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Date : 20040917

Dossier : A-584-03

Référence : 2004 CAF 300

CORAM :       LE JUGE EN CHEF RICHARD

LE JUGE NOËL

LE JUGE EVANS

ENTRE :

                                        LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                              appelant

                                                                             et

                   MAUREEN CARTY, SUSAN MARCHANT, JOSEPH DALRYMPLE,

BARRY McCURDY, BERT DANDY et ANGELA LIN

                                                                                                                                                intimés

et

DAVID McBEAN, NEIL WILLARD, GLEN NG et JENNIFER HARNUM

intimés

                                      Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 31 août 2004.

                                 Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 17 septembre 2004.

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                                       LE JUGE NOËL

Y ONT SOUSCRIT :                                                                         LE JUGE EN CHEF RICHARD

                                                                                                                               LE JUGE EVANS


Date : 20040917

Dossier : A-584-03

Référence : 2004 CAF 300

CORAM :       LE JUGE EN CHEF RICHARD

LE JUGE NOËL

LE JUGE EVANS

ENTRE :

                                        LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                              appelant

                                                                             et

                   MAUREEN CARTY, SUSAN MARCHANT, JOSEPH DALRYMPLE,

BARRY McCURDY, BERT DANDY et ANGELA LIN

                                                                                                                                                intimés

et

DAVID McBEAN, NEIL WILLARD, GLEN NG et JENNIFER HARNUM

intimés

                                                       MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE NOËL


[1]                La Cour est saisie d'un appel formé contre l'ordonnance (2003 CF 1338) par laquelle la Cour fédérale a accueilli la demande de contrôle judiciaire visant la décision du Comité d'appel de la Commission de la fonction publique (le Comité d'appel) rendue le 10 avril 2002. Pour l'examen des candidatures soumises relativement à un poste au sein de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (l'employeur ou la CISR), le jury de sélection a évalué les qualités retenues et annoncées par l'employeur dans le cadre d' un concours interne en appliquant une méthode globale ou méthode « compensatoire » .

[2]                Le Comité d'appel, siégeant en appel de la décision du jury de sélection, a maintenu l'évaluation des candidats faite par le jury, estimant que l'approche globale respectait le principe du mérite dans le contexte du concours en cause. La Cour fédérale a annulé la décision du comité d'appel, d'où le présent appel.

[3]                La Cour a entendu le présent appel avec celui d'une autre décision rendue à la même date (Procureur général du Canada c. James Mercer et al., 2003 CF 1344) dans laquelle la même juge a annulé la décision d'un autre comité d'appel pour les motifs qu'elle a exposés relativement à la présente espèce. La Cour rend des motifs distincts pour chaque affaire en raison des différences existant entre les faits de chacune, mais comme elles posent toutes deux la même question principale, ces motifs sont essentiellement les mêmes.

Les faits


[4]                Au mois de février 2001, l'employeur a annoncé le poste de gestionnaire des services aux opérations pour son bureau de Toronto (Ontario). Les candidats qui satisfaisaient aux exigences en matière d'études et d'expérience fixées par l'employeur étaient évalués en fonction des trois qualités suivantes, énumérées dans l'énoncé de qualités afférent au poste annoncé (l'énoncé) : les connaissances, les capacités et compétences et les qualités personnelles.

[5]                Chacune des trois qualités figurant dans l'annonce comportait plusieurs éléments (que j'appellerai sous-facteurs) :

[traduction]

Connaissances :             Connaissance de la mission, des objectifs et des programmes de la CISR

Connaissance des lois et règlements et des conventions des Nations Unies applicables ainsi que des tendances nationales et internationales en matière d'immigration et de réfugiés

Connaissance des politiques et procédures opérationnelles liées au programme de la Section du statut de réfugié

Connaissance des théories et des pratiques de gestion

Capacités                      Leadership

et compétences :

Gestion des ressources humaines et financières

Promotion du travail d'équipe

Capacité de raisonnement

Souci du service à la clientèle

Communication

Qualités                         Rapports interpersonnels

personnelles :

Jugement

Initiative


Fiabilité

Souplesse

[6]                L'énoncé afférent au poste annoncé faisait également état de l'exigence de l'employeur selon laquelle trois sous-facteurs des capacités et compétences (leadership, promotion du travail d'équipe et communication) étaient obligatoires (non-compensatory), c'est-à-dire que des notes élevées obtenues à l'égard d'autres sous-facteurs ne pouvaient compenser un échec pour ces éléments. Le jury de sélection, le Comité d'appel et la juge de la Cour fédérale ont procédé à leur analyse en présumant de la désignation de ces trois sous-facteurs comme obligatoires que tous les autres sous-facteurs étaient non obligatoires, c'est-à-dire qu'une bonne note à l'égard d'un facteur pouvait compenser une mauvaise note à l'égard d'un autre.

