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Date : 20171120


Dossier : A-128-17

Référence : 2017 CAF 227

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :  LE JUGE EN CHEF NOËL

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE WEBB

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

demandeur

et

HEWLETT-PACKARD (CANADA) CO.

défenderesse

et

LE TRIBUNAL CANADIEN DU COMMERCE EXTÉRIEUR

intervenant

Requête écrite décidée sans comparution des parties.

Ordonnance rendue à Ottawa (Ontario), le 20 novembre 2017.

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LE JUGE WEBB

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE EN CHEF NOËL

LA JUGE TRUDEL


Date : 20171120


Dossier : A-128-17

Référence : 2017 CAF 227

CORAM :  LE JUGE EN CHEF NOËL

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE WEBB

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

demandeur

et

HEWLETT-PACKARD (CANADA) CO.

défenderesse

et

LE TRIBUNAL CANADIEN DU COMMERCE EXTÉRIEUR

intervenant

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

LE JUGE WEBB

[1]  Le Tribunal canadien du commerce extérieur (le TCCE) a présenté une requête en vue d’obtenir une ordonnance radiant la demande de contrôle judiciaire d’une décision du TCCE présentée par le procureur général du Canada (le PG). Le TCCE avait rejeté la requête préliminaire de Services partagés Canada (SPC) visant le rejet de la plainte déposée par Hewlett-Packard (Canada) Co. (HP) avant la tenue de l’audience.

[2]  HP a déposé une plainte auprès du TCCE le 11 novembre 2016. Le 15 décembre 2016, SPC a présenté une requête devant le TCCE dans laquelle il alléguait que ce dernier n’avait pas compétence pour instruire la plainte de HP. Le TCCE a rendu une ordonnance rejetant cette requête le 10 janvier 2017. Les motifs du rejet de la requête ont été intégrés dans les motifs formulés par le TCCE le 20 mars 2017 après avoir tranché la plainte de HP. SPC a eu gain de cause quant au fond de la plainte de HP. HP n’a pas demandé le contrôle judiciaire de la décision définitive, mais le PG demande le contrôle judiciaire de la décision préliminaire du TCCE sur la question de savoir si ce dernier avait compétence pour instruire la plainte.

[3]  Dans la présente requête, le TCCE soulève un certain nombre de motifs. En particulier, il fait valoir que la demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée au motif qu’elle est théorique.

[4]  Dans l’arrêt Borowski c. Canada (Procureur général), [1989] 1 R.C.S. 342, à la page 353, le juge Sopinka, s’exprimant au nom de la Cour suprême du Canada, a décrit l’analyse en deux temps concernant la doctrine relative au caractère théorique :

La démarche suivie dans des affaires récentes comporte une analyse en deux temps. En premier, il faut se demander si le différend concret et tangible a disparu et si la question est devenue purement théorique. En deuxième lieu, si la réponse à la première question est affirmative, le tribunal décide s’il doit exercer son pouvoir discrétionnaire et entendre l’affaire […]

[5]  Au paragraphe 10 du mémoire du PG déposé dans le cadre de la présente requête, il est indiqué que [traduction] « le Canada reconnaît que cette demande est théorique ». Par conséquent, la seule question à trancher est celle de savoir si la Cour doit exercer son pouvoir discrétionnaire et instruire la présente demande.

[6]  Cette décision est discrétionnaire. La Cour suprême du Canada a fourni des lignes directrices dans l’arrêt Borowski, aux pages 358 et 359, pour aider le tribunal à décider s’il doit exercer son pouvoir discrétionnaire et instruire l’affaire. En particulier, la Cour suprême a fait remarquer ce qui suit :

La première raison d’être de la politique ou de la pratique en question tient à ce que la capacité des tribunaux de trancher des litiges a sa source dans le système contradictoire. L’exigence du débat contradictoire est l’un des principes fondamentaux de notre système juridique et elle tend à garantir que les parties ayant un intérêt dans l’issue du litige en débattent complètement tous les aspects. Il semble que cette exigence puisse être remplie si, malgré la disparition du litige actuel, le débat contradictoire demeure.

