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Date : 20170110


Dossier : A-189-16

Référence : 2017 CAF 3

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE PELLETIER

LE JUGE STRATAS

LA JUGE WOODS

 

ENTRE :

SOCIÉTÉ GÉNÉRALE VALEURS MOBILIÈRES INC.

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 10 janvier 2017.

Jugement rendu à l’audience à Toronto (Ontario), le 10 janvier 2017.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE WOODS

 


Date : 20170110


Dossier : A-189-16

Référence : 2017 CAF 3

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE PELLETIER

LE JUGE STRATAS

LA JUGE WOODS

 

 

ENTRE :

SOCIÉTÉ GÉNÉRALE VALEURS MOBILIÈRES INC.

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Toronto (Ontario), le 10 janvier 2017).

LA JUGE WOODS

[1]  Au cours d’un appel interjeté devant la Cour canadienne de l’impôt par Société Générale Valeurs Mobilières Inc., la Couronne a voulu faire trancher des questions de droit conformément au paragraphe 58(1) des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale). Avec le consentement de Société Générale, la juge en chef adjointe de la Cour de l’impôt a inscrit l’affaire au rôle pour décision.

[2]  Dans une décision portant la référence 2016 CCI 131, le juge Paris (le juge) a finalement tranché les questions en faveur de la Couronne, et Société Générale a interjeté appel auprès de notre Cour.

[3]  Les questions en litige concernent la disposition d’allègement fiscal figurant dans la Convention de 1984 entre le Gouvernement du Canada et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu (la convention fiscale). De manière générale, cette disposition oblige le Canada à limiter l’impôt canadien sur certains revenus provenant du Brésil afin que les contribuables canadiens puissent bénéficier de mesures fiscales incitatives offertes par le Brésil. Sans la disposition d’allègement fiscal, le Canada aurait le droit d’imposer les résidents canadiens sur ces revenus au Canada. Le mécanisme prévu dans la convention fiscale oblige le Canada à accorder un crédit pour impôt étranger sur les revenus brésiliens admissibles comme si l’impôt brésilien était perçu, même si les revenus n’ont pas été imposés au Brésil.

[4]  Les questions précises soumises à la Cour de l’impôt concernaient le calcul du crédit canadien pour impôt étranger. Plus particulièrement, la disposition applicable de la convention fiscale obligeait‑elle le Canada à accorder un crédit pour impôt étranger calculé d’après l’impôt canadien sur le montant brut des revenus?

[5]  Les questions précises sont reproduites ci‑après :

[traduction]

Lorsqu’un contribuable qui est un résident du Canada reçoit un revenu d’intérêts d’une obligation prenant naissance au Brésil qui est imposable au Brésil en vertu de l’article XI de la convention fiscale entre le Canada et le Brésil et qu’il reçoit un revenu imposable d’autres sources, est‑ce que, selon le paragraphe XXII(2) de la convention fiscale, le montant de l’impôt sur le revenu canadien « correspondant aux revenus imposables au Brésil » :

a)  est égal à l’impôt sur le revenu canadien sur le montant dudit revenu d’intérêts qui est imposable au Brésil, ou qui est réputé l’être, soit un montant brut?

b)  Si la réponse à la question a) est « oui », quel est le critère approprié pour déterminer le montant de l’impôt sur le revenu canadien à payer sur le montant brut du revenu tiré du Brésil?

c)  Si la réponse à la question a) est « non », quel est le critère approprié pour déterminer les montants du contribuable qui est un résident du Canada qui devraient être inclus dans le revenu brut provenant de sources au Brésil, ou qui devraient être déduits de ce revenu brut?

[6]  La disposition applicable est la deuxième phrase de l’article XXII(2) de la convention fiscale, rédigée ainsi : « Toutefois, cette déduction ne peut excéder la fraction de l’impôt sur le revenu, calculé avant la déduction, correspondant aux revenus imposables au Brésil ».