[7]                Le jury de sélection a fixé la note de passage pour chaque qualité et pour chacun des sous-facteurs obligatoires (60 % ou à peu près, dans tous les cas), mais il n'en a pas établi pour les sous-facteurs non obligatoires; il a plutôt effectué une évaluation globale de ces sous-facteurs pour chaque qualité, et les candidats qui obtenaient le pourcentage nécessaire pour une qualité étaient réputés satisfaire à l'exigence.


[8]                Les intimés Carty, Marchant, Dalrymple, McCurdy, Dandy et Lin n'ont pas obtenu la note de passage pour l'un ou plusieurs des sous-facteurs obligatoires de la qualité « capacités et compétences » . Par conséquent, ils ont été écartés de la suite du processus de sélection. Les autres intimés ont obtenu la note de passage pour chacun des trois sous-facteurs obligatoires et pour les trois qualités, et leur nom a donc été inscrit sur la liste d'admissibilité, suivant l'ordre du mérite.

[9]                Les candidats non retenus ont interjeté appel devant le Comité d'appel, soutenant notamment que l'approche globale suivie par le jury de sélection n'était pas conforme au principe du mérite parce qu'elle lui permettait de ne pas tenir compte de certains des sous-facteurs annoncés (ils ont invoqué la décision Nelson et al. c. Canada (Procureur général) et al., [2001] 204 F.T.R. 287 et l'arrêt Boucher c. Procureur général du Canada, [2002] 252 N.R. 186 (C.A.), lequel avait été cité dans Nelson).

[10]            Le Comité d'appel a rejeté leur argument. Il a exposé ce qui suit dans ses motifs :

Pour ce qui est de la dernière allégation, je ne suis pas convaincue que le jury de sélection a agi de façon inappropriée lorsqu'il a évalué les qualités des candidats et candidates. Au début du processus de sélection, on a déterminé que trois qualités étaient obligatoires, c'est-à-dire que les candidats et candidates devaient satisfaire à la norme minimale pour chacune de ces qualités pour être jugés qualifiés pour le poste. Partant, les candidats et candidates ont compris dès le début que, s'ils ne satisfaisaient pas à la norme minimale relative au leadership, au travail d'équipe et à la communication, le jury établirait qu'ils n'étaient pas qualifiés pour le poste de gestionnaire des services aux opérations.


À mon avis, c'est ce qui distingue la présente situation de celle qu'on a présentée dans l'arrêt Nelson [et al.] (précité). Tout d'abord, le jury de sélection est tenu d'évaluer toutes les qualités énumérées dans l'énoncé de qualités. Selon moi, le fait que le gestionnaire responsable ait précisé quelles qualités étaient obligatoires vient couper court aux préoccupations soulevées par la Cour dans l'arrêt Nelson [et al.] (précité), étant donné que le leadership, la communication et le travail d'équipe étaient désignés comme qualités essentielles et distinctes des autres qualités énumérées dans l'énoncé de qualités. En précisant les qualités que les candidats et candidates doivent posséder et en décidant que les candidats et candidates satisfont/ou ne satisfont pas à la norme minimale relative au poste sur la base de leur succès à l'égard de ces trois facteurs, on établit l'importance de ces qualités pour le poste de gestionnaire des services aux opérations. Par conséquent, il semble logique de présumer que les autres qualités n'étaient pas considérées comme étant aussi importantes pour le poste, car elles n'ont pas été identifiées comme telles. En conséquence, je crois que le jury de sélection a agi de façon appropriée en évaluant chacun des sous-facteurs et en regroupant les notes ainsi obtenues dans les principales catégories de qualités des connaissances, capacités et qualités personnelles par l'établissement d'une norme minimale appropriée pour chacune de ces trois catégories. Ainsi, les mesures prises dans le présent processus de sélection peuvent être différentes de celles dont on parle dans l'arrêt Nelson [et al.].

