Décisions de la Cour d'appel fédérale

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     Date : 20000825

     Dossier : A-332-00

OTTAWA (ONTARIO), LE VENDREDI 25 AOÛT 2000

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE STRAYER


CORAM :      LE JUGE STRAYER

         LE JUGE LINDEN

         LE JUGE NOËL




E N T R E :


     KIRK MEAGELL GRANDISON

     appelant

     -- et --

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     intimé


JUGEMENT


     L'appel est rejeté pour défaut de compétence.



     « B.L. Strayer »

                                             J.C.A.

Traduction certifiée conforme



Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.






Date : 20000825

     Dossier : A-332-00





CORAM :      LE JUGE STRAYER

         LE JUGE LINDEN

         LE JUGE NOËL




E N T R E :


     KIRK MEAGELL GRANDISON

     appelant

     -- et --

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     intimé





REQUÊTE tranchée sous le régime de la règle 369 à Ottawa (Ontario), le vendredi 25 août 2000


JUGEMENT rendu à Ottawa (Ontario), le vendredi 25 août 2000


MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS PAR :      LE JUGE STRAYER

Y ONT SOUSCRIT :      LE JUGE LINDEN

     LE JUGE NOËL



     Date : 20000825

Dossier : A-332-00



C O R A M :      LE JUGE STRAYER

         LE JUGE LINDEN

         LE JUGE NOËL


B E T W E E N:

     KIRK MEAGELL GRANDISON

     appelant

     -- et --

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     intimé


     MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE STRAYER

[1]          L'appelant a présenté une demande de contrôle judiciaire à l'encontre d'une décision rendue par le représentant du ministre en vertu de la Loi sur l'immigration, selon laquelle il est d'avis que l'appelant constitue un danger pour le public.

[2]          La veille du jour fixé pour l'audition de la demande de contrôle judiciaire, l'appelant a déposé de nouveaux documents volumineux, sans affidavit à l'appui. L'intimé a présenté une requête visant à épurer le dossier de la plupart des documents et un juge a accueilli cette requête en statuant que ces documents n'avaient pas été produits régulièrement. Le juge a de plus adjugé les dépens relatifs à la requête en faveur de l'intimé. Le juge des requêtes n'a certifié aucune question grave de portée générale. L'appelant veut interjeter appel de ces deux décisions interlocutoires, dont aucune ne tranche évidemment la demande de contrôle judiciaire. Lorsque l'appelant a voulu déposer l'avis d'appel, l'affaire m'a été renvoyée afin que je formule des directives parce qu'aucune question n'avait été certifiée comme l'exige apparemment le paragraphe 83(1) de la Loi sur l'immigration. Voici ce que prévoit ce paragraphe :

83.(1) A judgment of the Federal Court -- Trial Division on an application for judicial review with respect to any decision or order made, or any matter arising, under this Act or the rules or regulations thereunder may be appealed to the Federal Court of Appeal only if the Federal Court -- Trial Division has at the time of rendering judgment certified that a serious question of general importance is involved and has stated that question.

83.(1) Le jugement de la Section de première instance de la Cour fédérale rendu sur une demande de contrôle judiciaire relative à une décision ou ordonnance rendue, une mesure prise ou toute question soulevée dans le cadre de la présente loi ou de ses textes d'application -- règlements ou règles -- ne peut être porté en appel devant la Cour d'appel fédérale que si la Section de première instance certifie dans son jugement que l'affaire soulève une question grave de portée générale et énonce celle-ci.

En examinant le dossier, j'ai constaté que la jurisprudence n'est pas uniforme quant à la question de savoir si une ordonnance interlocutoire prononcée dans le cadre d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision rendue sous le régime de la Loi sur l'immigration est susceptible d'appel lorsqu'aucune question n'a été certifiée en vertu du paragraphe 83(1). J'ai donc donné des directives afin que l'avis d'appel soit déposé et que les parties fassent valoir leurs prétentions sur ce point. J'ai maintenant terminé l'examen de leurs observations.

