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Date : 20161201


Dossier : A-297-15

Référence : 2016 CAF 308

CORAM :

LE JUGE EN CHEF NOËL

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE BOIVIN

 

 

ENTRE :

GANDHI JEAN PIERRE

demandeur

et

DIANNE CLÉMENT, CATHIE GIROUX ET MINISTÈRE DE CITOYENNETÉ ET IMMIGRATION CANADA

défendeurs

Audience tenue à Montréal (Québec), le 1 décembre 2016.

Jugement rendu à l’audience à Montréal (Québec), le 1 décembre 2016.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE BOIVIN

 


Date : 20161201


Dossier : A-297-15

Référence : 2016 CAF 308

CORAM :

LE JUGE EN CHEF NOËL

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE BOIVIN

 

 

ENTRE :

GANDHI JEAN PIERRE

demandeur

et

DIANNE CLÉMENT, CATHIE GIROUX ET MINISTÈRE DE CITOYENNETÉ ET IMMIGRATION CANADA

défendeurs

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Montréal (Québec), le 1 décembre 2016.)

LE JUGE BOIVIN

[1]  Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée par M. Gandhi Jean-Pierre (demandeur).

I.  Motifs concernant la requête préliminaire pour un ajournement

[2]  La date de l’audition de cette demande de contrôle judiciaire a été transmise au demandeur le 19 septembre 2016. Le demandeur a, au début de l’audition, demandé un ajournement au motif qu’il entendait déposer une requête écrite demandant la récusation de deux des trois membres de la formation. Le fondement allégué de la requête à être présentée est lié au fait que les deux juges en question ont co-signé le jugement rendu dans l’affaire Ghandi Jean Pierre c. Alliance de la Fonction publique du Canada 2013 CAF 223, rejetant une demande antérieure du demandeur (permission d’en appeler rejetée par la Cour suprême, dossier no. 35102, 2013 CanLII 21755 (SCC)).

[3]  La procureure des défendeurs s’oppose à la demande la qualifiant de tardive et dilatoire. Nous sommes d’accord, à tout le moins en ce qui a trait au retard indu. Une directive de la Cour publiée sur son site web rend disponible sur demande la composition du banc appelé à siéger deux semaines avant l’audition de sorte que la requête aurait dû être rendue présentable au plus tard ce matin.

[4]  De plus, le dossier a été ponctué de retards, a exigé l’émission d’un avis d’examen de l’état de l’instance ainsi que plusieurs prorogations de délai, tous au bénéfice du demandeur.

[5]  Le demandeur n’a pas expliqué pourquoi il a tardé jusqu’au jour de l’audition pour effectuer sa demande, nous avons refusé la demande et invité les parties à procéder au mérite.

II.  Motifs au mérite

[6]  Le demandeur est un agent d’immigration depuis 2002 au groupe et niveau PM-03 auprès du Ministère de la Citoyenneté et Immigration Canada (employeur). Alors qu’il occupe un poste intérimaire d’agent d’examen des risques avant renvoi (ERAR) au groupe et niveau PM-04, il est avisé le 26 octobre 2011 que, compte tenu de sa performance comme agent ERAR, son affectation intérimaire ne sera pas renouvelée au-delà du 28 octobre 2011.

[7]  Le 22 janvier 2012, le demandeur loge une première plainte pour pratique déloyale à l’encontre de cette décision en vertu notamment des articles 185 et 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 2 (Loi) alléguant que le non-renouvellement de son affectation intérimaire est en guise de représailles pour un grief déposé en 2009 à l’encontre de son gestionnaire de l’époque, M. Vassallo, et pour une plainte déposée en 2010 contre son syndicat qui avait refusé de le représenter dans son grief.

[8]  Le 13 avril 2012, le demandeur dépose une deuxième plainte dans laquelle il allègue être victime de représailles alors que des références négatives sont données à son égard dans le cadre d’une demande pour un poste auprès de l’Agence des services frontaliers du Canada.

[9]  L’audience devant la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (Commission) se déroule du 29 avril au 2 mai 2014 et porte sur les deux plaintes. La Commission rend une seule décision (2015 CRTEEP 49) sur la base que les faits sont les mêmes pour les deux plaintes.

[10]  Dans sa décision rendue le 26 mai 2015, la Commission rejette les deux plaintes du demandeur au motif que ce dernier ne s’est pas déchargé de son fardeau d’établir une preuve défendable (prima facie) de distinctions illicites ou de représailles. Et au cas où elle aurait erré quant à l’administration du fardeau de la preuve, la Commission rejette aussi les deux plaintes du demandeur. La Commission  conclut, qu’en regard de la preuve présentée, le non-renouvellement du demandeur à un poste intérimaire de PM-04 et les références négatives données à d’autres gestionnaires sont fondés sur la faible performance de ce dernier et qu’il ne s’agit pas de représailles.

