage de l'intimée. Bien sûr, c'est par ignorance de tous les aspects de leur rôle que les membres du Conseil arbitral ont opposé ce refus, ce n'est pas par oubli des règles de justice naturelle; mais il en résulte un exercice incomplet de juridiction. C'est sur cette base que la décision du Conseil arbitral aurait dû être sanctionnée par le juge-arbitre et le dossier être renvoyé au Conseil pour qu'il exerce sa juridiction de façon intégrale, ce qui requerra évidemment qu'il entende l'intimée.

     Ainsi, suis-je d'avis que la Cour devrait accueillir le pourvoi du Procureur général tout en rejetant la demande parallèle de l'intimée.1 Elle devrait annuler la décision attaquée et renvoyer le dossier au juge-arbitre pour qu'il dispose de l'appel porté devant lui contre la décision du Conseil arbitral en l'accueillant pour partie, au motif que le Conseil a omis d'exercer pleinement sa juridiction, et en retournant l'affaire au Conseil arbitral pour qu'il entende l'intimée et se prononce sur la question de savoir si le quantum de la pénalité n'a pas été déterminé par la Commission sans tenir compte de quelque considération pertinente.

     "Louis Marceau"

     j.c.a.

"J'y souscris.

Robert Décary, j.c.a."

"J'y souscris.

François Chevalier, j.s."

     A-708-95

CORAM:      LE JUGE MARCEAU

     LE JUGE DÉCARY

     LE JUGE SUPPLÉANT CHEVALIER

ENTRE:

     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

     Requérant,

     - et -

     CHRISTINE DUNHAM,

     Intimée.

Audience tenue à Montréal, Québec, le jeudi 19 septembre 1996.

Jugement prononcé à Ottawa, Ontario, le vendredi 27 septembre 1996.

MOTIFS DU JUGEMENT PAR:      LE JUGE MARCEAU

Y ONT SOUSCRIT:      LE JUGE DÉCARY

     LE JUGE SUPPLÉANT CHEVALIER

     A-708-95

OTTAWA, ONTARIO, le vendredi 27 septembre 1996.

CORAM:      LE JUGE MARCEAU

     LE JUGE DÉCARY

     LE JUGE SUPPLÉANT CHEVALIER

ENTRE:

     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

     Requérant,

     - et -

     CHRISTINE DUNHAM,

     Intimée.

     J U G E M E N T

     La demande du Procureur général du Canada est accueillie; la décision attaquée est annulée; et le dossier est renvoyé au juge-arbitre en chef pour que lui-même ou un autre juge-arbitre qu'il désignera dispose de l'appel en prenant pour acquis que l'appel porté contre la décision du Conseil arbitral doit être accueilli en partie et le dossier retourné au Conseil arbitral pour qu'il entende l'intimée et se prononce sur la question de savoir si le quantum de la pénalité n'a pas été déterminé par la Commission sans tenir compte de quelque considération pertinente.

     "Louis Marceau"

     j.c.a.

     EN LA COUR D'APPEL FÉDÉRALE

     A-708-95

ENTRE:

     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

     Requérant,

     - et -

     CHRISTINE DUNHAM,

     Intimée.

     MOTIFS DU JUGEMENT


__________________

1      En effet, l'intimée a cru devoir s'opposer au pourvoi par voie de demande formelle (A-857-95), laquelle, par ordonnance, a été incorporée à la demande du Procureur général. Une copie des présents motifs devrait être versée, avec la décision de rejet, dans le dossier A-857-95.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.