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Date : 20001103


Dossier : A-660-97


Coram :      Le juge Décary

         Le juge Létourneau

         Le juge Noël



Entre :


RICHARD ROY,


Appelant


et


SA MAJESTÉ LA REINE,


Intimée




Audience tenue à Québec (Québec) le vendredi, 20 octobre 2000


Jugement rendu à Ottawa (Ontario) le vendredi, le 3 novembre 2000






MOTIFS DU JUGEMENT PAR :      LE JUGE NOËL


Y ONT SOUSCRIT :      LE JUGE DÉCARY

     LE JUGE LÉTOURNEAU



Date : 20001103


Dossier : A-660-97

Coram :      Le juge Décary

         Le juge Létourneau

         Le juge Noël

Entre :


RICHARD ROY,


Appelant


et


SA MAJESTÉ LA REINE,


Intimée


     MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE NOËL

[1]      Il s'agit d'un appel de la décision du juge Archambault de la Cour canadienne de l'impôt rejetant en partie les appels du contribuable à l'égard de ses années d'imposition 1985 à 1989 inclusivement. L'intimée a déposé un appel incident face au refus du juge Archambault d'adjuger les dépens en sa faveur1.

[2]      Trois questions furent soulevées par l'appelant au cours de l'audition dont deux peuvent être assujetties à une disposition sommaire. Tout d'abord, l'attaque à l'encontre des valeurs retenues par le premier juge dans son évaluation du coût de construction des immeubles met en question son appréciation des faits et aucune erreur palpable ou manifeste n'a été identifiée à cet égard. Deuxièmement, le refus par le premier juge d'accorder à l'appelant l'exemption pour gain en capital me semble être en stricte application du paragraphe 110.6(6) de la Loi de l'impôt sur le Revenu2 et l'appelant n'a pu indiquer en quoi le premier juge se serait trompé en lui refusant cette exemption.

[3]      La troisième question mérite qu'on s'y attarde. L'appelant prétend que le juge Archambault s'est mépris dans le calcul de la pénalité en refusant de déduire dans ce calcul l'allocation du coût en capital à laquelle il avait droit.

[4]      Les faits pertinents à cette question sont étalés dans le jugement de première instance. Il suffit de rappeler que l'appelant a, dans un premier temps, été cotisé par la méthode de l' « avoir net » . Ses représentants ont alors fait valoir auprès du ministre que les revenus non déclarés issus de ces cotisations provenaient de la location de cinq immeubles et ont demandé que l'allocation du coût en capital à l'égard de la catégorie à laquelle appartenait ces immeubles soit déduite à l'encontre des revenus non déclarés. L'appelant détenait d'autres immeubles locatifs, de la même catégorie, dont les revenus furent dûment déclarés3.

[5]      Le ministre a accédé à cette demande et par voie de nouvelles cotisations émises en date du 19 janvier 1995, une allocation du coût en capital de l'ordre de 24 615 $, 22 065 $, 35 190 $, 36 984 $ et 39 984 $ fut accordée pour les cinq années en question respectivement. Cependant, le ministre refusa de reconnaître la déduction de ces montants dans le calcul de la pénalité.

[6]      Le juge Archambault confirma cet aspect des cotisations. Il cita tout d'abord le paragraphe 163(2) qui prélève une pénalité égale à 25 % de l'impôt qu'un contribuable omet de déclarer sciemment ou dans des circonstances qui justifient l'imputation d'une faute lourde4. Il cita aussi le paragraphe (2.1) lequel se lit en partie comme suit :

163(2.1) Pour l'application du paragraphe (2), le revenu imposable déclaré par une personne dans sa déclaration pour une année d'imposition est réputé ne pas être inférieur à zéro et le « revenu déclaré en moins » d'une personne pour une année s'entend du total

     (a) l'excédent éventuel, si excédent il y a,
         (i)      du total des montants qu'elle n'a pas déclarés dans sa déclaration mais qui devaient être inclus dans le calcul de son revenu pour l'année,
         sur
         (ii)      le total des montants qu'elle pouvait déduire lors du calcul de son revenu pour l'année en vertu de la présente loi, qui étaient entièrement applicables aux montants visés au sous-alinéa (i) et qu'elle n'a pas déduit lors du calcul de son revenu pour l'année dans sa déclaration;

163(2.1) For the purposes of subsection (2), the taxable income reported by a person in his return for a taxation year shall be deemed not to be less than nil and the "understatement of income" for a year of a person means the aggregate of

     (a) the amount, if any, by which
         (i)      the aggregate of amounts that were not reported by him in his return and that were required to be included in computing his income for the year
         exceeds
         (ii)      the aggregate of such of the amounts deductible by him in computing his income for the year under the provisions of this Act as were wholly applicable to the amounts referred to in subparagraph (i) and were not deducted by him in computing his income for the year reported by him in his return,

(Le souligné est celui du premier juge.)

