Décisions de la Cour d'appel fédérale

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Date : 20170307


Dossier : A‑253‑16

Référence : 2017 CAF 43

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE SCOTT

LE JUGE BOIVIN

LE JUGE DE MONTIGNY

 

 

ENTRE :

BUREAU DE RÉGIE INTERNE

ET PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE DES COMMUNES

appelants

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA ET BOULERICE ET AL.

intimés

Audience tenue à Montréal (Québec), le 9 janvier 2017.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 7 mars 2017.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE DE MONTIGNY

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE SCOTT

LE JUGE BOIVIN

 


Date : 20170307


Dossier : A‑253‑16

Référence : 2017 CAF 43

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE SCOTT

LE JUGE BOIVIN

LE JUGE DE MONTIGNY

 

 

ENTRE :

BUREAU DE RÉGIE INTERNE

ET PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE DES COMMUNES

appelants

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA ET BOULERICE ET AL.

intimés

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE DE MONTIGNY

[1]  La Cour est saisie d’un appel de la décision de la Cour fédérale par laquelle le juge Locke (le juge) a confirmé une ordonnance interlocutoire du protonotaire Morneau (le protonotaire) portant rejet de la requête en radiation de l’affidavit de M. Maxime St‑Hilaire (l’affidavit de M. St‑Hilaire), professeur de droit à l’Université de Sherbrooke (la requête en radiation), formée par le Bureau de régie interne (le BRI) et le Président de la Chambre des communes (collectivement désignés les « appelants »). Cet affidavit a été déposé par un certain nombre de députés et d’anciens députés fédéraux du Nouveau Parti démocratique (le NPD), intimés à la présente instance et collectivement désignés ci‑après les « députés intimés », en réponse à une requête en exception déclinatoire par laquelle les appelants contestaient la compétence de la Cour fédérale et sollicitaient la radiation de quatre demandes de contrôle judiciaire déposées par lesdits députés intimés (la requête en exception déclinatoire). Ces demandes de contrôle judiciaire visent plusieurs décisions du BRI déclarant irrégulier, compte tenu de l’esprit et de l’objet de ses règlements administratifs, l’usage des fonds, des biens ou des ressources mis à la disposition de certains membres du NPD pour des publipostages et l’établissement de bureaux auxiliaires

[2]  Pour les motifs dont l’exposé suit, je suis d’avis que l’appel devrait être accueilli et que l’affidavit en cause devrait être radié.

I.  Rappel des faits

[3]  Les faits sous‑jacents au présent appel découlent de quatre demandes de contrôle judiciaire formées par les députés intimés entre le 3 juillet 2014 et le 17 février 2015 contre des décisions par lesquelles le BRI a : 1) conclu qu’un certain nombre des publipostages des députés intimés contrevenaient à ses règlements administratifs et à sa politique, au motif qu’ils avaient été effectués par un parti politique et à son profit; 2) ordonné à un certain nombre des députés intimés de rembourser les frais d’impression et d’expédition engagés en violation de ses règlements et de sa politique; 3) conclu que plusieurs des députés intimés avaient irrégulièrement utilisé des ressources parlementaires pour couvrir certains frais professionnels, de télécommunications et de déplacement, notamment d’employés qui s’étaient révélés travailler ailleurs que dans un bureau parlementaire ou de circonscription; et 4) ordonné à l’Administration de la Chambre des communes de délivrer à plusieurs des députés intimés des états de compte faisant état des sommes à rembourser pour l’utilisation irrégulière de ressources parlementaires. Ces quatre demandes de contrôle judiciaire ont été réunies et mises au rôle pour audience commune conformément à des ordonnances de la Cour fédérale.

[4]  Les appelants ont réagi en présentant une requête en radiation des demandes de contrôle judiciaire, où ils invoquaient que la Cour fédérale n’avait pas compétence pour statuer sur les questions relevant exclusivement de la Chambre des communes, que la doctrine du privilège parlementaire soustrait à l’intervention judiciaire. Plus précisément, les appelants ont excipé de l’incompétence de la Cour fédérale pour les motifs suivants : 1) la Cour, par son intervention, porterait atteinte à l’indépendance constitutionnelle de la Chambre des communes, de même qu’à ses privilèges et immunités, violant ainsi la Constitution; 2) la Loi sur le Parlement du Canada, L.R.C. 1985, ch. P‑1 ne fait pas partie des « lois » que vise l’article 101 de la Loi constitutionnelle de 1867 (R.‑U.), 30 & 31 Victoria, ch. 3, reproduite dans L.R.C. 1985, App. II, no 5; et 3) le BRI n’est pas un « office fédéral » au sens de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F‑7. La Cour fédérale a ordonné que cette requête soit examinée au fond avant tout débat sur l’obtention de documents au titre des articles 317 et 318 des Règles des Cours fédérales, D.O.R.S./98‑106.