[11]            La juge saisie de la demande de contrôle judiciaire a jugé incorrect le raisonnement du Comité d'appel. En se fondant sur son interprétation de la jurisprudence, elle a conclu que pour respecter le principe du mérite il fallait évaluer chaque élément distinct de la qualité, obligatoire ou non obligatoire, et que, puisque le processus suivi en l'espèce pouvait faire en sorte qu'un sous-facteur non obligatoire ne soit pas pris en considération, il allait à l'encontre du principe du mérite. Elle s'est exprimée ainsi au paragraphe 14 de ses motifs :

... il serait théoriquement possible qu'un candidat n'obtienne aucun point à l'égard d'une qualité donnée et soit quand même retenu. Même si la qualité en question n'était pas qualifiée d'obligatoire, le jury de sélection devait quand même l'évaluer d'une façon convenable, étant donné qu'il s'agissait d'une exigence établie par la CISR. Bien que le jury de sélection dispose indubitablement de la faculté d'accorder une importance différente aux diverses qualités requises, il ne peut faire abstraction d'aucune de ces qualités. C'est la conclusion à laquelle est arrivée la Cour dans les affaires Boucher et Nelson, précitées. Selon le juge Muldoon, chacune des qualités doit être évaluée. La notion d'évaluation comporte de façon implicite la nécessité d'établir une norme d'appréciation quelconque - une « note de passage » - à l'égard de chaque qualité.

[12]            À la fin de ses motifs, elle a indiqué clairement que c'est sur une question très restreinte qu'elle différait d'avis avec le jury de sélection au sujet du processus suivi par ce dernier :


[16]     Le jury de sélection a procédé à une évaluation approfondie et méticuleuse des candidats. À mon avis, la dernière mesure qu'il convient de prendre pour respecter les prescriptions de la loi consiste à déterminer un seuil de passage à l'égard de chacune des qualités. La responsabilité de prendre cette mesure incombe entièrement au jury de sélection. Selon moi, le jury de sélection a toute latitude pour établir une « note de passage » à l'égard d'une qualité particulière (à l'exception des qualités obligatoires).

[13]            C'est cette décision qui a été portée en appel.

La question en litige

[14]            La Cour d'appel doit trancher la question de savoir si la juge qui a entendu la demande de contrôle judiciaire a commis une erreur en déterminant qu'il convenait d'y faire droit parce que le principe du mérite exigeait que le jury de sélection fixe une « note de passage » pour chaque sous-facteur, même non obligatoire, et qu'il évalue les candidats en fonction de cette note. Il s'agit d'une pure question de droit, à laquelle s'applique la norme de la décision correcte (Housen c. Nikolaisen, [2002] 25 C.R. 235, p. 247).

Décision


[15]            Il est opportun, avant d'examiner cette question, de rappeler deux principes fondamentaux régissant l'embauche dans la fonction publique. Le premier est que les nominations se font sur la base d'une sélection fondée sur le mérite, selon ce que détermine la Commission de la fonction publique (voir les paragraphes 10(1) et 12(1) de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, S.R., ch. P-32, art. 1). Dans ce contexte, le mérite veut dire « qu'il faut trouver les personnes les plus aptes à remplir les différents postes [...] " compte tenu de la nature des fonctions à accomplir " » (Nanda c. La Commission de la fonction publique, [1972] C.F. 277, p. 297, juge en chef Jackett).

[16]            Ce qui nous amène au deuxième principe, selon lequel la définition d'un poste et la détermination des qualités y afférentes relèvent exclusivement de l'employeur, lequel est le mieux placé pour évaluer ses besoins (voir, par exemple, Laberge c. Canada (Procureur général), [1988] 2 C.F. 137 (C.A.), p. 142; Brown c. Commission de la fonction publique, [1975] C.F. 345, p. 348 à 350 (C.A.); Canada c. Blashford, [1991] 2 C.F., p. 44 à 48 et 56 (C.A.)). Cette prérogative s'accompagne, logiquement, du droit de déterminer les qualités qui sont essentielles et celles qui, tout en étant utiles ou souhaitables, ne sont pas essentielles (à cet égard, voir le document Normes de sélection et d'évaluation, publié par la Commission de la fonction publique, à la p. 3, Cahier conjoint, onglet A-3).

