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Date : 20160216


Dossier : A-278-15

Référence : 2016 CAF 53

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LA JUGE DAWSON

LE JUGE NEAR

LE JUGE BOIVIN

 

 

ENTRE :

MINISTRE DU REVENU NATIONAL

appelant

et

JOHN T. LEE

intimé

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 16 février 2016.

Jugement rendu à l’audience à Toronto (Ontario), le 16 février 2016.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR PAR :

LA JUGE DAWSON

 


Date : 20160216


Dossier : A-278-15

Référence : 2016 CAF 53

CORAM :

LA JUGE DAWSON

LE JUGE NEAR

LE JUGE BOIVIN

 

 

ENTRE :

MINISTRE DU REVENU NATIONAL

appelant

et

JOHN T. LEE

intimé

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Toronto (Ontario), le 16 février 2016.)

LA JUGE DAWSON

[1]               Le 1er juin 2012, l’Agence du revenu du Canada a délivré une demande de renseignements à l’intimé. La demande a été délivrée en vertu du paragraphe 231.2(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.) (la Loi). La demande de renseignements exigeait que l’intimé fournisse un large éventail de renseignements et de documents relativement à sa situation financière et fiscale. Par exemple, la demande obligeait l’intimé à fournir des détails sur toutes les actions ordinaires et privilégiées qu’il possédait, indépendamment de la question de savoir si les actions étaient enregistrées en son nom. Bien que l’intimé ait accusé réception de la demande, il ne s’y est pas conformé. Aucun renseignement ou document n’a été fourni à l’Agence du revenu du Canada en réponse à la demande.

[2]               Par conséquent, le ministre du Revenu national a présenté une demande d’ordonnance à la Cour fédérale conformément à l’article 231.7 de la Loi, enjoignant à l’intimé de fournir les renseignements et les documents prescrits par la demande.

[3]               Pour les motifs énoncés sous la référence 2015 CF 634, un juge de la Cour fédérale a rejeté la demande du ministre. C’est sur cette ordonnance que porte le présent appel.

[4]               Si nous comprenons bien les motifs de la Cour fédérale, le juge a refusé de rendre l’ordonnance demandée pour les raisons suivantes :

i)                    L’« étendue et la portée de [la demande] [étaient] trop vastes » (motifs, paragraphe 6).

ii)                  Le destinataire visé par la demande de renseignements restait imprécis; la demande de renseignements n’indiquait pas clairement « le nom de la personne [...] et le rôle de celle‑ci » (motifs, paragraphes 3, 30, 39, 41 et 44).

iii)                De l’avis du juge, « une demande de renseignements destinée à un administrateur ou à un dirigeant d’une société, qui concerne les actifs de l’entreprise, doit être une demande qui vise la personne morale elle‑même » (motifs, paragraphe 43).

[5]               Nous ne trouvons aucun fondement pour l’une de ces préoccupations. L’article 231.2 de la Loi confère au ministre le pouvoir étendu et général d’exiger de quiconque la fourniture de renseignements ou de documents à toutes fins afférentes à l’application ou à l’exécution de la Loi.

[6]               Lorsqu’elle est saisie d’une demande présentée en vertu de l’article 231.7 de la Loi, la Cour doit être convaincue que :

i)                    La personne à l’encontre de qui l’ordonnance est demandée était tenue, en vertu de l’article 231.1 ou 231.2 de la Loi, de fournir l’accès, l’aide, les renseignements ou les documents que le ministre cherche à obtenir;

ii)                  Bien que la personne ait été tenue de fournir les renseignements ou documents demandés par le ministre, elle ne l’a pas fait;

iii)                Le privilège des communications entre client et avocat, tel qu’il est défini dans la Loi, n’est pas opposable aux demandes de renseignements et de documents du ministre.

[7]               Le fait que la demande exigeait la divulgation de biens dont l’intimé était le propriétaire à titre bénéficiaire ne l’a pas rendue excessive ou ambiguë. En outre, la question de la portée ou de l’étendue de la demande relève du ministre, tant et aussi longtemps que les renseignements demandés sont nécessaires pour l’application ou l’exécution de la Loi.

[8]               De plus, il n’est pas inapproprié d’exiger dans une demande que des renseignements soient fournis au sujet d’un tiers. Voir, par exemple, la décision Taxpro Professional Corporation c. Canada (Revenu national), 2011 CF 224, 385 F.T.R. 103; conf. par 2011 CAF 306, 427 N.R. 354.

[9]               En l’espèce, la demande était clairement et sans équivoque adressée à l’intimé; il était tenu de fournir les renseignements ou documents demandés par l’Agence du revenu du Canada; il ne l’a pas fait et il n’a pas fait valoir que les renseignements ou documents demandés étaient protégés par le privilège des communications entre client et avocat. La Cour fédérale aurait dû rendre l’ordonnance demandée. Les décisions Canada (Ministre du Revenu national) c. SML Operations (Canada) Ltd., 2003 CF 868, [2003] 4 C.T.C. 201 et Canada (Ministre du Revenu national) c. Chamandy, 2014 CF 354, 452 F.T.R. 261 invoquées par la Cour fédérale se distinguaient par leurs faits.


[10]           Il s’ensuit que l’appel sera accueilli et l’ordonnance de la Cour fédérale sera infirmée, avec dépens tant devant notre Cour que devant la Cour fédérale à être payés par l’intimé à l’appelant. Rendant l’ordonnance qui aurait dû être rendue par la Cour fédérale, j’ordonnerai à l’intimé de fournir à l’appelant ou à ses fonctionnaires l’accès, l’aide, les renseignements ou les documents que l’appelant a cherché à obtenir de l’intimé et qui ont fait l’objet de la demande de renseignements datée du 1er juin 2012.

« Eleanor R. Dawson »

j.c.a.


Traduction certifiée conforme

Mario Lagacé, jurilinguiste


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-278-15

 

 

INTITULÉ :

MINISTRE DU REVENU NATIONAL c. JOHN T. LEE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 16 février 2016

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE DAWSON

LE JUGE NEAR

LE JUGE BOIVIN

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :

LA JUGE DAWSON

COMPARUTIONS :

Margaret Nott

Christopher Bartlett

 

Pour l’appelant

 

S.O.

 

Pour l’intimé

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

 

Pour l’appelant

 

S.O.

 

l’intimé

(pour son propre compte)

 

 

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