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Date : 20160315


Dossier : A-262-15

Référence : 2016 CAF 81

CORAM :

LE JUGE PELLETIER

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE SCOTT

 

 

ENTRE :

MARIE-ANNE JEAN

appelante

et

SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

intimée

Audience tenue à Montréal (Québec), le 10 mars 2016.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 15 mars 2016.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE SCOTT

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE PELLETIER

LA JUGE GAUTHIER

 


Date : 20160315


Dossier : A-262-15

Référence : 2016 CAF 81

CORAM :

LE JUGE PELLETIER

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE SCOTT

 

 

ENTRE :

MARIE-ANNE JEAN

appelante

et

SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

intimée

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE SCOTT

[1]               La Cour est saisie d’un appel d’une décision rendue le 28 avril 2015 (2015 CF 541) par laquelle la juge Gagné (Juge) de la Cour fédérale a rejeté la demande de contrôle judiciaire de la décision rendue le 3 janvier 2013 par la Commission canadienne des droits de la personne (Commission) rejetant la plainte de Marie-Anne Jean (appelante) aux termes du sous-alinéa 44(3)b)(i) de la Loi canadienne des droits de la personne, L.R.C. 1985, c. H‑6. La Commission, à la suite d’une enquête, a conclu au rejet de la plainte parce que la preuve recueillie n’appuyait pas l’allégation voulant que la société Radio-Canada (Radio-Canada) ait fait preuve de discrimination à l’égard de l’appelante en raison de son âge en refusant de la considérer pour un emploi de sous-titreur en 2007.

[2]               Devant la Commission, l’appelante soutenait entre autres choses que son employeur, Radio-Canada lui a fait délibérément échouer à son examen de français avec la complicité des ressources humaines. Elle prétendait que la lettre l’informant de ses résultats établissait que ses notes avaient été trafiquées vu la police de caractère différente utilisée pour inscrire sa note. Par ailleurs, elle faisait valoir que certains témoins avaient menti à l’enquêteur de la Commission et qu’on avait transmis des courriels en son nom, usurpant ainsi son identité. Elle affirmait aussi que les notes manuscrites et copies d’examen produites par Radio-Canada avaient également été falsifiées.

[3]               Un enquêteur de la Commission s’est penché sur ces allégations et a recommandé le rejet de la plainte pour les motifs suivants : i) les candidates au poste convoité avaient été évaluées selon les mêmes critères; ii) les témoignages de monsieur Tremblay, gestionnaire responsable du sous-titrage et du représentant syndical de l’appelante M. Bernard contredisaient la prétention de l’appelante voulant que monsieur Tremblay avait avoué que les critères de sélection avaient été modifiés; iii) les deux courriels transmis par l’appelante le 20 juin 2007 à la suite d’une rencontre de rétroaction avec ces derniers établissaient qu’elle avait reconnu ses erreurs et qu’elle était l’auteure des deux courriels; iv) l’explication fournie par Radio-Canada quant à la police de caractère différente pour inscrire sa note était plausible. Enfin, le rapport de l’enquêteur a conclu que l’appelante n’avait pas établi le lien entre son âge et le défaut d’obtenir le poste convoité.

[4]               Devant la Juge, l’appelante a fait valoir que l’enquêteur de la Commission avait manqué à son devoir d’équité procédurale puisqu’il avait omis d’interroger un témoin capital au dossier, Madame Tanguay, présente lors de la rencontre de rétroaction, qu’il n’avait pas répondu à la totalité de ses allégations, ni tenu compte de certains éléments de preuve qu’elle a présentés. Elle lui reprochait également son défaut de lui divulguer chacun des éléments de preuve produits par Radio-Canada dès leur réception. Elle prétendait aussi que l’enquêteur aurait lui-même menti en affirmant qu’elle avait reconnu être l’auteure des courriels du 20 juin 2007 à la suite de la rencontre de rétroaction. De plus, l’appelante a soulevé qu’une décision prise sur la foi d’une enquête manifestement déficiente était clairement déraisonnable.

[5]               La Juge a retenu les normes de contrôle appropriées aux questions soulevées par l’appelante puisqu’elle a traité la question du manquement à l’équité procédurale selon la norme de la décision correcte et a appliqué la norme de la raisonnabilité à la décision de la Commission de rejeter la plainte.

[6]               Cette Cour doit déterminer si la Juge a appliqué ces normes correctement. Pour ce faire, il faut se pencher sur la décision de la Commission (Agraira c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36, [2013] 2 R.C.S. 559, aux paragraphes 45 à 47).

[7]               Je suis d’avis que l’appelante n’a pas produit d’éléments de preuve convaincants pour établir l’existence de fraude telle qu’elle l’allègue dans ce dossier. Les motifs d’appel soulevés par l’appelante portant sur des manquements à l’équité procédurale ne peuvent réussir puisqu’il est bien établi en jurisprudence qu’un enquêteur est maître de la conduite de son enquête, dans la mesure où elle est menée avec rigueur et neutralité. L’enquêteur n’avait aucune obligation de partager les éléments de preuve qu’il recevait de Radio-Canada dès leur réception ou de rencontrer le témoin, Mme Tanguay, puisque le dépôt des notes manuscrites prises par cette dernière lors de la rencontre de rétroaction l’en dispensait. Il en va de même de l’obligation de confronter le représentant de Radio-Canada avec chacune des allégations contenues à l’affidavit de l’appelante (voir Slattery c. Canada (Commission des droits de la personne), [1994] 2 C.F. 574 aux pages 600, 601 et 605 (1re inst.), [1994] F.C.J. No. 181, conf. (1996), 205 N.R. 383 (C.A.)). Le rapport d’enquête de la Commission tient compte de tous les éléments présentés par les parties et l’appelante a pu y répondre. Il étaie plutôt la conclusion de la Juge selon laquelle il n’y a pas eu de manquements à l’équité procédurale dans la conduite de l’enquête.

[8]               La décision de la Commission de rejeter la plainte de l’appelante était raisonnable compte tenu du rapport de l’enquêteur et des soumissions des parties à la suite de sa production. Vu l’absence d’éléments de preuve probants pour établir que le poste convoité lui a été refusé à cause de son âge, la décision de la Commission de rejeter cette plainte fait partie des issus possibles.

[9]               Je suis d’avis de rejeter cet appel avec dépens.

« A.F. Scott »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

J.D. Denis Pelletier j.c.a. »

« Je suis d’accord.

Johanne Gauthier j.c.a. »

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-262-15

 

INTITULÉ :

MARIE-ANNE JEAN c. SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 10 mars 2016

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE SCOTT

 

 

Y ONT  SOUSCRIT :

LE JUGE PELLETIER

LA JUGE GAUTHIER

 

 

DATE DES MOTIFS :

LE 15 mars 2016

 

 

COMPARUTIONS :

Marie-Anne Jean

 

Pour l'appelante

(se représente seule)

Marie Pedneault

 

Pour l'intimée

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Société Radio-Canada

Montréal (Québec)

 

Pour l'intimée

 

 

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