[5]  Le 17 décembre 2015, les députés intimés ont signifié l’affidavit de M. St‑Hilaire en réponse à la requête en exception déclinatoire. M. St‑Hilaire se présente dans son affidavit comme un expert du droit constitutionnel comparé, possédant des connaissances spéciales sur les [traduction« meilleures pratiques » et les « standards mondiaux » en matière de droit constitutionnel. Cet affidavit avait pour objet déclaré de fournir des éléments de preuve établissant l’existence d’une « tendance mondiale à l’interprétation restrictive du privilège parlementaire », et les députés intimés affirment qu’il est admissible en tant que preuve du droit étranger.

[6]  M. St‑Hilaire avance dans son affidavit qu’il existe une norme mondiale de droit constitutionnel selon laquelle l’administration des dépenses n’entre pas dans le champ du concept de common law qu’est le privilège parlementaire (au paragraphe 4); que la gestion des dépenses des députés ne relève pas de la doctrine du privilège parlementaire selon la jurisprudence britannique (aux paragraphes 5 et 6); que ni la Parliamentary Privileges Act 1987 (Commonwealth) de l’Australie, ni la Parliamentary Privilege Act 2014 de la Nouvelle‑Zélande, ni la Powers, Privileges and Immunities of Parliament and Provincial Legislatures Act 2004 (no 4 de 2004) de la République sud‑africaine ne traitent expressément de la gestion des dépenses des parlementaires (aux paragraphes 8 à 10); que le remboursement des dépenses parlementaires ne peut être considéré comme une affaire purement interne à la Chambre des communes (au paragraphe 11); et que l’on constate dans le Commonwealth et en Europe une tendance à l’interprétation restrictive du privilège parlementaire par l’application d’un critère de « nécessité » (aux paragraphes 14 et suivants). M. St‑Hilaire conclut de cet examen général du droit international que les dépenses parlementaires sont actuellement considérées comme extérieures à la sphère du privilège parlementaire, et donc comme assujetties au principe de la primauté du droit et susceptibles de contrôle judiciaire.

[7]  Les appelants ont formé, le 10 mars 2016, la requête en radiation qui se trouve au cœur du présent appel. À l’appui de leur requête, ils soutenaient que l’affidavit de M. St‑Hilaire propose en fait une argumentation juridique étayant la thèse des députés intimés, plutôt que de se limiter aux faits dont le déclarant a une connaissance personnelle. Il n’existe en l’espèce, ajoutaient‑ils, aucun différend factuel sur l’application du droit international qui exigerait la production d’une preuve d’expert afférente à cette question.

[8]  Par décision non publiée en date du 18 mai 2016, le protonotaire a rejeté la requête en radiation de l’affidavit formée par les appelants. Après s’être reporté à des décisions de notre Cour et de la Cour fédérale d’après lesquelles la radiation d’un affidavit à l’étape interlocutoire constitue une mesure exceptionnelle, relevant d’un pouvoir discrétionnaire qu’il convient de n’exercer qu’avec modération, il a conclu que l’affaire portée devant lui ne correspondait à aucun des cas spéciaux justifiant selon la jurisprudence la radiation d’un affidavit si tôt dans une instance.

[9]  Le protonotaire, se fondant principalement sur la décision Armstrong c. Canada (Procureur général), 2005 CF 1013 (Armstrong), a d’abord constaté que le contenu de l’affidavit pourrait être reproduit dans l’exposé des faits et du droit des députés intimés, d’où il a conclu que l’admission dudit affidavit ne pourrait causer de préjudice grave. Il a également constaté qu’il est normal dans une instance de contrôle judiciaire d’avoir à produire une contre‑preuve et à effectuer des contre‑interrogatoires supplémentaires. Le juge qui serait ultérieurement saisi de la requête en exception déclinatoire, a ajouté le protonotaire, serait capable de distinguer dans l’affidavit les allégations de fait des arguments juridiques, et on ne pouvait dire qu’il serait influencé par la qualité de professeur de droit du déposant. Enfin, le protonotaire a conclu que la requête en radiation n’avait pas été déposée dans un délai raisonnable au titre du paragraphe 58(2) des Règles des Cours fédérales et qu’elle modifiait le calendrier établi dans une ordonnance antérieure.