[11]  Le demandeur fait une demande de contrôle judiciaire devant cette Cour à l’encontre de la décision de la Commission.

[12]  En l’espèce, la norme applicable pour la décision de la Commission relativement aux questions mixtes de fait et de droit est celle de la décision raisonnable. Au soutien de sa demande de contrôle judiciaire, le demandeur allègue que la Commission a commis plusieurs erreurs. Bien que le demandeur qualifie dans son mémoire (paras. 7, 29, 42, 47 et 49) certaines de ces erreurs de « vice procédural » sous la rubrique « équité procédurale », les erreurs alléguées relèvent en fait de la gestion d’instance propre à la Commission. Nonobstant la norme applicable, nous sommes tous d’avis qu’il était loisible à la Commission de conclure comme elle l’a fait et qu’il n’y a pas lieu pour notre Cour d’intervenir.

[13]  Tout d’abord, le demandeur reproche à la Commission d’avoir commis une erreur en entendant sa preuve en premier plutôt que celle du défendeur. Or, notre Cour a récemment réitéré que « la Commission contrôle sa procédure » (Gal c. Canada (Agence du Revenu), 2015 CAF 188, [2015] A.C.F. no 1055 (QL)). Plus particulièrement, dans le cadre d’une plainte pour pratique déloyale, la procédure élaborée par la Commission est d’entendre la preuve de l’individu qui dépose la plainte en premier et ce, sans égard au fardeau de la preuve, afin de permettre à l’autre partie de connaître la nature des allégations. En fait, la preuve démontre que lors de la téléconférence préparatoire avec la Commission, la question de la présentation de la preuve a été discutée et il a été convenu que le demandeur présenterait sa preuve en premier (Affidavit de Sylvia Grznar, Dossier des défendeurs, Vol. I, onglet 2, au para. 12).

[14]  Le demandeur soutient de plus qu’il avait le droit à la présence d’un sténographe officiel. Or, en l’absence de circonstances exceptionnelles, comme c’est le cas en l’espèce, la Commission était justifiée de ne pas faire droit à cette demande. Il en va de même pour les requêtes de l’exclusion des témoins et de la production de preuve qui relèvent de la discrétion de la Commission et pour lesquelles nous ne décelons aucune erreur.

[15]  Dans ses motifs, la Commission a conclu que le demandeur n’a pas réussi à établir un lien entre le non-renouvellement de son affectation et les pratiques déloyales prévues à la Loi. D’une part, la Commission a noté que l’employeur a offert une affectation intérimaire au demandeur après qu’il ait logé à la fois son grief et sa plainte. D’autre part, malgré certaines lacunes dans le travail de ce dernier, l’affectation a été renouvelée à deux reprises afin de permettre au demandeur de surmonter les difficultés identifiées. Qui plus est, les termes des ententes de détachement stipulaient très clairement qu’à la fin du terme, le fonctionnaire retournerait à son poste d’attache au niveau PM-03 (Décision de la Commission, au para. 84). La Commission a évalué la preuve et a conclu que les témoignages de Mme Clément et de Mme Giroux étaient crédibles, de bonne foi et qu’aucune des deux plaintes ne contenait de preuve de représailles à l’endroit du demandeur. La conclusion de la Commission quant à la crédibilité des témoins est au cœur de son expertise et le demandeur ne nous a pas convaincu qu’il y a lieu d’intervenir. Enfin, les autres erreurs alléguées par le demandeur ne peuvent non plus réussir.

[16]  La Cour a pris note de l’observation des défendeurs concernant l’intitulé de cause (mémoire des défendeurs au para. 38). Une ordonnance sera émise afin de remplacer les « défendeurs » qui y sont désignés par « Procureur général du Canada ».

[17]  En conséquence, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée avec dépens.

« Richard Boivin »

j.c.a.

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-297-15

 

 

INTITULÉ :

GANDHI JEAN PIERRE c. DIANNE CLÉMENT, CATHIE GIROUX ET MINISTÈRE DE CITOYENNETÉ ET IMMIGRATION CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 1 décembre 2016

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE EN CHEF NOËL

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE BOIVIN

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE :

LE JUGE BOIVIN

 

COMPARUTIONS :

Ghandi Jean Pierre

 

Pour le demandeur

(pour lui-même)

 

Geneviève Ruel

 

Pour les défendeurs

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Pour les défendeurs

 

 

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