[7]  En l’espèce, HP n’est pas partie à la demande de contrôle judiciaire. Les parties sont donc le PG et le TCCE, à titre d’intervenant. C’est la propre décision du TCCE qui fait l’objet de la demande de contrôle judiciaire. Le TCCE défendrait sa propre décision. Selon moi, ce facteur ne milite pas en faveur de l’exercice du pouvoir discrétionnaire et de l’instruction de l’affaire.

[8]  Aux pages 360 et 361, la Cour suprême a également indiqué que l’économie des ressources judiciaires est un facteur dont il faut tenir compte. À cet égard, il sera important de tenir compte de la fréquence à laquelle la question visée par le contrôle est soulevée. Dans son mémoire, le PG a indiqué ce qui suit :

[traduction]

21.  La question en l’espèce pourrait ne jamais être soumise aux tribunaux. Si la Cour refuse d’instruire la présente demande, le Canada doit attendre a) la procédure de passation de marchés publics assujettie à l’ESN omnibus; b) une plainte d’un soumissionnaire potentiel relativement à ce marché et c) que le TCCE confirme la plainte (tout en rejetant la requête de SPC pour des motifs de compétence). L’ESN omnibus a été invoquée en 2012 et ne l’a jamais été depuis, aucune affaire n’ayant satisfait à ces trois critères. Contrairement à l’affirmation du TCCE selon laquelle il reçoit régulièrement des plaintes concernant la procédure de passation de marchés publics de SPC, aucune plainte n’a été déposée relativement à un marché public assujetti à l’ESN omnibus depuis que le TCCE a rendu sa décision dans l’affaire. La question de savoir à quel moment cette question pourra faire l’objet d’un contrôle par la Cour relève donc de la pure conjecture, ce qui justifie que la Cour exerce son pouvoir discrétionnaire et l’instruise maintenant.

[9]  Au paragraphe 30 de ses observations en réponse, le TCCE conteste ces affirmations et affirme que le PG aura d’autres occasions de soulever la question.

[10]  Si, comme l’affirme le PG, la question est rare et risque de ne pas se présenter de nouveau, cette affirmation ne justifie pas que la Cour exerce son pouvoir discrétionnaire et instruise l’affaire. Si, comme l’affirme le TCCE, le PG aura d’autres occasions de soulever cette question, à mon avis, cette affirmation ne justifie pas non plus que la Cour exerce son pouvoir discrétionnaire et instruise la présente demande. S’il existe d’autres occasions de soulever la question, cela devrait se faire dans le cadre d’une affaire où une partie adverse, autre que le TCCE, pourra présenter des arguments contraires aux arguments qui seraient formulés par le PG sur le bien-fondé de la demande de contrôle judiciaire.

[11]  Par conséquent, je n’exercerais pas le pouvoir discrétionnaire qui m’habilite à instruire la présente affaire. J’accueillerais la requête du TCCE et je rejetterais la présente demande de contrôle judiciaire.

« Wyman W. Webb »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

Marc Noël Juge en chef »

« Je suis d’accord.

Johanne Trudel j.c.a. »

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-128-17

INTITULÉ :

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA c. HEWLETT-PACKARD (CANADA) CO. ET

LE TRIBUNAL CANADIEN DU COMMERCE EXTÉRIEUR

REQUÊTE ÉCRITE DÉCIDÉE SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LE JUGE WEBB

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE EN CHEF NOËL

LA JUGE TRUDEL

DATE DES MOTIFS :

LE 20 NOVEMBRE 2017

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Michael H. Morris

Roger Flaim

POUR LE DEMANDEUR

Nick Covelli

Eric Wildhaber

Dustin Kenall

POUR L’INTERVENANT

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

POUR LE DEMANDEUR

Avocat

Tribunal canadien du commerce intérieur

POUR L’INTERVENANT

 

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