[10]  Par décision en date du 4 juillet 2016 et répertoriée sous 2016 CF 745, le juge a confirmé la décision discrétionnaire par laquelle le protonotaire a refusé de radier l’affidavit. Les appelants ont soutenu devant le juge que le protonotaire avait commis une erreur en ne prenant pas en considération une jurisprudence plus récente de notre Cour sur les motifs de radiation des affidavits. Le juge a rejeté cet argument au motif que les arrêts invoqués – soit Gravel c. Telus Communications Inc., 2011 CAF 14 (Gravel); Duyvenbode c. Canada (Procureur général), 2009 CAF 120, [2009] A.C.F. no 504; et Canada (Procureur général) c. Quadrini, 2010 CAF 47 (Quadrini) – s’accordaient en fait avec les principes exposés dans la décision Armstrong, sur laquelle le protonotaire s’était fondé avec raison et qu’il avait valablement appliquée. Le juge a en outre rejeté, comme inapplicable aux experts, l’argument des appelants selon lequel l’affidavit contrevenait à l’article 81 des Règles, qui dispose que les affidavits doivent se limiter aux faits dont le déclarant a une connaissance personnelle.

[11]  À propos de l’inquiétude des appelants de voir créer un précédent qui inciterait les parties à étayer d’opinions d’expert leur argumentation juridique avant le dépôt de leur exposé des faits et du droit, possibilité qui contreviendrait au principe de proportionnalité formulé à l’article 3 des Règles des Cours fédérales, le juge a fait observer que le protonotaire avait tenu compte dans sa décision du risque d’adjonction de nouvelles étapes à la procédure. Il ne pouvait donc conclure que le protonotaire avait commis une erreur de principe en refusant de prendre en considération le danger que s’accumulent dès le début de l’instance les opinions d’expert concurrentes sur des questions juridiques.

[12]  Enfin, le juge a refusé d’appliquer la distinction entre déposants profanes et experts, concluant que le juge qui instruirait la requête en exception déclinatoire serait capable d’exclure de sa considération tout élément de preuve dont il aurait constaté l’inadmissibilité. Il n’a décelé aucune erreur manifeste dans les conclusions du protonotaire portant que le refus de radier l’affidavit n’entraînerait aucun préjudice important et que l’espèce ne comportait aucune circonstance exceptionnelle propre à justifier cette radiation. En conséquence, il n’a pas estimé nécessaire d’examiner l’autre conclusion du protonotaire selon laquelle les appelants avaient formé la requête en radiation hors délai.

II.  La question en litige et la norme de contrôle applicable

[13]  La question que doit trancher notre Cour est relativement limitée : le juge a‑t‑il commis une erreur en refusant d’infirmer l’ordonnance du protonotaire et en refusant par conséquent de radier l’affidavit de M. St‑Hilaire?

[14]  Notre Cour a récemment réexaminé la norme de contrôle applicable aux décisions discrétionnaires des protonotaires, ainsi qu’aux décisions rendues par la Cour fédérale en appel de ces décisions, dans Corporation de soins de la santé Hospira c. Kennedy Institute of Rheumatology, 2016 CAF 215, [2016] A.C.F. no 943. Elle a conclu que la norme de contrôle exposée dans l’arrêt Canada c. Aqua‑Gem Investments Ltd., [1993] 2 C.F. 425, devait être abandonnée pour céder la place à la norme énoncée par la Cour suprême du Canada dans Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33, [2002] 2 R.C.S. 235. Il est acquis aux débats que c’est là la norme à appliquer à la présente espèce, de sorte que notre Cour n’ira à l’encontre de la décision rendue par la Cour fédérale à l’issue du contrôle de la décision du protonotaire que si cette dernière se révèle entachée soit d’une erreur de droit, soit d’une erreur manifeste et dominante relativement à des questions de fait ou des questions mixtes de fait et de droit.

III.  Analyse

[15]  Il est de droit constant qu’un affidavit doit se limiter aux faits dont le déclarant a une connaissance personnelle. Ce principe est codifié au paragraphe 81(1) des Règles des Cours fédérales, ainsi libellé :

81 (1) Les affidavits se limitent aux faits dont le déclarant a une connaissance personnelle, sauf s’ils sont présentés à l’appui d’une requête – autre qu’une requête en jugement sommaire ou en procès sommaire – auquel cas ils peuvent contenir des déclarations fondées sur ce que le déclarant croit être les faits, avec motifs à l’appui.

81 (1) Affidavits shall be confined to facts within the deponent’s personal knowledge except on motions, other than motions for summary judgment or summary trial, in which statements as to the deponent’s belief, with the grounds for it, may be included.

