Décisions de la Cour d'appel fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20170613


Dossier : A-88-16

Référence : 2017 CAF 121

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE DE MONTIGNY

LA JUGE WOODS

 

 

ENTRE :

1218395 ONTARIO INC.

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 13 juin 2017.

Jugement rendu à l’audience à Toronto (Ontario), le 13 juin 2017.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE GAUTHIER

 


Date : 20170613


Dossier : A-88-16

Référence : 2017 CAF 121

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE DE MONTIGNY

LA JUGE WOODS

 

 

ENTRE :

1218395 ONTARIO INC.

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Toronto (Ontario), le 13 juin 2017.)

LA JUGE GAUTHIER

[1]  Nous sommes saisis de l’appel d’une ordonnance du juge Graham de la Cour canadienne de l’impôt (CCI) qui a cassé les appels interjetés par 1218395 Ontario Inc. (l’appelante) de plusieurs cotisations établies en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C., 1985, ch. E-15, pour les périodes de déclaration incluses entre le 1er janvier 2001 le 31 décembre 2001 et des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C., 1985, ch. 1 (5e suppl.), relativement aux années d’imposition 1998 à 2005.

[2]  Nous sommes également saisis d’une requête en autorisation de présenter de nouveaux éléments de preuve, déposée en vertu de l’article 351 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, qui a été renvoyée à la formation de juges appelés à trancher le présent appel au fond.

[3]  La CCI a cassé les appels mentionnés plus haut au motif que l’appelante n’avait pas la qualité pour intenter une instance, car elle avait perdu sa charte sociale le ou vers le 27 mars 2006 (date à laquelle sa charte a été révoquée en application de la Loi sur les sociétés par actions de l’Ontario, L.R.O. 1990, chap. B-16 (la LSAO)). L’appelante a déposé ses avis d’appel auprès de la CCI en 2011. L’appelante a omis de reconstituer sa charte dans le délai prescrit par la CCI dans son ordonnance du 18 novembre 2015, et ce même si on lui avait accordé le délai supplémentaire de trois mois demandé pour ce faire.

[4]  Avant de casser les appels, la CCI a tenu une conférence téléphonique avec les parties le 8 juillet 2016 afin de vérifier l’état de l’affaire. L’avocat de l’appelante à l’époque ainsi qu’un ancien dirigeant et un ancien employé de l’appelante ont tous eu la possibilité d’expliquer les mesures prises en 2012 et en mars 2015 en vue de reconstituer la charte de la société. Ils ont aussi indiqué que l’appelante avait espéré que l’Agence du revenu du Canada (ARC) l’aiderait à faire changer d’idée le ministre des Finances de l’Ontario qui aurait refusé son consentement, en raison de l’impôt provincial impayé de l’appelante.

[5]  Lorsque l’appelante a demandé une autre prolongation, la CCI a demandé à ses représentants de préciser les mesures qu’elle avait prises depuis le 18 novembre 2015 pour respecter le délai fixé par la CCI. La demande de prolongation supplémentaire a été refusée, car la CCI était d’avis que les efforts déployés pour faire avancer l’affaire depuis novembre 2015 avaient été insuffisants. La CCI a signalé que l’appelante n’avait guère fait que confirmer les renseignements dont elle disposait déjà à l’époque où elle a demandé la prolongation de trois mois.

[6]  Il est évident qu’au vu du dossier, il était loisible à la CCI d’en venir à cette conclusion, ce qui n’est pas réellement contesté.

[7]  L’appelante soutient plutôt que la décision de la CCI était fondée sur des renseignements inadéquats. L’ARC aurait omis d’expliquer en toute franchise le rôle qu’elle avait joué dans le refus du ministre des Finances de l’Ontario de consentir à la reconstitution de la société.

[8]  Dans sa requête en présentation de nouveaux éléments de preuve, l’appelante soutient que l’ARC est responsable d’avoir bloqué la reconstitution de sa charte sociale et dit souhaiter contester la position adoptée par le ministère des Finances de l’Ontario. Signalons que son employé, M. Bonhomme, a fait allusion lors de la conférence téléphonique à la nécessité de se pencher de plus près sur le processus prévu à l’article 241 de la LSAO.