[7]  Le contexte soumis au juge pour lui permettre de répondre à ces questions était un simple énoncé de faits hypothétiques accepté par les parties. Ces faits sont les suivants :

  1. Un contribuable qui est un résident du Canada gagne un revenu d’intérêts d’une obligation provenant du Brésil.
  2. Ce revenu d’intérêts d’une obligation est imposable par le Brésil en vertu de l’article XI de la convention fiscale.
  3. Le contribuable gagne des revenus d’autres sources qui sont imposables au Canada.
  4. En vertu du paragraphe XXII(3) de la convention fiscale, le contribuable est réputé avoir payé au Brésil un impôt égal à 20 % du montant brut du revenu d’intérêts de l’obligation provenant du Brésil.

[8]  Les conclusions du juge sont reproduites ci‑après.

1.  Le montant de l’impôt sur le revenu canadien mentionné dans la deuxième phrase du paragraphe XXII(2) de la convention fiscale comme « correspondant aux revenus imposables au Brésil » est le montant réel de l’impôt sur le revenu canadien lié aux revenus imposables au Brésil, qui est calculé selon le revenu net provenant du Brésil.

2.  Le critère approprié pour déterminer quels montants du contribuable qui est un résident du Canada devraient être inclus dans le revenu d’intérêts brut provenant de sources au Brésil ou qui devraient en être déduits est celui indiqué au paragraphe 4(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu.

[9]  Selon Société Générale, le juge a commis une erreur en concluant que le Canada peut limiter le crédit pour impôt étranger à l’impôt canadien réellement payable sur le montant net  des revenus d’intérêts d’une obligation. Elle affirme que le montant applicable est celui que l’on obtient en multipliant le montant brut des revenus d’intérêts d’obligations par le taux d’imposition canadien. C’est là une question de droit à l’égard de laquelle la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte (Housen c. Nikolaissen, 2002 CSC 33).

[10]  À notre avis, le juge a bien répondu aux questions, et nous souscrivons aux motifs qu’il a exposés.

[11]  Devant notre Cour, Société Générale affirme que l’interprétation que le juge a faite de la convention fiscale devrait être rejetée, car elle ne s’accorde pas avec le langage clair de la disposition. Elle affirme aussi que, si l’interprétation donnée par le juge était exacte, les rédacteurs de la convention fiscale auraient employé le même langage que celui qui figure dans maintes autres conventions.

[12]  Nous ne souscrivons pas à ces arguments. À notre avis, l’interprétation donnée par le juge est davantage en harmonie avec le libellé de la disposition applicable. En particulier, le juge a eu raison de dire que le sens ordinaire du texte prend en considération non seulement le revenu brut, qui est imposable au Brésil, mais aussi l’impôt canadien réellement payable tel qu’il est calculé en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, et qui est fondé sur le revenu net.

[13]  L’interprétation donnée par le juge est celle qui s’accorde le mieux avec le texte, le contexte et l’objet de la disposition.

[14]  Enfin, nous reconnaissons que le texte de la convention fiscale est sans doute différent de celui de bien d’autres conventions signées par le Canada. Cependant, en l’espèce, cela ne suffit pas à justifier une autre interprétation de la disposition.

[15]  L’appel sera rejeté avec dépens devant la Cour d’appel fédérale et devant la Cour de l’impôt.

« Judith M. Woods »

j.c.a.


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


Dossier :

A‑189‑16

APPEL INTERJETÉ D’UNE ORDONNANCE DE MONSIEUR LE JUGE B. PARIS, DE LA COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT, DATÉE DU 30 JUIN 2016, DOSSIER No 2013‑4035(IT)G

INTITULÉ :

SOCIÉTÉ GÉNÉRALE VALEURS MOBILIÈRES INC. c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 10 JANVIER 2017

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE PELLETIER

LE JUGE STRATAS

LA JUGE WOODS

 

MOTIFS PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :

LA JUGE WOODS

COMPARUTIONS :

Al Meghji

Matias Milet

Diana Yeung

 

POUR L’appelante

 

Daniel Bourgeois

Martin Beaudry

 

POUR L’intimée

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Osler, Hoskin & Harcourt S.E.N.C.R.L., s.r.l.

Toronto (Ontario)

 

POUR L’appelante

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

POUR L’intimée

 

 

 

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