[16]  Notre Cour a appliqué cette règle en de nombreuses occasions et n’a cessé de répéter que les déclarations contenues dans un affidavit doivent se limiter aux faits dont leur auteur possède une connaissance personnelle. Le passage suivant, tiré du paragraphe 18 de l’arrêt Quadrini, illustre la position de notre Cour sur cette question :

[…] En général, l’affidavit doit contenir des renseignements pertinents qui aideraient la Cour à trancher la demande. Comme l’a souligné notre Cour dans Dwyvenbode c. Canada (Procureur général), 2009 CAF 120, l’affidavit a pour but de présenter les faits pertinents quant au litige sans commentaires ni explications. La Cour peut radier des affidavits ou des parties de ceux‑ci lorsqu’ils sont abusifs ou n’ont clairement aucune pertinence, lorsqu’ils renferment une opinion, des arguments ou des conclusions de droit ou encore lorsque la Cour est convaincue qu’il est préférable de régler la question de l’admissibilité au stade préliminaire de façon à permettre le déroulement ordonné de l’audience (McConnell c. Commission canadienne des droits de la personne, 2004 CF 817, décision confirmée dans 2005 CAF 389). [Souligné dans l’original.]

[17]  Les tribunaux judiciaires ont cependant reconnu que certaines questions exceptionnelles exigent l’application de connaissances spéciales qui n’entrent pas habituellement dans la sphère d’expertise et d’expérience du juge des faits. Ainsi, la preuve sous forme d’opinion d’expert est devenue admissible comme exception à la règle interdisant la preuve d’opinion, mais seulement dans les cas où il se révélerait nécessaire de fournir au juge des faits des éléments techniques ou scientifiques propres à lui permettre de valablement apprécier la preuve produite; voir R. c. Abbey, [1982] 2 R.C.S. 24, à la page 42, 1982 CanLII 25; et R. c. D.D., 2000 CSC 43, au paragraphe 50, [2000] 2 R.C.S. 275. Dans de tels cas, l’admissibilité de la preuve sous forme d’opinion d’expert sera subordonnée à un certain nombre de conditions, soit la pertinence, la nécessité d’aider le juge des faits, l’absence de toute règle d’exclusion et la qualification suffisante de l’expert; voir R. c. Mohan, [1994] 2 R.C.S. 9, 1994 CanLII 80 (Mohan); et J. Sopinka, S.N. Lederman et A.W. Bryant, The Law of Evidence in Canada, 4e éd., Markham (Ontario), LexisNexis, 2014, aux paragraphes 12.35 et suivants.

[18]  La Cour suprême a cependant mis en garde dans l’arrêt Mohan contre le risque de permettre aux experts d’usurper les fonctions du juge des faits, citant à ce propos la règle suivante formulée par lord Wilberforce dans l’arrêt Director of Public Prosecutions c. Jordan, [1977] A.C. 699 (à la page 718) :

[traduction] L’opinion d’un expert est recevable pour donner à la cour des renseignements scientifiques qui, selon toute vraisemblance, dépassent l’expérience et la connaissance d’un juge ou d’un jury. Si, à partir des faits établis par la preuve, un juge ou un jury peut à lui seul tirer ses propres conclusions, alors l’opinion de l’expert n’est pas nécessaire.

(Mohan, à la page 24.)

C’est précisément pourquoi les tribunaux judiciaires n’accepteront pas de preuve d’opinion sur les questions de droit interne (par opposition au droit étranger). En effet, de telles questions appartiennent manifestement au champ d’expertise du tribunal judiciaire, et l’admission d’une preuve d’opinion y afférente empiéterait sur le rôle du tribunal en tant qu’expert en matière de droit; voir Association of Chartered Certified Accountants et al. c. Institut canadien des comptables agréés, 2016 CF 1076, aux paragraphes 29 et suivants; Eurocopter c. Bell Helicopter Textron Canada Limitée, 2010 CF 1328, au paragraphe 10, [2010] A.C.F. no 1650; Québec (Procureur général) c. Canada, 2008 CF 713, au paragraphe 161, confirmée par 2009 CAF 361, confirmé par 2011 CSC 11, [2011] 1 R.C.S. 368; Es‑Sayyid c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2012 CAF 59, au paragraphe 41, Brandon (Ville) c. Canada, 2010 CAF 244, au paragraphe 27; Dywidag Systems International, Canada, Ltd. c. Garford Pty Ltd., 2010 CAF 223, aux paragraphes 10 et 11 et The Law of Evidence in Canada, aux paragraphes 12.155 et 12.156.

[19]  Pour revenir à la présente espèce, la nature de l’affidavit de M. St‑Hilaire ne se découvre pas au premier coup d’œil. Le juge semble l’avoir considéré comme un affidavit d’expert, bien qu’il ne soit accompagné ni d’une formule 52.2 (Certificat relatif au code de déontologie régissant les témoins experts) ni du curriculum vitae de son auteur. La formation saisie ayant fait remarquer ces omissions procédurales lors du débat, les avocats des appelants ont déposé après l’audience une requête en autorisation de produire le certificat et le curriculum vitae manquants. Il ne sera pas nécessaire de statuer sur cette requête, la dernière en date des députés intimés, étant donné ma conclusion que le juge a commis une erreur en confirmant la décision du protonotaire et en ne radiant pas l’affidavit de M. St‑Hilaire, mais je vois néanmoins dans ladite requête une nouvelle confirmation du fait que celui‑ci doit être considéré comme un affidavit d’expert.

