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Date : 20160209


Dossier : A-242-15

Référence : 2016 CAF 48

CORAM :

LE JUGE EN CHEF NOËL

LE JUGE SCOTT

LE JUGE DE MONTIGNY

 

 

ENTRE :

MICHELE TORRE

appelant

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION

intimé

Audience tenue à Montréal (Québec), le 9 février 2016.

Jugement rendu à l’audience à Montréal (Québec), le 9 février 2016.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE DE MONTIGNY

 


Date : 20160209


Dossier : A-242-15

Référence : 2016 CAF 48

CORAM :

LE JUGE EN CHEF NOËL

LE JUGE SCOTT

LE JUGE DE MONTIGNY

 

 

ENTRE :

MICHELE TORRE

appelant

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION

intimé

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Montréal (Québec), le 9 février 2016.)

LE JUGE DE MONTIGNY

[1]               Le présent appel fait suite à la décision rendue le 6 mai 2015 par la juge Tremblay-Lamer de la Cour fédérale (2015 CF 591) rejetant la demande de contrôle judiciaire de M. Michele Torre à l’encontre d’une déclaration d’interdiction de territoire pour grande criminalité et criminalité organisée prononcée par la Section de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié.

[2]               Aux termes de sa décision, la juge a certifié la question suivante :

La Section de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié est-elle compétente pour accorder un arrêt des procédures aux termes du paragraphe (24)1 de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte) dans le cadre d’une enquête suivant le déféré d’un rapport préparé conformément au paragraphe 44(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR)?

[3]               Suivant le paragraphe 74(d) de la LIPR, seule une question grave de portée générale peut être certifiée et ainsi donner ouverture à l’appel d’un jugement consécutif à une demande de contrôle judiciaire. Cette exigence a été interprétée à plusieurs reprises par cette Cour, et il est maintenant bien établi qu’une question ne peut être certifiée que dans la mesure où elle est déterminante quant à l’issue de l’appel et transcende les intérêts des parties au litige de par ses conséquences importantes : Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Liyanagamage, [1994] A.C.F. no 1637au para. 4, 176 N.R. 4; Zhang c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CAF 168 au para. 9, [2013] A.C.F. no 764. En d’autres termes, la certification d’une question ne constitue pas une occasion pour demander un renvoi à cette Cour; la question doit avoir été soulevée et tranchée en première instance et avoir un impact sur le résultat du litige : Zazai c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CAF 89 aux paras 11-12, [2004] A.C.F. no 368; Lai c. Canada (ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2015 CAF 21 au para 4, [2015] A.C.F. no 125.

[4]               Dans la présente affaire, la question certifiée ne répond pas à ces exigences. D’une part, l’appelant n’a pas même tenté de démontrer en quoi son droit à la vie, à la liberté ou à la sécurité de sa personne se trouve enfreint par l’enquête devant la Section de l’immigration. Or, une conclusion d’interdiction de territoire ne suffit pas à elle seule pour mettre en cause les droits conférés par l’article 7. C’est au moment où la mesure d’expulsion sera mise en œuvre qu’il conviendra de déterminer si le droit à la liberté, à la sécurité ou même à la vie d’un individu seront mis en péril par le renvoi dans son pays d’origine. En l’absence d’une atteinte à un droit garanti par la Charte, la question de savoir si une réparation peut être accordée en vertu du paragraphe (24)1 de cette même Charte ne se pose pas.

[5]               D’autre part, l’appelant ne peut se plaindre d’un quelconque préjudice résultant du délai entre ses condamnations et le déféré des rapports d’enquête. Comme l’a indiqué la Cour suprême dans l’arrêt Blencoe c. Colombie-Britannique (Human Rights Commission), 2000 CSC 44 au para. 133, [2000] 2 R.C.S. 307, le seul écoulement du temps ne constitue pas un abus de procédure ou une violation de l’obligation d’agir équitablement. L’appelant ne pouvait se contenter de vagues allégations voulant que le délai ait mis en péril son intégrité physique et psychologique et ait sapé son aptitude à soumettre une défense pleine et entière, sans aucune preuve à cet égard. En fait, l’appelant n’a jamais cherché à établir en quoi il avait été préjudicié par l’écoulement du temps ni devant la Section de l’immigration ni devant la Cour fédérale. Qui plus est, il n’a pas soulevé la question du délai lors de son entrevue avant l’établissement des rapports prévus à l’article 44 de la LIPR, et n’a pas non plus contesté par voie de contrôle judiciaire la décision qui a été prise de le déférer à la Section de l’immigration pour enquête. Dans ces circonstances, l’appelant ne peut faire valoir qu’il a subi un préjudice et que l’équité des procédures a été compromise.

[6]               Puisque la question certifiée n’aurait pas dû l’être et puisque l’existence d’une question certifiée est une condition préalable à l’exercice d’un droit d’appel, l’appel est rejeté.

« Yves de Montigny »

j.c.a.

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-242-15

 

 

INTITULÉ :

MICHELE TORRE c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 9 février 2016

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE EN CHEF NOËL

LE JUGE SCOTT

LE JUGE DE MONTIGNY

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE :

LE JUGE DE MONTIGNY

 

COMPARUTIONS :

Stéphane Handfield

Meryam Haddad

Jeanne Larochelle

 

Pour l'appelant

 

Lisa Maziade

 

Pour l'intimé

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Handfield & Associés, Avocats

Montréal (Québec)

 

Pour l'appelant

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

 

Pour l'intimé

 

 

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