[17]            La juge de première instance a estimé que les candidats devaient satisfaire à une exigence minimale pour toutes les qualités, y compris les non obligatoires. Bien que personne n'ait contesté que le jury de sélection avait bien examiné chacune des qualités et chacun des sous-facteurs, la juge a craint qu'en l'absence d'une exigence minimale, il soit théoriquement possible qu'un candidat n'obtienne aucun point pour un sous-facteur donné mais atteigne quand même la note de passage pour la qualité visée (motifs, paragraphe 14).


[18]            Selon elle, cette façon de faire peut, soit être interprétée comme une instruction donnée par l'employeur au jury de sélection « chargé d'administrer le concours de tenir compte d'une partie seulement des qualités requises pour le poste » contrairement au principe formulé dans l'arrêt Laberge, précité (paragraphe 15 des motifs), soit comme donnant lieu à la possibilité pour le jury de sélection de décider de son propre chef que des qualités retenues par l'employeur sont optionnelles, contrairement au principe établi dans Nelson et al. et dans Boucher, précités (paragraphe 15 in fine des motifs).

[19]            En toute déférence, j'estime que les trois décisions sur lesquelles la juge a fondé ses conclusions n'ont pas l'effet qu'elle leur attribue et ne sont pas pertinentes pour trancher la question soulevée en l'espèce.

[20]            Dans l'arrêt Laberge, précité, notre Cour a statué que le défaut du jury de sélection d'évaluer « l'aptitude des candidats à remplir toutes les fonctions du poste ... [à] combler » (p. 141, 1er paragraphe complet) définies par l'employeur (p. 142, 2e paragraphe complet) contrevient au principe du mérite. L'employeur avait notamment établi comme exigence que le candidat retenu « devrait [...] connaître » la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels (p. 139, 3e paragraphe complet). La Cour a écrit, à la p. 142 :


Il appartient, bien sûr, au ministère concerné de définir les postes et les qualifications qu'il exige. Ici, le ministère l'a fait en décrivant le poste de coordonnateur comme comportant la tâche d'administrer la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels et comme exigeant une bonne connaissance de ces deux Lois. La question à laquelle il faut répondre ici est celle de savoir si un ministère qui a établi les fonctions rattachées à un poste peut, à l'occasion d'un concours tenu pour remplir ce poste, demander au comité de sélection chargé d'administrer le concours de n'apprécier la valeur des divers candidats qu'en regard de certaines des exigences du poste. Cette question doit, bien sûr, recevoir une réponse négative. Contrairement à ce qu'a affirmé le comité d'appel, le rôle du comité de sélection n'est pas seulement d'obéir aux directives du ministère concerné. Le comité de sélection n'est qu'un outil utilisé par la Commission de la Fonction publique pour remplir la tâche que lui impose l'article 10 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique. Le ministère n'a pas le pouvoir de modifier les obligations que l'article 10 de la Loi impose à la Commission. Ni le comité de sélection, ni la Commission ne sont les valets des divers ministères.

[21]            Il est facile de comprendre pourquoi le défaut d'un jury de sélection d'évaluer une qualité établie par l'employeur contrevient au principe du mérite, puisqu'il entraîne nécessairement la possibilité que le candidat le plus méritant ne soit pas retenu. L'instruction donnée par l'employeur de ne pas tenir compte d'une qualité qu'il a lui même définie comme nécessaire pour le poste à combler et qui demeure applicable au moment du concours ne peut, il va de soi, changer ce résultat. C'est le principe qui a été formulé dans l'arrêt Laberge.

[22]            Toutefois, lorsqu'un employeur décrit une qualité au moyen de sous-facteurs qu'il présente comme « non obligatoires » et que le jury de sélection évalue cette qualité en fonction d'une norme minimale appropriée, comme il l'a fait en l'espèce, je ne vois pas comment on peut prétendre que le principe du mérite n'a pas été respecté simplement parce que le jury n'a pas effectué d'évaluation suivant l' « exigence minimale » ou la « note de passage » pour chaque sous-facteur.


[23]            Par définition, les sous-facteurs désignés comme « non obligatoires » ne sont pas essentiels. Ils demeurent pertinents, cependant, pour l'évaluation au mérite des candidats, car ils sont considérés par l'employeur comme des indicateurs équivalents ou comparables de la qualité recherchée. C'est pourquoi, une excellente note à l'égard d'un sous-facteur peut compenser une note faible à l'égard d'un autre. On ne peut dire que les sous-facteurs non obligatoires ne se prêtaient pas à cette désignation.