[20]  Les avocats des députés intimés soutiennent que l’affidavit de M. St‑Hilaire, s’il contient une argumentation juridique, n’est pas, considéré dans son ensemble, un avis juridique. Ils préfèrent le définir comme un élément de preuve [traduction] « visant à fournir une information factuelle cohérente sur le contexte historique, le droit positif étranger et le droit constitutionnel comparé » (paragraphe 55 de l’exposé des faits et du droit déposé par les députés intimés). Ils contestent en outre l’argument des appelants selon lequel cet affidavit empiète sur le rôle de la Cour et porte sur la question même que cette dernière aura à trancher dans la requête en exception déclinatoire (à savoir l’application et la portée du privilège parlementaire), avançant plutôt qu’il tend seulement à établir l’existence [traduction] « de pratiques exemplaires mondiales de droit constitutionnel qui restreignent le concept de privilège parlementaire », afin d’aider la Cour à délimiter la portée de ce privilège (paragraphes 52 et 53 de l’exposé des faits et du droit déposé par les députés intimés). Qu’il me soit permis de ne pas partager cet avis.

[21]  Premièrement, une lecture attentive de l’affidavit en cause révèle qu’il ne se limite pas aux faits, mais qu’il est au contraire truffé d’opinions. Par exemple, M. St‑Hilaire y déclare au paragraphe 4 qu’il existe à son avis une norme mondiale de droit constitutionnel selon laquelle l’administration des dépenses parlementaires n’entre pas dans le concept de common law du privilège parlementaire. Une telle déclaration non seulement repose sur sa propre appréciation des pratiques étrangères et des textes sur lesquels il se fonde, mais constitue aussi un jugement de valeur sur l’orientation que devrait prendre le droit canadien. Il en va de même pour le paragraphe 11, où M. St‑Hilaire affirme qu’il serait difficile de définir le remboursement des dépenses parlementaires comme une question purement interne à l’administration de la Chambre des communes, soustraite de ce fait au contrôle judiciaire. De même encore, on trouve au paragraphe 14 l’opinion selon laquelle la tendance dans le Commonwealth serait actuellement, à quelques exceptions près, de restreindre l’application du privilège parlementaire sur la base d’un critère de « nécessité ».

[22]  Enfin, les paragraphes 23 et 24 relèvent manifestement de l’avis juridique. Se fondant sur son examen des textes faisant autorité en Angleterre, en Australie, en Nouvelle‑Zélande et en Afrique du Sud, d’un rapport de la Commission de Venise du Conseil de l’Europe et d’un document de travail d’un sous‑comité du Sénat canadien, M. St‑Hilaire émet l’opinion que le droit international s’oriente vers une interprétation plus restrictive du privilège parlementaire, selon laquelle les dépenses parlementaires échapperaient à son application. Il va même jusqu’à affirmer non seulement que l’assujettissement des dépenses parlementaires au principe de la primauté du droit et au contrôle judiciaire représente un « standard » mondial, mais qu’une telle pratique doit être recommandée parce qu’elle est fondée sur la raison :

24. Il ressort des paragraphes 11 à 23 que l’exclusion, en droit positif étranger, de la gestion des dépenses parlementaires du champ d’application du privilège parlementaire pour l’assujettir plutôt au principe de primauté du droit et de contrôle judiciaire de légalité et constitutionnalité, principe qui bien sûr n’exclut pas un certain degré, même relativement élevé, de « déférence » à l’endroit du gestionnaire contrôlé, représente un « standard ». En effet, il s’agit d’une pratique, non seulement répandue, mais bonne, voire meilleure qu’une autre, car fondée en raison.

Affidavit de Maxime St‑Hilaire, dossier d’appel, à la page 102.

[23]  On ne saurait prétendre que l’affidavit de M. St‑Hilaire constitue un exposé des faits offrant des renseignements neutres sur l’évolution historique du privilège parlementaire ainsi que sur le droit comparé et le droit étranger. Il serait plutôt assimilable à un avis juridique, tirant d’éléments puisés à des sources canadiennes et étrangères une conclusion qui se trouve à appuyer la thèse des députés intimés. En fait, l’essentiel du contenu de cet affidavit aurait fort bien pu être intégré au mémoire des faits et du droit produit par ceux‑ci. Ou encore, on imagine facilement la publication de ce texte, à quelques modifications près, dans une revue juridique sous la forme d’un article de doctrine que les députés intimés invoqueraient au soutien de leur thèse. En tout cas, l’affidavit en question ne contient manifestement pas d’éléments de preuve qui seraient nécessaires au juge des faits pour apprécier les questions en litige en raison de la nature technique de celles‑ci, comme l’exige l’arrêt Mohan.

