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                                                                                                                     A-765-95

 

 

CORAM:LE JUGE STRAYER, J.C.A.

LE JUGE DESJARDINS, J.C.A.

LE JUGE ROBERTSON, J.C.A.

 

 

                  AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur l’assurance-chômage

 

 

Entre:

 

                              PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

 

                                                                                                                    requérant,

 

 

                                                              - et -

 

 

                                          SHELLEY L. PATTERSON,

 

                                                                                                                       intimée.

 

 

 

Audience tenue à Winnipeg (Manitoba), le mercredi 23 octobre 1996.

 

Jugement rendu à l’audience à Winnipeg (Manitoba), le mercredi 23 octobre 1996.

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR: LE JUGE ROBERTSON J.C.A.


 

                                                                                                                     A-765-95

 

 

Winnipeg (Manitoba), le mercredi 23 octobre 1996.

 

 

En présence de Monsieur le juge Strayer

 Madame le juge Desjardins

 Monsieur le juge Robertson

 

 

                  AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur l’assurance-chômage

 

 

ENTRE:

 

                              PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

 

                                                                                                                    requérant,

 

 

                                                              - et -

 

 

                                          SHELLEY L. PATTERSON,

 

                                                                                                                       intimée.

 

 

                                                       JUGEMENT

 

            La demande est accueillie, la décision du juge-arbitre en date du 30 août 1995 est annulée et l’affaire est renvoyée devant le juge-arbitre en chef ou la personne qu’il désignera pour nouvel examen en tenant pour acquis que l’intimée a quitté volontairement son emploi sans justification.

                                                                          «B.L. Strayer»                                                                                                                 J.C.A.

 

Traduction certifiée conforme

                                             

   Yvan Tardif, B.A., LL.L.


 

 

 

 

                                                                                                                     A-765-95

 

 

CORAM:LE JUGE STRAYER, J.C.A.

LE JUGE DESJARDINS, J.C.A.

LE JUGE ROBERTSON, J.C.A.

 

 

                  AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur l’assurance-chômage

 

 

Entre:

 

                              PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

 

                                                                                                                    requérant,

 

 

                                                              - et -

 

 

                                          SHELLEY L. PATTERSON,

 

                                                                                                                       intimée.

 

 

 


                             MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

                                       (Exposés à l’audience à Winnipeg,

                                                   le 23 octobre 1996)

 

LE JUGE ROBERTSON, J.C.A.

            La présente demande de contrôle judiciaire soulève la question de savoir si le juge‑arbitre et le conseil arbitral ont tous deux commis une erreur en concluant que l’intimée n’a pas quitté volontairement son emploi sans justification, au sens du paragraphe 28(1) de la Loi sur l’assurance-chômage (la «Loi»).  Les circonstances donnant lieu à cette conclusion sont les suivantes.

 

            L’intimée travaillait à titre de caissière pour la société Canada Safeway Ltd. lorsqu’elle s’est vu offrir une indemnité de départ volontaire de 24 000 $, offre qui devait venir à expiration le 11 février 1994.  À l’époque où cette offre a été faite, l’intimée envisageait la possibilité de déménager dans une autre partie de la province pour suivre son mari.  Avant de décider d’accepter l’offre, l’intimée a communiqué avec la Commission de l’assurance-chômage en vue de déterminer si elle était admissible aux prestations d’assurance-chômage.  On l’a avisé que, comme elle n’avait établi aucun plan définitif relativement à son déménagement, elle ne serait peut‑être pas fondée à quitter son emploi.  L’intimée a toutefois laissé son emploi à la Safeway le 19 février 1994 et a présenté une demande de prestations le 2 mars 1994.  Dans sa demande, l’intimée a indiqué qu’elle avait quitté son emploi, qu’elle avait reçu une indemnité de départ volontaire de 24 000 $ et qu’elle avait accepté cette indemnité en raison d’un déménagement éventuel.  Il semble que l’intimée envisageait de rejoindre son mari une fois l’année scolaire terminée au mois de juin.

 

            La Commission a rejeté la demande de prestations pour le motif que l’intimée avait laissé volontairement son emploi sans justification.  En appel, le Conseil a infirmé la décision de la Commission.  À son tour, le juge-arbitre a confirmé la décision du Conseil pour la raison suivante:[traduction] Dans le cas présent, l’intimée était en mesure de savoir qu’elle allait déménager afin de rejoindre son mari à la première occasion, qui, selon la preuve, correspondait à la fin de l’année scolaire en juin 1994.  Elle se trouvait devant l’alternative de recevoir une indemnité de départ volontaire de 24 000 $ qui, compte tenu de toutes les circonstances, constituait une somme importante pour elle ou de continuer d’occuper son emploi jusqu’à la fin de l’année scolaire et de déménager ensuite sans profiter de l’indemnité de départ volontaire.  Il me semble que ce n’est pas une alternative raisonnable.  À mon avis, le Conseil arbitral n’a pas commis d’erreur dans la décision qu’il a rendue, lorsqu’on prend en considération toutes les circonstances comme l’exige l’article 28 de la Loi.