[24]            Puisqu'il appartient à l'employeur de définir le poste qu'il annonce et de déterminer les qualités exigibles, celui-ci peut établir les sous-facteurs entre lesquels une compensation peut s'opérer. Je ne vois donc pas en quoi le fait d'ajouter une « note de passage » ou une « exigence minimale » à ces sous-facteurs peut aider à déterminer quel est le candidat le plus méritant. D'ailleurs, lorsqu'un employeur établit des sous-facteurs, le meilleur candidat doit être celui qui obtient la note globale la plus élevée à l'égard de la qualité, quel que soit le résultat obtenu à l'égard de l'un ou l'autre des sous-facteurs.

[25]            La présente affaire peut également se distinguer de l'affaire Boucher, précitée, décidée par notre Cour, lorsqu'on prend en considération la nature non obligatoire des sous-facteurs en l'espèce. Dans l'affaire Boucher, la Cour devait examiner le défaut du jury de sélection d'évaluer une qualité (et non un sous-facteur) considérée comme obligatoire. La Cour a statué, au paragraphe [8] :


... nous concluons qu'un tel défaut constituait une erreur de droit de la part du comité de sélection. De fait, cela a eu pour effet d'éliminer le facteur des connaissances des qualifications malgré les exigences annoncées pour le poste. Comme la Cour l'a décidé en d'autres occasions, un comité de sélection ne peut changer les qualifications annoncées en éliminant une ou plusieurs d'entre elles : agir de la sorte est inéquitable pour ceux qui autrement, auraient peut-être posé leur candidature mais ne l'ont pas fait parce qu'ils reconnaissaient ne pas posséder toutes les qualifications annoncées. Voir Bambrough c. Commission de la fonction publique, [1976] 2 C.F. 109; Procureur général c. Blashford et autres,[1991] 2 C.F. 44.

[26]            Dans l'affaire Nelson, précitée, la Section de première instance de la Cour (telle qu'elle était alors désignée) devait examiner le défaut d'évaluer des sous-facteurs. Le Comité d'appel avait indiqué dans ses motifs que l'énoncé de l'employeur définissait chacun de ces sous-facteurs comme obligatoire (Nelson, précité, paragraphe 3). C'est dans ce contexte que la Cour a formulé la conclusion suivante, au paragraphe 26 :

Le jury de sélection ne peut éliminer une qualité au cours du processus de sélection. [...] changer les qualités énoncées en éliminant une ou plusieurs d'entre elles est inéquitable, étant donné que des personnes n'ont peut-être pas posé leur candidature parce qu'elles reconnaissaient ne pas posséder toutes les qualités annoncées.

[27]            Cette question ne se pose pas en l'espèce parce que les trois sous-facteurs présentés comme obligatoires dans l'énoncé des qualités ont bien été évalués comme des sous-facteurs obligatoires et que les autres sous-facteurs devaient implicitement, suivant la conclusion irréfutable du Comité d'appel, être considérés comme non obligatoires.


[28]            Pour ces motifs, j'accueillerais l'appel, j'infirmerais la décision de la juge de première instance et, rendant la décision qui aurait dû être prononcée, je rejetterais la demande de contrôle judiciaire visant la décision du Comité d'appel. L'appelant devrait avoir droit à ses dépens tant en appel qu'en première instance.

                        « Marc Noël »                       

Juge                              

« Je souscris à ces motifs.

J. Richard, juge en chef »

« Je souscris à ces motifs.

John M. Evans, juge »

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.


                             COUR D'APPEL FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Appel d'une ordonnance de la Cour fédérale en date du 14 novembre 2003,

No de greffe T-552-02

DOSSIER :                A-584-03

INTITULÉ :               Procureur général du Canada c. Maureen Carty et al.

                                                     

LIEU DE L'AUDIENCE :                              Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                            Le 31 août 2004

MOTIFS DU JUGEMENT :                         Le juge Noël

AUXQUELS ONT SOUSCRIT :                           Le juge en chef Richard

Le juge Evans

DATE DES MOTIFS :                                              Le 17 septembre 2004

COMPARUTIONS:

J. Sanderson Graham

Marie Crowley                                               POUR L'APPELANT

David Yazbeck                                             POUR LES INTIMÉS

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Morris Rosenberg                                         

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)                                             POUR L'APPELANT

Raven, Allen, Cameron, Ballantyne & Yazbeck, LLP

Ottawa (Ontario)                                             POUR LES INTIMÉS



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