[24]  Il ne s’agit pas non plus ici, de toute évidence, d’un cas où le droit et les textes étrangers auxquels renvoie M. St‑Hilaire constitueraient des questions de fait nécessitant la production d’éléments de preuve; ce dernier s’y réfère plutôt à seule fin d’aider la Cour dans son analyse d’une question de droit interne. Or les tribunaux judiciaires s’appuient couramment sur la jurisprudence et la doctrine étrangères sans qu’il soit besoin de présenter en preuve les textes en question par voie d’affidavit; voir par exemple Kazemi (Succession) c. République islamique d’Iran, 2014 CSC 62, aux paragraphes 34 à 39, [2014] 3 R.C.S. 176, concernant la notion d’immunité des États; Médecins canadiens pour les soins aux réfugiés c. Canada (Procureur général), 2014 CF 651, aux paragraphes 591 à 609, [2015] 2 R.C.F. 267, au sujet de l’interprétation à donner à l’article 12 de la Charte canadienne des droits et libertés, Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.‑U.), 1982, c. 11 (la Charte); Groupe de la Banque mondiale c. Wallace, 2016 CSC 15, aux paragraphes 47, 61, 70, 71 et 79 à 83, [2016] 1 R.C.S. 207, touchant la portée à attribuer à l’inviolabilité des archives de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement et de l’Association internationale de développement et Jones c. Tsige, 2012 ONCA 32, aux paragraphes 55 à 65, 346 D.L.R. (4th) 34, où des textes étrangers sont invoqués au soutien de la conclusion qu’un droit d’action en intrusion dans l’intimité devrait être reconnu en Ontario. En fait, la Cour suprême du Canada, aux paragraphes 21 à 74 de Canada (Chambre des communes) c. Vaid, 2005 CSC 30, [2005] 1 R.C.S. 667, arrêt de principe sur le privilège parlementaire, s’est abondamment référée à des textes étrangers dans son analyse de cette doctrine sans avoir eu besoin de preuve par affidavit sur le sujet.

[25]  La jurisprudence invoquée par les députés intimés ne vient pas au soutien de l’admissibilité de l’affidavit de M. St‑Hilaire. Dans Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Ministre de la Défense nationale), 2011 CSC 25, [2011] 2 R.C.S. 306 [Canada (Commissaire à l’information)], par exemple, la preuve d’expert considérée n’était pas de nature juridique, mais se rapportait plutôt à l’appareil gouvernemental. La Cour suprême y a conclu qu’on peut recourir à ce type de preuve non pas pour interpréter la Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. 1985, c. A‑1, mais pour « situer son interprétation […] dans le bon contexte » [Canada (Commissaire à l’information), au paragraphe 33]. L’affidavit de M. St‑Hilaire est manifestement de nature différente : son caractère essentiel n’est pas de proposer un aperçu historique du concept de privilège parlementaire, mais d’avancer une interprétation restrictive de l’article 18 de la Loi constitutionnelle de 1867 et de l’article 4 de la Loi sur le Parlement du Canada, qu’il fonde sur une analyse juridique de dispositions constitutionnelles et autres textes étrangers.

[26]  Dans la décision Daniels c. Canada, 2013 CF 6, portant sur une question de droit autochtone, la Cour fédérale a de même accepté une preuve d’expert visant à l’éclairer sur le contexte essentiel à la juste intelligence du droit applicable. Il est également à noter que, dans cette affaire, la plupart des experts étaient des historiens et des anthropologues, et ne proposaient pas de compétences juridiques.

[27]  La dernière décision invoquée par les députés intimés à cet égard est l’arrêt Danson c. Ontario (Procureur général), [1990] 2 R.C.S. 1086, 1990 CanLII 93, où la Cour suprême a pris acte de la distinction entre les faits en litige et les faits législatifs. Les premiers concernent directement les parties au litige, tandis que les seconds sont de nature plus générale et tendent à établir l’objet et la genèse des dispositions législatives en question, y compris leur contexte social, économique et culturel. Les faits législatifs sont souvent d’une importance cruciale pour un examen adéquat des questions relatives à la Charte, en particulier s’agissant des effets nuisibles d’une disposition législative. Dans la présente espèce, l’affidavit attaqué n’est pas déposé dans cet esprit : les faits exposés par M. St‑Hilaire ne sont pas de nature économique, sociale ou culturelle. On ne saurait en effet assimiler à un fait législatif l’état du droit dans une juridiction étrangère. En outre, l’affidavit de M. St‑Hilaire ne vise pas tant à expliquer l’objet et la genèse du privilège parlementaire qu’à argumenter en faveur d’une interprétation plus restrictive de ce privilège à la lumière de l’évolution récente de la pratique et du droit étrangers.