[3]          L'appelant a invoqué une seule décision de la Cour, l'affaire Moldevenau c. Canada1, dans laquelle la Cour a entendu un appel d'une ordonnance interlocutoire (concernant l'admissibilité d'un affidavit) malgré l'absence de question certifiée. Dans cette cause, la Cour s'est sentie liée par une décision antérieure par laquelle la Cour avait rejeté, dans le même dossier, une requête en annulation fondée sur l'absence de question certifiée. Toutefois, dans la décision ultérieure publiée qui a tranché l'appel proprement dit, la formation de la Cour a relevé qu'aucune décision judiciaire n'avait été citée par la formation antérieure qui avait rejeté la requête en annulation et que les circonstances de l'affaire étaient uniques. La formation de la Cour a affirmé ne pas pouvoir réviser cette décision : la procédure qui convenait était un appel de la part de la Couronne, mais celle-ci n'avait pas interjeté appel. La Cour a souligné qu'elle pouvait « être appelée à réviser cette décision dans une autre affaire... »

[4]          Par contre la Cour a statué qu'il ne peut être interjeté appel de l'adjudication des dépens2 dans le cadre d'une demande de contrôle judiciaire, ni d'un refus de sursis3 accessoire à une telle demande, si aucune question n'est certifiée.

[5]          Non seulement cette théorie - portant qu'il n'est pas possible d'interjeter appel d'une ordonnance interlocutoire dans une telle procédure si aucune question n'a été certifiée - est clairement étayée par la jurisprudence, mais encore elle semble plus compatible avec le but visé par le paragraphe 83(1) de la Loi sur l'immigration. Le but évident des articles 82.1 à 84 de la Loi sur l'immigration actuellement en vigueur consiste à réduire le nombre des demandes de contrôle judiciaire et des appels frivoles à l'encontre de décisions rendues dans des causes semblables. Le paragraphe 83(1) vise, de façon générale, à conférer un caractère définitif à la décision de la Section de première instance, tout en permettant la formation d'un appel sur des questions importantes qui transcendent une cause en particulier. Il est clair que le législateur avait l'intention de permettre à la Cour de trancher, à l'exclusion de toutes autres, les questions qui doivent être réglées pour guider la Section de première instance dans les cas où des divergences auraient autrement subsisté entre les juges de première instance sur une « question grave de portée générale » . Il est clair que cette intention signifie implicitement qu'aucun appel ne peut être interjeté relativement à des questions propres à une instance en particulier, comme les questions de nature procédurale. Il faut donc interpréter la limite établie par le paragraphe 83(1) relativement aux appels d'un « jugement » comme applicable, implicitement, à toutes les ordonnances accessoires à un tel jugement.

[6]          L'appelant soutient essentiellement que, même si les jugements définitifs de la Section de première instance ne peuvent peut-être pas être portés en appel si aucune question n'est certifiée, les décisions interlocutoires sont susceptibles d'appel à volonté. Pareille interprétation mènerait à un résultat illogique, en contradiction directe avec le but visé par le paragraphe 83(1). Elle ne serait pas non plus conforme aux attentes normales alors que, dans bon nombre de tribunaux, la possibilité d'interjeter appel des ordonnances interlocutoires, et non définitives, est très restreinte.

[7]          L'appelant fait valoir en passant que le paragraphe 83(1) ne peut, au regard du droit constitutionnel, empêcher la formation d'un appel d'une ordonnance interlocutoire, car pareille interdiction contreviendrait à l'article 7 de la Charte. La Cour a déjà rejeté cet argument dans Huyn c. M.E.I.4.

[8]          L'appelant semble avoir mal interprété ma directive comme l'invitant à plaider son appel au fond. Il a soutenu que le juge des requêtes a commis une erreur en le condamnant au dépens. Je n'examinerai pas cet aspect de ses prétentions, car il s'agit de questions qui devraient être débattues dans le cadre même d'un appel.

[9]          L'appel doit donc être rejeté, étant donné que la Cour n'a pas compétence pour l'entendre du fait qu'aucune question grave de portée générale n'a été certifiée par le juge de première instance.


                                     B.L. Strayer

                                             J.C.A.

Je souscris à ces motifs, A.M. Linden, J.C.A.

Je souscris à ces motifs, Marc Noël, J.C.A.


Traduction certifiée conforme



Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION D'APPEL



AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



NUMÉRO DU GREFFE :          A-332-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :      KIRK MEAGELL GRANDISON c. MCI     

LIEU DE L'AUDIENCE :          OTTAWA (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE :          25 AOÛT 2000

(tranchée sous le régime de la règle 369)

MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS PAR LE JUGE STRAYER

Y ONT SOUSCRIT :          le juge Linden et le juge Noël
EN DATE DU :             




AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Munyonzwe Hamalengwa              POUR L'APPELANT

Avocat

Toronto (Ontario)

Me Morris Rosenberg                  POUR L'INTIMÉ

Sous-procureur général du Canada

__________________

1      (1888) 235 N.R. 192.

2      Su c. Canada (1997) 225 N.R. 34.

3      Ge c. Canada (1998) 234 N.R. 87.

4      (1996) 197 N.R. 62; autorisation de pourvoi à la C.S.C. refusée 206 N.R. 238 (note).

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