[7]      Le juge Archambault procéda ensuite à rejeter l'appel quant au calcul de la pénalité en ces termes :

Tel qu'il appert de la lecture des dispositions pertinentes, pour que la pénalité soit calculée après la déduction de l'allocation du coût en capital il faudrait pouvoir conclure que cette allocation constitue un montant que M. Roy pouvait déduire et qui était entièrement applicable au montant qu'il n'a pas déclaré. Or, l'allocation du coût en capital réclamée ici n'est pas entièrement applicable au revenu non déclaré. La preuve a révélé que M. Roy avait déclaré une partie de ses revenus de location mais pas la totalité. Par conséquent, la pénalité doit être calculée par rapport au revenu non déclaré calculé avant la déduction de l'allocation du coût en capital.

[8]      Ce raisonnement me laisse perplexe puisqu'il signifie que si l'appelant avait caché tous ses revenus de location, il aurait droit à la déduction de l'allocation du coût en capital dans le calcul de la pénalité. Ce n'est que parce qu'il a déclaré une partie de ces revenus qu'il perd le droit à cette déduction. Considérant que le but de la pénalité est d'inciter les contribuables à déclarer leurs revenus et que l'effet dissuasif doit normalement croître avec l'étendue des revenus non déclarés ce résultat semble absurde. La pénalité est moindre si tous les revenus sont cachés qu'elle ne le serait si les revenus n'étaient cachés qu'en partie.

[9]      Je constate cependant que la disposition ne peut être interprétée autrement. Le législateur est disposé à calculer la pénalité en tenant compte d'une déduction dans la mesure où cette déduction s'applique exclusivement aux revenus non déclarés. Si non, la déduction doit être écartée dans son entièreté.

[10]      Autant ce résultat peut se justifier par le souci du législateur de ne pas permettre la réduction indue d'une pénalité par le biais de la déduction d'un montant qui ne se rapporte pas exclusivement aux revenus non déclarés, autant le législateur ne semble pas avoir compris que ce faisant, il utilisait une mesure qui se veut « pénale » pour inciter les contribuables enclins à déclarer partie de leurs revenus à ne pas le faire du tout.

[11]      Ceci étant dit, l'absurdité qui découle de l'application d'une disposition législative n'autorise pas les tribunaux à ignorer ses effets lorsque le législateur s'est exprimé de façon claire et non équivoque. (Voir R. c. McIntosh, [1995] 1 R.C.S. 686 aux pp. 704-705.) Puisque la déduction de l'allocation du coût en capital n'est pas entièrement applicable aux revenus non déclarés, l'appelant ne peut exiger que cette allocation soit déduite dans le calcul de la pénalité.

[12]      Je rejetterais l'appel avec dépens.

[13]      Quant à l'appel incident, je le rejetterais aussi avec dépens. Le contribuable ayant eu partiellement gain de cause devant le juge Archambault, ce dernier avait le loisir d'ordonner que les parties assument leurs propres dépens.



"Marc Noël"

j.c.a.

"Je suis d'accord.

     Robert Décary, j.c.a."

"Je suis d'accord.

     Gilles Létourneau, j.c.a."

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION D'APPEL

     NOMS DES AVOCATS ET DES AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



NO DU DOSSIER DE LA COUR :      A-660-97


INTITULÉ : RICHARD ROY c. SA MAJESTÉ LA REINE


LIEU DE L'AUDIENCE :      Québec (Québec)


DATE DE L'AUDIENCE :      le 20 octobre 2000


MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR: Noël j.c.a.


Y ONT SOUSCRIT: Décary & Létourneau jj.c.a.


EN DATE DU: 3 novembre 2000



COMPARUTIONS :     


Me Normand Roy      pour l'appelant

Me Martin Gentile      pour l'intimé


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:


Normand Roy

Québec (Québec)pour l'appelant

Morris Rosenbergpour l'intimé

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Ontario

__________________

1La décision est publiée à 97 DTC 1355.

2S.C. 1970, 71, 72, c. 63.

3L'appelant, au delà des cinq immeubles qui font l'objet du litige, possédait 11 autres immeubles dont trois furent vendus en 1987. (Motifs de la décision, note 1 à la p. 1356.)

4L'appelant a concédé devant le premier juge qu'il avait omis de déclarer ses revenus sciemment ou dans des circonstances qui justifient l'imputation d'une faute lourde. (Motifs du jugement, note 1 à la p. 1360)

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