[28]  Pour tous les motifs qui précèdent, je suis donc convaincu que l’affidavit en cause est inadmissible au titre du paragraphe 81(1) des Règles et ne saurait valablement bénéficier de l’exception accordée aux experts. Le point à trancher par notre Cour, cependant, n’est pas celui de savoir si le dépôt de l’affidavit de M. St‑Hilaire a été régulièrement accepté, mais plutôt si le juge a commis une erreur en refusant d’aller à l’encontre de l’ordonnance du protonotaire déférant la question de l’admissibilité au juge qui doit instruire l’affaire au fond.

[29]  Il est de jurisprudence constante, comme l’ont rappelé le protonotaire et le juge, que le pouvoir discrétionnaire de radier un affidavit en partie ou en totalité doit être exercé avec modération et seulement dans des cas exceptionnels. Dans la décision Armstrong, par exemple, sur laquelle le protonotaire s’est largement appuyé, la Cour fédérale a expliqué au paragraphe 40 que les tribunaux ne doivent exercer le pouvoir discrétionnaire de radier un affidavit que « dans les cas où il est dans l’intérêt de la justice de le faire, par exemple, ou dans les cas où cela causerait un préjudice important à une partie, lorsque le fait de ne pas radier un affidavit ou des parties d’un affidavit nuirait au bon déroulement de l’audition de la demande de contrôle judiciaire ». Notre Cour a réitéré ce point de vue dans les termes suivants au paragraphe 5 de l’arrêt Gravel :

[…] Dans la première décision, la juge saisie du dossier a reconnu la jurisprudence de notre Cour voulant que, dans le contexte d’une procédure de contrôle judiciaire, il ne faille recourir à des requêtes en radiation de la totalité ou d’une partie d’un affidavit que dans des circonstances exceptionnelles, surtout lorsque l’objet de la radiation a trait à la pertinence de la preuve : voir Canadian Tire Corp. Ltd. c. P.S. Partsource Inc., 2001 CAF 8. La raison en est bien simple : les demandes de contrôle judiciaire doivent procéder au mérite rapidement et les incidents procéduraux de la nature d’une requête en radiation ont pour effet de retarder indûment, et plus souvent qu’autrement inutilement, une décision au mérite.

[30]  Dans la présente espèce, cependant, je constate qu’il vaut mieux régler la question de l’admissibilité dès le début de la procédure, et ce, pour deux raisons. Premièrement, l’affidavit de M. St‑Hilaire est si manifestement inacceptable et rempli d’opinions juridiques qu’il faut l’écarter au plus tôt. Il n’y a absolument aucune raison de le laisser au dossier, puisque son inadmissibilité apparaît avec une évidence telle qu’on peut se prononcer définitivement sur le fond à son égard sans avoir besoin d’un dossier complet. Si le paragraphe 81(1) des Règles a un sens quelconque, il doit être appliqué à des cas tels que le présent où l’on produit un affidavit contenant une opinion d’expert juridique sur la question de fond même que la Cour devra examiner. Cette situation est très différente de l’affaire Armstrong, où l’auteur de l’affidavit n’était pas un expert mais un profane, qui se trouvait être aussi le demandeur et dont l’exposé des faits avait dévié vers l’argumentation.

[31]  Deuxièmement, il est dans l’intérêt de la justice d’intervenir dès la présente étape, étant donné que le fait de ne pas radier immédiatement l’affidavit de M. St‑Hilaire causerait un préjudice important aux appelants et nuirait à la bonne marche de l’instruction de la demande. Le problème n’est pas vraiment, comme les appelants voudraient le faire croire, que le juge qui instruira au fond la requête en exception déclinatoire risque d’être indûment influencé par le contenu de l’affidavit. Les juges sont habitués à faire abstraction des témoignages et opinions qu’ils ont exclus au cours de l’instance, et à apprécier les éléments de preuve qui, même déclarés admissibles, se révèlent d’une faible pertinence, fiabilité ou crédibilité.

[32]  Toutefois, si la Cour autorisait à la présente étape le maintien de l’affidavit au dossier, les appelants pourraient se voir contraints, ne serait‑ce que pour des raisons tactiques, non seulement de contre‑interroger son auteur (ce qu’ils ont apparemment déjà fait), mais aussi d’engager eux aussi un ou plusieurs juristes comme témoins experts et de déposer un affidavit en réponse. Cette façon de procéder aurait le malencontreux résultat de détourner la Cour de sa tâche principale pour l’engager dans une voie parallèle où elle aurait à décider lequel des experts est le plus crédible et le plus fiable. Elle se trouverait ainsi entraînée dans un débat superflu qui, au meilleur des cas, allongerait indûment ce qui devrait être une instance rapide et, dans l’hypothèse la plus pessimiste, l’inciterait à se soustraire à sa responsabilité de trancher les questions de droit. De telles conséquences ne sauraient être admises.