            Nous estimons que la présente demande doit être accueillie.  En tirant cette conclusion, nous reconnaissons que l’alinéa 28(4)b) de la Loi prévoit que la justification requise pour quitter volontairement un emploi comprend l’obligation de suivre un conjoint dans un nouveau lieu de résidence.  Nous reconnaissons également que l’intimée se trouvait en face d’une énigme.  Elle pouvait accepter l’indemnité de départ volontaire, auquel cas elle pouvait se rendre inadmissible aux prestations, ou refuser l’offre, continuer de travailler pour la société Safeway jusqu’à ce qu’elle décide de déménager et demander alors des prestations d’assurance-chômage.  À notre avis, cependant, le paragraphe 28(1) ne permet pas à l’intimée de réclamer des prestations une fois qu’elle a décidé de laisser son emploi à la Safeway et d’accepter l’indemnité de départ volontaire.  Notre décision a pour effet de confirmer la jurisprudence antérieure du juge‑arbitre du Canada sur les prestations: voir CUB 27882, 17 janvier 1995, et CUB 28188, 19 avril 1995.  Nous avons suivi le raisonnement ci‑dessous.

 

            Comme le requérant le fait remarquer à juste titre, [traduction] «il faut une justification pour quitter volontairement son emploi plus tôt que lorsqu’une autre justification est censée survenir».  Autrement dit, si un demandeur de prestations laisse son emploi plus tôt, c’est‑à‑dire à une date qui n’est pas raisonnablement proche de la date de l’événement qui constitue une justification pour quitter volontairement un emploi, alors, en l’absence d’une justification distincte, le demandeur de prestations ne peut pas profiter de prestations en vertu du paragraphe 28(1) de la Loi.  Ce qui constitue une date raisonnablement proche peut naturellement varier selon les raisons de laisser son emploi: voir par exemple Canada (Procureur général) c. Melanson, [1995] A.C.F. no 848 (C.A.F.), où la personne qui réclamait des prestations a quitté son emploi deux semaines avant la fin prévue de son contrat dans le but de prendre des vacances et s’est vu refuser les prestations demandées le jour où elle a quitté son emploi.

 

            À notre avis, cette interprétation du paragraphe 28(1) est en accord avec les motifs exposés par notre Cour dans l’arrêt Tanguay c. Canada (Commission de l’assurance-chômage) (1985), 68 N.R. 154, à la p. 156, où il a été statué que l’employé «qui quitte son emploi dans le but d'obtenir un avantage pécuniaire» «n'est pas une circonstance qui le justifie de se placer dans une situation où il risque de devoir redemander des prestations d'assurance-chômage»; cette interprétation renforce même ces motifs.  En l’espèce, l’intimée faisait supporter le risque de chômage par le régime d’assurance.  À l’époque où elle a quitté son emploi à la société Safeway, rien ne garantissait ni rien ne pouvait garantir que de fait elle déménagerait.  Par exemple, si son mari avait décidé inopinément de rentrer à son domicile et d’y rester, l’intimée n’aurait pas eu besoin de déménager ni de trouver un nouvel emploi.

 

            Pour les motifs exposés ci‑dessus, la demande doit être accueillie, la décision du juge-arbitre en date du 30 août 1995 doit être annulée et l’affaire doit être renvoyée devant le juge-arbitre en chef ou la personne qu’il désignera pour nouvel examen en tenant pour acquis que l’intimée avait quitté volontairement son emploi sans justification.

 

 

 

 

                                                                          «J.T. Robertson»                                                                                                              J.C.A.

 

Traduction certifiée conforme

                                             

   Yvan Tardif, B.A., LL.L.


                     COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

 

 

                                                                                 A-765-95

 

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur l’assurance-chômage

 

 

Entre:

 

 

             PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

                                                                                 requérant

 

 

                                            - et -

 

 

                         SHELLEY L. PATTERSON

 

                                                                                    intimée

 

 

                                                                         

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

 

 

                                                                        


                                                   COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

                           AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

NO DU GREFFE:A-765-95

 

 

 

INTITULÉ DE LA CAUSE:Procureur général du Canada

c. Shelley L. Patterson

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE:Winnipeg (Manitoba)

 

 

 

DATE DE L’AUDIENCE:le mercredi 23 octobre 1996

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

DE LA COUR:le juge Strayer, J.C.A.

le juge Desjardins, J.C.A.

le juge Robertson, J.C.A.

 

 

 

EXPOSÉS À L’AUDIENCE PAR:le juge Robertson, J.C.A.

 

 

 

ONT COMPARU:

 

David I. Beslerpour le requérant

 

Shelley Pattersonpour son propre compte

 

 

 

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER:

 

George Thomson

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)pour le requérant

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