[9]  L’appelante veut déposer à titre de nouveaux éléments de preuve principalement des renseignements et des documents qui étaient en sa possession lorsqu’elle a présenté ses arguments devant la CCI le 8 février 2016, y compris des renseignements sur l’entente intervenue en 2008 entre l’ARC et le ministre des Finances de l’Ontario sur l’administration et le recouvrement de l’impôt provincial. Y sont aussi compris la correspondance échangée par les avocats des parties depuis février 2016 relativement à ce que les avocats de la défenderesse et d’autres personnes au sein du ministère de la Justice savaient au sujet des demandes de l’appelante présentées en application de la LSAO.

[10]  L’appelante reconnaît que ces nouveaux éléments de preuve ne répondent pas aux critères généralement appliqués par notre Cour pour décider si elle exercera le pouvoir discrétionnaire que lui confère l’article 351. Toutefois, elle exhorte la Cour à exercer son pouvoir résiduel en l’espèce, car, à son avis, la communication des nouveaux éléments de preuve est essentielle pour empêcher l’erreur judiciaire.

[11]  Ayant pris connaissance de la nouvelle preuve, nous ne sommes pas convaincus qu’elle offre quoi que ce soit de plus que les renseignements que les parties avaient déjà communiqués à la CCI. Les nouveaux éléments de preuve ne corroborent pas la simple thèse de l’appelante selon laquelle l’ARC avait empêché la reconstitution de la charte sociale de l’appelante. Tout au plus, cette preuve soulève une question concernant l’existence d’un obstacle déjà recensé par M. Bonhomme. Rien dans l’entente n’indique que les pouvoirs qui y sont délégués concernent le consentement ou le refus du consentement aux statuts de reconstitution pour l’application de la LSAO. L’appelante a reconnu qu’aucune disposition de la Loi sur l’imposition des sociétés, L.R.O. 1990, chap. C-40, ne traite de la question. Seul l’article 6 du Règlement de l’Ontario 289/00, pris en vertu de la LSAO, en traite. Enfin, nous ne sommes pas convaincus que les nouveaux éléments de preuve démontrent que l’ARC a omis de communiquer des renseignements susceptibles de contraindre la CCI à revenir sur sa conclusion selon laquelle l’appelante n’avait pas fait preuve de diligence.

[12]  La Cour doit exercer le pouvoir discrétionnaire que lui confère l’article 351 avec grande prudence. Le pouvoir résiduel dont elle dispose lorsqu’il n’est pas satisfait au critère pertinent ne doit être exercé que dans les cas manifestes où l’intérêt de la justice l’exige, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

[13]  L’appelante savait depuis de nombreuses années qu’elle devait reconstituer sa charte sociale conformément à la LSAO, à défaut de quoi, elle a été informée que ses appels devant la CCI seraient cassés le 12 février 2016. Tout ce qu’elle a fait avant la conférence téléphonique, c’est d’écrire au ministre des Finances de l’Ontario pour l’informer qu’elle avait besoin d’une lettre de consentement pour reconstituer sa charte sociale dans le but de poursuivre son appel à l’encontre d’une nouvelle cotisation établie en matière d’impôt fédéral. Lorsqu’elle a demandé une autre prolongation du délai à la CCI lors de la conférence téléphonique, elle n’a pas démontré à la CCI qu’elle avait établi un plan solide pour obtenir le consentement du ministre de l’Ontario ou pour reconstituer autrement sa société.


[14]  Compte tenu de ce qui précède, nous ne sommes pas convaincus que l’intervention de la Cour est justifiée, malgré les nouveaux éléments de preuve. Par conséquent, la requête en autorisation de présenter de nouveaux éléments de preuve et l’appel sont rejetés avec dépens, fixés à 1 000 $ (entiers dépens).

« Johanne Gauthier »

j.c.a.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

APPEL D’UNE ORDONNANCE DE L’HONORABLE JUGE DAVID GRAHAM DE LA COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT DATÉE DU 19 FÉVRIER 2016, DOSSIERS NOS 2011-759(GST)G ET 2011-769(IT)G.

 

DOSSIER :

A-88-16


INTITULÉ :

1218395 ONTARIO INC. c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 13 juin 2017

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE DE MONTIGNY

LA JUGE WOODS

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :

LA JUGE GAUTHIER

COMPARUTIONS :

Me William I. Innes

Pour l’appelante

Me John Grant

Me Craig Maw

Pour l’intimée

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Rueters LLP

Toronto (Ontario)

Pour l’appelante

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Pour l’intimée

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.