[33]  Je conclus de ce qui précède non seulement que l’affidavit de M. St‑Hilaire est inadmissible, mais que le juge a commis une erreur en n’annulant pas l’ordonnance du protonotaire et en ne radiant pas cet affidavit.

[34]  Ayant déterminé que le protonotaire ne s’était pas trompé en décidant de ne pas radier l’affidavit, le juge s’est abstenu d’examiner le point de savoir s’il avait commis une erreur en concluant à titre subsidiaire que la requête en radiation devait être rejetée pour cause de retard. Il reste donc à notre Cour à examiner de sa propre initiative la conclusion subsidiaire du protonotaire. Après avoir étudié attentivement la question, je conclus que le retard à former la requête en radiation ne la rend pas irrecevable, et ce, pour deux motifs.

[35]  J’admets que le critère présidant au rejet d’une requête pour cause de retard est formulé en termes très généraux; les termes tels que « le plus tôt possible », employés au paragraphe 58(2) des Règles, à quoi s’ajoutent les expressions « la Cour […] peut, par ordonnance » et « dans un délai suffisant — après avoir pris connaissance de l’irrégularité » de l’article 59, impliquent que cette décision est de nature discrétionnaire et repose dans une large mesure sur les faits de l’espèce. Cela dit, le protonotaire semble avoir supposé que la jurisprudence prescrit le rejet d’une requête pour cause de retard après l’écoulement de deux mois, ce qui n’est pas le cas. La décision de la Cour fédérale Scottish & York Insurance Co. c. York, 180 F.T.R. 115, 94 A.C.W.S. (3d) 449, invoquée par les députés intimés devant le protonotaire et sur laquelle il s’est lui‑même implicitement appuyé (voir le paragraphe 27 de ses motifs), n’étaye pas le principe selon lequel les termes « le plus tôt possible » au paragraphe 58(2) des Règles obligent invariablement à former une requête dans les deux mois suivant la date à laquelle le requérant a pris connaissance de l’irrégularité en question. Pour autant qu’il se soit fondé sur cette fausse interprétation du paragraphe 58(2) des Règles, le protonotaire a commis une erreur de droit.

[36]  En outre, je ne puis conclure qu’un tribunal doive s’abstenir de radier un affidavit manifestement inadmissible simplement parce que la requête tendant à obtenir cette radiation n’aurait pas été formée aussi rapidement qu’elle aurait dû l’être. Après tout, les Règles des Cours fédérales doivent être interprétées et appliquées « de façon à permettre d’apporter une solution au litige qui soit juste et la plus expéditive et économique possible » (art. 3). Il en va particulièrement ainsi dans un cas tel que le présent, où les députés intimés n’ont pas établi que le retard des appelants – de quelques semaines tout au plus – à former leur requête en radiation leur ait causé un quelconque préjudice. Le préjudice que subiraient les appelants si leur requête était rejetée pour cause de retard l’emporte manifestement sur tout inconvénient qui résulterait du décalage au rôle de la requête en exception déclinatoire.

IV.  Conclusion

[37]  En conséquence, je serais d’avis d’accueillir l’appel, d’annuler l’ordonnance du juge Locke et de radier l’affidavit de M. Maxime St‑Hilaire. Les dépens sont adjugés aux appelants.

« Yves de Montigny »

j.c.a.

« Je suis d’accord

A.F. Scott, j.c.a. »

« Je suis d’accord

Richard Boivin, j.c.a. »


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A‑253‑16

 

 

INTITULÉ :

BUREAU DE RÉGIE INTERNE ET PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE DES COMMUNES c. PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA ET BOULERICE ET AL.

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (QuÉbec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 9 JANVIER 2017

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE DE MONTIGNY

 

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE SCOTT

LE JUGE BOIVIN

 

DATE DES MOTIFS :

LE 7 MARS 2017

 

COMPARUTIONS :

Guy Pratte

Nadia Effendi

 

POUR LES APPELANTS

 

Julius Grey

Simon Gruda‑Dolbec

James Duggan

Alexander Duggan

 

POUR LES INTIMÉS

BOULERICE ET AL.

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Borden Ladner Gervais S.E.N.C.R.L., s.r.l.

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LES APPELANTS

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

POUR L’INTIMÉ

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

Grey Casgrain et

Duggan - Avocats

Avocats

Montréal (Québec)

POUR LES INTIMÉS

BOULERICE ET AL.

 

 

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